Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Ministre dÉtat,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs.
Je voudrais dabord vous dire le regret que jai de ne pas pouvoir vous accueillir pour la cinquième fois dans le parc de Matignon, comme cest la tradition. Ceci est dû notamment à lévènement très important qui va réunir cet après-midi à lÉlysée tous ceux qui vont participer à la renaissance, à la reconstruction de la Libye. Sans doute aussi un peu aux inquiétudes de mes collaborateurs sur la météorologie. Cest sans doute un des résultats du réchauffement climatique qui fait quau mois daoût on ne peut plus se réunir dans le jardin de Matignon.
En tout cas lannée qui vient de sécouler a été rythmée par des évènements de portée historique au plan international. Sous lautorité dAlain Juppé, soutenu par Henri de Raincourt, Jean Leonetti et David Douillet, notre diplomatie a été fortement sollicitée, et elle a parfois même été bousculée par les fulgurances de lHistoire.
Ces fulgurances rappellent la nécessité de nous prémunir contre les préjugés, les présupposés, bref le prêt-à-penser et le conservatisme qui nous empêchent de saisir les évolutions du monde.
Je veux tirer trois enseignements de 2011. Dabord, la puissance de la liberté est plus forte que la peur. Aucun pays, aucun peuple, nest éternellement condamné à subir le joug de régimes totalitaires. Côte dIvoire, Tunisie, Égypte, Libye, Syrie : les aspirations à la démocratie, au respect des droits de lHomme et de lÉtat de droit sont universelles.
Le réalisme politique fait partie de laction diplomatique parce que les relations dÉtat à État ont leur logique. Mais le souffle de ces valeurs universelles ne doit plus être sous-estimé. Cest lhonneur de la France que davoir pesé sur le cours des évènements en Côte dIvoire et en Libye.
Le deuxième enseignement concerne la régulation de la mondialisation. La crise a eu le mérite daccélérer la prise en charge de la globalisation par les responsables politiques. Entre le culte de la mondialisation heureuse et le repli illusoire et suicidaire du protectionnisme, nous sommes progressivement en train de fixer les règles dun monde interdépendant. Le temps nous est compté parce que les peuples ont le sentiment que la mondialisation est plus une menace quune chance.
À Cannes, nous souhaitons que le G20 achève les chantiers déjà engagés pour sattaquer aux racines de la crise économique et financière. Au-delà de la réforme de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, il faut poursuivre les réformes en matière de régulation financière et poser les bases dun Système monétaire international qui soit plus stable et plus robuste.
Sous notre impulsion, le G20 et le G8 ont su innover en traitant denjeux qui navaient jamais été abordés dans ce format. La régulation dinternet, la lutte contre le trafic de drogue, la promotion des normes de sûreté nucléaire plus exigeantes, lappui aux transitions arabes ; Et dans le cadre du G20, une plus forte prise en compte des normes sociales et un meilleur encadrement des marchés agricoles.
Je veux dailleurs faire remarquer que si certaines des recommandations du plan daction approuvé par les ministres de lAgriculture du G20, à Paris à la fin du mois de juin, avaient pu être adoptées plus tôt, et notamment la constitution de réserves humanitaires durgence, la communauté internationale aurait été mieux armée pour faire face à la crise alimentaire que connaît aujourdhui la Corne de lAfrique.
Enfin le troisième enseignement concerne le rôle des Nations unies. Souvent décriées, elles ont fait preuve de réactivité et se sont réaffirmées comme loutil incontournable de laction collective de la communauté internationale. En mettant en uvre, pour la première fois, le principe de la responsabilité de protéger, en définissant des mandats robustes de maintien de la paix, et en ayant recours sans hésiter à la justice pénale internationale, lONU a été à la hauteur des enjeux de 2011.
La France a été souvent à linitiative, au Conseil de sécurité mais aussi sur le terrain, pour faire appliquer les décisions de la communauté internationale. Je veux à cet égard rendre hommage à lengagement du ministre dÉtat, Alain Juppé.
En allant cette année à la rencontre de nos soldats, jai vu partout le même engagement et jai ressenti la même fierté : sur le Charles de Gaulle à Djeddah, après sa mission au large de lAfghanistan, en Côte dIvoire auprès des soldats de lopération Licorne, ou encore sur nos bases au Gabon ou aux Émirats Arabes Unis. Et je veux avoir une pensée particulière pour le contingent français de la FINUL au Liban, victime dun lâche attentat au mois de juillet, ainsi que pour nos forces en Afghanistan.
Je veux dire que nous tiendrons notre objectif de transférer rapidement aux forces de sécurité afghanes la responsabilité du district de Surobi, puis de la province de Kapisa. Le retrait progressif de nos militaires sera engagé cet automne et il sachèvera en 2014.
Dans ce monde mouvementé où les cartes de la puissance sont redistribuées, les nations européennes doivent plus que jamais être capables dunir leurs forces. Jamais lUnion européenne na été aussi nécessaire, et pourtant jamais elle na été aussi suspectée, critiquée, fragilisée par le scepticisme ambiant. Eh bien il faut résister au populisme anti-européen !
Nous avons fait lEurope pour la paix. Nous poursuivons lEurope pour protéger notre mode de vie, pour protéger notre prospérité, et plus fondamentalement encore, pour ne pas sortir de lHistoire.
