Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, sur la gestion de la crise économique, tant au niveau français qu'au niveau européen, la réforme de l'Etat et celle des institutions locales, Paris le 25 novembre 2008.

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Circonstance : 91ème Congrès des maires et des présidents de communautés de France à Paris du 25 au 29 novembre 2008

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Maires,
Monsieur le Président, mon cher Jacques,
Je voudrais d'abord vous dire le plaisir que j'ai de lancer avec vous les travaux du congrès 2008 et de le faire en compagnie d'une grande partie de mon gouvernement. Je veux en mon nom et en leurs noms adresser aux 40 % de maires qui exercent leur premier mandat municipal mes encouragements les plus chaleureux. _ Je veux rendre hommage à leur engagement pour la République, et pour nos concitoyens. J'en connais les satisfactions, mais j'en connais aussi les difficultés, mon cher Jacques, pour avoir assumé cette charge de maire pendant de nombreuses années. Nouveau mandat, nouveaux défis, nouvelles exigences, tout place cette session sous le signe de l'initiative. Tout et d'abord le contexte. Permettez-moi de vous le rappeler.
L'OCDE vient de publier ses prévisions économiques pour la croissance mondiale en 2009. En l'espace de trois semaines ces prévisions sont passées de 5 % de croissance mondiale à 1 %. Les prévisions de croissance pour les Etats-Unis sont de moins 0,9 %. Pour la Grande Bretagne, de moins 1,1 %. Pour l'Allemagne de moins 0,8 %. Pour l'Italie de moins 1 %. Pour la zone euro dans son ensemble de 0,6 % et pour notre pays de moins 0,4 %.
Voilà la situation dans laquelle nous nous retrouvons ensemble, avec la responsabilité collective de prendre les mesures qui vont permettre de surmonter cette crise et qui vont permettre de faire en sorte que nos structures mais surtout nos concitoyens, nos concitoyens qui sont menacés par les conséquences de la crise économique et de la crise financière, puissent être préservés et que notre pays puisse le plus rapidement possible retrouver la croissance nécessaire à son développement. La crise dicte notre ordre du jour. Il faut d'abord stopper cet incendie financier. Il faut ensuite contenir la tourmente économique. Il faut dans l'épreuve, conforter la solidarité qui lie l'Etat aux collectivités locales. Et il faut mener à bien les chantiers de la croissance et de l'emploi pour préparer au plus tôt le rebond français. Face à la crise, le gouvernement français a réagi avec rapidité, et le président de la République a joué un rôle moteur pour coordonner la mise en place des dispositifs de lutte à l'échelle européenne et mondiale. Il fallait d'abord assurer la stabilité du système bancaire. Nous avons voté en quatre jours une loi de finances rectificative, garantissant aux établissements français des liquidités stables de un à cinq ans, pour un montant plafond de 320 milliards d'euros. Il fallait veiller au contrôle scrupuleux des prêts consentis par l'Etat.
Nous avons créé pour les centraliser, une société de refinancement de l'économie. Il fallait afficher sur un marché en proie au doute, la compétitivité et la solidité réelle des banques françaises. Nous avons prévu d'accroître leurs fonds propres en souscrivant jusqu'à 40 milliards d'euros de titres subordonnés c'est-à-dire de prêts à long terme rémunérés à 8 %. Il fallait enfin conserver pour règle absolue, notre responsabilité devant le contribuable. Nous avons voulu que prêts et garanties soient temporaires, qu'ils soient rémunérés et qu'ils donnent lieu à des engagements en contrepartie. Et enfin, lorsque c'était nécessaire, nous avons décidé d'aller plus loin pour sauver DEXIA de la faillite, nous sommes montés au capital, nous avons désigné des nouveaux dirigeants pour fixer une nouvelle ligne stratégique.
Nous sauvons avec les mesures qui ont été prises, les dépôts des clients des banques, nous sécurisons l'épargne des Français ; nous protégeons les victimes de ces défaillances ; et au premier rang d'entre-elles, les entreprises mais aussi les collectivités locales, dont DEXIA assurait pour une large part le financement. Dès le début du mois d'octobre nous avons, monsieur le Président, arrêté une enveloppe de 22 milliards de nouveaux prêts et de garanties aux petites et moyennes entreprises, en particulier grâce aux excédents de l'épargne réglementée. Mais aussi grâce aux nouveaux moyens que nous avons accordés à OSEO. Dans le même temps et pour couper court à toute hésitation de la part des banques, je demandais aux Préfets de mettre en oeuvre dans chaque département, une commission de suivi et un réseau de médiateurs du crédit, chapeautés par un médiateur national. Bref, tout était fait pour réamorcer sans délai les circuits du financement au bénéfice des entreprises, des particuliers, des collectivités locales. A cette réaction urgente, nécessaire, indispensable, il fallait joindre une politique de moyen terme, une politique axée sur le soutien de l'économie réelle et de l'investissement.
Le prochain sommet européen de décembre sera, à la demande expresse de la France qui préside l'Union européenne, consacré à la relance de l'économie européenne. Si nous décidions chacun de notre côté, de plans de relance nationaux, sans aucune coordination, nous risquerions d'affaiblir l'effet de levier pourtant nécessaire de ces plans de relance. Il faut donc que l'Europe en même temps mette en oeuvre une relance massive de l'économie européenne, et que nous puissions faire coïncider cette relance massive avec celle qui sera mise en oeuvre, nous l'espérons, rapidement, par le nouveau gouvernement américain. C'est la clé d'une reprise rapide de la croissance mondiale. Seul, un cadre commun peut assurer que les outils les plus pertinents seront utilisés pour soutenir l'économie et seul, ce cadre commun garantit la crédibilité d'ensemble du retour à l'équilibre financier. Nos moyens d'action seront naturellement les budgets des Etats membres mais aussi l'adaptation des règles européennes. Il faut que nous puissions utiliser les circonstances exceptionnelles qui sont prévues par le pacte de croissance et de stabilité. Il faut que nous obtenions et c'est une exigence que nous allons formuler au Conseil européen, une adaptation considérable du contrôle des aides d'Etat ; du contrôle des aides à finalité régionale. Lorsqu'il y a le feu dans la maison, lorsqu'il faut relancer l'activité économique, lorsqu'il faut soutenir les investissements des entreprises et des collectivités locales, on ne peut pas être arrêtés et bloqués par des règles de concurrence qui ne correspondent pas à la réalité de la situation économique que nous connaissons aujourd'hui.
