Texte intégral
Bonjour.
Michelin, Adidas, ELF, auraient placé de l'argent au Liechtenstein, révèle Le Parisien. Une enquête devrait être ouverte pour blanchiment de fraude fiscale. Confirmez-vous cette information ?
Je ne peux ni infirmer ni confirmer les noms des entreprises qui sont citées par Le Parisien. Tout ce que je peux vous dire, c'est que dans cette affaire du Liechtenstein qui est née il y a à peu près huit, neuf mois, ou à peu près une année et qui a défrayé la chronique, d'ailleurs, en France comme en Allemagne ou dans d'autres pays, nous avons, nous, ministère du Budget, été le plus loin possible, enquêter sur l'ensemble des comptes, régulariser bon nombre de situations et transmis à justice trois dossiers et la justice a confié au service national de Douanes judiciaires, l'enquête qui maintenant est en cours, sous un angle judiciaire.
Qu'attendez-vous de la justice, justement ? Quelle fasse rentrer en France ce que l'on doit au Fisc ?
Oui, tout cela, mais la vérité sur la manière dont ça s'est passé, d'où est venu l'argent sur ces trois affaires qui ont été transmises à la justice, et puis in fine sur le plan fiscal, bien évidemment la récupération des impôts qui ont été édulcorés des pénalités.
Combien d'entreprises ont régularisé leur situation, c'est-à-dire combien étaient au Lichtenstein ?
C'est des groupes familiaux, en fait, ce n'est pas tellement des entreprises, c'est des groupes familiaux dans la plupart du temps, quelquefois c'est des comptes ouverts depuis 20 à 30 ans, donc il y a autant d'histoires que de comptes. Il y a à peu près...
C'est des dizaines de comptes, c'est des centaines de comptes ?
C'est 64 groupes familiaux, pour être exact. Une partie de gens sont décédés, une partie sont des résidents, en fait, non nom français. Donc, quand on regarde uniquement ceux qui sont vivants ou qui sont français, ça fait à peu près la moitié et sur la moitié aujourd'hui, les 2/3 ont régularisé leur situation et 1/3 sont en cours de le faire.
Ils ont donc payé ?
C'est-à-dire, payé...
Vous n'avez pas passé l'éponge ?
Non pas du tout, jamais, non, non. C'est-à-dire payé l'impôt qui a été édulcoré, qui a été gommé, et en même temps payé les pénalités qui vont avec. Et puis il y a trois dossiers, qui sont des dossiers qui dépassaient la compétence du Fisc, sur laquelle il n'avait pas le pouvoir d'enquête, en réalité, pour aller plus loin, et donc c'est ces dossiers que nous avons transmis à la justice et que j'ai transmis à la justice.
D. Lebègue, ancien directeur du Trésor, engagé aujourd'hui contre la corruption, dans une ONG, affirme que la fraude fiscale coûte 20 milliards d'euros par an à l'Etat français, dont dix du fait d'entreprises malhonnêtes. Vous confirmez ce chiffre ?
C'est très difficile à dire. Ce sont des chiffres qui circulent depuis trois, quatre ans. En réalité, à l'intérieur de ce chiffre, je pense qu'il y a aussi les problèmes de TVA, qui sont des carrousels de TVA...
5 milliards, dit-il.
... qui ne sont pas tout à fait du même ordre, mais la fraude fiscale représente certainement quelques milliards d'euros. C'est extrêmement difficile à évaluer. En réalité, nous prenons parfois les chiffres qui sont amenés. J'ai créé une délégation nationale de lutte contre la fraude, qui synthétise l'ensemble des problématiques de lutte contre la fraude, de toute nature sociale ou fiscale, et l'un de ces buts est, comme ils le font d'ailleurs à peu près correctement en Angleterre, d'essayer d'évaluer les montants de fraudes.
Comptez-vous sur le G20 pour régler ce genre de problèmes type Liechtenstein ?
