Texte intégral
L'impôt négatif est une idée qui depuis longtemps fait son chemin. Elle a été mise en uvre aux Etats-Unis par l'administration Reagan avec l'Earned Income Tax Credit, en Angleterre par John Major puis par Tony Blair avec le Working Family Tax Credit, et tout récemment en Belgique, pays qui nous est proche par son système social et fiscal, par le gouvernement libéral de Guy Veroshtadt. En France même, le Conseil d'Analyse Economique s'est prononcé à deux reprises en faveur d'un dispositif se rapprochant de ce qu'il appelle " le système idéal de l'impôt négatif ".
Pour ma part, cela fait déjà longtemps que je propose un impôt négatif adapté aux spécificités sociales françaises sous la forme d'un revenu familial garanti. Je suis même persuadé qu'aujourd'hui cette proposition constitue la réforme clé qui peut nous permettre de redessiner un Etat social moderne.
Paul Fabra voit dans cette proposition une fausse bonne idée, caractéristique d'une abstraction bien française. Je n'ignore ni les arguments que l'on peut opposer à l'idée de l'impôt négatif depuis que Milton Friedman l'a proposé il y a quarante ans, ni l'abondante littérature économique consacrée à l'échec des solutions similaires mises en uvre en Angleterre au 19ème siècle.
Si la critique de Paul Fabra n'est pas sans fondement elle fait cependant abstraction du système de redistribution et de garantie sociale de notre actuel Etat Providence. La question n'est pas de savoir si un revenu familial garanti tel que je le propose est un système parfait totalement exempt d'effets pervers, mais de savoir s'il est plus performant, plus lisible, plus simple et plus juste que notre actuel maquis d'aides sociales dont on commence à prendre conscience qu'il aboutit à enfermer des millions de familles dans l'assistance et dans la dépendance.
Ce système qui se caractérise par l'existence de 9 minimas sociaux de base, d'un salaire minimum et de multiples exonérations de charges est devenu, selon les termes mêmes d'un récent rapport du plan, à la fois " illisible " et " imprévisible " (plafond de ressources différents d'une prestation à l'autre, prise en compte inégale de la situation familiale, effets de seuils). C'est pourquoi dans mon esprit, le revenu familial garanti ne doit pas se surajouter à notre maquis d'aides sociales ou à notre fiscalité biscornue à la façon du crédit d'impôt baptisé " prime pour l'emploi" improvisé et bricolé par le gouvernement. Le revenu familial garanti s'inscrit dans un projet plus vaste de refondation fiscale et sociale.
Il s'agit d'assurer à tout citoyen un revenu garanti en fonction de la composition de son foyer familial :
- Un revenu minimum ( au niveau de notre actuel RMI) lié chaque fois qu'on le peut à une activité d'utilité sociale mise en uvre par les collectivités locales.
- Un revenu familial garanti jusqu'à un certain plafond en cas d'activité (travail salarié, à temps plein ou partiel, travail indépendant) au moyen d'un complément de revenu dégressif favorisant ainsi la reprise du travail pour celles et ceux qui sont enfermés dans l'assistance.
Un tel revenu familial garanti passe par la remise à plat de notre système d'aide sociale car il permet d'abord d'instituer un revenu minimum de base qui a vocation à se substituer de façon plus simple et plus équitable à nos minima sociaux.
Il s'inscrit aussi dans le cadre d'une réforme globale de l'impôt sur le revenu, qui ferait de la CSG, payée par tous les Français, la première tranche proportionnelle d'un impôt sur le revenu réformé, allégé, simplifié et retenu à la source.Ceci permettrait, en outre, de faire en sorte que les prestations liées à la solidarité soient gérées par l'administration fiscale permettant au citoyen de mesurer exactement ce qu'il reçoit de la solidarité nationale.
Ainsi la feuille de paie comporterait jusqu'à un certain seuil de revenu familial -compte tenu de la composition de la taille de la famille- un crédit d'impôt qui s'ajouterait au salaire. Au-delà de ce seuil, un prélèvement fiscal serait directement retenu à la source sur la feuille de paie.
Un tel dispositif serait l'occasion d'une "feuille de paie vérité" faisant apparaître le salaire complet par la réintégration des cotisations dites patronales (qui constituent en réalité un salaire indirect, propriété des salariés). Il serait aussi l'occasion de clarifier enfin nos cotisations sociales afin de mieux distinguer ce qui relève de la solidarité nationale, et donc de l'impôt, (les allocations familiales, une part de l'assurance maladie..) et ce qui relève de l'assurance, et donc de la cotisation, (le chômage, la vieillesse, une part de l'assurance maladie, les accidents du travail).
Ainsi un impôt négatif à la française constitue un puissant levier de réforme de notre Etat providence.
En présentant ce projet à l'Assemblée Nationale j'avais tenté de prévenir les craintes exprimées par Paul Fabra . A la question " donner une subvention publique au travail mal payé pour le rendre plus attrayant, n'est-ce pas prendre le risque de désorganiser le marché du travail ? ", je répondais " ce risque existe, mais c'est celui de toutes les aides à l'emploi et de toutes les baisses artificielles des charges sociales. La sagesse veut qu'au fil du temps et du retour au plein emploi nous atténuions cette aide publique pour permettre au marché du travail redynamisé de fonctionner plus librement et d'offrir des perspectives de revenus qui n'aient plus besoin de soutien public ". Quoiqu'il en soit, une chose est certaine, par rapport au système actuel, le revenu familial garanti minimise les distorsions et les effets pervers. Même s'il n'est pas exempt de tout reproche, il constitue un système plus clair, plus lisible, plus transparent et plus juste.
