Déclaration de M. Hervé Novelli, secrétaire d'Etat au commerce, à l'artisanat, aux petites et moyennes entreprises, au tourisme et aux services, sur la politique du gouvernement en faveur des PME, Paris le 27 octobre 2008.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Groupe de travail PME et eutrepreneuriat de l'OCDE à Paris le 27 octobre 2008

Texte intégral

Monsieur le Secrétaire Général adjoint, Monsieur le Directeur, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les ambassadeurs et chefs de délégations représentant les pays membres de l'OCDE et les pays observateurs,
C'est avec grand plaisir que j'interviens devant vous aujourd'hui. Je me dois à cette occasion de féliciter votre groupe de travail qui remplit parfaitement son mandat.
Je veux témoigner à cette occasion de l'importance de vos travaux pour l'élaboration de la politique française en faveur des PME. Vous constituez un des rares forums internationaux de haut niveau qui conduit une réflexion sur les politiques engagées, et surtout à engager, au bénéfice des PME. La France est donc particulièrement attentive à vos échanges et à la mutualisation des bonnes pratiques que vous identifiez et faites connaître. L'expertise de votre Groupe est désormais parfaitement reconnue, puisque plusieurs pays ont sollicité votre intervention pour un audit de leurs politiques en faveur des PME.
C'est donc parce que je m'adresse à un parterre d'experts qu'il me parait important de vous exposer la priorité que représente, plus que jamais, pour le Gouvernement français, une politique en faveur des PME.
L'histoire du ministère dont j'ai la charge s'inscrit en partie dans son nom : secrétariat d'Etat au commerce, à l'artisanat, aux petites et moyennes entreprises, au tourisme et aux services. Dans l'administration française, il y a presque toujours eu un ministère chargé du commerce et de l'artisanat. Or, depuis 10 ans, ce ministère s'est élargi aux PME et, depuis peu, au tourisme et aux services. Ce ministère est aujourd'hui celui de l'entrepreneuriat, c'est-à-dire celui de toutes les PME, quelle que soit l'activité qu'elles exercent : industrielle, commerciale, artisanale, libérale, ou de services. Si la France attache une grande importance à ce ministère, c'est que - nous le savons tous - c'est dans ces entreprises que se créent la croissance et l'emploi.
Avant de vous présenter les réformes adoptées ces derniers mois au profit des PME, je souhaitais revenir brièvement sur l'actualité financière et économique.
Face à la crise financière, nous avons organisé une mobilisation particulièrement importante en faveur des PME. Notre prise de conscience a permis de mettre un place un plan PME avant même qu'un plan de soutien aux banques ne soit décidé. Dès le 2 octobre, le président de la République Nicolas Sarkozy annonçait un plan de financement des PME, d'un montant de 22 milliards d'euros, ce plan étant intégralement opérationnel 20 jours plus tard. Ce plan PME s'ajoute donc au 360 milliards d'euros destinées aux banques et aux nouvelles mesures annoncées jeudi par le Président de la République en matière d'exonération fiscale, de médiation et de prise de participation dans les PME dites stratégiques. Le plan PME se décompose comme suit :
Tout d'abord 17 milliards d'euros d'excédents d'épargne réglementée ont été transférés aux banques. En échange de quoi, les banques se sont engagées, par la signature d'une convention mardi dernier, à utiliser exclusivement ces 17 milliards d'euros au profit des PME et des entreprises de taille intermédiaire. Les banques se sont engagées aussi en contrepartie à assurer une remontée d'information mensuelle sur l'emploi de ces crédits.
Ensuite, en plus des 17 milliards transférés aux banques, 5 milliards d'euros de garantie et de prêts sont mis en oeuvre par OSEO, l'Etablissement public de financement des PME. Sur ces 5 milliards, je tiens à porter à votre attention une mesure innovante qui consiste convertir 1 milliard d'euros de besoins de trésorerie en prêts moyen - long terme grâce à un mécanisme de garantie.
Pour que les entreprises aient accès à ces dispositifs, plus, un dispositif d'accompagnement a été mis en place par le Gouvernement. Ce dispositif repose sur un médiateur entre banques et PME qui rencontreraient des difficultés, sur la mise en place de comités de suivi dans chaque département autour des préfets, sur la nomination de « parrains » dans les services déconcentrés de l'Etat pour orienter les PME, et sur l'ouverture d'un numéro de téléphone dédié pour mettre les entreprises en relation avec OSEO.
