Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Voici donc venu le temps du Parlement. Le temps pour le Parlement dapprécier le diagnostic du Grenelle de lEnvironnement, de fixer le cadre, les objectifs, le calendrier et les moyens de parvenir et daccompagner une mutation sans précédent par son ampleur et par sa vitesse de notre économie, de notre modèle énergétique, de nos modes de consommation et de production, et de notre société. Temps du Parlement qui nest évidemment pas un collège de plus du Grenelle de lEnvironnement même sil a été associé tout au long du processus dans les groupes de travail, dans les comités opérationnels, dans les groupes de suivi parlementaires, dans les commissions, mais bien le dépositaire ultime de ces conclusions, celui qui fixe de façon définitive et irrémédiable, le cap et la stratégie de la Nation, de chacun de ses acteurs, à un moment clef de lhistoire de notre pays, de lEurope et du Monde. Permettez-moi dabord de remercier et dexprimer ma gratitude aux membres de la Commission des Affaires économiques, à son Président Patrick OLLIER, à son rapporteur, Christian JACOB, pour tout le travail accompli ces dernières semaines. Jassocie également à ces remerciements le député Eric DIARD, rapporteur pour avis de la Commission des lois pour la qualité de ses propositions.
Pourquoi un Grenelle de lEnvironnement, et qua-t-il été au fond ? Le Grenelle est né dun événement, dune volonté politique, dun constat et dune conviction.
Lévénement est indiscutablement le Pacte écologique porté par Nicolas HULOT pendant la campagne présidentielle, qui a cristallisé un long processus réunissant de nombreux acteurs depuis de nombreuses années, scientifiques et associatifs dépassant tous les clivages politiques.
La volonté politique, cest celle du Président de la République, déterminé à prendre à bras le corps cette révolution incontournable, volonté qui sest traduite par deux décisions :
- La première cest la création dun Ministère organisant les décisions en matière de transport, dénergie, durbanisme, de biodiversité, des mers et des océans, des infrastructures, de lécologie de façon non contradictoire et parfaitement intégrée afin de modifier en profondeur laction publique et mettre le développement durable au coeur de toute action.
- La deuxième cest la nécessité de faire un diagnostic, une radiographie en profondeur de notre société, de nos modes de production et de consommation, de nos pratiques, de nos processus de décision, de nos modes de construction, des villes, des bureaux et des logements, de nos modes de transport, de nos modes de production agricole.
Une conviction enfin, celle que nous entrons dans un nouveau monde. Nous avons vécu un siècle et demi dans lillusion de la profusion des ressources naturelles et des matières premières, de leau, des forêts, dun climat stable, dun air sans CO2, dune biodiversité infinie, sans cesse renouvelée, de terres fertiles et agricoles, permettant une urbanisation sans fin. Oui, nous avons vécu dans une forme daveuglement, sans réaliser que tous nous actes de production et de consommation nécessitaient de prélever sur les fruits de la nature plus que celle-ci ne pouvait reconstituer. Et pourtant, bien sûr, tour à tour et sur des sujets différents, daucuns sinquiétaient, lançaient des cris dalarme.
Le GIEC sur le climat alors quon sait aujourdhui, que la situation est plus grave que son scénario le plus pessimiste. Dautres, scientifiques tels Hubert REEVES, passionnés tels Jean-Louis ETIENNE, figures du monde associatif ont alerté sur la fonte des glaces au pôle du Nord et sur le réchauffement des mers. Dautres encore, comme FNE, la LPO, Greenpeace, WWF, ont alerté sur la biodiversité alors même quune espèce vivante sur huit est menacée de disparition. Dautres encore ont alerté sur lassèchement du lac TCHAD, de la mer Morte, du lac Baïkal, sur la déforestation accélérée en Afrique. Dautres ont alerté sur laprès pétrole, sur ses conséquences économiques et sociales dans une société fondée sur les ressources fossiles, permettant la multiplication par quatorze des besoins énergétiques depuis 50 ans. Dautres ont alerté sur limpossibilité pour les grands pays émergents de fonder leur croissance sur le même modèle que le nôtre et sur lobligation pour les pays industriels de montrer lexemple. Dautres aussi et parfois les mêmes ont alerté sur la crise alimentaire, sur les ressources en eau, ou encore sur létalement urbain. Dautres enfin ont alerté sur la production de déchets qui sont en train de provoquer lémergence dun 7ème continent dans le Pacifique. Dautres ont décrit les nouvelles migrations climatiques, les émeutes de la faim, létat des fleuves et des rivières, partout dans le monde, y compris en France.
Et dans le même temps, dautres niaient lévidence, opposaient lécologie à léconomie, le progrès social ou la puissance industrielle avec cette mutation nécessaire. Le débat était mal posé provoquant des affrontements réducteurs et faciles et au fond de cela, en réalité, un certain découragement sur le mode opératoire. Il était plus facile dêtre dans le déni ou dans le mépris de lautre, de lancer des anathèmes plutôt que délaborer avec tous les acteurs de la société un diagnostic à la fois réel, sincère et sans concession afin de trouver les moyens acceptables, partagés par tous, dassumer cette transition.
Le Grenelle cest dabord ça : une radiographie en profondeur de notre société, de nos modes de production et de consommation, de notre organisation territoriale, de nos modes de gouvernance, de nos objectifs et des moyens réalistes dy parvenir.
Et puis le Grenelle cest une conviction sur une méthode : aucun corps social na seul la capacité de faire ce diagnostic et encore moins, aussi puissant soit-il dimposer aux autres corps de la société, les solutions résultant de ce diagnostic.
