Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais dabord vous dire le plaisir qui est le mien de retrouver une assemblée de maires. Jai été, comme Bernard vient de le rappeler, plus de 18 ans maire dune commune, je préside encore la Communauté de communes et jy étais même dailleurs hier soir, je crois que je nai jamais raté une assemblée de maires de mon département. Jai vu à la fois le caractère extrêmement positif de cette fonction de maire, et en même temps lévolution de cette mission de plus en plus difficile, confronté à beaucoup de nos concitoyens qui sont de plus en plus exigeants. Je voyais hier soir le maire dune commune de la Communauté de communes découragé, parce quil subissait des attaques violentes sur des problèmes durbanisme. Il me décrivait sa vie quotidienne, qui ressemblait dailleurs assez à la mienne au fond, mais cest plus dur quand on est au cur dune petite communauté, quand on connaît tout le monde, quand on doit affronter chaque jour ces regards parfois très agressifs, plus agressifs sans doute aujourdhui que par le passé. Tout cela pour vous dire que je me sens au milieu de vous parfaitement chez moi, et que je mesure toute lampleur des difficultés que vous rencontrez.
Cest vrai que lactualité est un peu chargée, on pourrait après jaurai pu peut-être trouver une excuse pour ne pas répondre à linvitation du président Mudry, je ne lai pas fait pour plusieurs raisons. Dabord parce que cest pour moi loccasion de rendre hommage à Bernard Accoyer, qui joue depuis près de 5 ans un rôle clé dans le fonctionnement des institutions de la République. Jai beaucoup destime pour Bernard Accoyer pour la solidité de ses convictions, pour son bon sens, pour son ancrage territorial, pour lautorité nécessaire avec laquelle il préside lAssemblée nationale. Il a fait évoluer de manière décisive le fonctionnement du Parlement, je veux rappeler que cest sous sa présidence que lopposition a vu ses droits renforcés, avec la présidence de la Commission des finances, avec le droit de créer des commissions denquête, avec la maîtrise dune partie de lordre du jour pour ses propositions de loi. Je partage avec Bernard Accoyer le même héritage gaulliste, la même conception de laction publique et la même volonté de protéger lindépendance de notre pays, aujourdhui menacé par 30 ans de déficits et dendettement.
Je veux saluer le travail des parlementaires de Haute-Savoie, ils sont caractérisés par un esprit dentreprise, par une ténacité, par un souci du travail bien fait dont on me dit que ce sont les traits de caractère de tous les Hauts-Savoyards. Je veux aussi dire ma reconnaissance à tous les maires et à tous les élus pour le dévouement, pour lénergie personnelle quils déploient dans lexercice de leur mandat.
Mesdames et Messieurs, notre nation est aujourdhui défiée par le basculement de léconomie mondiale et par la remise en cause sévère des acquis de lEurope. Depuis que jai lhonneur de diriger le gouvernement de notre pays, nous avons dû avec le président de la République affronter 3 crises majeures : la crise quon a appelée des "subprimes" en 2008 qui a entraîné une récession économique mondiale ; puis la crise de lendettement des Etats depuis 2010 ; et maintenant la crise de lEurope. Je crois que ces 3 crises qui, en réalité, nen forment quune seule constituent une véritable crise de civilisation. Et je pense que lhistoire, lorsquelle voudra retenir une date pour marquer la fin de la suprématie occidentale, pour marquer le basculement de léconomie vers lAsie, eh bien ! Je pense que lhistoire retiendra les années 2008-2012.