Plus de la moitié de la croissance économique mondiale, les deux tiers des réserves monétaires et un tiers de la production totale des richesses ne sont plus en Occident, mais dans le monde émergent ou en développement. Selon des projections récentes, la Chine pourrait dépasser les États-Unis en termes de PIB en 2025. Elle ne ferait dailleurs que retrouver la place qui était la sienne avant le XIXème siècle, et lInde dépasser le Japon en 2030. Toutes ces données commandent de renforcer et de moderniser lhéritage européen.
Les turbulences financières du mois daoût ont rappelé combien notre solidarité était vitale. La crise financière mondiale de 2008 est venue frapper une Europe encore mal intégrée sur le plan financier. Et depuis trois ans, il a fallu innover et il a fallu construire dans lurgence.
Alors on peut toujours émettre des réserves sur les difficultés des Européens à se mettre daccord. On peut toujours pointer ici ou là les retards, les difficultés. On peut aussi voir que face à ces crises lEurope, parfois dans la douleur, mais à chaque fois, a su trouver les solutions permettant déviter la catastrophe qui se profilait. Les progrès ont été importants : désormais, le sommet de la zone euro se réunit autant que nécessaire pour prendre des décisions, et la rencontre de lÉlysée le 16 août dernier a proposé de renforcer encore son rôle. En réalité, nous sommes en marche vers la mise en place dun gouvernement économique de la zone euro, au niveau des chefs dÉtat et de gouvernement, qui devra se doter dun secrétariat permanent.
Nous avons maintenant des agences européennes de supervision pour les banques, pour les marchés financiers et pour les assurances. Nous avons un comité européen du risque systémique financier, présidé par la Banque centrale européenne. Et nous avons créé, pour protéger la zone euro, un Fonds européen de stabilité financière doté dune capacité daide de 440 milliards deuros, à qui lon vient de reconnaître la capacité dagir à titre préventif, dacheter des emprunts dÉtat sur le marché secondaire et même de participer à la recapitalisation détablissements financiers.
Nous avons décidé de rendre ce Fonds permanent, en créant à partir de 2013 le Mécanisme européen de stabilité. Il faut quavant la fin du mois de septembre, tous les pays de la zone euro aient adopté les mesures de réforme de ce Fonds, comme la France et lAllemagne sy sont engagées le 16 août dernier. Tous ces progrès nont été possibles que grâce à un retour aux bases de la construction européenne, la prise de conscience de nos intérêts communs face à ladversité, la création de structures communes, et bien sûr, limpulsion décisive franco-allemande.
Quand tout semblait compromis, cest une fois de plus lentente entre nos deux nations qui a permis à lEurope davancer. Et avancer, cest aujourdhui uvrer pour une plus grande intégration budgétaire et fiscale au sein de la zone euro.
Le retour à des finances publiques saines est désormais la priorité pour tous les pays en Europe. Les déséquilibres macroéconomiques seront désormais collectivement surveillés par des instruments de surveillance des budgets nationaux qui sont en train dêtre sensiblement renforcés. Ladoption par tous de ce quon appelle la «Règle dor», telle que proposée par la France et lAllemagne, viendra crédibiliser lensemble de lédifice. Notre pays doit montrer lexemple, et, pour cela, je souhaite que lopposition trouve le courage de dire quelle est prête à soutenir cette règle qui nest ni partisane, ni exclusivement hexagonale.
En matière de fiscalité, les propositions de la Commission pour une assiette commune consolidée de limpôt sur les sociétés doivent rapidement aboutir. Et de leur côté, la France et lAllemagne sapprêtent à franchir une étape historique en matière dintégration fiscale européenne en proposant de mettre en place un impôt sur les sociétés commun aux deux pays à compter de 2013.
À côté de la discipline budgétaire, nous devons créer les conditions du retour à une croissance durable. LEurope doit favoriser la recherche, linnovation, la formation et lenseignement supérieur, conformément dailleurs aux objectifs du Pacte «euro plus».
Ca signifie que les investissements doivent être dirigés vers léconomie numérique, les énergies décarbonées, lélectromobilité, laéronautique, le spatial, les biosciences, les nanotechnologies.
Il ne sagit pas pour lEurope, dans cette période où elle doit réduire ses déficits, de dépenser plus, mais de se concentrer sur les secteurs davenir, en associant au maximum les capitaux privés, en diminuant le coût administratif des programmes européens de recherche, et en mettant en uvre notamment les idées françaises concernant un fonds européen de capital risque et un fonds européen de brevets. Au-delà des fonds européens, lensemble des politiques européennes doit viser la croissance économique.
Je note quil y a déjà des progrès visibles, la politique commerciale cherche désormais à intégrer le concept de réciprocité, en particulier pour les marchés publics ; la législation européenne sefforce désormais de développer ces facteurs de croissance que sont le commerce électronique et la création dentreprises numériques ; et enfin, la politique de concurrence elle-même semble mieux prendre en compte la réalité du contexte international et la nécessité de développer les secteurs davenir.
Si la priorité européenne est clairement aujourdhui économique et financière, lEurope doit aussi continuer de se renforcer en matière de sécurité. Lefficacité de Schengen doit être améliorée. Les décisions prises par le Conseil européen de juin vont dans ce sens et elles doivent être appliquées de façon rigoureuse. Ces décisions prévoient une évaluation plus crédible des mesures prises par les États en matière de sécurité aux frontières, des moyens européens accrus pour aider les États confrontés à des difficultés de gestion de leurs frontières, ainsi quune clause de sauvegarde à actionner en cas de défaillance manifeste dun État vis-à-vis de ses obligations dans le cadre de Schengen.