Alors, oui, le Grenelle, a dabord été la plus grande opération de radiographie collective et démocratique jamais faite par un pays occidental, commençant par un travail de diagnostic très en profondeur, réunissant des scientifiques, des économistes, des biologistes, des syndicalistes, des politiques, des acteurs engagés dans plusieurs milliers dheures de discussions approfondies. Puis, un débat plus large : 14 000 contributions sur Internet, 300 000 internautes intervenants sur le forum du Grenelle, 15 000 participants à 19 réunions régionales pour aller au-delà des slogans, au-delà des raccourcis, au-delà des anathèmes, au-delà des réponses faciles.
Permettez-moi dailleurs de rendre hommage, à ces centaines dexperts et de spécialistes, qui dans des groupes de travail, dans lanonymat le plus total, pour lintérêt supérieur de notre pays et probablement de bien plus encore, nont ni compté leur peine, leurs échanges, faisant parfois évoluer leur point de vue pour rentrer à fond et au fond de ce débat, de ce diagnostic et pour dégager des pistes de solutions. La synthèse de ces travaux a ensuite fait lobjet dune table ronde finale réunissant les entreprises françaises, les syndicats, les collectivités territoriales, les ONG et lEtat. Ce fut le compromis du possible, validé pour lessentiel par le Président de la République en présence de deux Prix Nobel de la Paix et du Président de la Commission européenne BARROSO. Compromis du possible où chacun était convaincu que le corps social quil représentait devait simpliquer, devait accepter les compromis qui permettaient aux autres davancer au même rythme que lui.
Ce Grenelle, cest la conviction dune méthode, selon laquelle la mutation est tellement vaste et touche tellement de sujets de la société en même temps, quelle ne peut se faire que par la mise en mouvement de tous les acteurs.
Alors ce projet de loi est pour lessentiel la reprise des conclusions du Grenelle Environnement, de ses propositions, de ses financements et de son calendrier, sous forme législative.
Ne vous laissez pas abuser par ceux qui ny ont pas directement participé, ou par ceux qui ayant participé ne se souviennent que de leurs suggestions initiales et non pas de laccord final. Ce travail de complexité a été fait puis prolongé et approfondi au sein de 33 comités opérationnels qui ont rassemblé plus de 1200 personnes, élus, professionnels, syndicalistes, salariés, entreprises dans lobjectif de dénouer tous les pièges opératoires, délaborer tous les processus opérationnels pour rendre le Grenelle techniquement réaliste, techniquement crédible, bref, techniquement possible. Aujourdhui, ce travail gigantesque de la Nation toute entière revient devant le Parlement qui va devoir maintenant trancher, et donner au pays un cap clair, une feuille de route précise, avec des objectifs chiffrés, un calendrier et les moyens dy parvenir.
Et ce nest pas un hasard si dans le sondage SOFRES du 2 et 3 octobre 2008, 88% des Français considèrent que la méthodologie du Grenelle, ce mode de concertation, de rapprochement des points de vue, dacceptation et de gestion des contradictions, est non seulement approuvé mais également souhaité pour dautres chantiers économiques et sociaux. Alors bien sûr que tout ceci est complexe car on voit que léconomie et la technique seules ne suffiront pas à résoudre cette équation à plusieurs inconnues sans un travail essentiel sur les causes. Complexe parce que cette feuille de route doit réconcilier tous les acteurs de la société autour dun projet commun, une société sobre en carbone, une société respectueuse de la nature et des fruits de la nature, une société réconciliant enfin le progrès et lavenir. Complexe aussi parce quil sagit datteindre la plus haute ambition possible en faisant progresser tous les acteurs en même temps. Complexe parce quon voit quon se situe bien au-delà dun champ de compétence unique, bien au-delà de la seule sphère publique ou dun ministère de la spécialité. Complexe enfin parce que cette mutation est tellement vaste quelle sinscrit dans des échelles de temps incroyablement différentes.
Mais derrière ce diagnostic sans concession et parfois franchement alarmiste, il y a eu une conviction unanime, celle que nous pouvions changer radicalement la donne et répondre à cette urgence écologique. Et derrière ce constat du Grenelle, est apparue la possibilité dune autre croissance, celle de lefficacité, de la sobriété, de lautonomie énergétique, celle de lindépendance par rapport à des cours mondiaux quon ne maîtrise pas, celle de lindépendance par rapport à des rentes de situation énergétiques et financières qui sont responsables dune partie des déséquilibres actuels, Oui, je crois quil y a un accord unanime de tous les acteurs du Grenelle, quelque soit le corps social quils représentaient pour approuver les propos de Nicolas HULOT disant : « que la crise écologique constituait un horizon dépassable de lHumanité ; quelle constituait aujourdhui le centre de gravité de nos sociétés, loccasion unique de réussir ce sur quoi nos sociétés ont peiné et échoué jusquici, à savoir la combinaison de lefficacité économique, de la solidarité sociale et de la vie démocratique ».
Cette feuille de route qui vous est proposée est à la fois un mode de gestion de la rareté inéluctable de certaines ressources mais aussi de la recherche de nouvelles formes dabondance, parce que la force des marées est abondante, parce que le vent est abondant, parce que le soleil est abondant. Cette feuille de route doit permettre à notre société de faire un saut qualitatif ; au fond, la croissance verte ou sélective, est le chemin le plus court et le plus sûr vers une société de qualité : qualité de vie, qualité de lair, qualité de lair, qualité de lalimentation, des biens et des services. Permettez-moi de dire que la crise financière que nous connaissons aujourdhui, au-delà de son caractère conjoncturel, implique inéluctablement que le monde se tourne vers cette nouvelle croissance.