(source http://www.demlib.com, le 24 avril 2001)
Pour ma part, cela fait déjà longtemps que je propose un impôt négatif adapté aux spécificités sociales françaises sous la forme d'un revenu familial garanti. Je suis même persuadé qu'aujourd'hui cette proposition constitue la réforme clé qui peut nous permettre de redessiner un Etat social moderne.
Paul Fabra voit dans cette proposition une fausse bonne idée, caractéristique d'une abstraction bien française. Je n'ignore ni les arguments que l'on peut opposer à l'idée de l'impôt négatif depuis que Milton Friedman l'a proposé il y a quarante ans, ni l'abondante littérature économique consacrée à l'échec des solutions similaires mises en uvre en Angleterre au 19ème siècle.
Si la critique de Paul Fabra n'est pas sans fondement elle fait cependant abstraction du système de redistribution et de garantie sociale de notre actuel Etat Providence. La question n'est pas de savoir si un revenu familial garanti tel que je le propose est un système parfait totalement exempt d'effets pervers, mais de savoir s'il est plus performant, plus lisible, plus simple et plus juste que notre actuel maquis d'aides sociales dont on commence à prendre conscience qu'il aboutit à enfermer des millions de familles dans l'assistance et dans la dépendance.
Ce système qui se caractérise par l'existence de 9 minimas sociaux de base, d'un salaire minimum et de multiples exonérations de charges est devenu, selon les termes mêmes d'un récent rapport du plan, à la fois " illisible " et " imprévisible " (plafond de ressources différents d'une prestation à l'autre, prise en compte inégale de la situation familiale, effets de seuils). C'est pourquoi dans mon esprit, le revenu familial garanti ne doit pas se surajouter à notre maquis d'aides sociales ou à notre fiscalité biscornue à la façon du crédit d'impôt baptisé " prime pour l'emploi" improvisé et bricolé par le gouvernement. Le revenu familial garanti s'inscrit dans un projet plus vaste de refondation fiscale et sociale.
Il s'agit d'assurer à tout citoyen un revenu garanti en fonction de la composition de son foyer familial :
- Un revenu minimum ( au niveau de notre actuel RMI) lié chaque fois qu'on le peut à une activité d'utilité sociale mise en uvre par les collectivités locales.
- Un revenu familial garanti jusqu'à un certain plafond en cas d'activité (travail salarié, à temps plein ou partiel, travail indépendant) au moyen d'un complément de revenu dégressif favorisant ainsi la reprise du travail pour celles et ceux qui sont enfermés dans l'assistance.
Un tel revenu familial garanti passe par la remise à plat de notre système d'aide sociale car il permet d'abord d'instituer un revenu minimum de base qui a vocation à se substituer de façon plus simple et plus équitable à nos minima sociaux.
Il s'inscrit aussi dans le cadre d'une réforme globale de l'impôt sur le revenu, qui ferait de la CSG, payée par tous les Français, la première tranche proportionnelle d'un impôt sur le revenu réformé, allégé, simplifié et retenu à la source.Ceci permettrait, en outre, de faire en sorte que les prestations liées à la solidarité soient gérées par l'administration fiscale permettant au citoyen de mesurer exactement ce qu'il reçoit de la solidarité nationale.
Ainsi la feuille de paie comporterait jusqu'à un certain seuil de revenu familial -compte tenu de la composition de la taille de la famille- un crédit d'impôt qui s'ajouterait au salaire. Au-delà de ce seuil, un prélèvement fiscal serait directement retenu à la source sur la feuille de paie.
Un tel dispositif serait l'occasion d'une "feuille de paie vérité" faisant apparaître le salaire complet par la réintégration des cotisations dites patronales (qui constituent en réalité un salaire indirect, propriété des salariés). Il serait aussi l'occasion de clarifier enfin nos cotisations sociales afin de mieux distinguer ce qui relève de la solidarité nationale, et donc de l'impôt, (les allocations familiales, une part de l'assurance maladie..) et ce qui relève de l'assurance, et donc de la cotisation, (le chômage, la vieillesse, une part de l'assurance maladie, les accidents du travail).
Ainsi un impôt négatif à la française constitue un puissant levier de réforme de notre Etat providence.
En présentant ce projet à l'Assemblée Nationale j'avais tenté de prévenir les craintes exprimées par Paul Fabra . A la question " donner une subvention publique au travail mal payé pour le rendre plus attrayant, n'est-ce pas prendre le risque de désorganiser le marché du travail ? ", je répondais " ce risque existe, mais c'est celui de toutes les aides à l'emploi et de toutes les baisses artificielles des charges sociales. La sagesse veut qu'au fil du temps et du retour au plein emploi nous atténuions cette aide publique pour permettre au marché du travail redynamisé de fonctionner plus librement et d'offrir des perspectives de revenus qui n'aient plus besoin de soutien public ". Quoiqu'il en soit, une chose est certaine, par rapport au système actuel, le revenu familial garanti minimise les distorsions et les effets pervers. Même s'il n'est pas exempt de tout reproche, il constitue un système plus clair, plus lisible, plus transparent et plus juste.
(source http://www.demlib.com, le 24 avril 2001)