Nous devons poursuivre dans cette voie. Il est très important pour lavenir de lEurope de ne pas laisser accréditer lidée que lEurope serait laxiste, sous peine de fragiliser le principe même de la liberté de circulation.
Enfin, je veux vous dire un mot sur lEurope de la politique étrangère et de la défense. Il est trop tôt pour juger de lefficacité des nouvelles structures, en particulier le Haut Représentant - vice-président de la Commission et le Service européen daction extérieure, instituées par le Traité de Lisbonne.
Mais pour trouver sa légitimité, cette nouvelle mécanique doit rapidement apporter aux États européens des analyses nouvelles et pertinentes, des options justifiant une action en commun, bref une vraie plus-value européenne.
En Libye, cest surtout laction franco-britannique qui a été le fer de lance de laction européenne et même de laction internationale. Dailleurs depuis le Sommet de novembre 2010, la coopération entre Paris et Londres est à lavant-garde des évolutions en matière de défense européenne. On sait que nos deux pays totalisent à eux seuls la moitié du budget européen de la défense et les deux tiers des dépenses de recherche militaire. Si cette coopération franco-britannique est absolument nécessaire, elle ne peut pas suffire à lEurope toute entière. Et cest la raison pour laquelle la France soutient les efforts de la Présidence polonaise pour relancer la politique européenne de défense, sans dogmatisme et sans exclure personne.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, le nouveau monde qui se dessine sera implacable pour les nations faibles et insouciantes. Depuis 2007, nous avons choisi de réformer notre pays en tenant un discours de vérité. Vérité sur la croissance qui ne va pas sans compétitivité accrue et donc sans réforme. Vérité sur la solidarité qui ne va pas sans efforts partagés. Vérité enfin sur nos déficits publics. Quand on a plus de 1.500 milliards de dette, quand on na jamais connu léquilibre budgétaire depuis plus de trente cinq ans, quand chaque année, on doit verser 45 milliards deuros dintérêts, il est dérisoire de sen prendre aux agences de notation parce que cest la souveraineté nationale en réalité qui est mise en cause.
Nous avons défini une trajectoire de finances publiques intangible, qui prévoit le retour à un déficit de 5,7 % cette année, de 4,5 % en 2012, de 3 % en 2013, et de 2 % en 2014. Pour la première fois en 2010, les dépenses dassurance-maladie sont strictement restées dans les limites fixées en début dannée. La réforme des retraites a largement contribué à consolider nos comptes sociaux sur le long terme. Depuis 2008, nous avons réduit le nombre de fonctionnaires, nous avons rationalisé nos structures publiques, nous avons strictement gelé les dépenses de lÉtat et les dotations aux collectivités locales.
Cette discipline permet aujourdhui à notre pays de conserver lune des meilleures signatures financière. Et je veux dire que cette signature financière cest un atout pour notre indépendance que je ne suis pas prêt à sacrifier. Des efforts supplémentaires sont nécessaires. Le ralentissement de léconomie américaine et la crise des dettes souveraines nous ont obligés à revoir nos perspectives de croissance et à prévoir 11 milliards deuros déconomies supplémentaires. Cet effort doit être équitablement réparti et intelligemment ciblé afin de ne pas étouffer les moteurs de la reprise économique.
Malgré le contrecoup de la crise, nous cherchons sans cesse, avec le président de la République, à redonner du souffle à notre économie et de lélan à notre compétitivité. Comme aucun gouvernement par le passé, nous avons investi sur la recherche, sur luniversité, sur linnovation, sur la technologie, ou encore sur la croissance verte. 14 milliards deuros supplémentaires ont été dégagés pour lenseignement supérieur, pour la recherche et pour la modernisation de nos campus. Les 35 milliards deuros des investissements davenir soutiennent déjà 300 projets et 1 700 entreprises ; avec lautonomie des universités, avec les investissements davenir ; avec linstauration du service minimum qui a changé profondément le climat social dans notre pays ; avec la réforme de la représentativité syndicale qui donne lieu, notamment depuis dix huit mois, à un dialogue social extrêmement fécond, puisque même si ça nest pas un détail que les commentateurs soulignent volontiers, il ny a jamais eu autant daccords signés entre les partenaires sociaux que depuis les deux dernières années ; avec la réforme de la taxe professionnelle ; la défiscalisation des heures supplémentaires, nous avons, au fil de ces quatre ans, cherché à remettre la société française en mouvement.
Alors bien sûr, aucune de ces réformes na été facile. Mais jai une conviction, cest que leur légitimité va simposer, parce que les Français sentent bien que la nouvelle donne mondiale sera sans complaisance pour les nations qui choisissent la facilité.
Pour faire connaître cette France qui se transforme, cette France qui innove, nous avons besoin de vous. Certes, les entreprises étrangères implantées en France contribuent déjà à hauteur de 40 % aux exportations françaises et réalisent plus de 20 % de la recherche et du développement dans notre pays. Mais lattractivité de notre territoire nest jamais acquise ! Nous avons fait un progrès considérable avec le crédit impôt-recherche, nous avons rendu limplantation des centres industriels et de recherche en France plus intéressante et nous en avons déjà touché les bénéfices, mais il y a des préjugés qui sont souvent tenaces. Avec lappui de lAgence française pour les investissements internationaux, vous devez rester mobilisés pour relayer auprès des décideurs économiques le message dune France qui a changé.
