Texte intégral
J.-M. Aphatie.- Vous avez assisté, hier après midi à Milly-la-Forêt, aux obsèques de M.-C. Hodeau. Son assassin présumé, M. Da Cruz, était un délinquant sexuel récidiviste. "Ce crime aurait pu être évité", avez-vous dit au lendemain du drame. Comment B. Hortefeux ?
D'abord, première réflexion : j'ai effectivement souhaité me rendre aux obsèques de M.-C. Hodeau pour m'associer, au nom du président de la République et de tout le Gouvernement, à la peine, à la douleur, au chagrin de sa mère et de ses deux frères, ainsi que de ses proches. Et je l'ai fait naturellement avec leur accord, les ayant rencontrés au côté du président de la République, puisqu'il les avait reçus quelques heures à peine après la découverte du corps. Pour être tout à fait complet, je suis convaincu que le rôle des responsables publics face à ces drames est d'être au côté des victimes. Deuxième question que vous me posez
... La première que je vous pose...
Vous avez évoqué les obsèques, je vous explique pourquoi je m'y suis rendu. Deuxième élément : comment ç'aurait pu être évité ? D'abord, je persiste et je signe : oui, ce drame aurait pu, aurait dû être évité, d'ailleurs comme l'a rappelé le Premier ministre lui-même simultanément. Alors, comment ça aurait pu être évité ? Je crois qu'il y a deux questions, deux sujets. D'abord, première question, premier sujet : c'est la durée effective de la peine. Il faut comprendre le sentiment - ça, ce ne sont pas des statistiques, ce ne sont pas des théories, c'est de l'humain, c'est du charnel -, il faut comprendre le sentiment de cette famille qui voit un de ses membres assassiné par un criminel sexuel qui aurait dû effectuer onze années de prison et qui a été libéré après seulement sept années de peine effective. Ca signifie, je pense, qu'il faut s'interroger sur les libérations conditionnelles et les réductions de peine concernant les criminels sexuels dont on sait que pour la plupart, ils se comportent apparemment bien pendant la période de détention et qu'ils risquent d'être soumis à nouveau à leurs pulsions à leur sortie.
Il faudrait remettre en cause les remises de peine pour les délinquants sexuels ? C'est ce que vous voulez dire ?
Non. Cela signifie qu'il doit y avoir un examen individuel approfondi et pas de règles générales automatiques.
Pour les remises de peine ?
Pour les délinquants, pour les criminels sexuels. Ce n'est d'ailleurs pas, "délinquants", c'est pas un bon mot puisque ce n'est pas un délit, c'est un crime.
Ce que vous souhaitez, c'est la fin des remises de peine automatiques pour les délinquants sexuels ?
Je dis qu'il faut un examen individuel approfondi et pas de règles générales systématiques. Deuxième question, et deuxième moyen d'éviter de tels drames : ce sont des mesures de contrôle, de suivi, de surveillance qui soient à la fois coordonnées, opérationnelles et fermes. Cela peut passer de la libération conditionnelle sous réserve d'acceptation de la castration chimique. Cela peut passer par l'obligation de soins, par l'interdiction de résidence dans un périmètre suffisamment éloigné. Hier, je me rends à ces obsèques et je m'arrête quelques instants à la mairie et je croise, se rendant aux obsèques, la jeune fille et sa mère - jeune fille qui avait été victime de ce criminel sexuel, il y a quelques années - il était dans le même périmètre. Il n'avait rien été prévu pour l'éloigner.
Puisque sa peine était terminée...
C'est quand même extraordinairement choquant ! Et il faut aussi qu'il y ait une surveillance policière et de la gendarmerie qui soit réelle, et peut-être même...
Elle ne l'est pas aujourd'hui ?
Pas suffisamment.
??
La faute à qui ?
...Et peut-être même le port du bracelet électronique. Voyez, je donne un certain nombre de pistes qui permettent, en réalité, de rappeler que la plupart de ces mesures existe individuellement mais qu'il faut qu'elles soient mieux coordonnées et appliquées avec beaucoup plus de fermeté.
Deux questions, simples et précises : faut-il rendre obligatoire dans certains cas, les traitements de castration chimique ?