Il faut aussi que nous puissions mieux utiliser les moyens européens de financement, et prévoir par exemple que la Banque Européenne d'Investissement consacre les prêts nécessaires aux investissements stratégiques dont nous avons besoin, par exemple dans l'industrie automobile.
La situation du secteur automobile est une des plus préoccupantes avec celle du bâtiment, dans notre pays aujourd'hui. L'industrie automobile c'est 10 % des Français qui travaillent ; et l'industrie automobile c'est aujourd'hui plus d'un million de véhicules dans les stocks des entreprises françaises. C'est une crise comme on n'en a jamais connue dans l'histoire récente de cette industrie. Eh bien nous allons proposer dans quelques jours, des mesures fiscales considérables, des mesures fiscales coordonnées pour relancer l'activité de l'industrie automobile, à la fois pour relancer l'achat des véhicules neufs et en même temps pour permettre à cette industrie automobile d'aller plus vite vers la reconversion nécessaire qui doit lui permettre de produire des véhicules propres qui demain domineront le marché automobile mondial.
Mesdames et Messieurs les Maires, l'Europe n'entend pas présenter en terme de relance une recette unique mais une boite à outils dans laquelle les Européens seront invités à utiliser les instruments les plus adaptés à leur situation. Certains ont décidé et l'ont déjà annoncé, de baisser la TVA pendant une durée limitée. C'est une proposition qui est adaptée à une situation. Nous, nous pensons en France et en Allemagne, que la baisse de la TVA, généralisée, n'est pas une solution à la crise économique que nous rencontrons. Pour trois raisons : d'abord, parce que cette baisse de la TVA généralisée aurait pour premier effet de favoriser les importations et pas l'activité des salariés français qui travaillent dans les entreprises françaises. Deuxièmement parce que ce serait une mesure qui serait répartie uniformément sur tous les consommateurs alors qu'il faut que nous fassions un effort plus particulier pour ceux qui en ont le plus besoin. Et enfin parce que, quand on est dans une période de baisse extrêmement rapide des prix, comme celle que nous connaissons en ce moment, il y a une grande tentation pour les industriels, pour les producteurs et pour la distribution, d'empocher la baisse de la TVA sans la répercuter sur les consommateurs. C'est la raison pour laquelle nous pensons que chaque pays, chaque Etat doit garder une marge de liberté dans la mise en oeuvre de son plan de relance.
Et dans ce cadre, la France est déterminée à soutenir son activité économique fusse au prix - je le dis devant vous aujourd'hui - après avoir défendu l'année dernière lorsque j'étais venu vous voir, la nécessité de tenir les engagements que nous avions pris sur la réduction du déficit budgétaire dans les délais, eh bien je dis aujourd'hui devant vous que, devant la situation économique qui est celle que nous connaissons, nous devons accepter qu'il y ait un délai supplémentaire à notre retour à l'équilibre budgétaire. Mais ça ne veut pas dire que nous devions abandonner cet objectif de retour à l'équilibre budgétaire. Je veux rappeler ici à chacun, mais vous le savez bien, vous qui gérez vos communes avec beaucoup d'attention, avec beaucoup de rigueur, vous qui n'accepteriez jamais de vous engager dans des dépenses dont vous sauriez à l'avance qu'elles ne peuvent pas être couvertes par vos recettes, vous savez très bien ce qu'il adviendra, ce qui pourrait advenir d'un pays qui ne ferait jamais l'effort de réduire sa dépense publique pour réduire ses déficits. Ca fait trente-quatre ans que dans notre pays on n'a jamais voté un budget en équilibre, trente-quatre ans. Tous les Français qui ont moins de 34 ans pensent que ça marche "comme ça" Et tous les Français qui ont plus de trente quatre ans se disent : si ça a duré 34 ans, ça va bien durer encore quelques années.
Eh bien la vérité, c'est que cette dette qui s'accumule sur notre tête, sur la vôtre, sur celle de nos enfants, sur celle de notre économie, c'est elle qui diminue nos capacités d'investissement, c'est elle qui diminue nos capacités à réagir aux demandes qui peuvent apparaître à un moment ou à un autre, de tel ou tel secteur, de tel ou tel territoire. C'est elle qui pèse sur la fiscalité française et qui nous place dans une situation de non compétitivité par rapport à beaucoup d'autres pays européens. Et donc oui, il faut relancer l'activité. Mais il faut le faire en mettant l'argent sur les investissements, en mettant l'argent sur le soutien à la recherche, sur le soutien à l'innovation, sur le développement des universités, sur les infrastructures de transports, sur toutes les infrastructures qui vont permettre d'améliorer la compétitivité de l'économie française, qui vont permettre d'améliorer la vie de nos concitoyens et qui vont permettre à notre pays de retrouver plus vite la croissance.
