Texte intégral
Monsieur le Président, Cher Vincent,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec plaisir que j'ai répondu à l'invitation de votre Compagnie, pour débattre de l'évolution de votre profession de commissaire aux comptes.
Avant toute chose, permettez-moi de souligner le rôle économique essentiel que vous jouez, en tant que commissaires aux comptes, dans le soutien aux entreprises, et en particulier aux PME.
1. Le rôle essentiel des commissaires aux comptes dans l'économie, en particulier dans le contexte actuel.
Par leur action, les commissaires aux comptes contribuent au développement de la confiance entre les acteurs économiques. Cela vaut bien-sûr pour les grandes entreprises mais aussi et surtout pour les petites et moyennes entreprises, dont les professionnels du chiffre accompagnent le développement. En tant que chef d'une PME, pendant plus de vingt ans, j'ai pu mesurer l'utilité d'avoir à mes côtés un commissaire aux comptes.
Ce rôle économique du commissaire aux comptes est d'autant plus nécessaire dans la période de difficultés financières que nous traversons.
Dans cette période, votre mission de certification des comptes est plus que jamais utile pour maintenir la confiance entre les acteurs économiques. Je pense également à la procédure d'alerte, qui depuis 1984, impose au commissaire aux comptes d'alerter le dirigeant puis son Conseil, puis l'Assemblée Générale, puis le Président du Tribunal de commerce en cas de mise en cause de la continuité de l'exploitation.
Depuis 1984 cette procédure a été maintes fois remaniée, mais j'ai le sentiment qu'elle pourrait être plus fréquemment utilisée, comme outil de prévention des difficultés des entreprises. Pour moi, le commissaire aux comptes est un acteur à part entière en matière de prévention des difficultés des entreprises : je vous invite, dans les prochains mois, à jouer pleinement ce rôle de prévention auprès des PME.
Depuis la loi portant nouvelle régulation économique, le commissaire aux comptes est obligé de justifier de ses appréciations lorsqu'il émet un rapport. Je pense, Monsieur le Président, que le recours à ces appréciations pourrait être plus développé.
Enfin, le Gouvernement souhaite confier une mission particulière aux commissaires aux comptes dans la réforme des délais de paiement que nous mettons en oeuvre à partir du 1er janvier. La loi de modernisation de l'économie vous a en effet confié la mission de vérifier le respect des règles de délais de paiement à 60 jours. J'ai élaboré sur ce sujet un projet de décret en lien avec votre Compagnie, qui sera publié dans les prochaines semaines. Ce projet de décret précise les informations que devra contenir le rapport de gestion en matière de délais de paiement, pour toutes les entreprises soumises à commissariat aux comptes. Il vous appartiendra, à partir de début 2010, d'adresser un rapport au ministre chargé de l'économie si vous relevez, de façon répétée, des manquements graves et significatifs aux prescriptions du code de commerce. C'est là un élargissement de vos missions, un élargissement délicat d'ailleurs, qui sort d'une certaine manière de votre mission traditionnelle de certification. J'en suis conscient. Mais je suis aussi convaincu que vous saurez accomplir cette nouvelle mission, dans une optique d'accompagnement des entreprises plutôt que de pur contrôle.
En résumé, je sais que les Commissaires aux comptes joueront leur rôle dans le contexte actuel de difficultés financières, un rôle essentiel à la transparence de l'économie à la sécurité juridique et financière des entreprises.
Le Gouvernement a besoin de vous. Vous êtes des acteurs de la sécurité et de la confiance dans les investissements, dont nous avons plus que jamais besoin. Vous pourrez compter sur moi pour vous appuyer dans ce travail de proximité au service de l'économie française.
2. Le périmètre du Commissariat aux comptes pour les SAS :
Permettez-moi maintenant d'évoquer plus particulièrement la question du champ d'intervention du commissariat aux comptes, qui a donné lieu à de nombreux débats durant la discussion de la loi de modernisation de l'économie. Au cours des dernières années, le champ d'intervention des commissaires aux comptes a été étendu à certaines associations et aux établissements publics, car le commissariat aux comptes est indispensable lorsqu'un certain niveau de développement est atteint ou que des entités sont financées pour une part importante par des fonds publics.
Depuis 2007, nous avons étendu votre champ de compétences dans plusieurs domaines. Pour ne citer qu'un exemple, nous avons créé une mission de certification des comptes pour les fonds de dotation, structure juridique issue de la loi de modernisation de l'économie. Le recours au commissariat aux comptes est obligatoire dès lors que le montant total des ressources du fonds de dotation dépasse 10 000 euros. J'en profite pour remercier la Compagnie, qui nous a apporté une aide précieuse dans la rédaction des décrets d'application correspondants.
