Déclaration de M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique, sur la modernisation en cours de la fonction publique à travers la réforme des concours, la gestion des agents et leur rémunération, la question du dialogue social, le télétravail, à Paris le 6 juillet 2011.

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Circonstance : Rencontres de la modernisation de l'Etat, à Paris le 6 juillet 2011

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
Je voudrais tout d’abord vous remercier de votre accueil et remercier la rédaction d’Acteurs publics qui organise ces Rencontres de la modernisation de l'État, sujet d’actualité qui restera d’actualité.
Ce débat est utile, d’abord pour rappeler le rôle et l’importance de la fonction publique, qu’elle soit d'État, territoriale ou hospitalière, et de rappeler aussi que ce ne sont pas des métiers et des fonctions comme les autres, parce qu’elles sont au service de la collectivité.
Ces débats sont nécessaires pour échanger sur ce que doit être une fonction publique moderne. Une fonction publique qui doit s’adapter pour faire face aux mutations profondes de notre société comme aux préoccupations parfois contradictoires de nos compatriotes.
Et donc échanger sur les bonnes pratiques, évaluer, croiser les regards, c’est rendre service à l’idée que rien ne peut se faire sans les acteurs eux-mêmes et sans tirer les leçons des expériences et des réformes.
Vous m’accueillez dans un contexte particulier puisque je viens tout juste de prendre mes fonctions de Ministre de la Fonction Publique.
Et ce qui est nouveau, c’est que le Président de la République et le Premier ministre ont souhaité que la Fonction publique soit dotée d’un ministère de plein exercice. C’est un signal fort qui a été donné à l’ensemble des fonctionnaires de France. Et j’aborde cette fonction avec responsabilité et souci du dialogue social.
De ce point de vue du reste, nous avons un calendrier bien rempli.
Responsabilité, parce que nous sommes dans un contexte de tensions, pas simplement financières mais aussi budgétaires. L’exigence de maitrise de la dépense publique s’impose et continuera de s’imposer à nous. Chacun doit bien avoir conscience que cette nécessité de travailler au redressement de nos finances publiques n’est en rien conjoncturelle, cela nécessite de s’organiser pour optimiser cette dépense si l’on veut continuer d’assurer durablement des services publics et au public qui soient de qualité.
Dialogue social, parce que je vous le disais, il faut associer l’ensemble des agents publics à cet nécessité collective. Ce n’est pas facile pour eux, les mutations ont secoué les habitudes, elles ont modifié singulièrement leur environnement et je n’oublie pas pour ma part que derrière le mot fonction publique, il y a des hommes et des femmes qui doivent être accompagnés et qui doivent se sentir reconnus.
J’entends aller à leur rencontre, sur le terrain, dans un esprit d’écoute, de dialogue et de respect mutuel, je ne serai pas un ministre enfermé dans son bureau.
Les réformes que nous menons sont essentielles, elles sont indispensables pour assurer l’avenir du service public et pour préserver à terme le rang que tient notre pays parmi les nations.
Ma conviction, c'est que pour réussir dans les missions qui nous ont été confiées, il nous faudra continuer de rencontrer et d’échanger avec l’ensemble des fonctionnaires.
C’est dans cet esprit que dès hier, j’ai commencé à rencontrer l’ensemble des représentants syndicaux de la fonction publique.
Mesdames et Messieurs, avant de vous présenter les grandes orientations que le Gouvernement a arrêtées pour cette année 2011, j’aimerais revenir sur une contre-vérité.
On laisse entendre, trop souvent encore, que la Fonction publique ne se modernise pas, ou du moins pas suffisamment. Pour ma part je m’inscris en faux contre ce discours. Car je sais, depuis plus de 4 ans, le travail qui a été fait par les fonctionnaires. Depuis plus de 4 ans, le Gouvernement a pris des mesures, d’abord pour mieux gérer, mieux recruter, mais aussi, on ne le dit pas suffisamment, mieux rémunérer l’ensemble des agents de la fonction publique.
I. Depuis 4 ans, le Gouvernement a pris des mesures pour mieux recruter, mieux gérer, mieux rémunérer les agents publics et a agi en faveur d’une amélioration des conditions d’exercice du dialogue social
A. Mieux recruter les agents
Un plan d’action sur la réforme des concours a été mené afin de les rendre moins académiques. Cette professionnalisation du recrutement et des voies de promotion a d’ores et déjà permis de lutter contre la reproduction sociale qu’engendrait une sélection où les strictes connaissances prenaient trop souvent le pas sur les compétences.
Nous avons récemment atteint la cible des 360 concours que nous nous étions engagés à réviser. Très concrètement, ce sont donc autant de jurys qui s’appuient désormais plus qu’hier sur des mises en situation et des cas pratiques. J’insiste aussi que la Reconnaissance des Acquis de l’Expérience Professionnelle (RAEP) qui a été introduite afin de valoriser les acquis de l’expérience professionnelle sur la base d’un dossier. Et l’Etat n’a pas été le seul : dans la territoriale, un groupe de travail « concours » a permis de publier, en trois ans, plus de 40 textes modifiant les concours et examens professionnels de 18 cadres d’emplois.