Le Gouvernement annoncera dans quelques jours un plan d'action nationale qui sera déployé sous l'égide européenne ; ce plan se concentre sur l'accélération des programmes d'infrastructures et d'investissements susceptibles d'entrer en vigueur dans des délais brefs. C'est-à-dire les programmes qui sont prêts, les programmes qui sont bloqués, ceux qui sont bloqués pour des raisons financières, ceux qui sont bloqués pour des raisons de réglementation ; nous voulons les mettre en oeuvre parce qu'il ne servirait à rien de lancer un grand programme d'investissement pour soutenir des infrastructures qui ne seront réalisées que dans quatre, cinq, ou dix ans, le temps qu'on se mette d'accord sur les tracés, sur les financements et sur le respect de toutes les règles qui doivent être respectées. Oui, Monsieur le président, nous allons proposer que pendant une période déterminée correspondant à la lutte contre cette grave crise que nous rencontrons, il puisse y avoir des réglementations allégées, des réglementations allégées pour les acteurs publics ; pour les acteurs publics qui tiennent une grande partie de l'investissement entre leurs mains. Oui, nous allons exiger que la Commission européenne accepte de suspendre une partie des règles de la concurrence, s'agissant de ces actions. Oui, nous allons regarder comment assouplir les règles des marchés publics pour que les acteurs publics puissent plus rapidement investir et venir au service de l'économie française. Nous n'oublions pas à cette occasion le soutien dû aux Français qui risquent de subir le plus fortement l'impact de la crise. Nous allons mettre en oeuvre dans quelques mois, une réforme considérable qui est la réforme du Revenu de Solidarité Active. Mais sans attendre, je veux évoquer un autre sujet qui concerne les Français les plus frappés par la crise, c'est celui de l'immobilier et du logement.
Le resserrement du crédit aux promoteurs comme aux particuliers, l'incertitude liée aux prix futurs de l'énergie, le développement très inégal du marché de la construction neuve ont conduit cette année à la baisse de plus d'un quart des mises en chantier dans notre pays. Il n'y a pas que des inconvénients à un ajustement des prix par rapport aux revenus des ménages. Et nous savons tous que les cinq années passées avaient enregistré des hausses très excessives du bâti et du foncier, qui ont d'ailleurs conduit à accroître sur la part de revenu des ménages les plus modestes la part qui revient au logement. Mais nous savons aussi qu'avec un déficit déjà estimé à près de cinq cent mille logements, il n'est pas acceptable que la crise précarise encore les conditions de vie des ménages. Nous avions déjà voté au cours de l'année, une indexation plus réaliste des loyers, le crédit d'impôts sur les intérêts de l'emprunt, la vente à leurs locataires de quarante mille logements HLM. Le 1er octobre nous avons ajouté à ces mesures un plan massif de soutien à l'immobilier, avec en particulier le rachat de trente mille logements neufs non réalisés, à prix décotés, dont une grande partie va être remise à disposition des opérateurs du logement social, pour aller plus vite vers la réalisation des logements sociaux nécessaires dans notre pays. Nous avons décidé de l'augmentation du plafond de ressources pour l'octroi des prêts d'accession sociale. Il y avait à peu près 20 % des ménages qui étaient redevables de ce dispositif, il y en aura près de 70 % après la réforme qui a été décidée. Au coeur de ce plan, Mesdames et Messieurs les maires, il y a le pass-foncier. Le pass-foncier qui vous concerne directement, destiné à épauler les plus modestes des accédants à la propriété, le pass-foncier permet de cumuler le prêt à taux zéro accordé par l'Etat, une TVA à 5,5 et un prêt complémentaire du 1 % logement. Ce pass-foncier sera prolongé jusqu'à la fin de 2010, il sera étendu aux logements collectifs et son nombre sera considérablement augmenté. D'une certaine façon vous détenez la clé du pass-foncier. Il vous revient de la faire jouer. Je veux dire que d'autres dispositifs : le financement de cent vingt mille logements sociaux en 2009, les travaux induits par le Grenelle de l'Environnement ; les nouvelles aides, en particulier l'éco-prêt à taux zéro, destiné aux travaux d'économie d'énergie dans les logements neufs, devraient en prolonger les effets. Cent vingt mille logement sociaux, c'est trois fois plus que ce que construisait la France il y a six ans. L'impact sur l'économie française des seules mesures nouvelles que je viens d'évoquer devrait être de 8 à 12 milliards d'euros, soit un demi-point de PIB supplémentaire, auxquels il faudra ajouter les mesures de relance économique qui seront annoncées dans quelques jours.
Mesdames et Messieurs les maires, il y a quelques jours le président de la République a annoncé la création d'un fonds souverain français. Placé sous la présidence du directeur général de la Caisse des Dépôts, ce fonds sera doté de 20 d'euros et il commencera à intervenir dans les tous prochains jours.
Ce fonds, c'est l'instrument d'une politique volontaire qui refuse de laisser tomber nos industries de production. C'est l'instrument d'un soutien conjoncturel puissant et c'est la meilleure solution pour aider les champions nationaux, quelle que soit par ailleurs leur taille, à éviter les écueils de la faillite ou du rachat dans ces temps de troubles boursiers. L'exonération totale de la taxe professionnelle sur les investissements nouveaux répond à la même logique. Oui, un dégrèvement de 100 % sera accordé aux entreprises sur la base de la taxe professionnelle assise sur les équipements et les biens mobiliers acquis jusqu'au 31 décembre 2009. Cette exonération concerne tous les investissements productifs. Elle perdurera pendant toute leur durée de vie ; son champ est donc plus large et plus puissant que l'actuel dégrèvement pour investissements nouveaux. Je veux insister sur ce point pour répondre aux inquiétudes exprimées par votre association. Il s'agit bien d'un dégrèvement de fiscalité locale et à ce titre une mesure qui sera intégralement prise en charge par l'Etat. Le produit perçu par les collectivités territoriales sera strictement protégé. Et pour les entreprises l'allègement sera de l'ordre d'un milliard d'euros ; il constituera une incitation très forte à l'investissement au moment où elles en ont besoin. Il ne constituera pas en revanche un cadeau sans contrepartie, puisque pour en bénéficier, les entreprises devront investir entre le 23 octobre 2008 et le 31 décembre 2009. Il s'agit bien d'une mesure ciblée sur la relance économique et sur la relance de l'investissement.
