Déclaration de M. Michel Mercier, ministre de la justice et des libertés, sur les avancées du programme immobilier de la justice en Corse, l'établissement de la sécurité sur l'île et la situation des détenus corses, à Ajaccio (Corse du Sud) le 12 mai 2011.

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Circonstance : Inauguration du nouveau Palais de justice d'Ajaccio (Corse du Sud), le 12 mai 2011.

Texte intégral

Messieurs les parlementaires,
Messieurs les préfets,
Monsieur le président du conseil exécutif,
Mesdames et messieurs les élus,
Monsieur le premier président,
Monsieur le procureur général,
Mesdames, Messieurs les chefs de juridictions,
Mesdames et messieurs les magistrats, greffiers et personnels,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux d'être venu aujourd'hui à votre rencontre pour inaugurer le Palais de Justice rénové d'Ajaccio. Pouvoir exercer vos missions dans de meilleures conditions matérielles était en effet indispensable.
Il était important que vos juridictions puissent bénéficier du vaste programme pour l'immobilier de la Justice que nous avons engagé voici plusieurs années déjà. La Chancellerie a, en effet, déployé les moyens budgétaires nécessaires au fonctionnement et à la meilleure sécurité des juridictions de Corse du Sud.
Cette inauguration marque l'achèvement d'un cycle de travaux débutés dès 2004 en vue de la restructuration et de l'extension du Palais de Justice d'Ajaccio. Hors les problèmes de vétusté, les locaux du palais étaient devenus très nettement insuffisants pour accueillir les juridictions du ressort - ce, d'autant plus qu'avec la réforme de la carte judiciaire, les tribunaux d'instance de Sartène et Porto Vecchio ont été regroupés avec celui d'Ajaccio.
Ce sont ainsi 17,2 millions d'euros de travaux qui ont permis d'installer le tribunal d'instance et le tribunal de commerce dans le Palais Finosello et de rénover le palais de justice Masseria afin d'y redéployer le tribunal de grande instance et d'y accueillir les sessions d'assises.
Le résultat est sans conteste remarquable et je tiens à féliciter et à remercier tous ceux qui se sont engagés dans ce projet et en ont assuré la réussite.
Ces investissements pour l'immobilier judiciaire dont nous constatons ici les excellents résultats concernent également le département de la Haute-Corse - beaucoup a été fait, depuis 2007, pour la sûreté et la rénovation des bâtiments de Justice.
Deux opérations d'un montant de 3,8 millions d'euros arriveront prochainement à terme. La dernière phase des travaux pour la réhabilitation et la restructuration du Palais de Justice de Bastia doit ainsi s'achever courant 2011 ; et les travaux réalisés pour l'aménagement de l'ancien centre de plein air, acquis par le ministère de la Justice auprès de la ville de Bastia, doivent permettre d'accueillir le SAR dès mi-2012.
Tel que vous pouvez le constater, ici, la justice souhaite se donner les moyens d'accueillir et de gérer dans les meilleures conditions possibles les citoyens et les professionnels du droit. L'État souhaite également donner à ses agents, magistrats, greffiers, les moyens d'exercer leurs missions dans des conditions matérielles modernes et performantes.
Cependant, l'ensemble de ses efforts est vain si l'oeuvre de justice ne s'exécute pas dans un climat de sérénité et de sécurité.
L'accès à la sécurité, en Corse comme sur l'ensemble du territoire national c'est un droit fondamental que l'État doit garantir. Il n'y a pas de liberté sans sécurité et nul en démocratie doit se voir imposer des chemins qui mènent à la peur et à la violence. Quelles que soient les revendications que les actes de violence sont censés porter, ils ne sont pas admissibles dans notre République, à laquelle je sais que les Corses sont profondément attachés. Ainsi je veux dire que tant les dégradations que les attentats, ou les violences qui visent les personnes sont irresponsables et ne conduisent à rien, sauf à être poursuivies et sanctionnées.