Moi, je compte beaucoup que... le Liechtenstein - nous avons utilisé cette affaire, qui est une affaire assez étonnante, et qui n'arrive pas tous les jours -, nous avons essayé d'utiliser cette affaire, pour essayer d'aller révéler les paradis fiscaux. Comment on peut faire pour essayer de lutter contre les paradis fiscaux, c'est-à-dire des endroits où en réalité l'argent est extrait de pays comme nous, à fiscalité transparente, et caché dans des endroits. Donc, nous sommes en train, grâce au coup de boutoir de la France, du président de la République et de la Chancelière allemande, nous sommes en train de terminer, de tuer d'une certaine façon le secret bancaire, c'est-à-dire de faire en sorte qu'une administration comme la nôtre, française, fiscale, qui va interroger une autre administration, par exemple l'administration suisse ou l'administration luxembourgeoise, ne se voit plus opposer le secret fiscal ou le secret bancaire, qu'il y ait une collaboration entre les administrations, selon les standards, selon, on va dire, les règles internationales que sont celles de l'OCDE et le progrès est spectaculaire dans ce domaine-là, les paradis fiscaux sont en train, aujourd'hui, de revenir dans la légalité, au travers de la suppression du secret bancaire, l'échange d'informations...
Andorre, Monaco, même la City, personne n'y échappe.
Andorre, Monaco, l'Autriche, la Suisse, etc., qui contestaient l'idée qu'ils étaient paradis fiscal, mais en réalité qui appliquaient une règle qui était celle du secret bancaire. Et puis il y a d'autres pays, au fond, qui eux vont beaucoup plus loin, c'est-à-dire pratiquent le secret bancaire, qui sont d'une opacité totale, mais en même temps n'ont pas de comptabilité, ou par exemple ont une fiscalité qui est totalement inexistante, cela dans d'autres pays du monde, il faut continuer à la combattre et j'espère qu'au G20 il y aura la publication d'une liste exacte de paradis fiscaux pour après prendre des mesures de rétorsion, c'est le souhait aussi du président de la République, de N. Sarkozy, il l'a dit à plusieurs reprises.
Les comptes de la Nation pour 2008 sont bouclés. Le déficit public 2007 était de 2,7 %. Nous allons sortir à combien pour 2008 ?
L'INSEE doit publier, là, dans quelques minutes ses premières estimations pour 2008. Je pense que l'INSEE va confirmer la prévision que j'avais faite il y a quelques semaines, de 3,4 points de PIB de déficit public, c'est-à-dire Etat, collectivités locales et Sécurité sociale, 3,4 points.
La faute à qui ? La faute à l'Etat, aux collectivités locales, à la Sécu ?
L'Etat arrive à peu près à tenir le niveau, son niveau de dépenses, enfin, vous savez on a entrepris beaucoup de travail sur la dépense publique et on s'aperçoit dans toutes ces prévisions qui vont paraître dans quelques moments, que l'augmentation de la dépense publique c'est 1 %, c'est-à-dire deux fois moins que l'augmentation passée...
Pour l'Etat.
...de la dépense publique, pour l'ensemble des collectivités, et pour l'Etat c'est zéro. Donc, c'est au moins dans l'ensemble de mauvaises nouvelles sur le plan économique, c'est une bonne nouvelle, c'est que nous tenons, nous tenons la dépense publique et ça il faut bien s'apercevoir que c'est un travail très considérable et c'est un travail très fructueux pour l'avenir, pour la sortie de crise. Il faut tenir la dépense publique.
C'est la Sécurité sociale, donc, qui dérape !
La Sécurité sociale, nous avons tenu l'objectif de dépenses d'assurance maladie, donc, c'est déjà...ça fait très très longtemps que cet objectif n'était pas tenu, mais en même temps, ça progresse, les dépenses progressent plus vite que le Produit intérieur brut depuis bien longtemps. Il faut continuer, bien évidemment, à travailler avec l'ensemble des acteurs de la Sécurité sociale.