Ce plan de soutien est très important car il doit permettre aux PME qui constituent les forces vices de notre tissu économique de résister dans la période de tourmente financière. Il faut qu'elles résistent car lorsque la tempête sera passée, il faudra rebondir et les PME seront au coeur du rebond de notre économie. Car la France a la capacité de rebondir. Elle bénéficie d'un tissu productif dynamique, doté d'une grande vitalité en matière de création d'entreprises, ainsi que d'une forte attractivité. Les créations d'entreprises, 321 000 en 2007 ont été multipliées par 1,5 depuis 2000, tandis que l'économie française a reçu, pendant cette même période, le 3ème montant d'investissements étrangers directs le plus important de l'OCDE (soit 3,5% du PIB), après les Etats-Unis et le Royaume-Uni.
La France dispose encore d'un fort potentiel d'augmentation de croissance, comme l'a relevé le rapport de la « Commission pour la libéralisation de la croissance française », la Commission menée par Jacques Attali. Pour exploiter ces gisements de croissance, nous pouvons et nous devons tout d'abord nous appuyer sur la concurrence, source d'émulation et de compétitivité, qui peut être renforcée dans certains secteurs, notamment dans les services. Une étude du FMI chiffre à près de 9% du PIB le surcroît d'activité qui découlerait, à terme, en France d'un renforcement de la concurrence dans les marchés des biens et des services. C'est ce à quoi j'oeuvre en veillant à la transposition de la directive européenne « Services » qui vise précisément à créer un marché unique des services au sein de l'Union européenne.
En outre, cette croissance ne se fera que si les entreprises, notamment les petites et les moyennes entreprises, voient s'améliorer encore leur environnement réglementaire et financier. C'est pour répondre à ce défi que, j'ai mis en place un Conseil des entrepreneurs composé de 17 chefs d'entreprise. Ce Conseil est chargé de proposer des réformes alimentant un pacte dit « Force 5 » structuré autour de 5 lignes directrices : simplifier l'environnement des entreprises, soutenir l'innovation, favoriser le financement des PME, baisser la fiscalité, poursuivre l'accélération des exportations.
La loi de modernisation de l'économie votée le 4 août 2008 répond aux engagements pris dans le Pacte « Force 5 ». Les réformes adoptées dans cette loi s'inscrivent dans la continuité de celles mises en oeuvre depuis 2003 avec la loi pour l'initiative économique et la loi en faveur des PME de 2005, dont j'ai été moi-même le rapporteur devant l'Assemblée Nationale. Ces lois de 2003 et 2005 visaient à promouvoir la création d'entreprise et l'entrepreneuriat, à favoriser le développement de secteurs créateurs d'emplois et d'un tissu d'entreprises en forte croissance. Le Gouvernement est conscient qu'il doit encore faciliter la vie des entreprises, en améliorant et en simplifiant leur environnement fiscal, financier, social et administratif. Tel a été le premier objet de la loi de modernisation de l'économie qui comporte d'importantes et nombreuses dispositions visant à encourager les entrepreneurs tout au long de leur parcours.
La loi a créé un régime incitatif et simplifié pour l'auto-entrepreneur qui souhaite mener une activité indépendante, à titre principal ou de façon accessoire à un statut de salarié ou de retraité. Ce régime est très attractif puisqu'il repose sur de faibles prélèvements fiscaux forfaitaires et libératoires. On devient auto-entrepreneur par simple déclaration. Il n'y a pas besoin d'immatriculation dès lors que l'activité concernée engendre un faible montant de chiffre d'affaires. Les démarches pour se mettre à son compte ont ainsi été réduites à leur plus simple expression pour que tout à chacun puisse tenter sa chance.
Par ailleurs, la loi a créé une véritable « seconde chance » pour les entrepreneurs ayant connu une faillite. Le droit français des sociétés était, jusqu'à présent, extrêmement rigoureux pour ces derniers et les empêchait de reprendre une activité commerciale. Désormais, ce sera au juge des faillites, c'est-à-dire le tribunal de commerce, d'apprécier, au cas par cas, si une incapacité commerciale est réellement justifiée.