En tout cas, à ce stade, ma réflexion, il n'y a pas de décisions, des décisions sont prises autour du président de la République qui est extrêmement touché, mobilisé sur ce sujet ; ma réflexion, c'est que la libération conditionnelle pourrait être subordonnée à la castration chimique. C'est-à-dire que le criminel sexuel en prison décide s'il veut bénéficier de réduction, s'il veut bénéficier de libération conditionnelle, d'accepter la castration chimique. Dans le cas contraire, il ne devrait pas sortir. Comprenez-moi bien, parce que je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté : il n'y a pas dans mon esprit de volonté d'ingérence dans le domaine de la justice. Il y a simplement un souci de cohérence dans le respect des citoyens.
Vous revenez sur les propos que vous aviez tenus au lendemain du drame sur les juges d'application des peines ?
Encore une fois, je me suis exprimé sur ce sujet, il n'y a pas de volonté d'ingérence mais un simple souci, une simple détermination, une volonté de cohérence.
"Garde à vue prolongée pour les violeurs", dit Le Figaro ce matin. C'est une piste de réflexion ?
Il y a beaucoup de pistes de réflexion sur ce sujet. Effectivement, sur ce cas précis, il faut savoir que la garde à vue, c'est donc 48 heures, qu'il y a des éléments techniques qui permettent de déterminer ou de prédéterminer la présomption de culpabilité. Je pense notamment à l'ADN. Dans ce cas précis, les éléments étaient communiqués à l'extrême fin de garde à vue. Cela présente donc un certain nombre d'inconvénients. Cela fait partie des pistes. Aucune décision n'est prise. Il ne faut écarter aucune solution qui puisse protéger nos concitoyens.
Quand proposerez-vous des mesures précises ? Vous vous donnez quel délai ?
Ce sera très rapide. Très rapide puisque les mesures on les connaît, les pistes sont désormais bien approfondies et il faut maintenant des arbitrages. Mais la volonté du président de la République, c'est que de tels drames ne puissent jamais se reproduire.
F. Mitterrand, ministre de la Culture, a publié en 2005 un livre intitulé "La mauvaise vie" qui se trouve aujourd'hui au centre d'une polémique. Il raconte notamment dans ce livre son expérience du tourisme sexuel en Thaïlande. "Tous ces rituels de foire aux éphèbes, a-t-il écrit, de marchés aux esclaves, m'excite énormément. La profusion de garçons immédiatement disponibles me met dans un état de désirs que je n'ai plus besoin de réfréner ou d'occulter. L'argent et le sexe, je suis au coeur de mon système". Ces écrits vous choquent-ils ?
D'abord vous évoquez une citation extraite d'un livre paru voici plusieurs années...
...2005.
...Et honnêtement, je n'en connaissais pas l'existence. Et deuxième réflexion : je ne connaissais pas F. Mitterrand avant son entrée au Gouvernement. J'observe simplement, aujourd'hui, que comme ministre de la Culture, il est unanimement salué, reconnu, respecté de par sa compétence.
Je peux reprendre ma question, B. Hortefeux : Ces écrits vous choquent-ils ?
Je ne peux pas vous répondre sur des écrits que je ne connais pas. Puisque vous m'y encouragez, je regarderai ce livre qui est paru, encore une fois, voici longtemps. Je ne sais pas dans quel contexte cela a été écrit, dans quel contexte cela était présenté. Mais en revanche, ce que je sais, c'est que c'est un ministre de la Culture qui est aujourd'hui totalement, unanimement reconnu et salué pour ses compétences et son action.
La France combat et condamne le tourisme sexuel. Quelqu'un qui l'a pratiqué peut-il être ministre de la République ?
C'est la question encore une fois, c'est que je ne sais pas si F. Mitterrand l'a pratiqué, si c'est ça aussi votre question ?
Je vous réponds oui.
Ecoutez, mais vous me laisserez le temps. Vous, vous répondez, c'est votre droit, mais moi je répondrai une fois que j'aurai connu l'ensemble. Encore une fois, je persiste à dire que F. Mitterrand est une personnalité que j'ai découverte, qui est une personnalité attachante et qui est à l'évidence considéré comme un très bon responsable ministériel.
Et s'il s'avère qu'il a pratiqué du tourisme sexuel, peut-il être ministre de la Culture ?
Eh bien, vous me réinviterez à ce moment-là.
Peut-on dire qu'il y a un énorme embarras, aujourd'hui, dans le Gouvernement avec cette affaire ?