Et sur 2009, pour la Sécurité sociale, vous disiez 12 en janvier, 15 en février, 18 en mars, vous allez vous arrêter où ?
Sur 2009, eh bien j'espère que l'on s'arrêtera à 18. Donc, pour l'instant, l'idée c'est d'être à peu près à 18 milliards d'euros de déficit, donc c'est évidemment des sommes très importantes. C'est moins important que le niveau de déficit de l'Etat, mais ça reste des sommes très, très importantes. On était à 10 cette année, et cette année on a tenu à peu près les objectifs, on sera je pense à 18, pas pour des raisons de dépenses, mais essentiellement pour des raisons de cotisations sociales. Les cotisations sociales, elles sont fondées sur le travail, sur la masse salariale. Il y a plus de chômage, la masse salariale n'augmente pas. Un point de masse salariale en augmentation, c'est deux milliards d'euros de recettes pour la Sécurité sociale, donc, vous voyez, quand vous le retirez, ça va très, très vite, donc il y a 8 ou 9 milliards d'euros de déficit de crise, dans ces 18.
3,4 % de déficit public en 2008. 2009, votre horizon, c'est vraiment de tenir la ligne des 4, vous ne dépasserez pas ?
En 2009, nous dépasserons la ligne des 4, on sera aux alentours de 5,5 points, 5,6 points de déficit public, c'est-à-dire à mon avis un peu inférieur à pas mal de pays, mais en même temps à des niveaux de déficit très importants. Il faut savoir que 60 % du déficit aujourd'hui, de l'Etat, enfin, à la fin de l'année 2009, c'est un déficit du à la crise, c'est-à-dire manque de recettes fiscales pour l'Etat ou dépenses liées au plan de relance, donc, au fond, ce déficit, c'est en même temps un instrument de la relance, car la relance c'est de la dépense publique, donc c'est en même temps un instrument de relance. Il reste les dépenses courantes, de tous les jours, de l'Etat et de l'assurance maladie, enfin de la Sécurité sociale, que nous devons, que nous devons bien sûr continuer à maîtriser. Il ne faut pas l'oublier, ça.
Quid de l'endettement du pays. On était à 2/3 du PIB sur 2007. En 2008, vous allez solder les comptes à combien ?
Ecoutez, en 2008, je pense que l'INSEE donnera des chiffres aux alentours de 68 % de point de PIB, c'est légèrement supérieur à la prévision qui avait été réalisée, de 0,3 ou 0,4 point, c'est-à-dire légèrement supérieur. Au fond, aussi, quand on regarde l'endettement net de la France, c'est-à-dire pas uniquement les dettes mais que l'on met en face un certain nombre d'actifs, on est aux alentours de 61 points de PIB de déficit, ce qui nous met à un taux inférieur, aussi, à d'autres pays. Evidemment, si vous voulez, à partir du moment où la relance c'est de la dépense publique, cette dépense publique elle n'est pas assise sur des recettes qui augmentent, on ne va pas augmenter les impôts, donc ce n'est pas assis sur l'augmentation de recettes, donc à ce moment-là c'est évidemment financé par le déficit et par la dette. Il faudra, au moment où la France sortira de cette crise, il faudra bien évidemment commencer à rembourser, accélérer le remboursement. Nous ne pouvons y arriver que si on diminue la dépense de tous les jours et si en même temps, bien évidemment, on a une croissance qui repart, mais c'est tout l'objectif de la sortie de crise, c'est tout l'objectif du G20, par exemple, qui va s'ouvrir dans quelques jours.
Le décret anti bonus et stocks-options parait aujourd'hui au Journal Officiel, avec un accord très mitigé dans la sphère politique. Pourquoi l'avoir limité dans le temps, à la fin 2010 ? Pourquoi ne pas avoir étendu cela à toutes les entreprises qui touchent de l'argent du fonds stratégique d'investissements ?
