Déclaration de M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme, sur les compétences et les missions d'Action logement en faveur du logement social et sur les défis qu'il lui faut relever, Paris le 2 décembre 2009.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Benoist Apparu - Secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme

Texte intégral

Monsieur le Président de l'UESL (Jérôme Bédier),
Monsieur le Vice Président de l'UESL (Jean-Luc Behro),
Mesdames et Messieurs les membres du conseil d'administration de l'UESL,
Mesdames et Messieurs les Présidents et Directeurs généraux des Comités interprofessionnels du logement,
Mesdames et Messieurs,

La profonde réforme de la participation des employeurs à l'effort de construction, qui s'est mise en oeuvre tout au long de l'année 2009, répondait à deux impératifs incontournables.
Il s'agissait d'abord d'apporter une réponse claire aux observations formulées par la Cour des comptes à de nombreuses reprises et présentées dans son rapport public pour 2009.
En effet, l'accumulation, au fil des temps, des conventions passées directement entre le 1 % Logement et l'État avait rendu la lecture et la compréhension de l'ensemble du dispositif de plus en plus difficile. La réforme de la gouvernance de l'ensemble de la participation des employeurs à l'effort de construction était donc indispensable.
Il s'agissait également de conforter l'utilisation des ressources d'Action logement au service des priorités de la politique du logement.
C'est pourquoi, la loi de mars 2009 a revu de manière conséquente la répartition des compétences entre les différents acteurs, à savoir le Parlement, l'État et Action logement.
Le législateur définit désormais les grands emplois d'Action Logement.
Le gouvernement, en concertation avec les partenaires sociaux gestionnaires d'Action Logement, a précisé, par décrets, la nature et les règles d'utilisation de ces emplois.
Enfin, il vous appartient de mettre en oeuvre les orientations définies par la loi. Cette mission, j'y reviendrais plus tard dans mon propos, vous ouvre de nouveaux champs d'action et de nouveaux défis que, j'en ai l'intime conviction, vous saurez relever.
Je sais que certains ont indiqué que c'était une nationalisation du 1%. Il n'en est rien. C'est désormais l'État et les partenaires sociaux qui marchent main dans la main pour répondre à ce besoin essentiel de nos concitoyens qu'est le logement, Car c'est bien pour cela que nous nous battons chaque jour, et que vous vous mobilisez sans compter.
En ce qui concerne les emplois, Il s'agissait de mobiliser vos ressources pour accroître nos efforts conjoints en faveur du logement de nos concitoyens, notamment des salariés des entreprises. Cette mobilisation doit permettre, en premier lieu, de financer les priorités fixées dans le cadre des décrets.
C'est pourquoi, en accord avec les partenaires sociaux gestionnaires d'Action Logement, des efforts significatifs ont été faits en faveur notamment du logement social.
Les subventions que vous apportez aux organismes HLM sont passées, depuis le début de cette année, de 225 Meuros à 300 ME. C'est un effort important qui a permis d'accroître le niveau de production de plusieurs milliers de logements sociaux.
Les dernières estimations dont je dispose montrent que l'année 2009 devrait Ôte exceptionnelle en ce qui concerne le financement de logements locatifs sociaux. PA de 125 000 logements devraient être financés cette année, meilleur chiffre depuis trente ans, et +20% par rapport à 2008 grâce au Plan de Relance décidé par le Président de la République il y a un an presque jour pour jour.
Ce succès, vous y avez contribué pour une large part et je vous en remercie.
Il a également été décidé d'intensifier le niveau de vos interventions en faveur de la rénovation urbaine et de l'amélioration de l'habitat: 1,3 Mdeuros y seront consacrés chaque année pendant trois ans, de 2009 à 2011.
Vous intervenez également, à hauteur de 800 Meuros, au soutien de l'accession populaire à !a propriété, au travers notamment du Pass Foncier et des prêts à l'accession.
Ces actions participent au développement de l'offre de logements économiquement accessibles, notamment pour les classes moyennes et plus particulièrement les classes moyennes dites, pour reprendre les termes des économistes, inférieures. Il s'agit des ménages qui disposent d'un revenu inférieur à 1 800 euros pour une personne seule ou 2 700 euros pour un couple.
Ces ménages, font, dans un grand nombre de cas, le choix de l'accession à la propriété. C'est, pour eux, un objectif et un enjeu de valorisation sociale.
Le doublement voire le triplement des prix de l'immobilier, fait malheureusement qu'ils n'ont pas les moyens suffisants pour pouvoir satisfaire ces aspirations. Il en résulte un profond sentiment d'insatisfaction, voire de «frustration ».
Le maintien de vos outils dans le domaine de l'accession populaire à la propriété, voulu par les partenaires sociaux, est donc indispensable et joue un rôle essentiel vis-à-vis de ces populations.
La réforme d'Action Logement pose les bases de nouveaux champs d'action et de nouveaux défis à relever.