Aujourdhui, contrairement à ce que nous disons souvent dans nos discours, le monde nest pas en train de changer, il a changé et nous ne lavons pas vu ou, en tout cas, nous navons pas voulu le voir. La mondialisation contre laquelle certains voudraient dresser de nouvelles lignes Maginot nest pas un phénomène nouveau, cest même une répétition perpétuelle de lhistoire de lhumanité. La mondialisation, cest un mouvement de lhistoire qui fait quil y a des civilisations qui naissent ou qui renaissent quand dautres déclinent. Les Chinois, les Indiens, les Brésiliens, demain peut-être les pays du printemps arabe, lAfrique réclament leur dû. Et je voudrais dire quil est inutile et quil est injuste de parler de compétition déloyale, est-ce que la compétition était loyale lorsque nous exploitions les richesses naturelles de ces pays pour les transformer chez nous en biens de consommation que nous revendions ?
Nous sommes devant un mouvement inéluctable de rattrapage des pays émergents. Et devant ce mouvement, nous aurions dû depuis longtemps engager la transformation de notre société, moderniser lorganisation de notre Etat et de notre territoire. Nous aurions dû accentuer notre productivité, faire appel à lesprit de responsabilité de chacun, plutôt que de promettre encore plus dassistance et encore plus dinterventions publiques, mais nous ne lavons pas fait.
Nous avons perdu une part de nos richesses du fait de la concurrence, sans rien changer à notre façon de vivre. Alors naturellement nous nous sommes endettés. Eh bien ! Je pense que lheure de vérité a sonné, et je crois quil nest pas utile de sen prendre aux agences de notation, aux banquiers, aux spéculateurs, à je ne sais quel bouc-émissaire. Je pense quil nest pas utile non plus de faire croire quil y a des trésors cachés pour financer nos dépenses publiques. Quand on a le record de la dépense publique, quand on détient le record des prélèvements obligatoires par rapport à la richesse, il ny a pas dautre recette pour réduire lendettement que de réduire les dépenses, cest une réalité qui est incontournable. Et je veux vous dire que pour moi, le seul programme qui vaille en 2012, cest le retour à léquilibre des finances publiques.
Alors je sais que certains me diront que cest un programme qui manque un peu de vision, eh bien ! Je pense exactement le contraire. Je pense que cest le seul programme qui peut protéger les Français et qui peut protéger notre modèle de société. Jai attiré depuis longtemps lattention sur notre situation financière, jai prononcé le mot de faillite pour réveiller nos consciences ; et jai écrit que la France pouvait supporter la vérité. Depuis la crise de 2008, qui a beaucoup aggravé nos déséquilibres financiers, je conduis sous lautorité du président de la République une politique difficile, une politique qui vise à nous ramener à léquilibre budgétaire mais sans étouffer les moteurs déjà très fragiles de la croissance.
Entre 2010 et 2011, nous avons divisé par 3 le rythme de progression des dépenses publiques. Le déficit est passé de 143 milliards à 113 milliards, il sera réduit de 20 % encore en 2012. Entre 2011 et 2012, cest une réduction de 45 milliards deuros que nous réalisons, la moitié sur des économies de dépenses et lautre moitié sur des recettes complémentaires, à travers la réduction de niches fiscales et de niches sociales. Pour donner une idée, un ordre de grandeur de cet effort, dans le même temps lAllemagne parce quelle est plus en avance que nous va réaliser un effort de lordre de 20 milliards ; et la Grande Bretagne parce quelle est en situation plus difficile que nous un effort de lordre de 70 milliards. Le budget 2012 sera lun des budgets les plus rigoureux que la France ait connu depuis 1945. Grâce à ces efforts, vous le savez, nous restons lun des 10 pays au monde avec la meilleure crédibilité financière.
Je veux vous dire que cest un atout que nous devons préserver à tout prix, et que nous préserverons mon cher Bernard en ajustant prochainement nos prévisions de croissance et en accentuant nos efforts budgétaires. Pourquoi ? Parce que cest un atout qui nous permet de financer cette dette que je viens dévoquer, accumulée depuis 30 ans, à un coût relativement faible. Nous empruntons aujourdhui autour de 3 % quand une grande partie de nos voisins européens doivent le faire à plus de 6 %. Et vous qui êtes maires, vous mesurez mieux que quiconque combien il est important de préserver cet atout.
