Déclaration de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre des affaires étrangères et européennes, sur la politique d'immigration et la question de la délivrance des visas, Paris le 14 février 2011.

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Circonstance : 4ème conférence préfectorale et consulaire à Paris le 14 février 2011

Texte intégral

Messieurs les Secrétaires généraux,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les Préfets,
Mesdames et Messieurs les Consuls,
Mesdames et Messieurs,
La mondialisation transforme les enjeux de notre politique d'immigration.
La libre circulation des personnes accroît la pression migratoire sur les pays développés. Elle crée aussi des opportunités, en attirant sur notre sol des compétences et des talents susceptibles de contribuer au rayonnement de notre pays.
La délivrance d'un visa ne se résume donc pas à un simple acte administratif. Elle exprime l'image que nous voulons donner de la France.
Une France respectueuse des personnes et de leur dignité, soucieuse d'accueillir les étrangers dans la mesure de ses capacités d'accueil.
Une France généreuse, solidaire avec les pays dits «d'origine», lucide sur ses intérêts économiques, culturels, et scientifiques.
Une France ambitieuse, tournée vers les puissances émergentes d'aujourd'hui et de demain, prête à contribuer à la formation de ses talents et de ses élites.
Responsables du ministère des Affaires étrangères et européennes, responsables du ministère de l'Intérieur, de l'Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l'Immigration, vous contribuez, chacun dans votre rôle, à la réussite de notre politique d'immigration. La politique des visas en est un volet important.
Au-delà des structures administratives, la réussite de notre action exige la cohérence et la continuité des efforts engagés par l'Etat.
Brice Hortefeux et moi-même partageons la même volonté d'une coopération approfondie de nos deux ministères.
Si le ministère des Affaires étrangères prend toute sa part dans la mise en oeuvre de la politique des visas, la coopération entre nos deux ministères est aujourd'hui appelée à se développer et à s'approfondir.
Ministre des Affaires étrangères et européennes, j'entends donner à notre réseau consulaire tous les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de la politique des visas.
Les moyens humains d'abord.
La France est riche de l'un des réseaux consulaires les plus développés du monde. Dans nos postes, 822 agents, dont 237 agents expatriés, ont délivré près de 2 millions de visas en 2010. Je mesure la charge et la difficulté de leur travail. Je veux leur rendre hommage.
Malgré les contraintes budgétaires que nous connaissons, vous devez disposer des effectifs nécessaires à l'accomplissement de nos missions. Je serai vigilante sur ce point. J'ai demandé au Secrétaire général une analyse des tâches dans les gros postes consulaires afin de normer celles qui peuvent l'être.
Pour mieux lutter contre la fraude, j'ai souhaité renforcer la formation de nos agents, y compris pour les personnels recrutés localement. Notre partenariat avec la Direction centrale de la police de l'air et des frontières et la Direction de la coopération internationale nous le permettra.
Les moyens sont humains. Ils sont aussi matériels.
J'entends poursuivre et amplifier l'effort de modernisation des procédures, autour d'un double objectif.
Recentrer le travail des agents consulaires sur l'analyse des dossiers. L'externalisation de la collecte de demandes de visas évite à nos agents des tâches de moindre valeur ajoutée. Elle leur permet de se concentrer sur les tâches régaliennes et d'assurer une meilleure surveillance du processus. Aujourd'hui, elle concerne près de la moitié des demandes de visas. Je souhaite qu'elle se développe rapidement.
Garantir la sécurité des titres. Près de la moitié de nos visas sont aujourd'hui biométriques. Cela permet d'alimenter le fichier Visabio, et de faciliter ainsi le travail du ministère de l'Intérieur. J'entends poursuivre cet effort. Des expérimentations d'externalisation de la prise d'empreintes biométriques seront lancées dès cette année.
Sur ces deux sujets, l'externalisation et la biométrie, la France est à la pointe des pays de l'espace Schengen. C'est dire l'importance de l'engagement commun de nos deux ministères.
Mesdames et Messieurs,
La politique des visas répond à des objectifs complexes et multiples.
Notre politique d'influence nous conduit à identifier les compétences, les talents, les potentiels, qui peuvent contribuer au rayonnement de la France. Je demande à nos représentants à l'étranger d'examiner le profil des demandeurs de visas à la lumière des intérêts à long terme de la France dans tel pays ou telle zone géographique.
Notre volonté de lutter contre l'immigration irrégulière exige aussi la plus grande vigilance de notre part. La coopération de nos deux ministères doit nous conduire à mieux articuler nos objectifs. La lutte contre l'immigration clandestine est l'une de nos premières priorités.
Pour mieux lutter contre l'immigration irrégulière, sans mettre en cause notre politique d'influence, nous devons approfondir la coopération entre nos deux ministères.
Deux objectifs guident notre travail.
Mieux lutter contre la fraude à l'entrée.
Aujourd'hui, plus de 85% des visas délivrés par les consulats sont des visas Schengen, délivrés conformément aux règles communautaires. La politique des visas est une politique européenne. Nos réponses doivent donc être européennes.
La généralisation de la biométrie chez nos partenaires européens et à l'entrée dans l'Espace Schengen est une première piste. Le système d'information visas (VIS) sera lancé à l'automne.
L'enregistrement des entrées et des sorties de l'espace Schengen est une deuxième piste. Cela peut permettre d'avoir une idée précise du nombre de ressortissants de pays tiers qui utilisent des visas de court séjour afin de s'installer illégalement en Europe, d'identifier, grâce à la biométrie, les migrants clandestins et de faciliter leur réadmission vers leur pays d'origine. La Commission européenne y travaille, avec le soutien du gouvernement français.
Garantir l'effectivité des mesures de reconduite à la frontière est notre deuxième objectif.
Pour reconduire à la frontière une personne qui ne dispose pas de titre de voyage valide, la coopération des consulats étrangers en France est indispensable. Or, elle fait souvent défaut. Nous devons donc favoriser la délivrance par les consulats étrangers des laissez-passer consulaires.
Nos deux ministères sont donc convenus d'un plan visant à améliorer le taux de délivrance de ce laissez-passer. Il prévoit une démarche adaptée à chacun des pays concernée, avec le concours de nos postes. Ce plan comporte des volets d'ordre diplomatique. Je demande à nos représentants à l'étranger de contribuer à leur bonne mise en oeuvre. Ce plan prévoit aussi des actions de coopération pour faciliter l'identification des personnes. Nos représentants à l'étranger devront souligner l'importance que la France attache à la lutte contre l'immigration irrégulière, attirer l'attention de leurs interlocuteurs locaux, comme je le fais moi-même, sur les difficultés rencontrées, exprimer clairement, lorsque cela est nécessaire, notre demande d'une meilleure coopération.
Mesdames et Messieurs,
Cette conférence, la quatrième du genre, doit nous permettre d'explorer toutes les pistes de la coopération entre nos deux ministères en matière d'immigration. Elle doit servir à échanger nos expériences, croiser nos idées, formuler des propositions concrètes et opérationnelles.
Je connais assez ces deux ministères pour mesurer l'attachement de chacune et chacun d'entre vous à l'intérêt général et à l'image de la France.
Je vous souhaite d'excellents travaux.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 février 2011