Aujourd'hui la politique de soutien de l'activité est en place. Elle vient épauler notre politique de l'emploi. La défiscalisation des heures supplémentaires, la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC, la modernisation du marché du travail, la réforme du temps de travail désormais négociable au niveau de l'entreprise, nous avons déjà pris beaucoup de décisions. Mais la crise nous oblige à faire plus, à aller plus loin. Quand une restructuration s'annonce, tous les services de l'Etat doivent être mobilisés pour l'anticiper. Et nous voulons mettre en oeuvre une amélioration considérable du dispositif de chômage partiel, dispositif dont nous savons bien qu'il est insatisfaisant mais dont nous savons aussi combien il est nécessaire, à des entreprises qui doivent passer des moments difficiles. Nous voulons étendre les conditions de mise en oeuvre du chômage partiel. Quand une restructuration devient inévitable, il faut qu'elle soit accompagnée de manière performante et rapide. Il faut qu'une personne qui termine un CDD ou qui termine un contrat d'intérim puisse être prise en charge immédiatement. Pas dans un mois, pas dans deux mois, immédiatement. Nous expérimentons depuis 2006, dans sept bassins d'emplois, le contrat de transition professionnelle ; ce contrat de transition professionnelle atteint le plus souvent un taux de reclassement de 70 % ; c'est un instrument efficace. Nous voulons que cet outil puissant soit étendu à vingt-cinq bassins d'emplois les plus touchés dans notre pays. Enfin, tout doit être fait pour créer et saisir les nouvelles occasions d'embauche. Le gouvernement a arbitré le déblocage d'une nouvelle enveloppe de cent mille contrats aidés en 2009. Le plan Borloo a quant à lui permis de créer plus de deux cent mille emplois dans les services à la personne.
Après l'urgence financière, après le soutien à l'activité, après la protection de l'emploi, la crise inscrit à notre programme un quatrième impératif. C'est celui du renforcement de la solidarité nationale. J'ai évoqué tout à l'heure, la révolution que va constituer la mise en oeuvre au 1er juillet prochain, du Revenu de Solidarité Active. Le Revenu de Solidarité Active constitue un véritable investissement en faveur de la réinsertion et de l'emploi. C'est un dispositif qui rompt avec les logiques d'assistance pour ramener les plus fragiles vers l'autonomie et vers la dignité associée au travail. Parmi les mesures de solidarité, la revalorisation du minimum vieillesse s'est imposée à la réflexion du Gouvernement, comme celle des retraites agricoles, étendue aux veuves et aux conjoints, elle devrait bénéficier à trois cent cinquante mille Français pour lesquels elle constituera un véritable filet de protection. Enfin, la prime exceptionnelle de fin d'année pour les titulaires de minima sociaux a été majorée à 220 euros et versée de façon anticipée. Mesdames et Messieurs les maires, le souci de solidarité nationale, il s'applique aux Français mais il s'appliquera aussi à vos communes. Que la très grande majorité soit dans une situation financière satisfaisante ne nous dispense pas d'épauler celle qui affronte des difficultés. Difficultés à emprunter d'abord. J'ai demandé à la Caisse des Dépôts de mettre à leur disposition immédiatement,cinq milliards d'euros supplémentaires, soit en direct, soit par le canal de leur banque, pour faciliter la fin de l'exercice comptable. L'adjudication a eu lieu le 4 novembre ; les enveloppes commencent à être mobilisées. Difficulté à rembourser ensuite. Les collectivités locales s'administrent librement et vous me l'avez à plusieurs reprises rappelé, monsieur le Président. La plupart de celles qui recourent à l'emprunt ont des capacités d'expertise qui leur permettent d'agir en connaissance de cause. Et tous les élus locaux sont responsables de ce qu'ils signent. Beaucoup ont souscrit des produits structurés dont je veux dire qu'ils ne sont pas, heureusement, tous des produits financiers toxiques. Les uns ont agi à bon escient et sont parvenus à réduire le montant de leurs intérêts. D'autres, comment dirais-je, ont pu être mal conseillés. Eh bien j'ai demandé à Christine Lagarde et à Michèle Alliot-Marie de réunir l'ensemble des établissements bancaires pour mettre en place un dispositif qui permette à chaque collectivité confrontée à cette question, de voir sa dette, ses emprunts réexaminés, de manière individuelle, au cas par cas, collectivité par collectivité, en fonction de la réalité de la situation.
Dans les mois à venir les tensions seront inévitables sur les finances des collectivités comme sur celles de l'Etat. Une croissance économique atone, ça signifie des rentrées fiscales moindres. Ca signifie une pression accrue sur les dépenses et notamment sur les dépenses sociales. Aujourd'hui nos collectivités dégagent un excédent de recettes, ce qui leur assure un taux d'autofinancement élevé. Leurs dettes représentent seulement 11 % de la dette publique. Elles sont capables de remplir avec l'Etat, ce rôle d'amortisseur de la crise. Et je crois que c'est un motif de fierté pour nous tous. Mais il fallait néanmoins que le projet de Loi de Finances tienne compte de l'effort qui leur est demandé. Nous nous étions fixés pour règle l'année dernière, et cette année de la même façon, d'aligner les concours financiers sur l'inflation. Nous venons de réviser nos perspectives de croissance et d'inflation. Le budget a été construit sur une inflation à 2 %. L'inflation prévisible sera sans doute de 1,5 % peut-être même d'un peu moins. Les dépenses de l'Etat ont été révisées sur cette nouvelle base. Nous avons souhaité avec Michèle Alliot-Marie, avec Christine Lagarde, que les dotations des collectivités locales ne soient pas révisées sur cette base. Elles restent donc calculées sur une augmentation de 2 %. Ce qui représente si l'inflation est à 1,5 % : 250 millions d'euros supplémentaires. Cette exception m'a paru légitime parce que, face à la crise, il faut que les collectivités locales puissent garder des marges de manoeuvre pour l'investissement.