Mais nous avons fait ce que nos devions faire, c'est-à-dire que nous avons réglé une bonne partie du... nous avons réglé le problème.
Très très peu.
Non, pas du tout. Vous savez, dans ce domaine-là...
Quelques banques, deux constructeurs automobiles.
... il ne faut pas s'exciter dans tous les sens ; il faut être moral, il faut chercher là où il y a des problèmes et en même temps laisser la liberté aux entreprises. Donc, le décret, il vise les entreprises qui sont aidées par l'Etat, parce que quand il y a l'argent du contribuable, les patrons ne peuvent pas faire n'importe quoi, donc ça, ça empêche totalement tout patron de faire n'importe quoi lorsqu'il est aidé par l'Etat. Ça, c'est le décret, et donc c'est applicable maintenant, car ce décret il est paru ce matin. Et puis, deuxième point, pour des entreprises publiques ou pour des entreprises qui licencient, qui ont des plans sociaux massifs ou qui font recours au chômage partiel, il y a un certain nombre de règles qui sont posées, notamment le fait que les mandataires, ça concerne les mandataires sociaux, qui ne peuvent plus avoir de contrat de travail, ça nécessite aussi, bien évidemment, de faire en sorte que toutes les parts variables doivent être ajustées sur des critères absolument transparents. Pour ça, c'est formidable.
C'est quoi du "chômage partiel massif" ou du licenciement... A partir de combien...
Ça, ce sera au Gouvernement de le déterminer, au fur et à mesure et au cas par cas, et c'est tant mieux et c'est comme ça qu'il faut agir. Ce décret il est puissant, il règle le problème de la moralisation, d'une certaine façon, de la rémunération des patrons et en même temps, ce n'est pas un décret général, global, qui viserait n'importe quoi et à force de viser n'importe quoi, ne viserait personne.
Certains ne sont pas satisfaits, J. Arthuis maintient son amendement, demain, au collectif budgétaire, pour interdire les stock-options, pour toute société ayant touché de l'argent de l'Etat.
Je trouve que... Non, J. Arthuis dépose un amendement, c'est son droit, il est parlementaire.
Vous le soutiendrez ?
Non, je ne le soutiendrai pas et je lui dirai qu'il a tort. Je lui dirai, parce que... tout à l'heure, au banc, au Sénat, parce que J. Arthuis, d'abord, veut que ça soit la loi, alors que le décret c'est plus rapide, c'est plus efficace, je veux dire, ce n'est pas du domaine législatif, donc, pourquoi tout confondre ? Au fond, le débat a lieu, le débat il est sur la place publique et que le gouvernement prend ses responsabilités au travers de ce décret qui est un décret efficace et puissant. Et deuxième point, J. Arthuis, il veut étendre simplement le système, non pas au mandataires sociaux, mais à tous les cadres, et je pense que quand un entreprise est aidée par l'Etat, ce n'est pas ses cadres qui sont responsables du problème, eux, ils peuvent continuer à être intéressés à la vie et aux résultats de l'entreprise, c'est les patrons qu'il faut viser, c'est pas ceux qui ne sont pas patrons, et les cadres ne sont pas les patrons. C'est les patrons.
En un mot, les patrons, vous vous attaquez aussi aux retraites chapeau, au système des retraites chapeau. Il faut un décret ?
Il faut évidemment regarder au fur et à mesure du temps, mais il y a un code éthique, il y aura un comité des sages. Il y a un code éthique qui va se développer encore plus, tout cela sera sur la place publique, donc il faut évidement combattre tout ce qui est excessif. En réalité, tout ce qui ne correspond pas à la norme, c'est-à-dire au fait que quand une entreprise réussit, un patron peut se payer, quand elle ne réussit pas, il ne peut pas se payer.