Pour autant, il nous faut aussi prendre en compte la nécessité de simplifier la vie des petites entreprises et de diminuer les coûts pesant sur elles. La loi de modernisation de l'économie a ainsi simplifié certaines règles de fonctionnement des entreprises. Elle a notamment réformé le commissariat aux comptes des sociétés par actions simplifiées en prévoyant que les plus petites SAS pourraient désormais être dispensées de l'obligation de désigner un commissaire aux comptes. Cette règle existait déjà pour d'autres structures sociétaires comme la société à responsabilité limitée, la société en nom collectif et la société en commandité simple dans lesquelles la désignation d'un commissaire aux comptes n'est obligatoire qu'à partir de certains seuils. La loi a donc étendu cette exemption aux sociétés par actions simplifiées.
Je sais que cette réforme a suscité de fortes réticences parmi nombre d'entre vous. Mais je voudrais insister sur le fait que l'allègement de cette obligation a été strictement encadré par le législateur. Sont tout d'abord tenues de désigner un commissaire aux comptes, quelle que soit leur taille, les sociétés par actions simplifiées qui sont contrôlées ou qui contrôlent une autre société. Il s'agit là d'un garde fou essentiel. De plus, la nomination d'un commissaire aux comptes peut toujours être demandée en justice par un ou plusieurs associés représentant le dixième du capital.
Enfin, les seuils en-dessous desquels la dispense s'applique ont fait l'objet d'un important travail de concertation, avec votre Compagnie. Vincent, vous pouvez je crois en témoigner. Nous avons retenu des seuils modérés, à 20 salariés, 2 Meuros de chiffres d'affaires et 1 Meuros de bilan, soit des niveaux inférieurs à ceux prévalant pour la SARL.
3. Lien entre la dispense de certification des SAS et les chantiers communautaires :
Je voudrais faire le lien entre cette question des SAS et les chantiers en cours au niveau communautaire. Le sens de l'histoire va à la simplification et à l'allègement des charges administratives qui pèsent sur les petites et moyennes entreprises. Ce mouvement de fond n'est pas national mais européen.
En 2007, Nicolas Sarkozy a oeuvré pour que l'Union européenne se dote d'un Small Business Act. Pendant la présidence française de l'Union européenne, j'ai fait en sorte de transformer l'essai pour que le Small Business Act que nous a proposé la Commission européenne le 25 juin dernier se traduise en actes.
Le 1er décembre, les Ministres européens en charge des entreprises ont adopté un plan d'actions prioritaires au sein du SBA pour faire face à la crise financière et au ralentissement économique.
A côté du financement, la première priorité identifiée par le Conseil est la simplification. Nous avons un objectif commun de réduction des charges administrative de 25% à l'échéance 2012. Au-delà de cet objectif horizontal, il est nécessaire de changer d'attitude pour concevoir d'entrée de jeu des cadres juridiques qui rendent la vie plus facile pour les PME. Il s'agit de mettre en application le principe du « pensez petit d'abord » qui consiste à prendre en compte l'intérêt des PME dans toutes les législations de l'Union. Nous avons instauré un test PME : des études d'impact seront désormais conduites en amont pour chaque texte ayant des effets sur les PME.
A côté du « penser petit d'abord », il y a aussi le principe « une seule fois » par lesquels nous nous sommes engagés à ne pas demander plusieurs fois la même information à une PME et nous nous interdisons de les faire participer plus d'une fois tous les trois ans à une enquête statistique.
Vous le voyez, nous sommes dans une perspective communautaire de simplification, dont nous devons tenir compte. Pour autant, je vous le dis clairement aujourd'hui, je suis réservé, non pas sur le principe, mais sur le niveau des seuils envisagés actuellement par la Commission européenne en matière de simplification comptable. Simplification ne veut pas dire abandon de l'impératif de sécurité financière, a fortiori actuellement.
