Déclaration de M. André Santini, secrétaire d'Etat à la fonction publique, sur la mission confiée aux préfets dans la réforme de l'organisation de l'Etat local, Paris le 29 septembre 2008.

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Texte intégral

Madame le Ministre,
Mesdames et Messieurs les Préfets,
Je suis particulièrement heureux de pouvoir m’adresser à vous toutes et vous tous aujourd’hui et je remercie Michèle Alliot-Marie de sa cordiale invitation.
Secrétaire d’Etat chargé de la fonction publique, c’est la première fois depuis que je suis au Gouvernement que j’ai l’honneur de m’adresser à vous.
Ma présence au ministère de l’intérieur aujourd’hui témoigne de mon engagement à vos côtés dans la mission que vous a confiée le Premier ministre dans la réforme de l’organisation de l’Etat local.
Le Président de la République a eu déjà l’occasion de réaffirmer avec force votre rôle incontesté et incontestable de patrons de cet Etat local d’un format nouveau.
Vous devez être des patrons d’un style nouveau. En effet quand on remet tout en chantier comme nous le faisons actuellement : les hiérarchies traditionnelles et les autorités les plus établies sont remises en cause. L’autorité préfectorale dans les semaines qui s’annoncent va devoir se démontrer par le dialogue et sa capacité à fédérer les énergies des cadres de l’Etat.
Vous allez en effet devoir faire preuve de conviction, de dialogue pour que l’ensemble des collaborateurs locaux de l’Etat - des cadres aux agents d’exécution – adhérent au projet de réorganisation territorial des services.
C’est donc à ces patrons que je m’adresse aujourd’hui.
Le troisième comité de modernisation des politiques publiques du 11 juin a maintenant arrêté le schéma d’organisation de l’Etat régional ou départemental.
La réforme de l’Etat territorial que nous menons est par son ampleur et ses conséquences comparable à la décentralisation qui avait été conduite au début des années 80.
Vous l’avez trop souvent réclamée, demandée dans vos rapports au gouvernement pour que vous boudiez votre plaisir.
C’est à vous qu’il revient de conduire – de réussir serait plus juste – cette réorganisation des administrations territoriales de l’Etat. Afin qu’il soit, au plan local, plus ramassé moins dispersé, plus fort et plus efficace dans ses interventions.
Le Gouvernement vous demande de faire preuve de votre capacité à mener le changement de l’organisation et le fonctionnement des services de l’Etat sans brusquer, sans braquer, sans casser mais avec détermination. En effet, et c’est là que l’exercice se corse, le gouvernement ne veut pas un semblant de réformes. Vous devez faire passer des mesures difficiles telles que des regroupements de service.
La circulaire du 7 juillet vous confie la conduite de cette réorganisation, et le Premier ministre vous demande de vous mobiliser personnellement sur les questions relatives à la communication au dialogue social avec les personnels et les organisations syndicales.
J’ai souhaité que la circulaire du 7 juillet prenne des engagements précis sur ces points qui m’apparaissent fondamentaux.
Au centre de la réforme, il y a la concertation et le dialogue social.
Tout au long de ce dossier, je me suis attaché à maintenir un contact étroit et permanent avec les branches « fonction publique » des huit centrales syndicales représentées au conseil supérieur de la fonction publique.
Très rapidement, et compte tenu des réactions d’inquiétude qui me revenaient de toute part, il m’a paru indispensable de proposer à mes partenaires syndicaux une organisation de l’information, la consultation, la concertation avec l’ensemble des personnels et leurs organisations syndicales, tant au plan national que régional ou départemental.
C’est très précisément ce qui a été validé au cours des comités de modernisation du conseil supérieur de la fonction publique de l’Etat les 19 mars et 27 juin.
Ainsi, depuis le mois de juillet, vous avez commencé ce travail en réunissant les personnels et les syndicats.
Afin de vous appuyer dans cet exercice, je me suis rendu le 16 septembre à la préfecture de Lyon, et le 26 dans celle de Limoges.
J’étais accompagné, lors de ces déplacements par des responsables syndicaux nationaux, membres du conseil supérieur de la fonction publique de l’Etat, ainsi que par le directeur de la mission interministérielle sur la réforme de l’administration territoriale de l’Etat.
Je me rendrai ensuite à Marseille le 28 octobre et Eric Woerth conclura ces rencontres à Lille le 6 novembre.
Vous êtes les patrons, aussi il vous appartient de prendre toutes les initiatives pour que la période de concertation soit réelle et non formelle.
Tous les comités techniques paritaires concernés doivent se réunir autant de fois qu’il sera nécessaire.
J’insiste sur l’organisation de réunions informelles avec les représentants des huit organisations syndicales siégeant dans les conseils supérieurs des fonctions publiques, et cela même si certains ne siègent pas dans les CTP.
C’est un engagement que j’ai pris personnellement, et c’est pour cela que les huit confédérations représentatives sont citées dans la circulaire du 7 juillet.
Je pense que le contact direct et personnel avec des responsables de tous les niveaux avec les agents est irremplaçable.
C’est ce qu’a montré la préfète Marcelle Pierrot à Cahors.
Excusez-moi par avance de vous paraître pesant, mais dans le contexte de la signature des accords de Bercy sur la représentativité syndicale dans la fonction publique le 2 juin dernier avec six organisations syndicales sur huit, il n’est pas possible que ces dernières me remontent que la concertation n’a pas été convenablement conduite.
Pour résumer mon message le plus simplement possible :
- nous vous confions la responsabilité de la concertation et vous avez carte blanche pour la conduire ;
- en contrepartie, vous avez une obligation de résultats ; donc aucun des départements et des régions doivent nous remonter des informations selon lesquelles la concertation et le dialogue social ont été bâclés ou expédiés.