Mesdames et Messieurs, nous n'avons pas le choix. Cette crise doit être un tremplin pour se mobiliser, un tremplin pour se transformer, un tremplin pour se dépasser et le secteur public doit participer à la compétitivité globale de notre pays. Depuis dix-huit mois, nous avons engagé un grand nombre de réformes structurelles, nous avons cherché à tirer les meilleurs partis des moyens de l'État pour rendre l'État plus efficace et moins coûteux. La révision générale des politiques publiques s'applique évidemment à la réforme de l'organisation territoriale de l'État. Cette réforme n'est pas un désengagement de l'État, c'est une réforme qui vise, au contraire, à lui permettre de mieux assurer ses fonctions et de mieux les assurer au service des Français. Elle ne va pas sans une transformation de son fonctionnement territorial. Elle ne va pas sans une meilleure prise en compte de son coût. La plus grande partie de cette nouvelle organisation sera mise en oeuvre avant la fin de l'année 2010, ce qui est un délai très court pour un chantier de cette ampleur.
J'ai demandé aux préfets de me proposer, dans ces conditions, des plans qui respectent trois priorités : ils doivent regrouper les services de l'État en un nombre très restreint de structures administratives, ils doivent rationaliser en conséquence les implantations immobilières, ils doivent améliorer l'organisation des fonctions supports pour augmenter fortement la part d'activité traduite en service rendu aux administrés. On a besoin de moins de back office et de plus de personnes à la disposition de nos administrés. Les directions départementales les plus proches de votre action seront organisées de manière interministérielle, à deux ou trois par départements, en fonction des publics et des sujets locaux les plus sensibles mais il n'est pas pour autant question d'affaiblir l'action publique dans les territoires déjà fragiles et je veux, devant vous, reprendre l'engagement qui a déjà été pris par Michèle Alliot-Marie : nous ne supprimerons pas de sous-préfectures dans les territoires ruraux. Nous n'avons pas l'intention de revenir sur le maillage du territoire. Bien entendu l'État se réserve la possibilité d'organiser ses services, de les organiser pour qu'ils soient plus efficaces mais nous garderons le maillage territorial auquel nous sommes attachés et qui est une des réponses au problème de solidarité qu'impose la crise d'aujourd'hui.
Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 27 novembre 2008
La réforme de l'État, comme la réduction du nombre de ses fonctionnaires, pose inévitablement la question de l'emploi public. Oui, Mesdames et Messieurs les maires, un régiment, une école de gendarmerie, ça compte dans une économie locale, je le sais. Mais en même temps, je vous le dis avec franchise, la problématique de l'emploi public ne peut pas empêcher le gouvernement de réformer. La problématique de l'emploi public ne peut pas empêcher le Gouvernement de prendre toutes les conséquences du fait que la Guerre froide est terminée et que nous n'avons plus besoin d'avoir une armée capable de s'opposer à l'invasion à l'Est d'un ennemi qui n'existe plus. Bien entendu il faut prendre toutes les précautions, il faut discuter pour chercher à trouver les moyens d'atténuer les conséquences de ces réformes. Mais qui peut prétendre que devant l'histoire, nous responsables nationaux, vous responsables locaux, nous devrions rester immobiles et ne pas toucher aux structures que nous avons héritées d'un autre temps, qui ne correspondent plus à la réalité d'aujourd'hui alors que par ailleurs, dans d'autres secteurs, nos concitoyens ont besoin de moyens supplémentaires, d'engagements supplémentaires de l'État ?
L'État doit aider les territoires les plus affectés à rechercher une nouvelle dynamique de développement. Il doit aider l'implantation de nouvelles activités. Vous avez évoqué, monsieur le Président, le plan d'accompagnement des restructurations de défense : il mobilise 320 millions d'euros pour les contrats et les plans de redynamisation, il prévoit des dispositifs fiscaux adaptés ainsi qu'un programme sans précédent de délocalisation de services, d'administrations centrales vers les territoires les plus touchés et la mise à disposition gratuite des empreintes de l'État au profit des collectivités territoriales qui ont pour ces empreintes des projets à proposer.
La réforme de l'État, c'est aussi la remise en ordre des finances publiques qui est fondamentale pour la compétitivité de notre pays. Je ne le répéterai jamais assez, un pays durablement endetté, c'est un pays qui perd ses marges de manoeuvre, c'est un pays qui reporte sur les générations futures le poids de son inertie, c'est un pays dont les dirigeants ne sont pas responsables. Nous sommes là devant un enjeu qui nous dépasse, qui dépasse chacun d'entre nous, qui dépasse nos territoires, qui dépasse la durée des mandats qui sont les nôtres ! Nous sommes là devant un enjeu qui n'est pas un enjeu de droite ou de gauche, qui n'est pas un enjeu qui distinguerait l'État des collectivités territoriales. Nous sommes tous dans la même barque. Nous sommes tous comptables de la même République. Les collectivités locales partagent avec l'État la responsabilité d'un retour à l'équilibre des finances publiques parce qu'elles participent largement, depuis la décentralisation, à la mise en oeuvre de ces politiques publiques, parce que l'État leur consacre déjà plus de 20 % de son budget. Il ne s'agit pas de faire des concours aux collectivités la variable d'ajustement du budget de l'État comme je l'entends parfois. Il s'agit simplement d'imposer à leur progression la même norme qu'à celle des dépenses de l'État, c'est-à-dire le taux de l'inflation. Et la vérité, Mesdames et Messieurs les maires, c'est que la progression globale est déjà plus forte que le taux de l'inflation. Le cadre du possible étant fixé par le projet de loi de finances, je suis prêt à débattre avec les élus de la structure des dotations pour en faire de véritables outils de développement économique et de la solidarité nationale.