4. Norme d'expertise professionnelle TPE :
La loi de modernisation de l'économie a également prévu que les commissaires aux comptes exerceraient leur mission selon une norme d'exercice professionnel spécifique pour certaines sociétés. Cette norme d'exercice professionnel constituera une incitation, pour les associés qui le souhaitent, à recourir aux services d'un commissaire aux comptes. Avec la Chancellerie, nous avons décidé de fixer un seuil raisonnable, pour ne pas faire de ce dispositif une contrainte additionnelle pour les commissaires aux comptes. La norme d'expertise professionnelle s'appliquera dès lors que l'entreprise ne dépasse pas 2 des 3 seuils suivants : 1,55 Meuros de bilan, 3,1 Meuros de chiffres d'affaires, et 50 salariés. Ce sont, comme vous le savez, les seuils applicables aux SARL.
Je me permets d'insister sur cette innovation, car il s'agit à mes yeux d'une réelle opportunité pour votre profession, afin de lui permettre de mieux intégrer la spécificité des PME dans l'exercice de ses missions.
Je vous invite aujourd'hui à utiliser votre jugement professionnel pour élargir le champ de la norme d'exercice professionnel petite entreprise : nous avons fixé des seuils règlementaires, mais rien ne vous empêche d'aller plus loin, et je vous y invite. Même si cette norme est utilisée dans le cadre de seuils réglementaires, votre jugement professionnel doit pouvoir vous permettre d'en élargir tout ou partie des modes opératoires. Je crois même que vous le faites déjà.
Cette réforme de la norme d'expertise professionnelle permettra de moderniser l'environnement offert aux sociétés en simplifiant les obligations pesant sur elles, tout en respectant les impératifs liés à la sécurité financière. La simplification ne peut réussir qu'à cette condition.
Car la réforme de la certification des comptes ne signifie pas la remise en cause du rôle essentiel de la comptabilité dans la vie des entreprises. La comptabilité sert à répondre aux besoins d'information des entrepreneurs eux-mêmes et à ceux des tiers, qu'il s'agisse des financeurs externes comme les banques ou plus généralement de l'ensemble des créanciers. La comptabilité est essentielle à la bonne gestion des entreprises et à la sécurité des transactions.
Il n'y a pas d'économie prospère s'il n'y a pas de confiance. J'ai la conviction que la loi de modernisation de l'économie n'est pas un texte dirigé contre le commissariat aux comptes, il ne s'agit pas pour nous de faire moins de commissariat aux comptes mais "mieux" de commissariat aux comptes.
5. Un dernier mot sur la directive Services :
Comme vous le savez, j'ai lancé avec Christine LAGARDE le chantier de transposition de la directive services. Cette directive permettra aux professionnels du secteur des services de s'établir ou d'exercer sur l'ensemble du territoire de la Communauté européenne.
L'activité des commissaires aux comptes est encadrée au niveau communautaire par la directive sectorielle du 17 mai 2006 concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés. Les commissaires aux comptes bénéficient dès lors des dispositions de l'article 3 de la directive services, qui prévoient qu'en cas d'existence d'un autre acte communautaire régissant spécifiquement l'accès et l'exercice d'une profession, cet acte prévaut et continue donc à s'appliquer.
Les choses sont donc claires : vous ne serez pas impactés en tant que commissaires aux comptes par la directive Services. En revanche, cette transposition concerne la profession d'expertise comptable.
Comme le prévoit la directive, nous devons donc avec Eric Woerth évaluer les règles professionnelles qui s'appliquent aux experts comptables, en vérifiant dans quelle mesure elles sont proportionnées et répondent aux intérêts de vos clients. Par exemple, faut-il continuer à interdire à un expert-comptable de participer à la gérance ou au conseil d'administration de plus de quatre sociétés membres de l'Ordre, comme le prévoit l'article 7 de l'ordonnance de 1945 ? Faut-il faire évoluer le ratio minimal de présence d'un expert comptable pour dix salariés ? Faut-il faire évoluer les règles relatives aux détentions de capital dans vos sociétés ? Autant de questions pour lesquels le Gouvernement n'a pas de réponse préconçue : il me paraît essentiel de laisser un temps suffisant à la concertation, au cours des prochains mois, sur ces sujets que je sais être complexes. Le seul impératif est bien sûr la nécessité du respect des prescriptions de la directive.
Vous le voyez, je suis pleinement conscient du rôle essentiel joué par les Commissaires aux comptes dans l'accompagnement des TPE et PME. Et si je tiens à vous aider à jouer ce rôle de relais, c'est parce que je connais l'apport de votre compétence à la vitalité et à la pérennité de notre économie, et que je suis intimement persuadé que la qualité de l'accompagnement, que vous fournissez aux entreprises françaises est indispensable à leur développement.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.espacecac.com, le 31 décembre 2008
Mesdames et Messieurs,
C'est avec plaisir que j'ai répondu à l'invitation de votre Compagnie, pour débattre de l'évolution de votre profession de commissaire aux comptes.