Il y a unanimité aussi pour penser que lenjeu écologique est un facteur clef de la compétitivité de nos entreprises, parce quune économie qui consomme globalement moins dénergie est nécessairement une économie qui dépense moins dargent ; parce que les relais de croissance de demain, ils sont là, dans le bâtiment, dans les ENR qui représenteront près de 16% de lemploi dans dix ans, dans le traitement de leau ou des déchets ; parce que les produits les plus compétitifs ou les plus demandés par les consommateurs seront les produits les plus sobres en carbone et en énergie. Ne nous trompons pas, le marché ira plus vite que nous et nous devons accompagner nos entreprises : déjà, dans lautomobile, la compétition ne porte plus sur le design ou sur la puissance des moteurs, mais sur la sobriété en carburant ; parce que le monde entier est sur ce combat là, la Chine, lInde, le Canada, les Etats-Unis
Et puis enfin, nous sommes tous engagés dans le même projet de société, un projet du respect de lautre, un projet où le libre échange laisse la place au juste échange, un projet où la certitude de la rareté laisse la place à la possibilité de labondance, un projet où chaque territoire, chaque région et chaque continent bénéfice dune chance réelle et loyale de développement.
? A partir de là, il y a le Grenelle visible, celui qui a déjà commencé, et les premières décisions prises.
Cest larrêt du projet dorpaillage de la Montagne de KAW, le 31 janvier 2008, pour protéger ce sanctuaire avec au fond, cette idée forte dans sa simplicité, que la France devait assumer pleinement et sereinement, sa responsabilité universelle de laboratoire du vivant dans toutes ses collectivités dOutre-mer.
Cest le basculement progressif et volontaire de secteurs entiers de notre économie dans le développement durable.
- Lindustrie aéronautique qui décide de réduire de 50% ses émissions de CO2, de 50% le bruit perçu et de 80% ses émissions de NoX.
- La grande distribution qui sengage à augmenter la part du bio de 15% dans ses rayons et de réduire de 10% le volume des emballages.
- Les professionnels de la publicité qui élaborent, en étroite concertation avec les ONG, de nouvelles règles de déontologie.
- Les professionnels de limmobilier qui choisissent de généraliser laffichage du diagnostic de performance énergétique des logements.
Cest la loi sur la responsabilité environnementale du 22 juillet 2008 qui pour la première fois, reconnaît lexistence dun préjudice écologique totalement déconnecté du préjudice économique ; qui pour la première fois depuis la catastrophe de lERIKA fait dire à notre droit « oui, la biodiversité a un prix », « oui, elle rend des services à la collectivité ».
Cest lexpérimentation du bonus écologique sur les voitures avec un déplacement massif, de près de 40%, du marché vers les véhicules les plus propres et les plus faiblement émetteurs. Bonus écologique qui a permis de réduire de 9g en 9 mois les émissions moyennes des véhicules alors que le rythme était plutôt de 1g tous les ans. Nous allons donc désormais dix fois plus vite. Et les constructeurs français sont déjà en train de concevoir de nouveaux modèles, en avance sur le calendrier parce quon sent bien que le marché a totalement changé de physionomie.
Cest la circulaire du Premier ministre sur lEtat exemplaire
Mais le Grenelle visible cest surtout ce texte fondateur, ce cap, ce changement radical de stratégie qui vous est proposé dans les transports, dans lénergie, dans laménagement urbain, dans la construction, dans lagriculture : la division par quatre de nos émissions de CO2 entre 1990 et 2050, la réduction de 38% de la consommation énergétique dans le bâti existant, la baisse de 20% des émissions de CO2 dans les transports à lhorizon 2020, les 23% dENR dans le bouquet énergétique en 2020, 2% du territoire placé sous protection forte dici 10 ans, le bon état écologique des eaux à lhorizon 2015, 6% de la SAU en bio en 2013 et 20% en 2020, les 50% dexploitations engagées dans une démarche environnementale en 2012, la trame verte et bleue
Alors, bien sûr, on trouvera toujours des commentateurs pour dire quon ne va pas assez vite, quon ne va pas assez loin sur tel ou tel sujet ou sur tel ou tel chantier. Et puis, inversement, on trouvera toujours des gens pour dire quau contraire, on va beaucoup trop vite, beaucoup trop loin et beaucoup trop fort.
Ces interrogations ou ces inquiétudes ne doivent pas nous détourner de nos objectifs. Ce changement de stratégie, lourd, irréversible, que je vous propose aujourdhui, se traduit de façon visible dans six grands chantiers :
- Le chantier thermique, la rénovation lourde des 4,2 millions de logement sociaux en commençant par les 800 000 les plus dégradés, des investissements annuels moyens de 16 milliards deuros représentant près de 235 000 emplois dici 2020. Cest à terme, 20 milliards deuros de travaux réalisés grâce à léco-prêt à taux zéro, pour un coût total pour lEtat en rythme de croisière denviron 1 milliard, soit un rapport de 1 à 20. Cest le crédit dimpôt développement durable qui représente une enveloppe d1,5 milliards deuros par an destinée aux travaux de rénovation thermique. Cest lamélioration des dispositifs TEPA et PTZ dans le cas où un ménage décide dacquérir un logement très performant sur le plan énergétique.
- Cest le chantier transport, la construction de 2000 km de lignes à grande vitesse supplémentaire, de 1500 kilomètres de lignes de transports collectifs dans nos villes avec un concours de lEtat de 2,5 milliards deuros sur une première tranche de 14 milliards, ce sont les autoroutes ferroviaires, les autoroutes maritimes pour un investissement total de 100 milliards deuros dici 2020 et la création de près de 80 000 emplois.
- Cest le chantier énergétique, la décision de porter la part dENR à 23% de notre consommation dénergie à lhorizon 2020, ce sont des investissements considérables et près de 220 000 emplois dici 2020. La prochaine programmation pluri annuelle des investissements qui vous sera proposée en sera la confirmation.
- Bref, les chantiers du Grenelle, représentent à terme plus de 400 milliards deuros dinvestissements injectés dans notre appareil de production industrielle dici 2020, 15 milliards deuros de valeur ajoutée en moyenne par an, soit 0,8 point de croissance et 500 000 emplois à terme.