Le triple A de la France, cest le résultat du travail des Français, cest aussi le résultat des efforts que nous avons engagés. La réforme des retraites cest 26 milliards de dépenses de moins dici 2020. La modernisation de lEtat, ce quon appelle "la révision générale des politiques publiques", cest déjà 15 milliards déconomies depuis 4 ans. La rationalisation de la carte militaire, de la carte judiciaire, de loffre de soins, le non-remplacement dun fonctionnaire dEtat sur deux partant à la retraite, ce sont des mesures difficiles, ce sont des mesures qui font grincer des dents, mais ce sont des mesures qui sont incontournables. Et dailleurs vous le savez bien, cest parce quils nont pas engagé ces réformes que plusieurs pays européens sont aujourdhui dans la tourmente. Hélas cette tourmente, elle nous menace tous et elle nous condamne tous à une discipline sans faille.
Lémotion qui a été suscitée par lannonce dun référendum en Grèce nindique pas que les dirigeants européens se méfient des peuples, mais seulement quils ne pouvaient pas accepter quon puisse faire croire aux Grecs quil y avait une option pour leur permettre de bénéficier de la solidarité européenne sans en accepter les contraintes. Et je veux dire que je me félicite que la raison lait emporté, et que les responsables politiques grecs aient choisi de respecter laccord du 27 octobre. Après le vote intervenu cette nuit à Athènes, lobjectif du Gouvernement doit être maintenant de bâtir un consensus politique le plus large possible, afin dadopter et de mettre en uvre sans tarder le plan qui a été arrêté à lunanimité à Bruxelles.
Jai toujours défendu le principe de la solidarité entre les pays de la zone euro, parce que leuro cest lacquis le plus fort de ces 60 années dunification européenne. Leuro au fond maintenant, cest le noyau de la cellule européenne. Eh bien ! Si lon retire ce noyau, alors naturellement la cellule dépérira. Leuro doit être préservé, la défense de notre indépendance, la défense de notre mode de vie, en un mot la défense de notre civilisation européenne passe maintenant par une solidarité européenne sans faille.
Dans un monde dailleurs qui vient de dépasser les 7 milliards dhabitants, il ny a pas besoin dêtre un grand économiste ou un grand stratège politique pour comprendre que 500 millions dEuropéens nont pas dautre choix que de se serrer les coudes, de se serrer les coudes sils ne veulent pas être emportés par le vent de lhistoire qui souffle dans le sens de leur déclin.
La crise européenne a révélé un grave défaut de gouvernance, a révélé un mauvais fonctionnement au fond de nos institutions. Les compromis politiques que nous avons élaborés depuis des années pour tenter de concilier les intérêts de chacun, nont pas résisté à la violence de la réalité que nous devons affronter. Nous nous sommes dotés dune monnaie commune, mais nous avions repoussé à plus tard le temps de mettre en place les institutions politiques et les institutions financières nécessaires à la stabilité, à la survie de cette monnaie commune. Eh bien ! Maintenant, nous avons besoin de ces institutions politiques et financières. Et je veux dire, moi qui étais un adversaire de leuro au nom notamment du fait que je considérais que mettre en place une monnaie avant de mettre en place les institutions qui permettent à cette monnaie davoir sa force, cétait prendre beaucoup de risques. Mais je dis aujourdhui, compte tenu des changements dans le monde, je dis aujourdhui que seule une intégration renforcée au sein de la zone euro nous permettra de résister aux coups qui ébranlent les liens que nous avions patiemment tissés entre les nations européennes depuis la seconde guerre mondiale.