Vous devez aussi continuer à soutenir notre effort dexportation. Les exportations françaises ont beau avoir connu un rebond en 2010, les chiffres de notre commerce extérieur sont médiocres. Nos exportations ne représentent plus que 40 % de celles de lAllemagne alors quelles en représentaient 55 % en 1999. Sur la même période, notre part dans le total des exportations de la zone euro a reculé de plus de 4 points pendant que celle de lAllemagne en gagnait 2,5.
Nous devons aider nos entreprises à réagir. Lessentiel de leffort porte sur les réformes permettant daméliorer la compétitivité de léconomie française, mais nous avons aussi, et vous avez aussi un rôle à jouer. Dabord pour renforcer le soutien aux grands contrats. Ces grands contrats ont atteint 21 milliards deuros en 2010, cest un accroissement de 38 % par rapport à 2009. Mais cest une progression qui ne doit pas faire oublier la compétition sévère à laquelle nos entreprises doivent faire face. Partout, les appels doffre remplacent le gré à gré et une nouvelle catégorie de concurrents, issus des pays émergents, est apparue. Ce sont des concurrents qui combinent une maîtrise technologique croissante, des prix de revient extrêmement avantageux et des offres de financement très généreuses.
LÉtat va encore renforcer ses moyens pour accompagner les entreprises dans la bataille des grands contrats, avec des mécanismes de financement innovants à lexport et avec lassouplissement de lassurance-crédit pour nous aligner, quand il le faut, sur les offres des autres pays.
Mais le rôle des ambassades restera indispensable en particulier pour nous informer sur loffre des concurrents et sur les véritables attentes des clients. Il faudra aussi continuer à soutenir les PME et les Entreprises de Taille Intermédiaire à linternational. Nous avons donné à UBIFRANCE les moyens dêtre présent dans 46 pays qui représentent 90 % de nos exportations. Et en février dernier jai présenté avec Pierre Lellouche un plan daction pour lexport qui crée une chaîne cohérente pour laccompagnement des PME, allant de chaque région française aux missions UBIFRANCE à létranger, et qui regroupe dans un catalogue unique les offres de financements dUBIFRANCE, dOSEO et de la COFACE.
Je compte sur vous, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, pour être les promoteurs incessants dune France qui continue de se réformer, dune France sérieuse, dune France qui tient ses engagements, dune France qui réduit ses déficits sans ligoter sa croissance, dune France qui entend donner à lEurope la puissance qui lui fait parfois défaut, dune France qui ne craint pas la mondialisation mais qui est bien décidée à mieux lorganiser.
Ce sera dailleurs le sens des visites que je compte effectuer dici la fin de lannée, en Corée, au Brésil et en Inde.
Au cours des dernières années, Monsieur le Ministre dÉtat, le Quai dOrsay sest modernisé en sengageant dans la Révision générale des politiques publiques. Des efforts considérables ont été consentis, mais votre ministère a consolidé son rôle pilote dans la conduite de la politique extérieure de la France. Il a renforcé ses capacités danalyse et de gestion des crises, et je veux à cet égard saluer laction menée ces derniers mois par le Centre de crise, en lien avec nos ambassades.
Il sest doté doutils au service de notre diplomatie dinfluence. Je pense au lancement de lInstitut français présidé par Xavier Darcos ou à la prochaine mise en place du nouvel opérateur Campus France pour favoriser la mobilité étudiante vers la France.
Je sais que certains dentre vous ont exprimé des inquiétudes concernant leurs moyens daction. Comme tous les autres, votre ministère doit participer à leffort de réduction de nos déficits publics. Et pas plus quAlain Juppé, je ne dispose dune baguette magique budgétaire.
Pour autant, sagissant des réductions deffectifs qui vous sont demandées entre 2011 et 2013, jai veillé à prendre en compte le poids des efforts déjà menés dans le passé et à préserver le cur du réseau diplomatique et consulaire. Les crédits pour notre réseau scolaire et éducatif à létranger seront consolidés en 2012. De même que ceux dédiés à la venue en France détudiants et de jeunes chercheurs étrangers, et ceux qui concernent notre aide au développement. Quant aux financements affectés à la sécurité de nos personnels et de nos implantations, ils seront, une fois encore, augmentés.
Enfin, après un long travail interministériel coordonné par le Quai dOrsay à ma demande, la réforme des indemnités de résidence à létranger entre en vigueur. Cest une réforme qui, permettra dinstaurer plus déquité et plus de cohérence dans la rémunération des 15.000 agents expatriés de lÉtat.
Les événements de ces derniers mois ont rappelé combien votre tâche est décisive. Les conditions dans lesquelles vous accomplissez votre mission sont parfois très difficiles, y compris pour vos familles. Cest la raison pour laquelle je veux les associer, ainsi que tous vos collaborateurs, aux remerciements que je veux vous adresser aujourdhui.
Récemment, certains se sont interrogés sur le fait de savoir si la France avait encore les moyens de sa politique étrangère et de défense. Eh bien vous avez la réponse. Oui, elle conserve les moyens de parler, elle conserve les moyens dagir sur le monde, et surtout elle en conserve la volonté. Telle est Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs la France, la France fière et ardente que vous servez, et dont nous défendons les intérêts et les valeurs.
Source http://www.gouvernement.fr, le 2 septembre 2011
Monsieur le Ministre dÉtat,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs.