Avant toute chose, permettez-moi de souligner le rôle économique essentiel que vous jouez, en tant que commissaires aux comptes, dans le soutien aux entreprises, et en particulier aux PME.
1. Le rôle essentiel des commissaires aux comptes dans l'économie, en particulier dans le contexte actuel.
Par leur action, les commissaires aux comptes contribuent au développement de la confiance entre les acteurs économiques. Cela vaut bien-sûr pour les grandes entreprises mais aussi et surtout pour les petites et moyennes entreprises, dont les professionnels du chiffre accompagnent le développement. En tant que chef d'une PME, pendant plus de vingt ans, j'ai pu mesurer l'utilité d'avoir à mes côtés un commissaire aux comptes.
Ce rôle économique du commissaire aux comptes est d'autant plus nécessaire dans la période de difficultés financières que nous traversons.
Dans cette période, votre mission de certification des comptes est plus que jamais utile pour maintenir la confiance entre les acteurs économiques. Je pense également à la procédure d'alerte, qui depuis 1984, impose au commissaire aux comptes d'alerter le dirigeant puis son Conseil, puis l'Assemblée Générale, puis le Président du Tribunal de commerce en cas de mise en cause de la continuité de l'exploitation.
Depuis 1984 cette procédure a été maintes fois remaniée, mais j'ai le sentiment qu'elle pourrait être plus fréquemment utilisée, comme outil de prévention des difficultés des entreprises. Pour moi, le commissaire aux comptes est un acteur à part entière en matière de prévention des difficultés des entreprises : je vous invite, dans les prochains mois, à jouer pleinement ce rôle de prévention auprès des PME.
Depuis la loi portant nouvelle régulation économique, le commissaire aux comptes est obligé de justifier de ses appréciations lorsqu'il émet un rapport. Je pense, Monsieur le Président, que le recours à ces appréciations pourrait être plus développé.
Enfin, le Gouvernement souhaite confier une mission particulière aux commissaires aux comptes dans la réforme des délais de paiement que nous mettons en oeuvre à partir du 1er janvier. La loi de modernisation de l'économie vous a en effet confié la mission de vérifier le respect des règles de délais de paiement à 60 jours. J'ai élaboré sur ce sujet un projet de décret en lien avec votre Compagnie, qui sera publié dans les prochaines semaines. Ce projet de décret précise les informations que devra contenir le rapport de gestion en matière de délais de paiement, pour toutes les entreprises soumises à commissariat aux comptes. Il vous appartiendra, à partir de début 2010, d'adresser un rapport au ministre chargé de l'économie si vous relevez, de façon répétée, des manquements graves et significatifs aux prescriptions du code de commerce. C'est là un élargissement de vos missions, un élargissement délicat d'ailleurs, qui sort d'une certaine manière de votre mission traditionnelle de certification. J'en suis conscient. Mais je suis aussi convaincu que vous saurez accomplir cette nouvelle mission, dans une optique d'accompagnement des entreprises plutôt que de pur contrôle.
En résumé, je sais que les Commissaires aux comptes joueront leur rôle dans le contexte actuel de difficultés financières, un rôle essentiel à la transparence de l'économie à la sécurité juridique et financière des entreprises.
Le Gouvernement a besoin de vous. Vous êtes des acteurs de la sécurité et de la confiance dans les investissements, dont nous avons plus que jamais besoin. Vous pourrez compter sur moi pour vous appuyer dans ce travail de proximité au service de l'économie française.
2. Le périmètre du Commissariat aux comptes pour les SAS :
Permettez-moi maintenant d'évoquer plus particulièrement la question du champ d'intervention du commissariat aux comptes, qui a donné lieu à de nombreux débats durant la discussion de la loi de modernisation de l'économie. Au cours des dernières années, le champ d'intervention des commissaires aux comptes a été étendu à certaines associations et aux établissements publics, car le commissariat aux comptes est indispensable lorsqu'un certain niveau de développement est atteint ou que des entités sont financées pour une part importante par des fonds publics.
Depuis 2007, nous avons étendu votre champ de compétences dans plusieurs domaines. Pour ne citer qu'un exemple, nous avons créé une mission de certification des comptes pour les fonds de dotation, structure juridique issue de la loi de modernisation de l'économie. Le recours au commissariat aux comptes est obligatoire dès lors que le montant total des ressources du fonds de dotation dépasse 10 000 euros. J'en profite pour remercier la Compagnie, qui nous a apporté une aide précieuse dans la rédaction des décrets d'application correspondants.