Jentends déjà ceux qui disent que ça coûte trop cher ou quon na pas les moyens. A ceux qui disent « ça coûte trop cher », je dis « non », car lessentiel du processus est fondé sur des économies, des économies dénergie, des économies de mobilité individuelle, des économies dintrants et cest par ces économies que nous financerons les nouvelles infrastructures, les travaux de rénovation thermiques grâce à un effet de levier massif. Parce que bien souvent, il sagit dengager des investissements rentables à la fois pour lavenir et immédiatement, ou de substituer des investissements vertueux à des investissements non vertueux.
Et à ceux qui disent « vous navez pas les moyens », je réponds « faux ». Lensemble des infrastructures et des moyens sont dans la loi de programmation et 13 des 24 mesures de la loi de finances initiales concernent directement des sujets Grenelle : léco-prêt à taux zéro, lextension du crédit dimpôt développement durable, le verdissement de tous les dispositifs daccession à la propriété, lexonération facultative de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des modes de production biologiques, laugmentation du crédit dimpôt en faveur de lagriculture biologique, linstauration de la taxe poids lourds, la majoration du taux damortissement dégressif pour certains matériels des entreprises de première transformation du bois, le relèvement de la taxation sur les pesticides, laménagement de la taxe générale sur les activités polluantes
Ainsi, avec le Grenelle 1 qui pose précisément les objectifs, les principes, les obligations, les normes, les programmes dinfrastructures, et la LFI pour 2009, nous avons un Grenelle complet, compact, déjà opérationnel. Il ne nous restera plus alors quà opérer aux derniers ajustements techniques ou juridiques dans notre droit. Cest tout lobjet du projet de loi de transition environnementale, qui est un texte dajustements, de finalisation, pour adapter notre législation en matière durbanisme par exemple sur certains points très techniques. Il sera transmis au Conseil dEtat dans les jours qui viennent après avoir fait lobjet, lui aussi, dune intense coproduction sociale et législative. Mais après ce débat sur le Grenelle 1 et après le débat sur la LFI, nous aurons lessentiel du Grenelle déjà en application.
Et puis, à côté de ce Grenelle visible, il y a le Grenelle invisible, c'est-à-dire toutes les conséquences induites par ce processus, par le débat au Parlement que vous allez mener, sur le comportement des Français. Oui, létiquetage carbone expérimenté dans plusieurs grandes surfaces a déjà des effets sur le comportement des consommateurs. Oui, le bonus écologique a modifié en profondeur les critères de choix des consommateurs. Oui, les campagnes de sensibilisation sur les déchets et sur le recyclage ont déjà des effets perceptibles sur les ventes de produits. Oui, le Grenelle a déjà modifié le regard que chacun porte sur les conséquences collectives de ses actes. Cest dans le sondage SOFRES du 2 et 3 octobre, 73% des Français qui pensent que le Grenelle a permis au pays de prendre conscience des problèmes environnementaux. Cest 66% des sondés qui sont convaincus que le Grenelle a incité les Français à faire des efforts dans leur vie quotidienne. Cest 61% des Français qui pensent que le Grenelle a permis dinciter les élus locaux à tenir compte des problèmes environnementaux dans la gestion de leurs collectivités. Ou encore 58% des Français qui pensent que le Grenelle a incité les entreprises à agir en faveur de lenvironnement. Ou enfin, 61% des Français qui ont le sentiment que le Grenelle a permis de promouvoir un nouveau modèle de développement économique respectueux de lenvironnement.
Et cest pour cette raison que le débat daujourdhui au Parlement doit se situer à la bonne hauteur parce que cest le Parlement qui confirmera de façon claire et irréversible, le message adressé à la Nation. Oui votre responsabilité est de vous tenir à ce qui est difficile, à la recherche de cette croissance davenir, gage de notre cohésion Sociale et de la place de la France dans le monde.
?Cest donc ce message adressé par le Parlement à la Nation à un moment crucial de lhistoire de lHumanité. Le long chemin engagé depuis Kyoto na pas toujours eu les effets attendus en termes de réduction démissions de CO2 et de sobriété en carbone. Ainsi, le monde se retrouve à son propre chevet, pour construire laprès Kyoto lors de deux rendez-vous de la dernière chance, à Poznan et à Copenhague.
Le Parlement adresse ce message à la Nation au moment où la France pilote les négociations sur le Paquet Energie Climat, négociations qui portent en elles la réussite ou léchec des négociations planétaires à venir. Parce que dans un an, à Poznan et à Copenhague, il faut que les 450 millions deuropéens puissent dire au reste du monde, quen dépit dhistoires industrielles différentes, en dépit de modes de développement différents, en dépit de conditions climatiques et géologiques différentes, nous avons réussi à nous mettre daccord sur des objectifs communs, sur un calendrier, sur un mode opératoire A Copenhague, chacun doit savoir que lautre est déjà engagé. Derrière le Président de la République, nous ne ménageons pas nos efforts pour réussir à faire adopter le « fameux paquet-climat énergie » à Bruxelles et pour convaincre lAfrique, lOcéanie, lAmérique du Sud que ce processus est la seule voie possible du développement.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Le Grenelle est un processus solide : solide parce que responsable. Solide parce que financé et techniquement possible. Solide parce que concerté. Solide parce que tous les acteurs ont donné leur accord sur lessentiel. Solide enfin parce que sûr de son message davenir. Ce message, cest à vous désormais de ladresser à notre pays, et par extension à lEurope et au reste du monde. Bref, cest à vous quil revient dengager la France, de façon à la fois responsable et irréversible, sur ce nouveau chemin de croissance, à la fois porteur dunité, de progrès et de paix car comme le disait Victor HUGO, « le progrès nest rien dautre que la révolution faite à lamiable ».
