Déclaration de Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat au développement durable, sur la simplification du droit applicable aux entreprises industrielles, notamment le régime d'enregistrement, les enquêtes publiques et la procédure d'autorisation pour les installations classées, à Paris le 27 octobre 2010.

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Circonstance : Remise du rapport de la députée Laure De La Raudière en vue de la simplification du droit applicable aux entreprises industrielles françaises, à Paris le 27 octobre 2010

Texte intégral

Monsieur le ministre, (Christian Estrosi)
Madame la députée (Mme Laure De La Raudière),
Mesdames, messieurs,
Je vous voudrais tout d'abord vous remercier M. le ministre de nous accueillir dans votre ministère pour la remise du rapport de la députée Laure De la Raudière à qui j'adresse tous mes compliments, ainsi qu'à ses collaborateurs, pour la qualité des propositions qu'elle nous remet aujourd'hui. Je crois pouvoir dire que ce travail a été effectué avec beaucoup de réalisme et de pragmatisme, deux qualités particulièrement appréciées par le monde industriel.
Vous avez su être à l'écoute du monde de l'économie, vous avez également su prendre en compte les contraintes s'imposant aux services des ministères et apprécier les propositions qui ont pu vous être faites. Et je sais que vous avez coordonné votre démarche avec les travaux engagés dans le cadre du Grenelle Environnement et plus largement dans le cadre des politiques environnementales portées par le Ministère du développement durable, le MEEDDM.
Et je crois pouvoir souligner que le MEEDDM est lui aussi, de son côté, très attaché à trouver un bon équilibre entre la réglementation, nécessaire qui entraîne certaines exigences, c'est le propre de toute réglementation, et la volonté de ne pas créer de charge non justifiée et trop lourde pour les entreprises.
Nous avons déjà une longue pratique de la concertation avec les entreprises sur l'élaboration des réglementations, leur évaluation, leur mise en oeuvre, y compris en comparant notre pratique avec celle de nos partenaires européens. Bien sûr nous souhaitons pouvoir nous améliorer.
Le Ministère s'est ainsi fixé comme objectif de réduire ses délais d'instruction. C'est ainsi qu'en 2009, les services d'inspection des installations classées ont instruit 75 % des demandes d'autorisations d'installations nouvelles dans un délai de moins d'un an.
Nous avons également lancé des actions très significatives de simplification, comme le régime d'enregistrement pour les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). C'est une évolution majeure. Rappelons que le but de ce régime d'enregistrement est de soumettre à une autorisation simplifiée les installations simples et standardisées implantées en dehors de zones sensibles sur le plan environnemental. L'objectif est de réduire de moitié les délais de délivrance des autorisations (5 mois à partir du dossier complet) et de simplifier les dossiers à fournir par les industriels. Le régime d'enregistrement assurera également une meilleure protection de l'environnement en concentrant les efforts des exploitants et de l'administration sur les sujets de prévention des pollutions ou de risques les plus importants.
Depuis avril 2010, plusieurs secteurs ont bénéficié de l'enregistrement : stations services, entrepôts, installations de méthanisation, blanchisseries, activités de compression,... D'autres décrets de nomenclature seront publiés dans les prochains mois afin de couvrir d'ici à deux ans une cible potentielle initiale de 30 % des flux de dossiers de demande d'autorisation.
Dans votre rapport vous avez souligné la nécessité de réussir la mise en oeuvre de cette réforme et nous nous y employons.
La loi Grenelle 2 a également permis d'introduire des mesures de simplification et de clarification. Je pense notamment à la réforme des enquêtes publiques. On est passé d'un système où il y avait plus de 180 types d'enquêtes publiques différentes, où tout le monde s'y perdait avec le risque de devoir tout reprendre à zéro si on se trompe de procédure, à un système où il n'y a plus que deux types d'enquête publique. La possibilité de mener conjointement certaines enquêtes publiques a été introduite dans la loi ce qui, comme vous le soulignez dans le rapport, produira un gain de temps et d'efficacité considérable. Lors de l'examen du projet de loi Grenelle 2, j'ai moi-même été particulièrement vigilante à ce que le dispositif proposé soit équilibré et apporte des avantages à tous les acteurs.
Plus généralement, nous partageons l'état d'esprit général du rapport, et bon nombre de propositions. Certaines sont d'ailleurs déjà en oeuvre ou prévues, comme : le travail lancé sur la qualification par labellisation volontaire des bureaux d'étude, initié suite à la table ronde sur les risques industriels conclue en juillet 2009, la dématérialisation de certains échanges (par exemple sur les déclarations de rejets polluants), bien sûr le régime d'enregistrement, avec la poursuite de sa mise en oeuvre et l'examen de son extension en 2012, l'élaboration de guides ou circulaires sur l'application des réglementations, ou encore la perspective, dans le cadre du programme stratégique de l'inspection des installations classées (ICPE), de pouvoir indiquer un délai pour l'examen des dossiers.