Pour autant, il nous faut aussi prendre en compte la nécessité de simplifier la vie des petites entreprises et de diminuer les coûts pesant sur elles. La loi de modernisation de l'économie a ainsi simplifié certaines règles de fonctionnement des entreprises. Elle a notamment réformé le commissariat aux comptes des sociétés par actions simplifiées en prévoyant que les plus petites SAS pourraient désormais être dispensées de l'obligation de désigner un commissaire aux comptes. Cette règle existait déjà pour d'autres structures sociétaires comme la société à responsabilité limitée, la société en nom collectif et la société en commandité simple dans lesquelles la désignation d'un commissaire aux comptes n'est obligatoire qu'à partir de certains seuils. La loi a donc étendu cette exemption aux sociétés par actions simplifiées.
Je sais que cette réforme a suscité de fortes réticences parmi nombre d'entre vous. Mais je voudrais insister sur le fait que l'allègement de cette obligation a été strictement encadré par le législateur. Sont tout d'abord tenues de désigner un commissaire aux comptes, quelle que soit leur taille, les sociétés par actions simplifiées qui sont contrôlées ou qui contrôlent une autre société. Il s'agit là d'un garde fou essentiel. De plus, la nomination d'un commissaire aux comptes peut toujours être demandée en justice par un ou plusieurs associés représentant le dixième du capital.
Enfin, les seuils en-dessous desquels la dispense s'applique ont fait l'objet d'un important travail de concertation, avec votre Compagnie. Vincent, vous pouvez je crois en témoigner. Nous avons retenu des seuils modérés, à 20 salariés, 2 Meuros de chiffres d'affaires et 1 Meuros de bilan, soit des niveaux inférieurs à ceux prévalant pour la SARL.
3. Lien entre la dispense de certification des SAS et les chantiers communautaires :
Je voudrais faire le lien entre cette question des SAS et les chantiers en cours au niveau communautaire. Le sens de l'histoire va à la simplification et à l'allègement des charges administratives qui pèsent sur les petites et moyennes entreprises. Ce mouvement de fond n'est pas national mais européen.
En 2007, Nicolas Sarkozy a oeuvré pour que l'Union européenne se dote d'un Small Business Act. Pendant la présidence française de l'Union européenne, j'ai fait en sorte de transformer l'essai pour que le Small Business Act que nous a proposé la Commission européenne le 25 juin dernier se traduise en actes.
Le 1er décembre, les Ministres européens en charge des entreprises ont adopté un plan d'actions prioritaires au sein du SBA pour faire face à la crise financière et au ralentissement économique.
A côté du financement, la première priorité identifiée par le Conseil est la simplification. Nous avons un objectif commun de réduction des charges administrative de 25% à l'échéance 2012. Au-delà de cet objectif horizontal, il est nécessaire de changer d'attitude pour concevoir d'entrée de jeu des cadres juridiques qui rendent la vie plus facile pour les PME. Il s'agit de mettre en application le principe du « pensez petit d'abord » qui consiste à prendre en compte l'intérêt des PME dans toutes les législations de l'Union. Nous avons instauré un test PME : des études d'impact seront désormais conduites en amont pour chaque texte ayant des effets sur les PME.
A côté du « penser petit d'abord », il y a aussi le principe « une seule fois » par lesquels nous nous sommes engagés à ne pas demander plusieurs fois la même information à une PME et nous nous interdisons de les faire participer plus d'une fois tous les trois ans à une enquête statistique.
Vous le voyez, nous sommes dans une perspective communautaire de simplification, dont nous devons tenir compte. Pour autant, je vous le dis clairement aujourd'hui, je suis réservé, non pas sur le principe, mais sur le niveau des seuils envisagés actuellement par la Commission européenne en matière de simplification comptable. Simplification ne veut pas dire abandon de l'impératif de sécurité financière, a fortiori actuellement.