Alors engageons nous, aujourdhui, résolument. Je vous remercie.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 9 octobre 2008
Mesdames et Messieurs les Députés,
Voici donc venu le temps du Parlement. Le temps pour le Parlement dapprécier le diagnostic du Grenelle de lEnvironnement, de fixer le cadre, les objectifs, le calendrier et les moyens de parvenir et daccompagner une mutation sans précédent par son ampleur et par sa vitesse de notre économie, de notre modèle énergétique, de nos modes de consommation et de production, et de notre société. Temps du Parlement qui nest évidemment pas un collège de plus du Grenelle de lEnvironnement même sil a été associé tout au long du processus dans les groupes de travail, dans les comités opérationnels, dans les groupes de suivi parlementaires, dans les commissions, mais bien le dépositaire ultime de ces conclusions, celui qui fixe de façon définitive et irrémédiable, le cap et la stratégie de la Nation, de chacun de ses acteurs, à un moment clef de lhistoire de notre pays, de lEurope et du Monde. Permettez-moi dabord de remercier et dexprimer ma gratitude aux membres de la Commission des Affaires économiques, à son Président Patrick OLLIER, à son rapporteur, Christian JACOB, pour tout le travail accompli ces dernières semaines. Jassocie également à ces remerciements le député Eric DIARD, rapporteur pour avis de la Commission des lois pour la qualité de ses propositions.
Pourquoi un Grenelle de lEnvironnement, et qua-t-il été au fond ? Le Grenelle est né dun événement, dune volonté politique, dun constat et dune conviction.
Lévénement est indiscutablement le Pacte écologique porté par Nicolas HULOT pendant la campagne présidentielle, qui a cristallisé un long processus réunissant de nombreux acteurs depuis de nombreuses années, scientifiques et associatifs dépassant tous les clivages politiques.
La volonté politique, cest celle du Président de la République, déterminé à prendre à bras le corps cette révolution incontournable, volonté qui sest traduite par deux décisions :
- La première cest la création dun Ministère organisant les décisions en matière de transport, dénergie, durbanisme, de biodiversité, des mers et des océans, des infrastructures, de lécologie de façon non contradictoire et parfaitement intégrée afin de modifier en profondeur laction publique et mettre le développement durable au coeur de toute action.
- La deuxième cest la nécessité de faire un diagnostic, une radiographie en profondeur de notre société, de nos modes de production et de consommation, de nos pratiques, de nos processus de décision, de nos modes de construction, des villes, des bureaux et des logements, de nos modes de transport, de nos modes de production agricole.
Une conviction enfin, celle que nous entrons dans un nouveau monde. Nous avons vécu un siècle et demi dans lillusion de la profusion des ressources naturelles et des matières premières, de leau, des forêts, dun climat stable, dun air sans CO2, dune biodiversité infinie, sans cesse renouvelée, de terres fertiles et agricoles, permettant une urbanisation sans fin. Oui, nous avons vécu dans une forme daveuglement, sans réaliser que tous nous actes de production et de consommation nécessitaient de prélever sur les fruits de la nature plus que celle-ci ne pouvait reconstituer. Et pourtant, bien sûr, tour à tour et sur des sujets différents, daucuns sinquiétaient, lançaient des cris dalarme.
Le GIEC sur le climat alors quon sait aujourdhui, que la situation est plus grave que son scénario le plus pessimiste. Dautres, scientifiques tels Hubert REEVES, passionnés tels Jean-Louis ETIENNE, figures du monde associatif ont alerté sur la fonte des glaces au pôle du Nord et sur le réchauffement des mers. Dautres encore, comme FNE, la LPO, Greenpeace, WWF, ont alerté sur la biodiversité alors même quune espèce vivante sur huit est menacée de disparition. Dautres encore ont alerté sur lassèchement du lac TCHAD, de la mer Morte, du lac Baïkal, sur la déforestation accélérée en Afrique. Dautres ont alerté sur laprès pétrole, sur ses conséquences économiques et sociales dans une société fondée sur les ressources fossiles, permettant la multiplication par quatorze des besoins énergétiques depuis 50 ans. Dautres ont alerté sur limpossibilité pour les grands pays émergents de fonder leur croissance sur le même modèle que le nôtre et sur lobligation pour les pays industriels de montrer lexemple. Dautres aussi et parfois les mêmes ont alerté sur la crise alimentaire, sur les ressources en eau, ou encore sur létalement urbain. Dautres enfin ont alerté sur la production de déchets qui sont en train de provoquer lémergence dun 7ème continent dans le Pacifique. Dautres ont décrit les nouvelles migrations climatiques, les émeutes de la faim, létat des fleuves et des rivières, partout dans le monde, y compris en France.
Et dans le même temps, dautres niaient lévidence, opposaient lécologie à léconomie, le progrès social ou la puissance industrielle avec cette mutation nécessaire. Le débat était mal posé provoquant des affrontements réducteurs et faciles et au fond de cela, en réalité, un certain découragement sur le mode opératoire. Il était plus facile dêtre dans le déni ou dans le mépris de lautre, de lancer des anathèmes plutôt que délaborer avec tous les acteurs de la société un diagnostic à la fois réel, sincère et sans concession afin de trouver les moyens acceptables, partagés par tous, dassumer cette transition.
Le Grenelle cest dabord ça : une radiographie en profondeur de notre société, de nos modes de production et de consommation, de notre organisation territoriale, de nos modes de gouvernance, de nos objectifs et des moyens réalistes dy parvenir.
Et puis le Grenelle cest une conviction sur une méthode : aucun corps social na seul la capacité de faire ce diagnostic et encore moins, aussi puissant soit-il dimposer aux autres corps de la société, les solutions résultant de ce diagnostic.