Et au cur de cette solidarité européenne, au cur de cette dynamique, il y a la France et il y a lAllemagne. Il y a la France et il y a lAllemagne, pas seulement parce que nos deux pays représentent la moitié du Produit Intérieur Brut de la zone euro, mais parce quil faut se souvenir que cest la France et lAllemagne qui sont à lorigine du mouvement européen, après avoir été les adversaires que lon sait. Et je veux dire que les critiques entendues ces derniers jours sur le couple franco-allemand sont à la fois dérisoires et infondées, mais surtout elles marquent un terrible contresens. Sil ny avait pas limpulsion de lAllemagne et de la France, il serait impossible de franchir une nouvelle étape qui est pourtant absolument nécessaire dans lintégration européenne. Et dailleurs je mets chacun dentre vous au défi de me citer une seule initiative, depuis 18 mois, qui soit venue dailleurs que de la France et de lAllemagne pour proposer des solutions à la crise européenne. Dune certaine façon sil y avait dautres initiatives, la France et lAllemagne pourraient se passer de travailler à rechercher des solutions. Mais depuis 18 mois, force est de constater que toutes les propositions qui ont été mises sur la table, même si cest souvent très difficile de parvenir à un accord entre nos deux pays, sont venues de la France et de lAllemagne.
Le rapprochement franco-allemand ça nest pas seulement un projet en soi, cest un point de départ pour entraîner lensemble du continent vers une nouvelle frontière. Cette nouvelle frontière cest une zone euro puissante, dont les économies progressivement convergent et qui éclairent le chemin de lUnion européenne dans la confrontation avec les nouvelles puissances économiques. Ce rapprochement exige des efforts de part et dautre, et pour la France vous le savez le défi cest de rejoindre lAllemagne sur le terrain de la compétitivité, de la réforme des retraites au triplement du crédit impôt recherche, de la réforme des universités à lassouplissement des 35 h. Nous avons posé les bases dune compétitivité accrue, mais cela nest quune première étape et il va falloir en franchir dautres.
LEurope a besoin dun leadership, mais le monde a aussi besoin dêtre conduit avec responsabilité. Et je veux dire que la présidence du G20 a montré la capacité du président de la République de faire bouger les lignes. Au sommet de Cannes, lengagement de renforcer les moyens du Fonds monétaire international a été pris, si besoin sen fait sentir. Le Fonds monétaire aura les moyens de jouer son rôle de rempart contre les crises systémiques. Et par ailleurs, les pays du G20 ont décidé dutiliser toutes les marges de manuvre pour soutenir la croissance. Cela veut dire que les pays dont la situation budgétaire est solide, je pense notamment à lAllemagne et à la Chine, devront faire jouer les stabilisateurs économiques, automatiques, au fond stimuler la demande intérieure pour soutenir la croissance. Les pays qui disposent dexcédents extérieurs importants et on pense naturellement surtout à la Chine sengagent à augmenter la demande intérieure et à accélérer la flexibilité de leur régime de change, afin de réduire à moyen terme laccumulation de réserves. Il faut savoir quaujourdhui, 80 % des réserves de change dans le monde sont détenus par les pays émergents, dont 60 % par la Chine.
Nous avons également obtenu des progrès en matière de régulation financière, puisque les grandes banques seront désormais soumises à de nouvelles obligations en matière de développement. Le G20 a reconnu la légitimité dune taxation du système financier, dont notamment une taxation des transactions financières. Alors comme dhabitude, les sceptiques diront que tout ceci reste insuffisant, et les idéalistes regretteront que le monde ne fut pas soudainement ré-enchanté. Mais les réalistes que nous sommes savent que la France a tenu efficacement son rôle international, et elle la fait en étant fidèle à ses valeurs universelles.
Mesdames et Messieurs, en vous parlant de la crise, en vous parlant de lEurope et du G20, je vous parle comme je parle aux élus de la nation. Parce que pour moi, il ny a pas dun côté lEtat et de lautre les collectivités locales qui saffronteraient dans une sorte de remake de lépoque féodale. Il ny a quune République dont lEtat et les collectivités sont les acteurs complémentaires, il ny a pas dun côté le Gouvernement qui serait le défenseur de lintérêt général et, de lautre, les maires qui défendraient le seul intérêt de leur commune. Il ny a quune seule nation française dont nous sommes les garants, vous et moi à égalité de responsabilités.