C'est un sujet qui est parti, comme cela arrive d'ailleurs sur certains sujets, ils partent très rapidement. Mais comme c'est très rapide, précisément il faut se méfier des jugements à l'emporte-pièces et des culpabilités pré-annoncées.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 9 octobre 2009
D'abord, première réflexion : j'ai effectivement souhaité me rendre aux obsèques de M.-C. Hodeau pour m'associer, au nom du président de la République et de tout le Gouvernement, à la peine, à la douleur, au chagrin de sa mère et de ses deux frères, ainsi que de ses proches. Et je l'ai fait naturellement avec leur accord, les ayant rencontrés au côté du président de la République, puisqu'il les avait reçus quelques heures à peine après la découverte du corps. Pour être tout à fait complet, je suis convaincu que le rôle des responsables publics face à ces drames est d'être au côté des victimes. Deuxième question que vous me posez
... La première que je vous pose...
Vous avez évoqué les obsèques, je vous explique pourquoi je m'y suis rendu. Deuxième élément : comment ç'aurait pu être évité ? D'abord, je persiste et je signe : oui, ce drame aurait pu, aurait dû être évité, d'ailleurs comme l'a rappelé le Premier ministre lui-même simultanément. Alors, comment ça aurait pu être évité ? Je crois qu'il y a deux questions, deux sujets. D'abord, première question, premier sujet : c'est la durée effective de la peine. Il faut comprendre le sentiment - ça, ce ne sont pas des statistiques, ce ne sont pas des théories, c'est de l'humain, c'est du charnel -, il faut comprendre le sentiment de cette famille qui voit un de ses membres assassiné par un criminel sexuel qui aurait dû effectuer onze années de prison et qui a été libéré après seulement sept années de peine effective. Ca signifie, je pense, qu'il faut s'interroger sur les libérations conditionnelles et les réductions de peine concernant les criminels sexuels dont on sait que pour la plupart, ils se comportent apparemment bien pendant la période de détention et qu'ils risquent d'être soumis à nouveau à leurs pulsions à leur sortie.
Il faudrait remettre en cause les remises de peine pour les délinquants sexuels ? C'est ce que vous voulez dire ?
Non. Cela signifie qu'il doit y avoir un examen individuel approfondi et pas de règles générales automatiques.
Pour les remises de peine ?
Pour les délinquants, pour les criminels sexuels. Ce n'est d'ailleurs pas, "délinquants", c'est pas un bon mot puisque ce n'est pas un délit, c'est un crime.
Ce que vous souhaitez, c'est la fin des remises de peine automatiques pour les délinquants sexuels ?
Je dis qu'il faut un examen individuel approfondi et pas de règles générales systématiques. Deuxième question, et deuxième moyen d'éviter de tels drames : ce sont des mesures de contrôle, de suivi, de surveillance qui soient à la fois coordonnées, opérationnelles et fermes. Cela peut passer de la libération conditionnelle sous réserve d'acceptation de la castration chimique. Cela peut passer par l'obligation de soins, par l'interdiction de résidence dans un périmètre suffisamment éloigné. Hier, je me rends à ces obsèques et je m'arrête quelques instants à la mairie et je croise, se rendant aux obsèques, la jeune fille et sa mère - jeune fille qui avait été victime de ce criminel sexuel, il y a quelques années - il était dans le même périmètre. Il n'avait rien été prévu pour l'éloigner.
Puisque sa peine était terminée...
C'est quand même extraordinairement choquant ! Et il faut aussi qu'il y ait une surveillance policière et de la gendarmerie qui soit réelle, et peut-être même...
Elle ne l'est pas aujourd'hui ?
Pas suffisamment.
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La faute à qui ?
...Et peut-être même le port du bracelet électronique. Voyez, je donne un certain nombre de pistes qui permettent, en réalité, de rappeler que la plupart de ces mesures existe individuellement mais qu'il faut qu'elles soient mieux coordonnées et appliquées avec beaucoup plus de fermeté.
Deux questions, simples et précises : faut-il rendre obligatoire dans certains cas, les traitements de castration chimique ?
En tout cas, à ce stade, ma réflexion, il n'y a pas de décisions, des décisions sont prises autour du président de la République qui est extrêmement touché, mobilisé sur ce sujet ; ma réflexion, c'est que la libération conditionnelle pourrait être subordonnée à la castration chimique. C'est-à-dire que le criminel sexuel en prison décide s'il veut bénéficier de réduction, s'il veut bénéficier de libération conditionnelle, d'accepter la castration chimique. Dans le cas contraire, il ne devrait pas sortir. Comprenez-moi bien, parce que je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté : il n'y a pas dans mon esprit de volonté d'ingérence dans le domaine de la justice. Il y a simplement un souci de cohérence dans le respect des citoyens.