Alors, oui, le Grenelle, a dabord été la plus grande opération de radiographie collective et démocratique jamais faite par un pays occidental, commençant par un travail de diagnostic très en profondeur, réunissant des scientifiques, des économistes, des biologistes, des syndicalistes, des politiques, des acteurs engagés dans plusieurs milliers dheures de discussions approfondies. Puis, un débat plus large : 14 000 contributions sur Internet, 300 000 internautes intervenants sur le forum du Grenelle, 15 000 participants à 19 réunions régionales pour aller au-delà des slogans, au-delà des raccourcis, au-delà des anathèmes, au-delà des réponses faciles.
Permettez-moi dailleurs de rendre hommage, à ces centaines dexperts et de spécialistes, qui dans des groupes de travail, dans lanonymat le plus total, pour lintérêt supérieur de notre pays et probablement de bien plus encore, nont ni compté leur peine, leurs échanges, faisant parfois évoluer leur point de vue pour rentrer à fond et au fond de ce débat, de ce diagnostic et pour dégager des pistes de solutions. La synthèse de ces travaux a ensuite fait lobjet dune table ronde finale réunissant les entreprises françaises, les syndicats, les collectivités territoriales, les ONG et lEtat. Ce fut le compromis du possible, validé pour lessentiel par le Président de la République en présence de deux Prix Nobel de la Paix et du Président de la Commission européenne BARROSO. Compromis du possible où chacun était convaincu que le corps social quil représentait devait simpliquer, devait accepter les compromis qui permettaient aux autres davancer au même rythme que lui.
Ce Grenelle, cest la conviction dune méthode, selon laquelle la mutation est tellement vaste et touche tellement de sujets de la société en même temps, quelle ne peut se faire que par la mise en mouvement de tous les acteurs.
Alors ce projet de loi est pour lessentiel la reprise des conclusions du Grenelle Environnement, de ses propositions, de ses financements et de son calendrier, sous forme législative.
Ne vous laissez pas abuser par ceux qui ny ont pas directement participé, ou par ceux qui ayant participé ne se souviennent que de leurs suggestions initiales et non pas de laccord final. Ce travail de complexité a été fait puis prolongé et approfondi au sein de 33 comités opérationnels qui ont rassemblé plus de 1200 personnes, élus, professionnels, syndicalistes, salariés, entreprises dans lobjectif de dénouer tous les pièges opératoires, délaborer tous les processus opérationnels pour rendre le Grenelle techniquement réaliste, techniquement crédible, bref, techniquement possible. Aujourdhui, ce travail gigantesque de la Nation toute entière revient devant le Parlement qui va devoir maintenant trancher, et donner au pays un cap clair, une feuille de route précise, avec des objectifs chiffrés, un calendrier et les moyens dy parvenir.
Et ce nest pas un hasard si dans le sondage SOFRES du 2 et 3 octobre 2008, 88% des Français considèrent que la méthodologie du Grenelle, ce mode de concertation, de rapprochement des points de vue, dacceptation et de gestion des contradictions, est non seulement approuvé mais également souhaité pour dautres chantiers économiques et sociaux. Alors bien sûr que tout ceci est complexe car on voit que léconomie et la technique seules ne suffiront pas à résoudre cette équation à plusieurs inconnues sans un travail essentiel sur les causes. Complexe parce que cette feuille de route doit réconcilier tous les acteurs de la société autour dun projet commun, une société sobre en carbone, une société respectueuse de la nature et des fruits de la nature, une société réconciliant enfin le progrès et lavenir. Complexe aussi parce quil sagit datteindre la plus haute ambition possible en faisant progresser tous les acteurs en même temps. Complexe parce quon voit quon se situe bien au-delà dun champ de compétence unique, bien au-delà de la seule sphère publique ou dun ministère de la spécialité. Complexe enfin parce que cette mutation est tellement vaste quelle sinscrit dans des échelles de temps incroyablement différentes.
Mais derrière ce diagnostic sans concession et parfois franchement alarmiste, il y a eu une conviction unanime, celle que nous pouvions changer radicalement la donne et répondre à cette urgence écologique. Et derrière ce constat du Grenelle, est apparue la possibilité dune autre croissance, celle de lefficacité, de la sobriété, de lautonomie énergétique, celle de lindépendance par rapport à des cours mondiaux quon ne maîtrise pas, celle de lindépendance par rapport à des rentes de situation énergétiques et financières qui sont responsables dune partie des déséquilibres actuels, Oui, je crois quil y a un accord unanime de tous les acteurs du Grenelle, quelque soit le corps social quils représentaient pour approuver les propos de Nicolas HULOT disant : « que la crise écologique constituait un horizon dépassable de lHumanité ; quelle constituait aujourdhui le centre de gravité de nos sociétés, loccasion unique de réussir ce sur quoi nos sociétés ont peiné et échoué jusquici, à savoir la combinaison de lefficacité économique, de la solidarité sociale et de la vie démocratique ».
Cette feuille de route qui vous est proposée est à la fois un mode de gestion de la rareté inéluctable de certaines ressources mais aussi de la recherche de nouvelles formes dabondance, parce que la force des marées est abondante, parce que le vent est abondant, parce que le soleil est abondant. Cette feuille de route doit permettre à notre société de faire un saut qualitatif ; au fond, la croissance verte ou sélective, est le chemin le plus court et le plus sûr vers une société de qualité : qualité de vie, qualité de lair, qualité de lair, qualité de lalimentation, des biens et des services. Permettez-moi de dire que la crise financière que nous connaissons aujourdhui, au-delà de son caractère conjoncturel, implique inéluctablement que le monde se tourne vers cette nouvelle croissance.