La Fonction publique doit aussi refléter l’image de la population qu’elle sert, nous avons choisi de mieux prendre en compte sa diversité sociale et géographique dans le recrutement comme la gestion de la carrière des agents publics.
Des classes préparatoires intégrées (CPI) ont tout d’abord été mises en place puis développées dans une grande partie du réseau des écoles du service public afin, précisément ; de permettre à des élèves issus de la diversité de préparer les concours de la Fonction publique dans des conditions à la fois matérielles et pédagogiques satisfaisantes. Les premiers résultats de cette politique sont du reste des plus encourageants puisqu’entre 2009 et 2010, ce sont plus de 50% des élèves présents qui ont réussi au moins un concours.
Au-delà, nous avons également promu d’une manière, je le pense plus efficace, l’égalité professionnelle dans chacune des Fonctions publiques et ce en nous attachant d’autre part à prévenir toute forme de discrimination. Cela concerne tant l’embauche que la gestion de la carrière des agents publics. C’est l’objet de la charte que mon prédécesseur a signée avec la HALDE en 2008, et dont le bilan positif a une nouvelle fois été dressé en début d’année par son ancien Président, Eric MOLINIE. Au titre de nos actions en faveur d’une plus grande égalité entre les agents publics, je voudrai insister tout spécialement sur les progrès qui ont été réalisés en matière d’insertion professionnelle des travailleurs handicapés. L’insertion professionnelle des travailleurs handicapés restera pour mon ministère une priorité.
B. Mieux gérer les agents
S’agissant de la carrière elle-même, nous avons pris des mesures dans plusieurs domaines : remplacement progressif de la notation par un véritable entretien professionnel annuel pour chaque fonctionnaire ; création d’un droit individuel à la formation pour tous les agents publics ; création et développement d’une bourse interministérielle de l’emploi public, qui matérialise la mise en place d’un véritable marché de l’emploi public ; systématisation des conseillers mobilité-carrière dans les ministères, etc.
Nous avons aussi encouragé la mobilité des agents publics en redonnant tout son sens à la notion de parcours professionnel. La loi du 6 août 2009 a ainsi instauré un véritable droit à la mobilité dans les trois versants de la Fonction publique. Elle a offert aux fonctionnaires des perspectives de carrière tout à la fois plus riches et plus diversifiées, dans un contexte marqué notamment par la réforme de l’administration territoriale de l’Etat, intervenue le 1er janvier 2010.
Je veux insister sur ce point, ce sont, avec cette loi, des garanties concrètes qui ont été données à chaque fonctionnaire quant au déroulement de sa carrière : suppression des obstacles juridiques au détachement ; prise en compte des avantages de carrière acquis en période de détachement ; assouplissement des conditions de cumul d’activités, etc.
Parallèlement, nous avons également levé des barrières et ouvert de nouvelles perspectives à un grand nombre d’agents publics en fusionnant entre eux nombre de corps administratifs. De 2005 à 2010, le nombre total de ces corps a ainsi été ramené de 700 à 380 avec l’objectif de reconstituer des familles de métiers et des filières professionnelles plus cohérentes qu’elles ne l’étaient hier.
C. Mieux rémunérer
Dans un contexte budgétaire, je vous l’ai dit, difficile, nous avons revalorisé les rémunérations en reversant aux agents la moitié des économies générées par le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux qui part à la retraite. J’en veux pour preuve la rénovation et la revalorisation de la grille indiciaire des agents de catégorie B des trois Fonctions publiques ou encore la récente revalorisation de la grille des agents de catégorie A, qui se voient désormais proposer un 3e grade à accès fonctionnel.
Nous avons également approfondi la prise en compte du mérite avec la prime de fonctions et de résultat (PFR), qui porte sur les performances individuelles des agents, et dont les premiers versements pour la filière administrative sont intervenus à l’été 2009. Cette rémunération à la performance, nous allons également la développer grâce à l’intéressement collectif, que je souhaite mettre en place pour récompenser financièrement les agents ayant atteint leurs objectifs de performance. C’est là un élément essentiel de notre politique de modernisation de la Fonction publique : récompenser les mérites des agents, c’est mieux les responsabiliser, et c’est dès lors aussi mieux les valoriser dans leur travail.
D. Mieux dialoguer
Avec la loi du 5 juillet 2010 portant rénovation du dialogue social dans la Fonction publique, l’élection est introduite partout et pour tous.