E. Woerth, merci, bonne journée.
Merci.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 31 mars 2009
Michelin, Adidas, ELF, auraient placé de l'argent au Liechtenstein, révèle Le Parisien. Une enquête devrait être ouverte pour blanchiment de fraude fiscale. Confirmez-vous cette information ?
Je ne peux ni infirmer ni confirmer les noms des entreprises qui sont citées par Le Parisien. Tout ce que je peux vous dire, c'est que dans cette affaire du Liechtenstein qui est née il y a à peu près huit, neuf mois, ou à peu près une année et qui a défrayé la chronique, d'ailleurs, en France comme en Allemagne ou dans d'autres pays, nous avons, nous, ministère du Budget, été le plus loin possible, enquêter sur l'ensemble des comptes, régulariser bon nombre de situations et transmis à justice trois dossiers et la justice a confié au service national de Douanes judiciaires, l'enquête qui maintenant est en cours, sous un angle judiciaire.
Qu'attendez-vous de la justice, justement ? Quelle fasse rentrer en France ce que l'on doit au Fisc ?
Oui, tout cela, mais la vérité sur la manière dont ça s'est passé, d'où est venu l'argent sur ces trois affaires qui ont été transmises à la justice, et puis in fine sur le plan fiscal, bien évidemment la récupération des impôts qui ont été édulcorés des pénalités.
Combien d'entreprises ont régularisé leur situation, c'est-à-dire combien étaient au Lichtenstein ?
C'est des groupes familiaux, en fait, ce n'est pas tellement des entreprises, c'est des groupes familiaux dans la plupart du temps, quelquefois c'est des comptes ouverts depuis 20 à 30 ans, donc il y a autant d'histoires que de comptes. Il y a à peu près...
C'est des dizaines de comptes, c'est des centaines de comptes ?
C'est 64 groupes familiaux, pour être exact. Une partie de gens sont décédés, une partie sont des résidents, en fait, non nom français. Donc, quand on regarde uniquement ceux qui sont vivants ou qui sont français, ça fait à peu près la moitié et sur la moitié aujourd'hui, les 2/3 ont régularisé leur situation et 1/3 sont en cours de le faire.
Ils ont donc payé ?
C'est-à-dire, payé...
Vous n'avez pas passé l'éponge ?
Non pas du tout, jamais, non, non. C'est-à-dire payé l'impôt qui a été édulcoré, qui a été gommé, et en même temps payé les pénalités qui vont avec. Et puis il y a trois dossiers, qui sont des dossiers qui dépassaient la compétence du Fisc, sur laquelle il n'avait pas le pouvoir d'enquête, en réalité, pour aller plus loin, et donc c'est ces dossiers que nous avons transmis à la justice et que j'ai transmis à la justice.
D. Lebègue, ancien directeur du Trésor, engagé aujourd'hui contre la corruption, dans une ONG, affirme que la fraude fiscale coûte 20 milliards d'euros par an à l'Etat français, dont dix du fait d'entreprises malhonnêtes. Vous confirmez ce chiffre ?
C'est très difficile à dire. Ce sont des chiffres qui circulent depuis trois, quatre ans. En réalité, à l'intérieur de ce chiffre, je pense qu'il y a aussi les problèmes de TVA, qui sont des carrousels de TVA...
5 milliards, dit-il.
... qui ne sont pas tout à fait du même ordre, mais la fraude fiscale représente certainement quelques milliards d'euros. C'est extrêmement difficile à évaluer. En réalité, nous prenons parfois les chiffres qui sont amenés. J'ai créé une délégation nationale de lutte contre la fraude, qui synthétise l'ensemble des problématiques de lutte contre la fraude, de toute nature sociale ou fiscale, et l'un de ces buts est, comme ils le font d'ailleurs à peu près correctement en Angleterre, d'essayer d'évaluer les montants de fraudes.
Comptez-vous sur le G20 pour régler ce genre de problèmes type Liechtenstein ?