Je voudrais dabord vous dire le regret que jai de ne pas pouvoir vous accueillir pour la cinquième fois dans le parc de Matignon, comme cest la tradition. Ceci est dû notamment à lévènement très important qui va réunir cet après-midi à lÉlysée tous ceux qui vont participer à la renaissance, à la reconstruction de la Libye. Sans doute aussi un peu aux inquiétudes de mes collaborateurs sur la météorologie. Cest sans doute un des résultats du réchauffement climatique qui fait quau mois daoût on ne peut plus se réunir dans le jardin de Matignon.
En tout cas lannée qui vient de sécouler a été rythmée par des évènements de portée historique au plan international. Sous lautorité dAlain Juppé, soutenu par Henri de Raincourt, Jean Leonetti et David Douillet, notre diplomatie a été fortement sollicitée, et elle a parfois même été bousculée par les fulgurances de lHistoire.
Ces fulgurances rappellent la nécessité de nous prémunir contre les préjugés, les présupposés, bref le prêt-à-penser et le conservatisme qui nous empêchent de saisir les évolutions du monde.
Je veux tirer trois enseignements de 2011. Dabord, la puissance de la liberté est plus forte que la peur. Aucun pays, aucun peuple, nest éternellement condamné à subir le joug de régimes totalitaires. Côte dIvoire, Tunisie, Égypte, Libye, Syrie : les aspirations à la démocratie, au respect des droits de lHomme et de lÉtat de droit sont universelles.
Le réalisme politique fait partie de laction diplomatique parce que les relations dÉtat à État ont leur logique. Mais le souffle de ces valeurs universelles ne doit plus être sous-estimé. Cest lhonneur de la France que davoir pesé sur le cours des évènements en Côte dIvoire et en Libye.
Le deuxième enseignement concerne la régulation de la mondialisation. La crise a eu le mérite daccélérer la prise en charge de la globalisation par les responsables politiques. Entre le culte de la mondialisation heureuse et le repli illusoire et suicidaire du protectionnisme, nous sommes progressivement en train de fixer les règles dun monde interdépendant. Le temps nous est compté parce que les peuples ont le sentiment que la mondialisation est plus une menace quune chance.
À Cannes, nous souhaitons que le G20 achève les chantiers déjà engagés pour sattaquer aux racines de la crise économique et financière. Au-delà de la réforme de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, il faut poursuivre les réformes en matière de régulation financière et poser les bases dun Système monétaire international qui soit plus stable et plus robuste.
Sous notre impulsion, le G20 et le G8 ont su innover en traitant denjeux qui navaient jamais été abordés dans ce format. La régulation dinternet, la lutte contre le trafic de drogue, la promotion des normes de sûreté nucléaire plus exigeantes, lappui aux transitions arabes ; Et dans le cadre du G20, une plus forte prise en compte des normes sociales et un meilleur encadrement des marchés agricoles.
Je veux dailleurs faire remarquer que si certaines des recommandations du plan daction approuvé par les ministres de lAgriculture du G20, à Paris à la fin du mois de juin, avaient pu être adoptées plus tôt, et notamment la constitution de réserves humanitaires durgence, la communauté internationale aurait été mieux armée pour faire face à la crise alimentaire que connaît aujourdhui la Corne de lAfrique.
Enfin le troisième enseignement concerne le rôle des Nations unies. Souvent décriées, elles ont fait preuve de réactivité et se sont réaffirmées comme loutil incontournable de laction collective de la communauté internationale. En mettant en uvre, pour la première fois, le principe de la responsabilité de protéger, en définissant des mandats robustes de maintien de la paix, et en ayant recours sans hésiter à la justice pénale internationale, lONU a été à la hauteur des enjeux de 2011.
La France a été souvent à linitiative, au Conseil de sécurité mais aussi sur le terrain, pour faire appliquer les décisions de la communauté internationale. Je veux à cet égard rendre hommage à lengagement du ministre dÉtat, Alain Juppé.
En allant cette année à la rencontre de nos soldats, jai vu partout le même engagement et jai ressenti la même fierté : sur le Charles de Gaulle à Djeddah, après sa mission au large de lAfghanistan, en Côte dIvoire auprès des soldats de lopération Licorne, ou encore sur nos bases au Gabon ou aux Émirats Arabes Unis. Et je veux avoir une pensée particulière pour le contingent français de la FINUL au Liban, victime dun lâche attentat au mois de juillet, ainsi que pour nos forces en Afghanistan.
Je veux dire que nous tiendrons notre objectif de transférer rapidement aux forces de sécurité afghanes la responsabilité du district de Surobi, puis de la province de Kapisa. Le retrait progressif de nos militaires sera engagé cet automne et il sachèvera en 2014.
Dans ce monde mouvementé où les cartes de la puissance sont redistribuées, les nations européennes doivent plus que jamais être capables dunir leurs forces. Jamais lUnion européenne na été aussi nécessaire, et pourtant jamais elle na été aussi suspectée, critiquée, fragilisée par le scepticisme ambiant. Eh bien il faut résister au populisme anti-européen !
Nous avons fait lEurope pour la paix. Nous poursuivons lEurope pour protéger notre mode de vie, pour protéger notre prospérité, et plus fondamentalement encore, pour ne pas sortir de lHistoire.