Mieux dialoguer pour tous, cela signifie concrètement que tous les syndicats peuvent se présenter aux élections, et que les agents non titulaires peuvent désormais élire leurs représentants. C’est ce même souci de cohérence qui nous a animés lorsque nous nous sommes engagés pour que les élections professionnelles aient lieu le même jour, tous les 4 ans. Ces élections auront donc lieu le 20 octobre prochain dans la Fonction publique de l’Etat et la Fonction publique hospitalière et je souhaite qu’il y ait à cette occasion un fort taux de participation.
Mieux dialoguer partout, cela signifie que parce que nous croyons dans le dialogue social, et nous pratiquerons la négociation à tous les niveaux sur tous les sujets. Nous avons par ailleurs établi les règles de validité des accords et la signature par des syndicats représentant plus de 50% des votants sera nécessaire après 2013 afin qu’un accord soit valide et plus légitime.
Pour piloter ce dialogue social rénové dans les trois versants de la Fonction publique, un Conseil commun va être mis en place et deviendra un acteur de tout premier plan.
Enfin, vous le verrez, ce dialogue social sera mené dans la plus grande transparence en ce qui concerne les moyens accordés aux organisations syndicales avec le double objectif de prendre en compte la représentativité et l’exercice du droit syndical. Des discussions sont d’ailleurs engagées sur ce point qui n’est pas un point mineur.
L’année 2011 a une nouvelle fois donné lieu à un nombre important de réunions avec les organisations syndicales et je souhaite que nous continuions avec un langage de vérité et de transparence.
Et je veux à cet égard rappeler la signature de l’ accord relatif à la lutte contre la précarité dans la Fonction publique en mars dernier. Cette disponibilité vis-à-vis des organisations syndicales, je la ferai mienne et j’ai commencé dès ma prise de fonction. J’associerai aussi systématiquement les représentants des employeurs territoriaux et hospitaliers à nos discussions.
Vous le voyez, Mesdames et Messieurs, les réformes avancent. Et je veux le redire ici, la réforme de la fonction publique n’est pas une menace pour la fonction publique, c’est une nouvelle chance qui lui est donnée pour son avenir.
II. Cette modernisation, nous allons la poursuivre dans les mois à venir
L’accord de lutte contre la précarité dans la Fonction publique que j’évoquais à l’instant sera soumis au vote du Parlement dès l’automne prochain, et j’insiste, le respect des engagements pris vis-à-vis des organisations syndicales.
Au-delà, nous souhaitons aussi avancer sur la place des femmes dans la Fonction publique. Une négociation va très prochainement être lancée avec les organisations syndicales sur la base des travaux de la Députée Françoise GUEGOT. Il s’agira ainsi d’améliorer la manière dont on peut concilier vie privée et vie professionnelle des agents et puis il y a un objectif aussi, c’est celui de donner toute leur place aux femmes dans l’encadrement supérieur et dirigeant : on ne peut en effet plus accepter qu’alors que les femmes représentent 60% de nos effectifs, moins de 10% d’entre elles soient par exemple préfètes ou ambassadrices. Il faudra sans doute un peu de temps mais l’objectif doit être clairement fixé.
Nous allons par ailleurs travailler sur le développement du télétravail qui est déjà expérimenté. C’est une question qui me tient particulièrement à coeur car j’ai moi-même mené une expérimentation au Conseil général de la Côte d’Or dont je suis le Président. Le Conseil général de l’Industrie, de l’Énergie et des Technologies va me remettre un rapport sur le sujet dans les tout prochains jours. Sur cette base, j’ouvrirai une concertation avec les organisations syndicales, qui pourra conduire à une négociation et à la signature d’un accord.
Nous ouvrirons également un chantier sur la gestion des âges de la vie dans la Fonction publique, avec l’ambition d’améliorer significativement la gestion de la carrière des seniors. Pour y parvenir, nous nous appuierons notamment sur les perspectives offertes par le développement de la formation continue tout au long de la carrière.
Enfin, la modernisation de la Fonction publique selon les quatre axes que j’évoquais se poursuivra, avec, par exemple, la prochaine publication des textes relatifs à l’intéressement collectif.
Voilà, nous allons continuer à assurer la modernisation de la fonction publique.
C’est une Fonction publique plus resserrée, concentrée sur ses missions, mieux rémunérée, et prenant mieux compte de la construction du parcours individuel de chaque agent.
Une Fonction publique dans laquelle le dialogue social doit continuer, où les droits de chacun, titulaire ou non titulaire, doivent être pris en compte grâce à la réforme du système électoral et à la possibilité pour chaque syndicat de se présenter aux élections.
Une Fonction publique représentative de la diversité de la population française.
Une Fonction publique participant équitablement à l’effort national pour préserver notre système de retraite.
Et puis surtout, une Fonction publique au service des Français, soucieuse du service rendu et efficiente.
Mais avant tout, je veux rappeler ici que c’est d’abord grâce à la qualité et à la compétence de ses agents que la Fonction publique peut se moderniser, et c’est pourquoi je veux, devant vous, les en remercier.
Source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 7 juillet 2011