Nous sommes également prêts à mettre en oeuvre des pistes d'amélioration complémentaires que vous avez proposées. Je pense notamment à l'optimisation de la procédure d'autorisation pour les installations classées. Lorsqu'un industriel souhaite introduire un changement dans son exploitation, si ce changement n'est pas notable et n'a pas d'impact sur l'environnement, vous préconisez de ne pas soumettre un nouveau dossier d'autorisation à l'enquête publique et vous proposez une procédure rapide, par simple arrêté préfectoral. Comme vous le recommandez, nous sommes prêts à définir plus clairement, via un guide, les conditions dans lesquelles l'absence d'impact ou risque significatif permettra de recourir à cette procédure simple, qui ne nécessite aucun changement législatif.
Une des propositions phares du rapport consiste à mieux réglementer et bien se poser en amont la question du rapport coût/bénéfice.
Nous sommes également prêts à améliorer les études d'impact préalables à toute réglementation, mais il faut aussi que l'on puisse organiser entre les entreprises et les administrations une méthode de travail qui soit utile et de qualité. Car les informations nécessaires pour ces études se trouvent bien souvent au sein des entreprises. Or la communication de ces informations de manière la plus juste et la plus complète possible est nécessaire pour calibrer au mieux la réglementation.
Sur la bonne harmonisation avec les réglementations des autres pays et le portage des projets au niveau européen, là aussi nous sommes d'accord sur le principe. Il faut toutefois être conscient que :
certains champs de réglementation ne sont pas et ne seront pas, durablement, traités au niveau européen. C'est le principe de subsidiarité. Un encadrement au niveau national est donc parfois nécessaire en l'absence de réglementation européenne. Prenons un exemple, celui des carrières pour lesquelles il n'existe pas d'encadrement communautaire. Or personne ne peut nier qu'elles peuvent présenter potentiellement des risques ou des nuisances.
Pour pouvoir faire des comparaisons avec nos voisins européens, il nous faut également votre participation,
Pour peser dans la négociation européenne nous renforçons autant que faire se peut, dans un contexte où nous devons réorganiser nos équipes et parfois réduire nos effectifs, notre présence dans les instances européennes (experts détachés) et dans les négociations. En ce qui concerne les ICPE, les déchets, et les produits chimiques notre présence est réellement forte. Mais il faut que les fédérations professionnelles se fassent aussi entendre.
Pour finir, je voudrais rappeler qu'il ne faut pas oublier nos autres partenaires : associations de consommateurs, riverains, ONG, syndicats... La réussite de ces actions passe par une appropriation par tous, les autres parties prenantes ne devant pas avoir l'impression que cela se fera au détriment de l'environnement ou de la sécurité, notre ministère sera particulièrement attentif sur ce sujet. Il faudra y veiller.
En plus des chantiers de simplification et d'harmonisation, je pense qu'il ne faut pas oublier l'accompagnement des entreprises, en particulier des PME et TPE, pour faciliter l'appropriation de la réglementation, européenne ou nationale, et ipso facto sa mise en oeuvre. Sans empiéter naturellement sur les missions du ministère de l'industrie, le MEEDDM considère qu'il doit s'impliquer fortement dans ce domaine. Nous l'avons ainsi fait pour la mise en place du règlement REACH sur les produits chimiques et cela en lien avec le ministère de l'industrie, ou récemment encore, en signant une convention avec l'Union des Industries Chimiques. Nous continuerons nos actions dans ce domaine, en partenariat avec tous les acteurs. Ainsi nous préparons une convention, dans tous les domaines d'activités de notre ministère, avec l'ACFCI et la dimension accompagnement sera très présente dans ce partenariat.
Politiques environnementales et compétitivité industrielle ne sont pas opposées, elles vont au contraire de pair et se renforcent l'une l'autre. Nous savons également que certains pays savent jouer de l'arme réglementaire, quand leur industrie est en avance sur des normes ou des exigences nationales, ils savent les porter au niveau communautaire et en faire un avantage compétitif.
Je suis personnellement convaincue que la croissance durable est la seule voie possible de développement pérenne. C'est bien entendu le travail que nous menons pour développer les filières vertes. Nous savons que nous avons là une ressource d'emplois considérable. Rappelons que nos deux ministères ici réunis copilotent les chantiers de développement de dix-huit filières « vertes » identifiées comme stratégiques. Et, dans la période budgétaire complexe que nous connaissons, cette priorité a été retenue au titre du grand emprunt pour les investissements d'avenir. Ainsi 250 Meuros seront consacrés, en s'appuyant sur l'ADEME, à l'économie circulaire ; recyclage et valorisation des déchets, dépollution, éco-conception, activités qui d'ailleurs, soyons en conscients, n'auraient pas émergé si depuis quatre décennies une réglementation progressive mais ambitieuse n'avait pas fixé des objectifs de progrès. Mais c'est aussi la compétitivité industrielle et environnementale des filières « classiques ». Les entreprises qui restent, qui réussissent à surmonter la concurrence et les crises, ce sont bien souvent les plus innovantes. Ce sont celles qui sont en avance sur leur temps et ce dans toutes les dimensions de l'entreprise : recherche et développement, social, environnement,...
Je vous remercie.Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 28 octobre 2010