Dans quelques mois, en fonction des rapprochements de service dans tel ou tel département ou dans telle ou telle région, on saura regarder la qualité de la concertation préalable qui a été conduite.
Jack Welsch, l’ancien président de General Electric m’a dit un jour qu’il lui importait peu que ses collaborateurs réussissent ou échouent dans leurs actions, pourvu que ceux-ci aient agi « avec la manière ».
Je suis venu aujourd’hui vous demander d’employer la « manière » dans cette concertation.
Je vous demande en outre de porter votre attention sur trois publics particuliers :
- les cadres, vos collaborateurs directeurs, chefs de service et leurs adjoints. Durant toute cette phase de concertation, ceux-ci ne peuvent pas être moins informé que leurs agents. Veillez à vous assurer de leur cohésion auprès de vous ;
- les agents des services : allez à leur rencontre, faites le tour des services, faites ce que font tous les entrepreneurs qui veulent convaincre les « investisseurs » : expliquez, discutez en direct. Faites le savoir ;
- les représentants des agents et des organisations syndicales : passez du temps à discuter, à prendre le pouls de la situation avec eux. Ils doivent avoir la garantie qu’ils seront reçus et écoutés. C’est eux qui donnent le « la » de la concertation.
J’ai bien conscience que tout cela va prendre du temps et de l’énergie, à vous personnellement bien entendu, à vos collaborateurs, aux chefs de services, mais j’ai la conviction profonde que c’est bien là, la clef du succès.
Car cette réforme de l’Etat, indispensable pour l’avenir de notre pays, c’est sur le terrain, au plus près des agents qu’elle deviendra réalité, et constituera un succès majeur du quinquennat.
Pour ce qui concerne le volet ressources humaines du dossier, les travaux sont menés, bien entendu par la Direction Générale de l’Administration de la Fonction Publique, et coordonnés dans un cadre interministériel, par la mission interministérielle de réforme de l’administration territoriale de l’Etat.
Les travaux en cours concernent la mutualisation des fonctions support, la constitution des plates-formes régionales d’appui à la gestion des ressources humaines, et la cartographie des compétences en cette matière.
Ces différents points ont été préparés chez certains d’entre vous par une étude sur l’état des lieux de la gestion des ressources humaines dans les services déconcentrés de l’Etat réalisée par Bearing Point en Bourgogne, ainsi que celle sur les plates formes régionales de ressources humaines réalisée par IDRH en juin dernier en Picardie, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Nord-Pas de Calais, Haute Normandie, et Limousin.
D’ores et déjà, la DGAFP a réalisé sous forme de questions-réponses, un vademecum sur le thème « mobilité et réforme de l’administration territoriale de l’Etat » qui vous est remis.
Vous pourrez aussi vous appuyer prochainement sur les dispositifs qui figurent dans le projet de loi relatif à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, projet déjà adopté au Sénat le 19 avril.
La presse a souligné son caractère novateur, car il s’agit bien d’instituer un droit effectif à la mobilité pour tous les fonctionnaires.
Le projet vise à simplifier et systématiser les possibilités de détachement et d’intégration entre les corps et cadres d’emploi de niveau comparable.
Il offre des possibilités d’intégration directe dans un corps, et crée un droit au départ en mobilité.
Il supprime les obstacles statutaires au retour des agents après une mobilité.
Afin d’assurer la modernisation de l’Etat et la continuité du service, le projet permet de remplacer un fonctionnaire momentanément absent par un agent contractuel.
Il permet aussi d’accompagner ceux qui sont momentanément sans affectation dans une réorientation professionnelle.
Le projet de loi ouvre la possibilité de recourir à l’intérim.
Ce n’est pas tout à fait nouveau, puisque le secteur hospitalier le pratique régulièrement, et cela, sans aucun texte !
Sachez néanmoins, qu’il ne s’agit pas là, malgré ses avancées considérables, de la loi de refondation du statut général de la fonction publique.
Celle-ci est néanmoins en cours, et elle est d’ores et déjà préparée par les concertations qui démarrent en ce moment avec les organisations syndicales à partir des propositions du « Livre Blanc sur l’avenir de la fonction publique » qui nous a été remis, à Eric Woerth et moi-même, en avril dernier par Jean-Ludovic Silicani.
La clef de voûte de ces réformes, j’en ai la conviction, c’est le dialogue social et la concertation.
Et ce ne sont pas que des mots, sinon comme aurions nous fait avec Eric Woerth pour signer les accords de Bercy le 2 juin dernier avec des syndicats qui n’avaient jamais signé aucun protocole avec un gouvernement quelconque depuis 1945 ?
Je finirai sur une anecdote : au préfet de la Vendée, qui dans les années 1800 rapportait les difficultés du transfert du siège de la préfecture de Fontenay le Comte à la Roche sur Yon – à l’époque à peine moins qu’une bourgade - dans le centre du département, le Ministre de l’Intérieur avait rappelé que si on lui avait confié cette mission c’était justement parce que c’était difficile.
C’est parce que c’est difficile Mesdames, Messieurs les Préfets que nous vous confions ce grand chantier de la réorganisation de l’Etat territorial. Et nous vous demandons de le réussir avec humanisme.
Elu depuis de nombreuses années, j’ai déjà travaillé avec nombre de préfets des Hauts de Seine et de sous-préfets de Boulogne-Billancourt, dont certains ont ensuite accompli de beaux parcours, aussi j’ai pu apprécier la réalité de votre engagement personnel, et c’est pourquoi j’ai beaucoup de respect pour votre fonction.
J’ai été très heureux de pouvoir m’adresser à vous aujourd’hui directement, et je t’en remercie encore, chère Michèle. Je vous remercie de votre attention.
Source ftp://ftp2.snepfsu.net, le 22 octobre 2008