Comme vous, je suis attaché à ce que ces dotations préservent d'abord la capacité d'investissement des collectivités dont vous avez eu raison de souligner que le rôle est essentiel pour l'investissement global de notre pays. Enfin vous avez évoqué la dotation de solidarité urbaine : 120 millions d'euros supplémentaires lui seront consacrés à travers une progression notamment de 70 millions d'euros de la dotation spécifique et la création d'une dotation de développement urbain. Le dispositif qui a été adopté par l'Assemblée nationale pour la réforme de la DSU est, je le crois, satisfaisant et je veux, devant vous, saluer le rôle du Comité des finances locales et de son président, Gilles Carrez. Ces 70 millions d'euros supplémentaires seront consacrés en 2009 aux cinquante communes les plus défavorisées de notre pays tandis que les trois cent vingt-sept villes suivantes, classées en fonction de leur indice synthétique, bénéficieront d'une augmentation de 2 % de leur dotation. Les communes qui auraient dû cesser de recevoir la DSU bénéficieront, quant à elles, d'une dotation équivalente à celle reçue en 2008. Comme convenu avec les associations d'élus, un groupe de travail sera mis en place pour une réforme du dispositif en 2010.
Mesdames et Messieurs les maires, la modernisation de notre pays passe par une rénovation de nos institutions locales. Bon, vous connaissez la situation et votre président l'a évoquée lui-même avec beaucoup de franchise, la fiscalité locale est obsolète. Je ne crois pas que la réforme que je viens d'évoquer de la taxe professionnelle soit la première. Elle vient s'ajouter à beaucoup d'autres qui ont contribué à enlever de plus en plus à la taxe professionnelle sa logique, à lui enlever son efficacité. Les valeurs locatives sur lesquelles les taxes foncières sont assises sont inéquitables, tout le monde le sait. Elles sont éloignées des réalités locales. La taxe professionnelle est le seul impôt au monde à frapper à 80 % les investissements des entreprises. Les collectivités locales n'ont pas les ressources fiscales qui sont adaptées à leurs compétences. Par ailleurs, l'empilement sans équivalent des niveaux de collectivités et l'enchevêtrement surtout des compétences rendent notre système local complètement incompréhensible et pas suffisamment efficace et coûteux pour le contribuable. Notre réflexion sur les institutions locales repose sur la volonté de simplifier les structures, sur la volonté de clarifier les compétences sans a priori, sans schéma préétabli et en acceptant de ne pas retenir forcément le même schéma pour l'ensemble du territoire national. Pourquoi n'accepterions-nous pas enfin qu'il puisse y avoir, sur le territoire national, en fonction des caractéristiques, en fonction de l'histoire, en fonction de la fragilité ou, au contraire, des potentialités de tel ou tel territoire, des systèmes d'organisation différents ? La réforme de la fiscalité locale, quant à elle, doit avoir comme point de départ la réforme de la taxe professionnelle. Vous voyez bien que la mesure, j'allais dire ultime que nous venons de prendre d'exonération des nouveaux investissements marque au fond la fin d'un impôt qui est à bout de souffle. Il faut donc maintenant, parce que nous sommes au pied du mur, avant l'échéance de 2011 - parce que c'est à cette date que les réformes successives produiront tous leurs effets- remettre complètement sur le chantier cette taxe professionnelle avec un objectif premier, celui de libérer l'investissement. Elle doit avoir comme corollaire une redistribution des impôts qui sont affectés à chaque niveau de collectivités. Bon, vous le savez, le président de la République a confié à Édouard Balladur la présidence d'un comité pluraliste pour faire avancer la réforme des collectivités locales. Ce comité, il est libre. Il est libre dans ses méthodes de travail, il sera libre dans les propositions qu'il formulera au premier trimestre 2009. Mais je veux vous dire que dans leur appréciation, vos associations, le Parlement au premier rang, joueront naturellement un rôle déterminant et je sais que le ministre chargé des relations avec le Parlement, Roger Karoutchi, sera plus que jamais à son écoute et que vous-mêmes les élus locaux, vous serez complètement associés à leurs suites.
Mesdames et Messieurs les maires, le 21 octobre dernier, les députés ont adopté à l'unanimité le projet de loi de programme mettant en oeuvre les conclusions du Grenelle de l'environnement. Ce vote exceptionnel dans notre pays dit assez leur adhésion et la manière dont les enjeux environnementaux auront pénétré la société française. Ce texte va être mis en oeuvre et d'ores et déjà, le Conseil d'État examine ce qu'on appelle le projet de loi Grenelle 2 qui comporte un grand nombre de mesures qui vous concernent parce que le développement durable, nous le savons, se jouera d'abord à votre niveau. D'abord parce que les collectivités sont au coeur de la maîtrise et de la gestion du territoire. La nouvelle politique de trame verte, c'est-à-dire la restauration des continuités écologiques, doit donc être à la main des élus. Mais aussi parce que c'est au plus près du terrain que les initiatives pertinentes émergent. Le Grenelle prévoit ainsi d'élargir la liberté des collectivités en leur confiant de nouveaux outils : le plan "Ville durable", la possibilité de rajouter des critères de densité autour des noeuds de transports en commun ou encore la possibilité d'ajouter des critères d'efficacité énergétique de l'habitat dans les documents d'urbanisme. Les schémas de cohérence territoriale intégreront désormais des objectifs de développement durable comme la lutte contre la consommation excessive de terres agricoles et naturelles. Les collectivités réaliseront dorénavant des plans Climat-Énergie territoriaux qui leur permettront d'identifier des engagements possibles en matière de réduction des gaz à effet de serre et de s'associer à l'effort national de réduction de 20 % des émissions d'ici 2020. Enfin des nouveaux objectifs de prévention et de recyclage des déchets seront retenus. La politique des filières dans laquelle l'amont finance l'élimination en aval, monsieur le Président, sera développée.
Dans une période économique incertaine, je pense que nous n'avons pas tort de faire le choix de l'audace environnementale. Nous voulons saisir ce relais de croissance que constituent les technologies de rupture vertes. Nous consacrerons un milliard d'euros à la recherche sur les quatre prochaines années pour financer notamment un fonds démonstrateur pour permettre d'accélérer le passage de ces technologies protectrices de l'environnement au développement industriel. Enfin l'activité de rénovation technique du bâtiment à partir de 2009. Les 100 milliards d'euros d'investissements publics privés pour les transports, qui seront inscrits dans le Grenelle entre 2009 et 2020, je veux dire que c'est notre avenir, ce sont nos emplois et c'est la préfiguration de la croissance verte que les Français appellent majoritairement de leurs voeux.