Plus de la moitié de la croissance économique mondiale, les deux tiers des réserves monétaires et un tiers de la production totale des richesses ne sont plus en Occident, mais dans le monde émergent ou en développement. Selon des projections récentes, la Chine pourrait dépasser les États-Unis en termes de PIB en 2025. Elle ne ferait dailleurs que retrouver la place qui était la sienne avant le XIXème siècle, et lInde dépasser le Japon en 2030. Toutes ces données commandent de renforcer et de moderniser lhéritage européen.
Les turbulences financières du mois daoût ont rappelé combien notre solidarité était vitale. La crise financière mondiale de 2008 est venue frapper une Europe encore mal intégrée sur le plan financier. Et depuis trois ans, il a fallu innover et il a fallu construire dans lurgence.
Alors on peut toujours émettre des réserves sur les difficultés des Européens à se mettre daccord. On peut toujours pointer ici ou là les retards, les difficultés. On peut aussi voir que face à ces crises lEurope, parfois dans la douleur, mais à chaque fois, a su trouver les solutions permettant déviter la catastrophe qui se profilait. Les progrès ont été importants : désormais, le sommet de la zone euro se réunit autant que nécessaire pour prendre des décisions, et la rencontre de lÉlysée le 16 août dernier a proposé de renforcer encore son rôle. En réalité, nous sommes en marche vers la mise en place dun gouvernement économique de la zone euro, au niveau des chefs dÉtat et de gouvernement, qui devra se doter dun secrétariat permanent.
Nous avons maintenant des agences européennes de supervision pour les banques, pour les marchés financiers et pour les assurances. Nous avons un comité européen du risque systémique financier, présidé par la Banque centrale européenne. Et nous avons créé, pour protéger la zone euro, un Fonds européen de stabilité financière doté dune capacité daide de 440 milliards deuros, à qui lon vient de reconnaître la capacité dagir à titre préventif, dacheter des emprunts dÉtat sur le marché secondaire et même de participer à la recapitalisation détablissements financiers.
Nous avons décidé de rendre ce Fonds permanent, en créant à partir de 2013 le Mécanisme européen de stabilité. Il faut quavant la fin du mois de septembre, tous les pays de la zone euro aient adopté les mesures de réforme de ce Fonds, comme la France et lAllemagne sy sont engagées le 16 août dernier. Tous ces progrès nont été possibles que grâce à un retour aux bases de la construction européenne, la prise de conscience de nos intérêts communs face à ladversité, la création de structures communes, et bien sûr, limpulsion décisive franco-allemande.
Quand tout semblait compromis, cest une fois de plus lentente entre nos deux nations qui a permis à lEurope davancer. Et avancer, cest aujourdhui uvrer pour une plus grande intégration budgétaire et fiscale au sein de la zone euro.
Le retour à des finances publiques saines est désormais la priorité pour tous les pays en Europe. Les déséquilibres macroéconomiques seront désormais collectivement surveillés par des instruments de surveillance des budgets nationaux qui sont en train dêtre sensiblement renforcés. Ladoption par tous de ce quon appelle la «Règle dor», telle que proposée par la France et lAllemagne, viendra crédibiliser lensemble de lédifice. Notre pays doit montrer lexemple, et, pour cela, je souhaite que lopposition trouve le courage de dire quelle est prête à soutenir cette règle qui nest ni partisane, ni exclusivement hexagonale.
En matière de fiscalité, les propositions de la Commission pour une assiette commune consolidée de limpôt sur les sociétés doivent rapidement aboutir. Et de leur côté, la France et lAllemagne sapprêtent à franchir une étape historique en matière dintégration fiscale européenne en proposant de mettre en place un impôt sur les sociétés commun aux deux pays à compter de 2013.
À côté de la discipline budgétaire, nous devons créer les conditions du retour à une croissance durable. LEurope doit favoriser la recherche, linnovation, la formation et lenseignement supérieur, conformément dailleurs aux objectifs du Pacte «euro plus».
Ca signifie que les investissements doivent être dirigés vers léconomie numérique, les énergies décarbonées, lélectromobilité, laéronautique, le spatial, les biosciences, les nanotechnologies.
Il ne sagit pas pour lEurope, dans cette période où elle doit réduire ses déficits, de dépenser plus, mais de se concentrer sur les secteurs davenir, en associant au maximum les capitaux privés, en diminuant le coût administratif des programmes européens de recherche, et en mettant en uvre notamment les idées françaises concernant un fonds européen de capital risque et un fonds européen de brevets. Au-delà des fonds européens, lensemble des politiques européennes doit viser la croissance économique.
Je note quil y a déjà des progrès visibles, la politique commerciale cherche désormais à intégrer le concept de réciprocité, en particulier pour les marchés publics ; la législation européenne sefforce désormais de développer ces facteurs de croissance que sont le commerce électronique et la création dentreprises numériques ; et enfin, la politique de concurrence elle-même semble mieux prendre en compte la réalité du contexte international et la nécessité de développer les secteurs davenir.
Si la priorité européenne est clairement aujourdhui économique et financière, lEurope doit aussi continuer de se renforcer en matière de sécurité. Lefficacité de Schengen doit être améliorée. Les décisions prises par le Conseil européen de juin vont dans ce sens et elles doivent être appliquées de façon rigoureuse. Ces décisions prévoient une évaluation plus crédible des mesures prises par les États en matière de sécurité aux frontières, des moyens européens accrus pour aider les États confrontés à des difficultés de gestion de leurs frontières, ainsi quune clause de sauvegarde à actionner en cas de défaillance manifeste dun État vis-à-vis de ses obligations dans le cadre de Schengen.