Il y a unanimité aussi pour penser que lenjeu écologique est un facteur clef de la compétitivité de nos entreprises, parce quune économie qui consomme globalement moins dénergie est nécessairement une économie qui dépense moins dargent ; parce que les relais de croissance de demain, ils sont là, dans le bâtiment, dans les ENR qui représenteront près de 16% de lemploi dans dix ans, dans le traitement de leau ou des déchets ; parce que les produits les plus compétitifs ou les plus demandés par les consommateurs seront les produits les plus sobres en carbone et en énergie. Ne nous trompons pas, le marché ira plus vite que nous et nous devons accompagner nos entreprises : déjà, dans lautomobile, la compétition ne porte plus sur le design ou sur la puissance des moteurs, mais sur la sobriété en carburant ; parce que le monde entier est sur ce combat là, la Chine, lInde, le Canada, les Etats-Unis
Et puis enfin, nous sommes tous engagés dans le même projet de société, un projet du respect de lautre, un projet où le libre échange laisse la place au juste échange, un projet où la certitude de la rareté laisse la place à la possibilité de labondance, un projet où chaque territoire, chaque région et chaque continent bénéfice dune chance réelle et loyale de développement.
? A partir de là, il y a le Grenelle visible, celui qui a déjà commencé, et les premières décisions prises.
Cest larrêt du projet dorpaillage de la Montagne de KAW, le 31 janvier 2008, pour protéger ce sanctuaire avec au fond, cette idée forte dans sa simplicité, que la France devait assumer pleinement et sereinement, sa responsabilité universelle de laboratoire du vivant dans toutes ses collectivités dOutre-mer.
Cest le basculement progressif et volontaire de secteurs entiers de notre économie dans le développement durable.
- Lindustrie aéronautique qui décide de réduire de 50% ses émissions de CO2, de 50% le bruit perçu et de 80% ses émissions de NoX.
- La grande distribution qui sengage à augmenter la part du bio de 15% dans ses rayons et de réduire de 10% le volume des emballages.
- Les professionnels de la publicité qui élaborent, en étroite concertation avec les ONG, de nouvelles règles de déontologie.
- Les professionnels de limmobilier qui choisissent de généraliser laffichage du diagnostic de performance énergétique des logements.
Cest la loi sur la responsabilité environnementale du 22 juillet 2008 qui pour la première fois, reconnaît lexistence dun préjudice écologique totalement déconnecté du préjudice économique ; qui pour la première fois depuis la catastrophe de lERIKA fait dire à notre droit « oui, la biodiversité a un prix », « oui, elle rend des services à la collectivité ».
Cest lexpérimentation du bonus écologique sur les voitures avec un déplacement massif, de près de 40%, du marché vers les véhicules les plus propres et les plus faiblement émetteurs. Bonus écologique qui a permis de réduire de 9g en 9 mois les émissions moyennes des véhicules alors que le rythme était plutôt de 1g tous les ans. Nous allons donc désormais dix fois plus vite. Et les constructeurs français sont déjà en train de concevoir de nouveaux modèles, en avance sur le calendrier parce quon sent bien que le marché a totalement changé de physionomie.
Cest la circulaire du Premier ministre sur lEtat exemplaire
Mais le Grenelle visible cest surtout ce texte fondateur, ce cap, ce changement radical de stratégie qui vous est proposé dans les transports, dans lénergie, dans laménagement urbain, dans la construction, dans lagriculture : la division par quatre de nos émissions de CO2 entre 1990 et 2050, la réduction de 38% de la consommation énergétique dans le bâti existant, la baisse de 20% des émissions de CO2 dans les transports à lhorizon 2020, les 23% dENR dans le bouquet énergétique en 2020, 2% du territoire placé sous protection forte dici 10 ans, le bon état écologique des eaux à lhorizon 2015, 6% de la SAU en bio en 2013 et 20% en 2020, les 50% dexploitations engagées dans une démarche environnementale en 2012, la trame verte et bleue
Alors, bien sûr, on trouvera toujours des commentateurs pour dire quon ne va pas assez vite, quon ne va pas assez loin sur tel ou tel sujet ou sur tel ou tel chantier. Et puis, inversement, on trouvera toujours des gens pour dire quau contraire, on va beaucoup trop vite, beaucoup trop loin et beaucoup trop fort.
Ces interrogations ou ces inquiétudes ne doivent pas nous détourner de nos objectifs. Ce changement de stratégie, lourd, irréversible, que je vous propose aujourdhui, se traduit de façon visible dans six grands chantiers :
- Le chantier thermique, la rénovation lourde des 4,2 millions de logement sociaux en commençant par les 800 000 les plus dégradés, des investissements annuels moyens de 16 milliards deuros représentant près de 235 000 emplois dici 2020. Cest à terme, 20 milliards deuros de travaux réalisés grâce à léco-prêt à taux zéro, pour un coût total pour lEtat en rythme de croisière denviron 1 milliard, soit un rapport de 1 à 20. Cest le crédit dimpôt développement durable qui représente une enveloppe d1,5 milliards deuros par an destinée aux travaux de rénovation thermique. Cest lamélioration des dispositifs TEPA et PTZ dans le cas où un ménage décide dacquérir un logement très performant sur le plan énergétique.
- Cest le chantier transport, la construction de 2000 km de lignes à grande vitesse supplémentaire, de 1500 kilomètres de lignes de transports collectifs dans nos villes avec un concours de lEtat de 2,5 milliards deuros sur une première tranche de 14 milliards, ce sont les autoroutes ferroviaires, les autoroutes maritimes pour un investissement total de 100 milliards deuros dici 2020 et la création de près de 80 000 emplois.
- Cest le chantier énergétique, la décision de porter la part dENR à 23% de notre consommation dénergie à lhorizon 2020, ce sont des investissements considérables et près de 220 000 emplois dici 2020. La prochaine programmation pluri annuelle des investissements qui vous sera proposée en sera la confirmation.
- Bref, les chantiers du Grenelle, représentent à terme plus de 400 milliards deuros dinvestissements injectés dans notre appareil de production industrielle dici 2020, 15 milliards deuros de valeur ajoutée en moyenne par an, soit 0,8 point de croissance et 500 000 emplois à terme.