Mesdames et Messieurs les maires, la solidarité territoriale, c'est la certitude que partout sur le territoire français, nos concitoyens continuent à bénéficier des mêmes droits et des mêmes chances. Et au premier rang de ces préoccupations, il y a l'accès aux soins. Le ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, a présenté un projet de loi intitulé - chaque mot compte - "Hôpital, santé, patients et territoires". L'objectif de ce projet de loi, c'est de passer un véritable pacte de modernité avec notre système de santé, c'est de garantir l'égalité de l'accès aux soins en libérant les forces de notre réseau hospitalier, c'est le décloisonnement, c'est la création de synergies entre le public et le privé, c'est plus de facilité pour les coopérations entre les établissements en les réunissant, par exemple, dans des communautés hospitalières de territoires. Mais l'objectif, c'est aussi de prendre en compte les contraintes de déplacement imposées aux patients, de renforcer les incitations géographiques pour mieux répartir les installations nouvelles des médecins, d'encourager la création locale de maisons de santé pluri-professionnelles. Si une concentration des services au coeur du département doit se traduire par une disparition de l'offre en périphérie, alors nous serons tous perdants et le service public hospitalier le premier. Mais si les rapprochements de services peuvent créer une dynamique, peuvent renforcer l'attrait d'un département désavantagé en termes de démographie médicale, alors nous aurons gagné notre pari. La solidarité territoriale, c'est aussi la défense de l'Éducation nationale et des valeurs qu'elle porte. Je connais votre attachement au bon fonctionnement de l'école dans chacune de vos communes et des efforts accomplis pour accompagner les changements successifs : école après l'école, suppression du samedi matin, instauration du service minimum d'accueil. Le ministre de l'Éducation nationale réforme et il a raison de le faire. Et il a raison de le faire parce que notre système éducatif a besoin de réforme et personne ne peut le nier. Quant à la loi de la République, Mesdames et Messieurs les maires, elle n'est pas négociable. Le service minimum d'accueil a été voté par le Parlement qui représente la majorité des Français et il correspond à la demande de la majorité des familles. Eh oui, je sais que la situation de chaque commune est particulière et je sais que sans l'ouverture d'un dialogue, sans la prise en compte de vos contraintes, l'application de la loi ne sera pas possible de façon satisfaisante. Eh bien je compte sur une vraie concertation entre les représentants de l'État et vous au niveau local, entre l'État et vos représentants au niveau national et naturellement, je suis prêt à toutes les évaluations nécessaires pour faire en sorte que nous améliorions le service public. On ne peut pas être à la fois d'un côté pour le service public et en même temps, refuser de mettre en oeuvre les conditions qui permettront à ce service public d'être appliqué vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept.
Tous ici, Mesdames et Messieurs les maires, nous sommes profondément républicains et je suis convaincu que nous trouverons les moyens de lever ensemble les obstacles restants. Je tiens le même raisonnement pour la plupart des services publics et notamment en milieu rural, c'est-à-dire dans la très grande majorité des trente-six mille communes que vous représentez. Je veux un redéploiement de ces services publics qui tire réellement les conséquences de la décentralisation. Pour la réussir, j'appelle les collectivités locales à tirer tous les profits de l'intercommunalité qui apparaît plus que jamais comme l'échelle pertinente pour l'organisation de ces services publics. Je sais qu'Alain Marleix consacre une réflexion particulièrement vigilante avec vos associations à cette question. J'appelle les collectivités territoriales à la concertation, à l'imagination mais je les appelle aussi au réalisme et je les appelle à peser sans a priori l'importance réelle des adaptations proposées. En contrepartie des efforts consentis, monsieur le Président, il est nécessaire de réévaluer la charte des services publics en milieu rural. Il est nécessaire de la faire évoluer, de la faire évoluer dans l'esprit du partenariat qui a présidé à sa signature. J'ai confié, bien conscient des difficultés de mise en oeuvre qui existaient ici et là, un mandat clair à Hubert Falco, le secrétaire d'État chargé de l'Aménagement du territoire. Il sait comme moi l'attachement de l'Association des maires de France à cet outil.
Le service public aujourd'hui, ce n'est pas toujours la présence symbolique d'un guichet public en sous-régime. Le service public, c'est aussi de plus en plus l'accès aux nouvelles technologies de l'information, l'accès à l'Internet haut débit, c'est l'aménagement numérique comme forme moderne de la proximité administrative culture et citoyenne. À ma demande, Éric Besson a élaboré un plan "France Numérique 2012" qui prévoit qu'à cette échéance, 100 % des Français devront accéder à l'Internet haut débit mobile, fixe et mobile. Grâce aux efforts des collectivités - et ils ont été importants ces dernières années -, nous avons déjà rattrapé une grande partie de notre retard et nous avons assuré à 99 % de nos concitoyens une couverture Internet que la plupart des pays voisins en Europe nous envient mais il faut aller plus loin. Et pour aller plus loin, nous allons définir un nouveau droit, celui d'accéder au haut débit partout sur le territoire pour un tarif abordable. Ce nouveau droit sera opposable aux opérateurs que nous allons sélectionner. Mais nous allons aussi anticiper la révolution technologique du très haut débit en créant les conditions favorables à un effort d'infrastructures majeures, notamment à l'investissement des opérateurs dans une nouvelle boucle locale en fibre optique. Dans le passé, notre pays a su relever les défis successifs de l'aménagement routier, du chemin de fer, de l'électrification. Eh bien avec le concours de l'État, des collectivités, des opérateurs, de l'Union européenne, nous serons capables de relever celui du très haut débit. Et pour éviter une nouvelle fracture numérique, les collectivités locales auront un rôle clé à jouer dans la cohérence et dans la régularité de son déploiement. Pour que tous les Français puissent disposer à terme d'une solution technique, j'ai décidé de consacrer à ce chantier national ce qu'on appelle le "dividende numérique", c'est-à-dire les fréquences qui vont être progressivement libérées par la fin de la diffusion analogique de la télévision hertzienne ; ces fréquences sont particulièrement adaptées à la couverture des zones les moins denses, dès 2009, elles seront attribuées aux opérateurs et seulement aux opérateurs qui s'engageront à étendre le très haut débit mobile aux communes isolées. A court terme, je suis heureux de confirmer que grâce à la négociation qui a été conduite cet été, par Hubert Falco, les trois cent soixante-quatre zones blanches de la téléphonie mobile devront être très prochainement couvertes, mettant un point final à la couverture du territoire français.