Moi, je compte beaucoup que... le Liechtenstein - nous avons utilisé cette affaire, qui est une affaire assez étonnante, et qui n'arrive pas tous les jours -, nous avons essayé d'utiliser cette affaire, pour essayer d'aller révéler les paradis fiscaux. Comment on peut faire pour essayer de lutter contre les paradis fiscaux, c'est-à-dire des endroits où en réalité l'argent est extrait de pays comme nous, à fiscalité transparente, et caché dans des endroits. Donc, nous sommes en train, grâce au coup de boutoir de la France, du président de la République et de la Chancelière allemande, nous sommes en train de terminer, de tuer d'une certaine façon le secret bancaire, c'est-à-dire de faire en sorte qu'une administration comme la nôtre, française, fiscale, qui va interroger une autre administration, par exemple l'administration suisse ou l'administration luxembourgeoise, ne se voit plus opposer le secret fiscal ou le secret bancaire, qu'il y ait une collaboration entre les administrations, selon les standards, selon, on va dire, les règles internationales que sont celles de l'OCDE et le progrès est spectaculaire dans ce domaine-là, les paradis fiscaux sont en train, aujourd'hui, de revenir dans la légalité, au travers de la suppression du secret bancaire, l'échange d'informations...
Andorre, Monaco, même la City, personne n'y échappe.
Andorre, Monaco, l'Autriche, la Suisse, etc., qui contestaient l'idée qu'ils étaient paradis fiscal, mais en réalité qui appliquaient une règle qui était celle du secret bancaire. Et puis il y a d'autres pays, au fond, qui eux vont beaucoup plus loin, c'est-à-dire pratiquent le secret bancaire, qui sont d'une opacité totale, mais en même temps n'ont pas de comptabilité, ou par exemple ont une fiscalité qui est totalement inexistante, cela dans d'autres pays du monde, il faut continuer à la combattre et j'espère qu'au G20 il y aura la publication d'une liste exacte de paradis fiscaux pour après prendre des mesures de rétorsion, c'est le souhait aussi du président de la République, de N. Sarkozy, il l'a dit à plusieurs reprises.
Les comptes de la Nation pour 2008 sont bouclés. Le déficit public 2007 était de 2,7 %. Nous allons sortir à combien pour 2008 ?
L'INSEE doit publier, là, dans quelques minutes ses premières estimations pour 2008. Je pense que l'INSEE va confirmer la prévision que j'avais faite il y a quelques semaines, de 3,4 points de PIB de déficit public, c'est-à-dire Etat, collectivités locales et Sécurité sociale, 3,4 points.
La faute à qui ? La faute à l'Etat, aux collectivités locales, à la Sécu ?
L'Etat arrive à peu près à tenir le niveau, son niveau de dépenses, enfin, vous savez on a entrepris beaucoup de travail sur la dépense publique et on s'aperçoit dans toutes ces prévisions qui vont paraître dans quelques moments, que l'augmentation de la dépense publique c'est 1 %, c'est-à-dire deux fois moins que l'augmentation passée...
Pour l'Etat.
...de la dépense publique, pour l'ensemble des collectivités, et pour l'Etat c'est zéro. Donc, c'est au moins dans l'ensemble de mauvaises nouvelles sur le plan économique, c'est une bonne nouvelle, c'est que nous tenons, nous tenons la dépense publique et ça il faut bien s'apercevoir que c'est un travail très considérable et c'est un travail très fructueux pour l'avenir, pour la sortie de crise. Il faut tenir la dépense publique.
C'est la Sécurité sociale, donc, qui dérape !
La Sécurité sociale, nous avons tenu l'objectif de dépenses d'assurance maladie, donc, c'est déjà...ça fait très très longtemps que cet objectif n'était pas tenu, mais en même temps, ça progresse, les dépenses progressent plus vite que le Produit intérieur brut depuis bien longtemps. Il faut continuer, bien évidemment, à travailler avec l'ensemble des acteurs de la Sécurité sociale.