En Haute-Savoie, un travail considérable de développement du territoire a été accompli en lien avec lEtat. En un demi-siècle, votre département a totalement changé de visage, il est ancré dans une dynamique de croissance fondée sur léconomie de la montagne, sur les filières industrielles, agroalimentaires, sur les filières du médicament et de la mécanique. Comme tous nos départements, vous vous battez avec résolution pour offrir à vos communes des infrastructures technologiques, éducatives, sociales, sanitaires auxquelles nos concitoyens à juste titre aspirent. Mais au cur de ce combat pour le progrès il y a et jy reviens la question de nos finances publiques.
Un effort collectif simpose à nous tous, parce que la dette publique nous la partageons. Les marchés, les agences de notation et nos partenaires internationaux ne font pas de distinction entre la dette de lEtat, celle des collectivités et celle des organismes sociaux. Et dailleurs les relations sont évidentes entre les finances de lEtat et celles des collectivités locales, il suffit pour cela dévoquer les dotations aux collectivités. Vous savez bien quà lheure actuelle lEtat sendette en partie pour financer les dotations de fonctionnement quil vous verse. Ce seul exemple doit nous inciter (Etat, collectivités locales) à rechercher plus de cohérence dans la gestion des fonds publics, et il doit inciter les collectivités locales entre elles à fédérer leurs projets, à rationaliser leurs dépenses et à rationaliser leur organisation.
Cest vrai quau cours de ce quinquennat le paysage des finances locales a profondément évolué. Nous avons réformé la taxe professionnelle, parce quon ne pouvait pas rester le seul pays européen à taxer les investissements des entreprises. Nous avons ainsi redonné des marges de compétitivité à nos entreprises, tout en veillant à accompagner les effets de la réforme pour les collectivités locales. Nous avons développé dans des proportions jamais atteintes la péréquation entre les collectivités locales ; nous lavons fait pour les départements lannée dernière, cette année ce sera le tour du secteur communal, avec la création dun fonds de péréquation qui va redistribuer un peu plus de 250 millions deuros dès 2012.
Enfin, nous avons veillé à traiter les situations financières les plus difficiles. Au plan national, ce sont les finances des départements qui ont le plus souffert de la crise, parce que leur compétence sociale est une compétence cruciale. Fin 2010, avec le Parlement, nous avons mis en place un plan daide aux départements en difficultés, qui a déjà bénéficié à 40 dentre eux. Le Gouvernement a été sensible aussi à la question des emprunts dits toxiques, que certaines banques distribuaient il y a quelques années. Pour que ces produits ne réapparaissent pas sous de nouvelles formes, nous avons mis au point une charte avec les banques ; et pour faciliter la renégociation de ces emprunts avec les banques, nous avons confié une médiation à un inspecteur général des Finances. Certaines collectivités de votre département y ont fait appel, mais je veux dire devant vous, et en madressant à travers vous à tous les élus de notre pays, que cette médiation est beaucoup trop peu sollicitée par les collectivités, qui disent avoir des soucis avec ces emprunts toxiques. Je ne peux quinciter toutes les collectivités concernées à recourir à la médiation, et pas seulement au moment où les frais financiers senvolent. Je crois vraiment quen ce domaine lEtat a fait le devoir qui était le sien.
Je sais aussi que vous vous inquiétez du devenir du financement bancaire des collectivités locales. Jai annoncé au début du mois doctobre la mobilisation de 3 milliards deuros issus du Fonds dépargne de la Caisse des Dépôts, pour compenser linsuffisance des financements offerts par les banques aux collectivités locales et aux hôpitaux, pour cette fin dannée 2011. Ce dispositif est maintenant en place. La distribution des prêts sera effectuée pour moitié directement par la Caisse des Dépôts, et pour moitié par les banques commerciales. Ladjudication aux banques, qui sest déroulée hier, sest déroulée dans de très bonnes conditions, et les enveloppes seront disponibles pour les collectivités locales et pour les établissements hospitaliers dès mardi prochain, le 8 novembre, soit auprès des banques, soit auprès des directions régionales de la Caisse des Dépôts.