Mesdames et Messieurs les maires, nous voulons que nos communes vivent et il faut, pour cela, que les formes irremplaçables de la proximité, le commerce de détail, l'artisanat, les services locaux puissent continuer d'y être assurés. Pour donner aux Pouvoirs publics, les moyens de les défendre, la Loi de modernisation de l'économie a renforcé considérablement les moyens du FISAC. Le FISAC aidera les maires à assurer une diversité commerciale, en prenant en charge une partie des intérêts de l'emprunt que les communes pourraient avoir contractés en faisant leur droit de préemption sur les fonds de commerce. Parce que nous voulons améliorer son action en zone rurale, le nombre des entreprises concernées sera élargi. Ses taux d'intervention et ses montants maximums seront augmentés. Les décrets correspondants seront pris avant la fin de cette année.
Lors du débat sur la Loi de modernisation de l'économie, les parlementaires ont demandé au gouvernement d'examiner l'intégration du droit de l'urbanisme commercial dans le droit commun de l'urbanisme. C'est un sujet extrêmement délicat, c'est un sujet qui demande de trouver un équilibre entre absence totale de régulation, qui n'est évidemment pas souhaitable, et fermeture des territoires, qui ne l'est pas plus ; j'ai confié une mission au député Jean-Paul Charier sur ce sujet, il doit me rendre son rapport pour la mi-décembre, de façon à ce que nous puissions, dès le début de l'année 2009, proposer au Parlement, un débat sur ce sujet.
Enfin, je n'oublie pas que les maires des petites communes rurales sont particulièrement attentifs au soutien que les pouvoirs publics apportent à l'agriculture. Ce n'est certes plus la seule activité économique du monde rural, mais chacun sait combien sa place demeure essentielle. Après un an de discussion, la présidence française est parvenue, jeudi dernier, à un accord sur le bilan de santé de la Politique Agricole Commune. C'est un accord solide, c'est un accord qui prépare l'avenir en répondant à deux enjeux majeurs pour notre agriculture : la localisation des productions, en nous permettant de réorienter une partie des aides vers les territoires et vers les produits les plus fragiles, ensuite la stabilisation des marchés en préservant des mécanismes d'intervention sur le lait et sur le blé ; nous avons été très vigilants sur les quotas laitiers ; la réforme précédente de 2003 a décidé de leurs suppressions en 2015, ce qui suscite des inquiétudes légitimes de la part des professionnels et des élus de beaucoup de régions. Nous avons veillé à ce que l'augmentation de ces quotas soit très progressive, 1 % par an, et nous avons décidé que des mesures d'accompagnement à la production laitière seraient mises en place.
L'accord va enfin nous permettre de répondre au défi d'une agriculture durable, dans le cadre d'une politique de développement rural adapté. C'est une contribution tangible de la Politique Agricole Commune aux orientations définies par le Grenelle de l'Environnement. Les discussions vont, à présent, s'engager rapidement avec la Profession agricole pour arrêter les choix de notre pays.
Le Gouvernement a aussi la préoccupation des revenus agricoles. Vous le savez, les marchés agricoles se sont retournés brutalement, et avec l'augmentation considérable des charges, le revenu des éleveurs, des producteurs de fruits et légumes, d'une partie des viticulteurs s'est fortement dégradé. Dans un contexte budgétaire dont je n'ai pas besoin de rappeler combien il est difficile, nous avons travaillé ; avec Michel Barnier, à des réponses concrètes pour permettre que ces secteurs puissent passer sans dommages le cap difficile de 2009. Le Plan d'urgence que Michel Barnier a présenté le 7 novembre dernier à la Profession agricole est doté de 204 millions d'euros de fonds publics, auquel il convient d'ajouter les efforts de la mutualité sociale agricole et des établissements de crédits qui se sont engagés aux côtés de l'Etat. Au total, ce sont 250 millions d'euros qui seront mobilisés pour les exploitations les plus en difficulté.
Mesdames et Messieurs les maires, c'est avec un sentiment de respect et de confiance que je vous dis que l'année 2009 sera, pour nous tous, une année de mobilisation, une année de coordination et une année d'action. Ni vous ni moi nous n'avons vocation à "faire le gros dos" en attendant la fin de l'orage. Sous la présidence de Jacques Pelissard, auquel je veux rendre hommage, l'Association des maires de France s'est toujours montrée à la hauteur de ses attentes. Durant son mandant, elle a prouvé que les maires n'étaient pas les gestionnaires d'un petit pré carré, mais qu'ils étaient les acteurs d'une société qui se transforme, d'une société qui doit faire des choix, d'une société qui doit se rassembler face aux défis que lui lancent la crise actuelle et la mondialisation. Je sais que la France peut compter sur vous pour continuer ; je veux vous dire que vous pouvez compter sur l'Etat, sur mon Gouvernement pour être votre partenaire, et je veux vous dire qu'il est de l'honneur et de la noblesse de la fonction qui est la nôtre, qui est la vôtre de premier magistrat de vos communes, qui est la mienne de chef du gouvernement français, de se dire toute la vérité, les yeux dans les yeux et de débattre ensemble dans le sens de l'intérêt général de notre pays.
Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 27 novembre 2008