Et sur 2009, pour la Sécurité sociale, vous disiez 12 en janvier, 15 en février, 18 en mars, vous allez vous arrêter où ?
Sur 2009, eh bien j'espère que l'on s'arrêtera à 18. Donc, pour l'instant, l'idée c'est d'être à peu près à 18 milliards d'euros de déficit, donc c'est évidemment des sommes très importantes. C'est moins important que le niveau de déficit de l'Etat, mais ça reste des sommes très, très importantes. On était à 10 cette année, et cette année on a tenu à peu près les objectifs, on sera je pense à 18, pas pour des raisons de dépenses, mais essentiellement pour des raisons de cotisations sociales. Les cotisations sociales, elles sont fondées sur le travail, sur la masse salariale. Il y a plus de chômage, la masse salariale n'augmente pas. Un point de masse salariale en augmentation, c'est deux milliards d'euros de recettes pour la Sécurité sociale, donc, vous voyez, quand vous le retirez, ça va très, très vite, donc il y a 8 ou 9 milliards d'euros de déficit de crise, dans ces 18.
3,4 % de déficit public en 2008. 2009, votre horizon, c'est vraiment de tenir la ligne des 4, vous ne dépasserez pas ?
En 2009, nous dépasserons la ligne des 4, on sera aux alentours de 5,5 points, 5,6 points de déficit public, c'est-à-dire à mon avis un peu inférieur à pas mal de pays, mais en même temps à des niveaux de déficit très importants. Il faut savoir que 60 % du déficit aujourd'hui, de l'Etat, enfin, à la fin de l'année 2009, c'est un déficit du à la crise, c'est-à-dire manque de recettes fiscales pour l'Etat ou dépenses liées au plan de relance, donc, au fond, ce déficit, c'est en même temps un instrument de la relance, car la relance c'est de la dépense publique, donc c'est en même temps un instrument de relance. Il reste les dépenses courantes, de tous les jours, de l'Etat et de l'assurance maladie, enfin de la Sécurité sociale, que nous devons, que nous devons bien sûr continuer à maîtriser. Il ne faut pas l'oublier, ça.
Quid de l'endettement du pays. On était à 2/3 du PIB sur 2007. En 2008, vous allez solder les comptes à combien ?
Ecoutez, en 2008, je pense que l'INSEE donnera des chiffres aux alentours de 68 % de point de PIB, c'est légèrement supérieur à la prévision qui avait été réalisée, de 0,3 ou 0,4 point, c'est-à-dire légèrement supérieur. Au fond, aussi, quand on regarde l'endettement net de la France, c'est-à-dire pas uniquement les dettes mais que l'on met en face un certain nombre d'actifs, on est aux alentours de 61 points de PIB de déficit, ce qui nous met à un taux inférieur, aussi, à d'autres pays. Evidemment, si vous voulez, à partir du moment où la relance c'est de la dépense publique, cette dépense publique elle n'est pas assise sur des recettes qui augmentent, on ne va pas augmenter les impôts, donc ce n'est pas assis sur l'augmentation de recettes, donc à ce moment-là c'est évidemment financé par le déficit et par la dette. Il faudra, au moment où la France sortira de cette crise, il faudra bien évidemment commencer à rembourser, accélérer le remboursement. Nous ne pouvons y arriver que si on diminue la dépense de tous les jours et si en même temps, bien évidemment, on a une croissance qui repart, mais c'est tout l'objectif de la sortie de crise, c'est tout l'objectif du G20, par exemple, qui va s'ouvrir dans quelques jours.
Le décret anti bonus et stocks-options parait aujourd'hui au Journal Officiel, avec un accord très mitigé dans la sphère politique. Pourquoi l'avoir limité dans le temps, à la fin 2010 ? Pourquoi ne pas avoir étendu cela à toutes les entreprises qui touchent de l'argent du fonds stratégique d'investissements ?