Vous revenez sur les propos que vous aviez tenus au lendemain du drame sur les juges d'application des peines ?
Encore une fois, je me suis exprimé sur ce sujet, il n'y a pas de volonté d'ingérence mais un simple souci, une simple détermination, une volonté de cohérence.
"Garde à vue prolongée pour les violeurs", dit Le Figaro ce matin. C'est une piste de réflexion ?
Il y a beaucoup de pistes de réflexion sur ce sujet. Effectivement, sur ce cas précis, il faut savoir que la garde à vue, c'est donc 48 heures, qu'il y a des éléments techniques qui permettent de déterminer ou de prédéterminer la présomption de culpabilité. Je pense notamment à l'ADN. Dans ce cas précis, les éléments étaient communiqués à l'extrême fin de garde à vue. Cela présente donc un certain nombre d'inconvénients. Cela fait partie des pistes. Aucune décision n'est prise. Il ne faut écarter aucune solution qui puisse protéger nos concitoyens.
Quand proposerez-vous des mesures précises ? Vous vous donnez quel délai ?
Ce sera très rapide. Très rapide puisque les mesures on les connaît, les pistes sont désormais bien approfondies et il faut maintenant des arbitrages. Mais la volonté du président de la République, c'est que de tels drames ne puissent jamais se reproduire.
F. Mitterrand, ministre de la Culture, a publié en 2005 un livre intitulé "La mauvaise vie" qui se trouve aujourd'hui au centre d'une polémique. Il raconte notamment dans ce livre son expérience du tourisme sexuel en Thaïlande. "Tous ces rituels de foire aux éphèbes, a-t-il écrit, de marchés aux esclaves, m'excite énormément. La profusion de garçons immédiatement disponibles me met dans un état de désirs que je n'ai plus besoin de réfréner ou d'occulter. L'argent et le sexe, je suis au coeur de mon système". Ces écrits vous choquent-ils ?
D'abord vous évoquez une citation extraite d'un livre paru voici plusieurs années...
...2005.
...Et honnêtement, je n'en connaissais pas l'existence. Et deuxième réflexion : je ne connaissais pas F. Mitterrand avant son entrée au Gouvernement. J'observe simplement, aujourd'hui, que comme ministre de la Culture, il est unanimement salué, reconnu, respecté de par sa compétence.
Je peux reprendre ma question, B. Hortefeux : Ces écrits vous choquent-ils ?
Je ne peux pas vous répondre sur des écrits que je ne connais pas. Puisque vous m'y encouragez, je regarderai ce livre qui est paru, encore une fois, voici longtemps. Je ne sais pas dans quel contexte cela a été écrit, dans quel contexte cela était présenté. Mais en revanche, ce que je sais, c'est que c'est un ministre de la Culture qui est aujourd'hui totalement, unanimement reconnu et salué pour ses compétences et son action.
La France combat et condamne le tourisme sexuel. Quelqu'un qui l'a pratiqué peut-il être ministre de la République ?
C'est la question encore une fois, c'est que je ne sais pas si F. Mitterrand l'a pratiqué, si c'est ça aussi votre question ?
Je vous réponds oui.
Ecoutez, mais vous me laisserez le temps. Vous, vous répondez, c'est votre droit, mais moi je répondrai une fois que j'aurai connu l'ensemble. Encore une fois, je persiste à dire que F. Mitterrand est une personnalité que j'ai découverte, qui est une personnalité attachante et qui est à l'évidence considéré comme un très bon responsable ministériel.
Et s'il s'avère qu'il a pratiqué du tourisme sexuel, peut-il être ministre de la Culture ?
Eh bien, vous me réinviterez à ce moment-là.
Peut-on dire qu'il y a un énorme embarras, aujourd'hui, dans le Gouvernement avec cette affaire ?
C'est un sujet qui est parti, comme cela arrive d'ailleurs sur certains sujets, ils partent très rapidement. Mais comme c'est très rapide, précisément il faut se méfier des jugements à l'emporte-pièces et des culpabilités pré-annoncées.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 9 octobre 2009