Je veux le dire avec force, alors que se sont multipliées les homicides ces derniers mois, au cours desquelles, des élus, des parents, une femme ont été assassinés... actes lâches où l'on s'attaque aux personnes, devant leurs époux, devant leurs enfants, devant leurs amis... cette barbarie ce n'est pas la Corse, son sens de l'honneur, ce n'est ni l'image, ni la réalité de ce territoire et son peuple, et je sais que vous tous, citoyens, élus, quelles que soient vos opinions politiques vous réprouvez totalement ces règlements de compte qui ont pour objet de créer la terreur. Je veux avoir une pensée pour les proches, les familles des victimes et les assurer de ma compassion saisi que de l'action indéfectible des forces de l'ordre et des magistrats pour amener les responsables devant les tribunaux.
Dans ce contexte, j'ai bien conscience des risques et de l'insécurité qui pèsent sur chacun de vous, magistrats, greffiers, fonctionnaires de justice. Je veux vous exhorter au courage et à la détermination et je veux vous dire toute ma reconnaissance, mesdames, messieurs, pour votre implication : c'est par votre dévouement au service de la justice, au service du justiciable, que la justice peut être rendue ici.
Je profite de l'occasion qui m'est ici donnée pour évoquer un sujet qui vous tient à coeur et qui transcende là aussi tous les courants de pensée, la situation des détenus Corses. J'ai été frappé de l'unanimité qui se dégage sur cette question et j'y ai répondu, dans la ligne définie par le Président de la République : la loi doit s'appliquer pour tous de la même façon sur le territoire national. Ainsi, après une rencontre à Paris le 2 mars dernier qui a permis de mettre fin à des années d'incompréhension, le gouvernement a pris des mesures de très forte portée en faveur des détenus corses. Nous avions pris des engagements, et aujourd'hui ces engagements sont tenus.
Conformément à ce que j'avais annoncé, quatre condamnés ont déjà été transférés à Borgo (Baptiste Ballester, Jacques Filippi, Charles Santoni et Thierry Gonzales depuis le 10 mai) et deux autres arriveront avant la fin de ce mois, Thierry Casolasco et Xavier Gardella ; en outre, 3 membres du commando Erignac seront en situation d'être transférés à Borgo à l'issue du procès qui se tient actuellement à Paris. Il s'agit de Paul Istria, Marcel Ottaviani et Didier Maranelli. Je précise également, car on a tendance à l'oublier, que 17 détenus dits de droit commun ont également été rapprochés depuis quelques mois.
Cet investissement du gouvernement dans ce dossier, et la satisfaction des demandes de rapprochement des condamnés corses, sont un geste fort dans l'intérêt des liens familiaux, réclamé par l'ensemble de vos élus.
Cependant, je sais que cette politique de rapprochement ne peut se faire sans une réflexion sur l'organisation carcérale en Corse, pour garantir des conditions de détention et de travail pour les surveillants les meilleurs possibles. J'ai bien reçu les messages qui m'ont été adressés dans ce domaine et je vous le redis, je suis ici pour voir, écouter et consulter avant de faire des choix en matière de structures de détention dans un contexte qui évolue. C'est pour cela que j'ai visité ce matin la maison d'arrêt d'Ajaccio, que j'irai cet après midi à Casabianda et à Borgo, afin de cerner les difficultés liées à la vétusté de certaines installations, connaître les problèmes que vivent les personnels pour exercer leurs misions et inscrire les structures dans une voie d'amélioration, sachant que certaines réussites sont aussi à reconnaître, et je pense notamment à Casabianda, établissement axé sur la réinsertion au mode de fonctionnement original qui existe depuis 1948. Cet exercice, je le conduirai avec vous et avec les contraintes aussi qui sont les miennes, sur le plan budgétaire notamment, mais je ne doute pas que l'on puisse trouver ensemble les solutions les plus adaptées.
Nous aspirons à la tranquillité et la sérénité pour tous, et je suis convaincu qu'à présent certains facteurs évoluent favorablement pour faire du dialogue et du partage, dans le cadre d'un fonctionnement républicain, des éléments moteurs de l'avenir de la Corse. Je vous invite à poursuivre dans cette voie qui est celle à laquelle aspire la population et je vous remercie de votre attentionsource http://www.corse.pref.gouv.fr, le 26 mai 2011