Quatre défis résultent de l'application directe de cette réforme.
Il s'agit :

  • de votre mobilisation pour renforcer la production de logements abordables dans les zones les plus tendues ;
  • de votre participation, à hauteur de 25% de vos attributions annuelles, au relogement des salariés et des demandeurs d'emploi désignés comme prioritaires par les commissions de médiation Dalo ;
  • de vos interventions, dans le cadre de la GRL, auprès des ménages ayant des difficultés pour acquitter leur loyer ;
  • de votre capacité à participer au mouvement de regroupement des SA d'HLM que je souhaite impulser.

En ce qui concerne la production de logement en zone tendue, je sais que je n'ai pas besoin de vous convaincre. Vous êtes au quotidien au contact des demandeurs de logement que ce soit les entreprises ou leurs salariés eux mêmes.
Soyez convaincu que je suis déterminé à concentrer l'effort de l'État sur ces territoires où les besoins sont les plus criants : 60% des logements sociaux sont aujourd'hui construits dans les zones qui ne sont pas les plus tendues. Je souhaite inverser cette tendance, et ce sera fait dès 2010. J'attends de vous que vous sachiez comme actionnaire de référence des sociétés et comme financeur accompagner ce mouvement.
En ce qui concerne les relogements DALO, il est important que chacun d'entre nous prenne ses responsabilités.
C'est ce que je fais au nom de l'État, notamment en Île-de-France, là où les besoins sont les plus criants.
Aujourd'hui, en Île-de-France, les relogements sur le contingent préfectoral représentent 12% des attributions alors qu'il pourrait aller jusqu'à 25% des attributions!
J'ai adressé des consignes claires aux préfets pour contractualiser avec les bailleurs sur des objectifs d'attributions permettant de retrouver la plénitude du contingent de l'État à travers les flux.. Cela représente plus de 5 000 logements supplémentaires en Île-de-France.
J'attends de votre part une mobilisation toute aussi importante sur vos attributions. En Île-de-France, selon l'estimation faite par l'ANPEEC, c'est environ 5 000 relogements supplémentaires qui pourraient être effectués au bénéfice de demandeurs DALO...
J'ai réuni début octobre les trois grands collecteurs de cette région avec l'UESL pour engager rapidement la démarche : depuis, plus de 600 propositions de relogement ont été faites au bénéfice de ménages DALO ou de sortants d'hébergement éligibles au DALO.
Je mesure l'effort qui a été fait. Il nous appartient de le transformer en relogements effectifs et de poursuivre dans cette voie.
De nombreuses personnes parmi vos demandeurs ont déjà déposés des dossiers DALO voire sont déclarés prioritaires. Nos objectifs sont donc convergents.
La circulaire, que nous avons élaborée avec l'UESL, se veut pragmatique, en ouvrant beaucoup de souplesse dans la mise en oeuvre de ce dispositif. Il faut en effet faire confiance à l'intelligence locale, au dialogue que vous engagerez avec les préfets, pour mettre en place le système qui sera le plus optimal en termes de relogement au bénéfice de nos concitoyens mal logés. Sa mise en oeuvre repose sur l'établissement de relations étroites- et nouvelles - entre vous, collecteurs, et les préfets de départements. La désignation d'un référent, par territoire, représentant l'ensemble des collecteurs pourra y participer.
En contrepartie de cette souplesse, je serai, et cet objectif est partagé avec l'UESL, intransigeant sur le suivi. Il nous permettra de mesurer l'implication des collecteurs et des préfectures et d'analyser précisément les raisons des échecs en matière de relogement.
Votre engagement est indispensable. Si notre pays a pu consacrer ce droit, c'est parce qu'on savait pouvoir prendre appui sur tous les acteurs, au service tout d'abord de la population, en particulier les ménages les plus modestes.
Cette priorité est réaffirmée par le Premier ministre dans le «Chantier National Prioritaire 2008-2012 pour les personnes sans abris ou mal logés».
Le troisième défi à relever, et qui devra l'être dans les premiers mois de l'année 2010, c'est la mise en oeuvre du nouveau dispositif de garantie contre les risques locatifs - la GRL -.
La nouvelle GRL, cher Jean-Luc Behro, sera opérationnelle au début de l'année prochaine. Un premier décret est en cours de signature, et le décret relatif au cahier des charges sera examiné la semaine prochaine par le Conseil d'État.