Nous devons poursuivre dans cette voie. Il est très important pour lavenir de lEurope de ne pas laisser accréditer lidée que lEurope serait laxiste, sous peine de fragiliser le principe même de la liberté de circulation.
Enfin, je veux vous dire un mot sur lEurope de la politique étrangère et de la défense. Il est trop tôt pour juger de lefficacité des nouvelles structures, en particulier le Haut Représentant - vice-président de la Commission et le Service européen daction extérieure, instituées par le Traité de Lisbonne.
Mais pour trouver sa légitimité, cette nouvelle mécanique doit rapidement apporter aux États européens des analyses nouvelles et pertinentes, des options justifiant une action en commun, bref une vraie plus-value européenne.
En Libye, cest surtout laction franco-britannique qui a été le fer de lance de laction européenne et même de laction internationale. Dailleurs depuis le Sommet de novembre 2010, la coopération entre Paris et Londres est à lavant-garde des évolutions en matière de défense européenne. On sait que nos deux pays totalisent à eux seuls la moitié du budget européen de la défense et les deux tiers des dépenses de recherche militaire. Si cette coopération franco-britannique est absolument nécessaire, elle ne peut pas suffire à lEurope toute entière. Et cest la raison pour laquelle la France soutient les efforts de la Présidence polonaise pour relancer la politique européenne de défense, sans dogmatisme et sans exclure personne.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, le nouveau monde qui se dessine sera implacable pour les nations faibles et insouciantes. Depuis 2007, nous avons choisi de réformer notre pays en tenant un discours de vérité. Vérité sur la croissance qui ne va pas sans compétitivité accrue et donc sans réforme. Vérité sur la solidarité qui ne va pas sans efforts partagés. Vérité enfin sur nos déficits publics. Quand on a plus de 1.500 milliards de dette, quand on na jamais connu léquilibre budgétaire depuis plus de trente cinq ans, quand chaque année, on doit verser 45 milliards deuros dintérêts, il est dérisoire de sen prendre aux agences de notation parce que cest la souveraineté nationale en réalité qui est mise en cause.
Nous avons défini une trajectoire de finances publiques intangible, qui prévoit le retour à un déficit de 5,7 % cette année, de 4,5 % en 2012, de 3 % en 2013, et de 2 % en 2014. Pour la première fois en 2010, les dépenses dassurance-maladie sont strictement restées dans les limites fixées en début dannée. La réforme des retraites a largement contribué à consolider nos comptes sociaux sur le long terme. Depuis 2008, nous avons réduit le nombre de fonctionnaires, nous avons rationalisé nos structures publiques, nous avons strictement gelé les dépenses de lÉtat et les dotations aux collectivités locales.
Cette discipline permet aujourdhui à notre pays de conserver lune des meilleures signatures financière. Et je veux dire que cette signature financière cest un atout pour notre indépendance que je ne suis pas prêt à sacrifier. Des efforts supplémentaires sont nécessaires. Le ralentissement de léconomie américaine et la crise des dettes souveraines nous ont obligés à revoir nos perspectives de croissance et à prévoir 11 milliards deuros déconomies supplémentaires. Cet effort doit être équitablement réparti et intelligemment ciblé afin de ne pas étouffer les moteurs de la reprise économique.
Malgré le contrecoup de la crise, nous cherchons sans cesse, avec le président de la République, à redonner du souffle à notre économie et de lélan à notre compétitivité. Comme aucun gouvernement par le passé, nous avons investi sur la recherche, sur luniversité, sur linnovation, sur la technologie, ou encore sur la croissance verte. 14 milliards deuros supplémentaires ont été dégagés pour lenseignement supérieur, pour la recherche et pour la modernisation de nos campus. Les 35 milliards deuros des investissements davenir soutiennent déjà 300 projets et 1 700 entreprises ; avec lautonomie des universités, avec les investissements davenir ; avec linstauration du service minimum qui a changé profondément le climat social dans notre pays ; avec la réforme de la représentativité syndicale qui donne lieu, notamment depuis dix huit mois, à un dialogue social extrêmement fécond, puisque même si ça nest pas un détail que les commentateurs soulignent volontiers, il ny a jamais eu autant daccords signés entre les partenaires sociaux que depuis les deux dernières années ; avec la réforme de la taxe professionnelle ; la défiscalisation des heures supplémentaires, nous avons, au fil de ces quatre ans, cherché à remettre la société française en mouvement.
Alors bien sûr, aucune de ces réformes na été facile. Mais jai une conviction, cest que leur légitimité va simposer, parce que les Français sentent bien que la nouvelle donne mondiale sera sans complaisance pour les nations qui choisissent la facilité.
Pour faire connaître cette France qui se transforme, cette France qui innove, nous avons besoin de vous. Certes, les entreprises étrangères implantées en France contribuent déjà à hauteur de 40 % aux exportations françaises et réalisent plus de 20 % de la recherche et du développement dans notre pays. Mais lattractivité de notre territoire nest jamais acquise ! Nous avons fait un progrès considérable avec le crédit impôt-recherche, nous avons rendu limplantation des centres industriels et de recherche en France plus intéressante et nous en avons déjà touché les bénéfices, mais il y a des préjugés qui sont souvent tenaces. Avec lappui de lAgence française pour les investissements internationaux, vous devez rester mobilisés pour relayer auprès des décideurs économiques le message dune France qui a changé.