4. Norme d'expertise professionnelle TPE :
La loi de modernisation de l'économie a également prévu que les commissaires aux comptes exerceraient leur mission selon une norme d'exercice professionnel spécifique pour certaines sociétés. Cette norme d'exercice professionnel constituera une incitation, pour les associés qui le souhaitent, à recourir aux services d'un commissaire aux comptes. Avec la Chancellerie, nous avons décidé de fixer un seuil raisonnable, pour ne pas faire de ce dispositif une contrainte additionnelle pour les commissaires aux comptes. La norme d'expertise professionnelle s'appliquera dès lors que l'entreprise ne dépasse pas 2 des 3 seuils suivants : 1,55 Meuros de bilan, 3,1 Meuros de chiffres d'affaires, et 50 salariés. Ce sont, comme vous le savez, les seuils applicables aux SARL.
Je me permets d'insister sur cette innovation, car il s'agit à mes yeux d'une réelle opportunité pour votre profession, afin de lui permettre de mieux intégrer la spécificité des PME dans l'exercice de ses missions.
Je vous invite aujourd'hui à utiliser votre jugement professionnel pour élargir le champ de la norme d'exercice professionnel petite entreprise : nous avons fixé des seuils règlementaires, mais rien ne vous empêche d'aller plus loin, et je vous y invite. Même si cette norme est utilisée dans le cadre de seuils réglementaires, votre jugement professionnel doit pouvoir vous permettre d'en élargir tout ou partie des modes opératoires. Je crois même que vous le faites déjà.
Cette réforme de la norme d'expertise professionnelle permettra de moderniser l'environnement offert aux sociétés en simplifiant les obligations pesant sur elles, tout en respectant les impératifs liés à la sécurité financière. La simplification ne peut réussir qu'à cette condition.
Car la réforme de la certification des comptes ne signifie pas la remise en cause du rôle essentiel de la comptabilité dans la vie des entreprises. La comptabilité sert à répondre aux besoins d'information des entrepreneurs eux-mêmes et à ceux des tiers, qu'il s'agisse des financeurs externes comme les banques ou plus généralement de l'ensemble des créanciers. La comptabilité est essentielle à la bonne gestion des entreprises et à la sécurité des transactions.
Il n'y a pas d'économie prospère s'il n'y a pas de confiance. J'ai la conviction que la loi de modernisation de l'économie n'est pas un texte dirigé contre le commissariat aux comptes, il ne s'agit pas pour nous de faire moins de commissariat aux comptes mais "mieux" de commissariat aux comptes.
5. Un dernier mot sur la directive Services :
Comme vous le savez, j'ai lancé avec Christine LAGARDE le chantier de transposition de la directive services. Cette directive permettra aux professionnels du secteur des services de s'établir ou d'exercer sur l'ensemble du territoire de la Communauté européenne.
L'activité des commissaires aux comptes est encadrée au niveau communautaire par la directive sectorielle du 17 mai 2006 concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés. Les commissaires aux comptes bénéficient dès lors des dispositions de l'article 3 de la directive services, qui prévoient qu'en cas d'existence d'un autre acte communautaire régissant spécifiquement l'accès et l'exercice d'une profession, cet acte prévaut et continue donc à s'appliquer.
Les choses sont donc claires : vous ne serez pas impactés en tant que commissaires aux comptes par la directive Services. En revanche, cette transposition concerne la profession d'expertise comptable.
Comme le prévoit la directive, nous devons donc avec Eric Woerth évaluer les règles professionnelles qui s'appliquent aux experts comptables, en vérifiant dans quelle mesure elles sont proportionnées et répondent aux intérêts de vos clients. Par exemple, faut-il continuer à interdire à un expert-comptable de participer à la gérance ou au conseil d'administration de plus de quatre sociétés membres de l'Ordre, comme le prévoit l'article 7 de l'ordonnance de 1945 ? Faut-il faire évoluer le ratio minimal de présence d'un expert comptable pour dix salariés ? Faut-il faire évoluer les règles relatives aux détentions de capital dans vos sociétés ? Autant de questions pour lesquels le Gouvernement n'a pas de réponse préconçue : il me paraît essentiel de laisser un temps suffisant à la concertation, au cours des prochains mois, sur ces sujets que je sais être complexes. Le seul impératif est bien sûr la nécessité du respect des prescriptions de la directive.
Vous le voyez, je suis pleinement conscient du rôle essentiel joué par les Commissaires aux comptes dans l'accompagnement des TPE et PME. Et si je tiens à vous aider à jouer ce rôle de relais, c'est parce que je connais l'apport de votre compétence à la vitalité et à la pérennité de notre économie, et que je suis intimement persuadé que la qualité de l'accompagnement, que vous fournissez aux entreprises françaises est indispensable à leur développement.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.espacecac.com, le 31 décembre 2008