A côté de la création, la loi favorise aussi la reprise d'entreprise. Pour cela, elle diminue significativement les droits de mutation, c'est-à-dire la taxe sur les reprises d'entreprises, afin de pérenniser l'actionnariat des PME, et d'encourager les reprises, en particulier par un proche ou par un salarié. Les droits sur la vente de fonds de commerce ont aussi été allégés.
La loi simplifie aussi la vie de l'entreprise avec :
la neutralisation, à titre expérimental, de l'impact financier du franchissement des seuils de 10 et 20 salariés par les entreprises ;
la simplification du fonctionnement des sociétés à responsabilité limité, avec plusieurs dispositions complémentaires permettant de résoudre à l'amiable certaines difficultés ;
l'extension du rescrit social et fiscal. Le rescrit permet à l'entreprise de faire valider dans un délai donné sa position vis-à-vis de l'administration. Le rescrit, c'est cette démarche par laquelle l'administration s'engage sur l'éligibilité d'un projet sans pouvoir la remettre en cause plus tard ;
avec l'allègement des obligations comptables pour les sociétés par action simplifiées.
Je sais que l'innovation est au coeur de vos travaux : c'est un point sur lequel nous avons souhaité porter un effort particulier. Il est désormais clairement reconnu que l'innovation est un vecteur de croissance. L'innovation est un facteur déterminant pour permettre aux entreprises d'être compétitives et de conquérir des parts de marché. La croissance a longtemps reposé sur le capital et le travail, deux facteurs essentiels qui conditionnaient la compétitivité de notre économie. Ces deux facteurs restent importants, mais ils ne permettent pas de créer la différenciation dont notre économie a désormais besoin. Ce qui aujourd'hui fait la différence, c'est l'innovation.
Le Gouvernement français a engagé une politique globale en faveur de l'innovation dans un esprit offensif. Nous avons mis en place des mesures visant à libérer l'innovation et à réduire considérablement les risques qui pesaient sur les entrepreneurs afin de leur permettre de se lancer plus facilement. Cette dynamique est fondamentale pour que la France retrouve le chemin de l'investissement et la croissance.
Je citerai deux vecteurs d'incitation sur lesquels nous jouons pour que les entreprises accélèrent leurs efforts de recherche et développement : le crédit d'impôt recherche et la commande publique. Leurs règles viennent de faire l'objet d'aménagements importants.
Le crédit d'impôt recherche tout d'abord est un dispositif transversal de soutien à la R&D, sans restriction de taille d'entreprise ni de secteur d'activité. Nous avons simplifié et amplifié cette mesure fiscale qui représentait 1,5 milliards d'euros en 2007 et qui atteindra 3,5 milliards d'euros en 2012. Ce crédit d'impôt concerne bien sûr les entreprises présentes en France, mais l'objectif est également de renforcer l'attractivité de la France pour les activités de recherche des entreprises françaises et étrangères. J'entends d'ailleurs que le crédit d'impôt recherche est aujourd'hui l'outil le plus puissant de tout l'OCDE et que le France serait devenue un paradis fiscal pour l'innovation. Nous estimons que la réforme du crédit impôt recherche fera progresser le ratio dépenses de R&D sur Produit Intérieur Brut de 0,2 point en 2013, et de 0,5 point en 2018.
Pour soutenir l'innovation, la loi de modernisation de l'économie permet aux acheteurs publics, à titre expérimental et pour une période de 5 ans, de traiter de façon préférentielle les PME innovantes. Cette mesure s'appliquera uniquement aux marchés de haute technologie, de recherche et développement et d'études technologiques, d'un montant inférieur aux seuils des procédures formalisées. Il s'agit, concrètement, de permettre aux acheteurs publics de réserver aux PME innovantes jusqu'à 15% de leurs marchés.
Mais ce n'est pas tout. Pour que les PME innovent, il faut qu'elles aient confiance dans leur capacité à profiter des fruits de leur innovation. C'est pourquoi nous avons renforcé la lutte contre la contrefaçon. Nous avons aussi simplifié le brevet européen avec la ratification de l'Accord de Londres et nous avons enfin réduit de 50% la redevance de dépôt de brevets pour les PME.
Simplification, innovation, financement. En ce qui concerne le financement des PME, nous avons joué sur les fonds propres, la dette et la trésorerie.