Jentends déjà ceux qui disent que ça coûte trop cher ou quon na pas les moyens. A ceux qui disent « ça coûte trop cher », je dis « non », car lessentiel du processus est fondé sur des économies, des économies dénergie, des économies de mobilité individuelle, des économies dintrants et cest par ces économies que nous financerons les nouvelles infrastructures, les travaux de rénovation thermiques grâce à un effet de levier massif. Parce que bien souvent, il sagit dengager des investissements rentables à la fois pour lavenir et immédiatement, ou de substituer des investissements vertueux à des investissements non vertueux.
Et à ceux qui disent « vous navez pas les moyens », je réponds « faux ». Lensemble des infrastructures et des moyens sont dans la loi de programmation et 13 des 24 mesures de la loi de finances initiales concernent directement des sujets Grenelle : léco-prêt à taux zéro, lextension du crédit dimpôt développement durable, le verdissement de tous les dispositifs daccession à la propriété, lexonération facultative de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des modes de production biologiques, laugmentation du crédit dimpôt en faveur de lagriculture biologique, linstauration de la taxe poids lourds, la majoration du taux damortissement dégressif pour certains matériels des entreprises de première transformation du bois, le relèvement de la taxation sur les pesticides, laménagement de la taxe générale sur les activités polluantes
Ainsi, avec le Grenelle 1 qui pose précisément les objectifs, les principes, les obligations, les normes, les programmes dinfrastructures, et la LFI pour 2009, nous avons un Grenelle complet, compact, déjà opérationnel. Il ne nous restera plus alors quà opérer aux derniers ajustements techniques ou juridiques dans notre droit. Cest tout lobjet du projet de loi de transition environnementale, qui est un texte dajustements, de finalisation, pour adapter notre législation en matière durbanisme par exemple sur certains points très techniques. Il sera transmis au Conseil dEtat dans les jours qui viennent après avoir fait lobjet, lui aussi, dune intense coproduction sociale et législative. Mais après ce débat sur le Grenelle 1 et après le débat sur la LFI, nous aurons lessentiel du Grenelle déjà en application.
Et puis, à côté de ce Grenelle visible, il y a le Grenelle invisible, c'est-à-dire toutes les conséquences induites par ce processus, par le débat au Parlement que vous allez mener, sur le comportement des Français. Oui, létiquetage carbone expérimenté dans plusieurs grandes surfaces a déjà des effets sur le comportement des consommateurs. Oui, le bonus écologique a modifié en profondeur les critères de choix des consommateurs. Oui, les campagnes de sensibilisation sur les déchets et sur le recyclage ont déjà des effets perceptibles sur les ventes de produits. Oui, le Grenelle a déjà modifié le regard que chacun porte sur les conséquences collectives de ses actes. Cest dans le sondage SOFRES du 2 et 3 octobre, 73% des Français qui pensent que le Grenelle a permis au pays de prendre conscience des problèmes environnementaux. Cest 66% des sondés qui sont convaincus que le Grenelle a incité les Français à faire des efforts dans leur vie quotidienne. Cest 61% des Français qui pensent que le Grenelle a permis dinciter les élus locaux à tenir compte des problèmes environnementaux dans la gestion de leurs collectivités. Ou encore 58% des Français qui pensent que le Grenelle a incité les entreprises à agir en faveur de lenvironnement. Ou enfin, 61% des Français qui ont le sentiment que le Grenelle a permis de promouvoir un nouveau modèle de développement économique respectueux de lenvironnement.
Et cest pour cette raison que le débat daujourdhui au Parlement doit se situer à la bonne hauteur parce que cest le Parlement qui confirmera de façon claire et irréversible, le message adressé à la Nation. Oui votre responsabilité est de vous tenir à ce qui est difficile, à la recherche de cette croissance davenir, gage de notre cohésion Sociale et de la place de la France dans le monde.
?Cest donc ce message adressé par le Parlement à la Nation à un moment crucial de lhistoire de lHumanité. Le long chemin engagé depuis Kyoto na pas toujours eu les effets attendus en termes de réduction démissions de CO2 et de sobriété en carbone. Ainsi, le monde se retrouve à son propre chevet, pour construire laprès Kyoto lors de deux rendez-vous de la dernière chance, à Poznan et à Copenhague.
Le Parlement adresse ce message à la Nation au moment où la France pilote les négociations sur le Paquet Energie Climat, négociations qui portent en elles la réussite ou léchec des négociations planétaires à venir. Parce que dans un an, à Poznan et à Copenhague, il faut que les 450 millions deuropéens puissent dire au reste du monde, quen dépit dhistoires industrielles différentes, en dépit de modes de développement différents, en dépit de conditions climatiques et géologiques différentes, nous avons réussi à nous mettre daccord sur des objectifs communs, sur un calendrier, sur un mode opératoire A Copenhague, chacun doit savoir que lautre est déjà engagé. Derrière le Président de la République, nous ne ménageons pas nos efforts pour réussir à faire adopter le « fameux paquet-climat énergie » à Bruxelles et pour convaincre lAfrique, lOcéanie, lAmérique du Sud que ce processus est la seule voie possible du développement.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Le Grenelle est un processus solide : solide parce que responsable. Solide parce que financé et techniquement possible. Solide parce que concerté. Solide parce que tous les acteurs ont donné leur accord sur lessentiel. Solide enfin parce que sûr de son message davenir. Ce message, cest à vous désormais de ladresser à notre pays, et par extension à lEurope et au reste du monde. Bref, cest à vous quil revient dengager la France, de façon à la fois responsable et irréversible, sur ce nouveau chemin de croissance, à la fois porteur dunité, de progrès et de paix car comme le disait Victor HUGO, « le progrès nest rien dautre que la révolution faite à lamiable ».
Alors engageons nous, aujourdhui, résolument. Je vous remercie.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 9 octobre 2008