Vous devez aussi continuer à soutenir notre effort dexportation. Les exportations françaises ont beau avoir connu un rebond en 2010, les chiffres de notre commerce extérieur sont médiocres. Nos exportations ne représentent plus que 40 % de celles de lAllemagne alors quelles en représentaient 55 % en 1999. Sur la même période, notre part dans le total des exportations de la zone euro a reculé de plus de 4 points pendant que celle de lAllemagne en gagnait 2,5.
Nous devons aider nos entreprises à réagir. Lessentiel de leffort porte sur les réformes permettant daméliorer la compétitivité de léconomie française, mais nous avons aussi, et vous avez aussi un rôle à jouer. Dabord pour renforcer le soutien aux grands contrats. Ces grands contrats ont atteint 21 milliards deuros en 2010, cest un accroissement de 38 % par rapport à 2009. Mais cest une progression qui ne doit pas faire oublier la compétition sévère à laquelle nos entreprises doivent faire face. Partout, les appels doffre remplacent le gré à gré et une nouvelle catégorie de concurrents, issus des pays émergents, est apparue. Ce sont des concurrents qui combinent une maîtrise technologique croissante, des prix de revient extrêmement avantageux et des offres de financement très généreuses.
LÉtat va encore renforcer ses moyens pour accompagner les entreprises dans la bataille des grands contrats, avec des mécanismes de financement innovants à lexport et avec lassouplissement de lassurance-crédit pour nous aligner, quand il le faut, sur les offres des autres pays.
Mais le rôle des ambassades restera indispensable en particulier pour nous informer sur loffre des concurrents et sur les véritables attentes des clients. Il faudra aussi continuer à soutenir les PME et les Entreprises de Taille Intermédiaire à linternational. Nous avons donné à UBIFRANCE les moyens dêtre présent dans 46 pays qui représentent 90 % de nos exportations. Et en février dernier jai présenté avec Pierre Lellouche un plan daction pour lexport qui crée une chaîne cohérente pour laccompagnement des PME, allant de chaque région française aux missions UBIFRANCE à létranger, et qui regroupe dans un catalogue unique les offres de financements dUBIFRANCE, dOSEO et de la COFACE.
Je compte sur vous, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, pour être les promoteurs incessants dune France qui continue de se réformer, dune France sérieuse, dune France qui tient ses engagements, dune France qui réduit ses déficits sans ligoter sa croissance, dune France qui entend donner à lEurope la puissance qui lui fait parfois défaut, dune France qui ne craint pas la mondialisation mais qui est bien décidée à mieux lorganiser.
Ce sera dailleurs le sens des visites que je compte effectuer dici la fin de lannée, en Corée, au Brésil et en Inde.
Au cours des dernières années, Monsieur le Ministre dÉtat, le Quai dOrsay sest modernisé en sengageant dans la Révision générale des politiques publiques. Des efforts considérables ont été consentis, mais votre ministère a consolidé son rôle pilote dans la conduite de la politique extérieure de la France. Il a renforcé ses capacités danalyse et de gestion des crises, et je veux à cet égard saluer laction menée ces derniers mois par le Centre de crise, en lien avec nos ambassades.
Il sest doté doutils au service de notre diplomatie dinfluence. Je pense au lancement de lInstitut français présidé par Xavier Darcos ou à la prochaine mise en place du nouvel opérateur Campus France pour favoriser la mobilité étudiante vers la France.
Je sais que certains dentre vous ont exprimé des inquiétudes concernant leurs moyens daction. Comme tous les autres, votre ministère doit participer à leffort de réduction de nos déficits publics. Et pas plus quAlain Juppé, je ne dispose dune baguette magique budgétaire.
Pour autant, sagissant des réductions deffectifs qui vous sont demandées entre 2011 et 2013, jai veillé à prendre en compte le poids des efforts déjà menés dans le passé et à préserver le cur du réseau diplomatique et consulaire. Les crédits pour notre réseau scolaire et éducatif à létranger seront consolidés en 2012. De même que ceux dédiés à la venue en France détudiants et de jeunes chercheurs étrangers, et ceux qui concernent notre aide au développement. Quant aux financements affectés à la sécurité de nos personnels et de nos implantations, ils seront, une fois encore, augmentés.
Enfin, après un long travail interministériel coordonné par le Quai dOrsay à ma demande, la réforme des indemnités de résidence à létranger entre en vigueur. Cest une réforme qui, permettra dinstaurer plus déquité et plus de cohérence dans la rémunération des 15.000 agents expatriés de lÉtat.
Les événements de ces derniers mois ont rappelé combien votre tâche est décisive. Les conditions dans lesquelles vous accomplissez votre mission sont parfois très difficiles, y compris pour vos familles. Cest la raison pour laquelle je veux les associer, ainsi que tous vos collaborateurs, aux remerciements que je veux vous adresser aujourdhui.
Récemment, certains se sont interrogés sur le fait de savoir si la France avait encore les moyens de sa politique étrangère et de défense. Eh bien vous avez la réponse. Oui, elle conserve les moyens de parler, elle conserve les moyens dagir sur le monde, et surtout elle en conserve la volonté. Telle est Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs la France, la France fière et ardente que vous servez, et dont nous défendons les intérêts et les valeurs.
Source http://www.gouvernement.fr, le 2 septembre 2011