En matière de fonds propres, je citerai une mesure qui a rencontré pour sa première année d'exécution un succès que nous n'avions pas imaginé. Nous avons introduit dans la loi sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat votée le 1er août 2007 une possibilité pour les redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune, dit ISF, d'obtenir une forte réduction fiscale en cas d'investissement dans le capital d'une PME. Et bien cette mesure est allée plus loin que toutes nos espérances puisque c'est près d'un milliard d'euros de fonds propres pour les PME qui ont été levés en 2008 grâce à cette réduction fiscale. Cette mesure a suscité par la même occasion des vocations pour des milliers de business angels.
La loi de modernisation de l'économie a aussi assoupli le cadre juridique dans lequel fonctionnaient les principaux instruments de capital-risque.
En matière de trésorerie, je souhaite insister sur les délais de paiement. En France les délais de paiement sont, en moyenne, plus longs que dans les autres pays européens. Cette situation pèse sur la compétitivité des entreprises et des PME, et pénalise l'investissement et la croissance. La loi a donc plafonné à 45 jours fin de mois le délai de paiement convenu entre les entreprises et elle a doublé les intérêts minimaux dus en cas de retard. Cette mesure va améliorer la trésorerie des entreprises dont les difficultés constituent la principale source de faillites.
En matière de fiscalité, je rappellerai tout d'abord la politique de soutien mise en oeuvre, depuis 2005, en direction des PME de croissance.
Nous poursuivons notre effort de réduction de la charge fiscale avec l'extinction progressive sur 3 ans de l'impôt forfaitaire annuel et la réforme de la taxe professionnelle, annoncée depuis longue date, ainsi que son exonération immédiate pour tous les nouveaux investissements réalisés d'ici la fin 2009.
La loi sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat a en outre défiscalisé les heures supplémentaires afin de libérer le travail.
Je sais que vos travaux vous ont également conduit à vous intéresser aux barrières que rencontrent les PME lorsqu'elles veulent se développer à l'international. En tant qu'ancien chef d'entreprise, je peux témoigner que pour une PME exporter peut être complexe, risqué et coûteux.
La constitution d'un groupement d'entreprises à l'export, avec d'autres PME et avec l'appui d'un accompagnateur spécialisé et compétent, constitue un moyen efficace pour mutualiser les frais de prospection commerciale, pour partager les risques, pour échanger les expériences. Pour les membres de tels groupements, la démarche d'exportation devient à la fois plus simple, plus sûre, et moins coûteuse.
Pour soutenir la phase critique de la constitution d'un tel groupement, nous avons lancé un appel à projets. Les groupements de PME à l'export ainsi accrédités bénéficient d'une aide financière pouvant atteindre 20 000 euros, en fonction des dépenses engagées.
Par ailleurs, nous encourageons le portage, c'est-à-dire l'appui technique et les conseils apportés aux PME par les grandes entreprises exportatrices.
Vous voyez combien les thèmes de vos travaux - suppression des obstacles à l'accès des PME aux marchés internationaux, innovation, financement des PME et de l'entrepreneuriat, fiscalité - pour n'en citer que quelques-uns, sont bien aussi ceux qui préoccupent le Gouvernement français. Cela montre tout l'intérêt que nous portons à vos travaux.
A cet égard, vous envisagez de tenir une table ronde sur le financement des PME et de l'entrepreneuriat en 2009. Vous souhaitez aussi transformer votre session d'octobre 2010 en une réunion à haut niveau, consacrée à réaliser un bilan et une prospective, 10 ans après l'adoption de la Charte de Bologne. Ces projets me paraissent devoir être encouragés. C'est pourquoi la France est prête à soutenir la préparation de ces 2 événements qui aborderont des thèmes-clés concernant le développement et la compétitivité des PME, dans un contexte d'accélération de la mondialisation.
Je souhaite que vous puissiez continuer sur la même dynamique et faire prévaloir les besoins des PME auprès des décideurs. Trop souvent encore, les règles administratives sont conçues pour les grandes entreprises : le rôle de votre groupe de travail, comme il l'a déjà démontré, est considérable en la matière. Il s'agit là d'une tâche primordiale pour nos pays pour laquelle je vous souhaite une pleine réussite. Je vous remercie.
Source http://www.delegfrance-ocde.org, le 26 novembre 2008