Quelle est sa philosophie ?
Garantir aux propriétaires leurs loyers, en cas de défaillance de leurs locataires et pour les locataires de bonne foi, mettre en place très rapidement un traitement social des impayés.
Pour garantir aux propriétaires leurs loyers, la nouvelle GRL s'articulera autour d'un contrat socle distribué par les assureurs, et qui permettra de couvrir les propriétaires contre les impayés de loyer des locataires ayant un taux d'effort inférieur ou égal à 50%.
Votre rôle sera essentiel pour la réussite de cette nouvelle GRL, notamment pour mettre en place un traitement social des impayés. Votre implication, vole réactivité, votre écoute et votre capacité d'innovation seront déterminantes.
C'est un des plus beaux défis que vous aurez à relever: réconcilier propriétaires et locataires grâce à la mise en oeuvre d'un fonctionnement fluide et optimal de la GRL.
En tout état de cause, les moyens nécessaires seront mis à votre disposition. L'arrêté fixant le niveau de rémunération de ces prestations a été signé hier. Une évaluation, sur la base des coûts réellement engagés, sera réalisée à l'issue d'une période d'un on pour revoir, le cas échéant, ce niveau.
Des instructions seront données par ailleurs aux préfets afin qu'ils facilitent la prise en compte de votre intervention dans le cadre des dispositifs de droit commun de prévention des expulsions.
Le quatrième défi concerne votre Implication dans le mouvement de regroupement des sociétés anonymes d'HLM.
Vous avez entrepris un vaste mouvement de regroupement des collecteurs : vous êtes passés, en quelques mois, de plus d'une centaine de collecteurs à une petite vingtaine aujourd'hui.
Comme vous le savez, je souhaite l'émergence de quelques grands acteurs du logement social, disposant chacun d'une centaine de milliers de logements, et qui interviennent sur l'ensemble du territoire national.

Cette évolution est indispensable pour répondre à deux grandes ambitions :

  • Ces acteurs puissants devront intervenir sur l'ensemble de la chaîne du logement, depuis l'hébergement et le logement adapté jusqu'au logement social, voire l'accession.

Je pense en effet qu'une telle organisation permettrait de faciliter la mise en oeuvre d'un parcours résidentiel allant de l'hébergement à l'accès à un logement social.
Peu d'opérateurs sont aujourd'hui en capacité de le faire. Il convient donc de faire émerger de grands acteurs susceptibles de s'y engager résolument.

  • Leur deuxième mission sera d'accroître le niveau de production de logements sociaux en zone tendue en opérant une mutualisation interne de leurs ressources.

C'est pourquoi il leur reviendra, compte tenu de leur implantation nationale, de vendre des logements sociaux à leurs locataires en zone peu tendue, pour financer la production de logements là où les besoins sont importants et où le coût du foncier est élevé.
Vous êtes, pour la plupart, actionnaires de référence de sociétés anonyme d' HLM.
Je souhaite, en conséquence, que le vaste mouvement de regroupement des collecteurs que vous avez conduit puisse être mis à profit pour engager le même processus de regroupement de SA d'HLM dont vous êtes actionnaires de référence susceptibles d'être, à terme, en capacité de répondre aux deux ambitions que je viens d'esquisser.
La réussite de ces quatre grands défis nécessite néanmoins deux conditions préalables: l'exemplarité et la pérennité d'Action Logement.
Je l'ai rappelé en introduction, la réforme de la gouvernante d'Action Logement est une réponse directe des observations de la Cour des comptes.
Il est indispensable de garder le cap et d'éviter, collectivement, toute dérive qui remette en cause la claire répartition des responsabilités voulues par le Parlement dans le cadre de la loi du 25 mars 2009.
Il est également nécessaire d'assurer la pérennité d'Action Logement, que défend Jérôme Bedier, dont je salue l'engagement personnel pour préserver l'identité et les valeurs d'Action Logement, toujours dans un dialogue constructif (et musclé). L'investissement des CIL, votre investissement, dans les différents défis à relever ne peut donner toute sa mesure que si vous ne nourrissez pas de doute quant à votre avenir.
Ce sentiment est partagé et je puis vous assurer que je serai particulièrement vigilant à assurer l'équilibre du système.
Cela nécessitera, dès qu'une certaine stabilité sera atteinte sur l'ensemble des actions engagées, d'engager une réflexion sur les moyens à imaginer pour éviter toute défaillance financière d'Action Logement.
Je vous remercie.

Source http://www.uesl.fr, le 11 janvier 2010