Mais nous avons fait ce que nos devions faire, c'est-à-dire que nous avons réglé une bonne partie du... nous avons réglé le problème.
Très très peu.
Non, pas du tout. Vous savez, dans ce domaine-là...
Quelques banques, deux constructeurs automobiles.
... il ne faut pas s'exciter dans tous les sens ; il faut être moral, il faut chercher là où il y a des problèmes et en même temps laisser la liberté aux entreprises. Donc, le décret, il vise les entreprises qui sont aidées par l'Etat, parce que quand il y a l'argent du contribuable, les patrons ne peuvent pas faire n'importe quoi, donc ça, ça empêche totalement tout patron de faire n'importe quoi lorsqu'il est aidé par l'Etat. Ça, c'est le décret, et donc c'est applicable maintenant, car ce décret il est paru ce matin. Et puis, deuxième point, pour des entreprises publiques ou pour des entreprises qui licencient, qui ont des plans sociaux massifs ou qui font recours au chômage partiel, il y a un certain nombre de règles qui sont posées, notamment le fait que les mandataires, ça concerne les mandataires sociaux, qui ne peuvent plus avoir de contrat de travail, ça nécessite aussi, bien évidemment, de faire en sorte que toutes les parts variables doivent être ajustées sur des critères absolument transparents. Pour ça, c'est formidable.
C'est quoi du "chômage partiel massif" ou du licenciement... A partir de combien...
Ça, ce sera au Gouvernement de le déterminer, au fur et à mesure et au cas par cas, et c'est tant mieux et c'est comme ça qu'il faut agir. Ce décret il est puissant, il règle le problème de la moralisation, d'une certaine façon, de la rémunération des patrons et en même temps, ce n'est pas un décret général, global, qui viserait n'importe quoi et à force de viser n'importe quoi, ne viserait personne.
Certains ne sont pas satisfaits, J. Arthuis maintient son amendement, demain, au collectif budgétaire, pour interdire les stock-options, pour toute société ayant touché de l'argent de l'Etat.
Je trouve que... Non, J. Arthuis dépose un amendement, c'est son droit, il est parlementaire.
Vous le soutiendrez ?
Non, je ne le soutiendrai pas et je lui dirai qu'il a tort. Je lui dirai, parce que... tout à l'heure, au banc, au Sénat, parce que J. Arthuis, d'abord, veut que ça soit la loi, alors que le décret c'est plus rapide, c'est plus efficace, je veux dire, ce n'est pas du domaine législatif, donc, pourquoi tout confondre ? Au fond, le débat a lieu, le débat il est sur la place publique et que le gouvernement prend ses responsabilités au travers de ce décret qui est un décret efficace et puissant. Et deuxième point, J. Arthuis, il veut étendre simplement le système, non pas au mandataires sociaux, mais à tous les cadres, et je pense que quand un entreprise est aidée par l'Etat, ce n'est pas ses cadres qui sont responsables du problème, eux, ils peuvent continuer à être intéressés à la vie et aux résultats de l'entreprise, c'est les patrons qu'il faut viser, c'est pas ceux qui ne sont pas patrons, et les cadres ne sont pas les patrons. C'est les patrons.
En un mot, les patrons, vous vous attaquez aussi aux retraites chapeau, au système des retraites chapeau. Il faut un décret ?
Il faut évidemment regarder au fur et à mesure du temps, mais il y a un code éthique, il y aura un comité des sages. Il y a un code éthique qui va se développer encore plus, tout cela sera sur la place publique, donc il faut évidement combattre tout ce qui est excessif. En réalité, tout ce qui ne correspond pas à la norme, c'est-à-dire au fait que quand une entreprise réussit, un patron peut se payer, quand elle ne réussit pas, il ne peut pas se payer.
E. Woerth, merci, bonne journée.
Merci.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 31 mars 2009