Sagissant des modalités de ces prêts, le Gouvernement a consulté les représentants des collectivités, et a pleinement pris en compte leurs recommandations. Ainsi, cette enveloppe pourra permettre de financer, au-delà des opérations dinvestissement inscrites au budget 2011, des opérations relevant des budgets pour 2012, dans la limite de 20 % du montant total. Par ailleurs, quatre types de prêts à taux fixe et à taux variable seront offerts, afin de donner un maximum de flexibilité aux collectivités locales dans la gestion de leur emprunt ; et le taux fixe pour des prêts à 15 ans sera denviron 4,5 %. Jai par ailleurs souhaité que la Caisse des Dépôts et les établissements partenaires dressent un état précis de la situation du financement des collectivités locales au 30 novembre, afin que nous puissions disposer dun diagnostic fiable permettant, le cas échéant, de majorer lenveloppe initialement prévue, si cela savère nécessaire.
Au-delà de cette réponse, qui est une réponse conjoncturelle, pour faire face au resserrement du crédit lié à la crise financière, nous avons décidé dapporter une réponse structurelle, pour faire face à la transformation du paysage des finances locales. Ce paysage des finances locales est en train de changer pour deux raisons. La première raison, cest quil y a des nouvelles règlementations bancaires internationales qui ne vont pas inciter les banques commerciales à prêter aux collectivités locales. Et la deuxième raison elle est plus conjoncturelle, celle-là , ce sont les difficultés de la banque Dexia ; ces difficultés, vous le savez, avaient démarré avec la crise de 2008. Elles nous ont engagés, cette année, compte tenu de la rechute de la crise financière, à réaliser une restructuration très profonde de cet établissement.
Et donc nous avons décidé, et ceci sera opérationnel au début de lannée 2012, de créer un pôle public de financement des territoires autour de la Banque Postale et de la Caisse des Dépôts. Au fond, il y aura désormais un établissement public, comme il y en avait autrefois, qui sera spécifiquement dédié au financement des collectivités locales, et qui pourra donc prêter aux collectivités locales en-dehors des contraintes qui sont celles qui pèsent sur les banques commerciales. Nous voulons en effet, à travers cet établissement, que vous ayez accès à une offre de financement qui soit à la fois simple, et qui soit surtout transparente ; et nous voulons que cette offre constitue une référence de bonnes pratiques sur le marché, pour les banques commerciales qui pourraient continuer à prêter aux collectivités locales.
Je voudrais dire un mot maintenant de la réforme territoriale, dont je sais que vous avez débattu ce matin. Cette réforme, elle provoque évidemment, comme toutes les réformes, des remous, des critiques, des contestations. Souvenez-vous de celle du début des années 80, souvenez-vous de la réforme de lintercommunalité : toutes les réformes de lorganisation de notre territoire ont suscité bien des critiques. Mais je veux dire que jassume sa philosophie, sa philosophie qui consiste à restructurer le territoire, à rationaliser nos structures.
Vous savez, on ne peut pas dun côté expliquer quil y a un grand malaise du monde rural du fait de la mondialisation, du fait du changement des habitudes de vie, du fait que les activités ne sont plus les mêmes quautrefois, que beaucoup dactivités nécessitent une concentration dénergie, de moyens, de formations, qui ne sont plus tout à fait adaptés à la structure des territoires ruraux , et puis de lautre côté, en tirer la conséquence que rien ne doit changer dans lorganisation de notre territoire national.
Nous avons, parallèlement à cette réforme, conduit des Assises des territoires ruraux, qui ont été les premières depuis 20 ans. Nous avons mis en place la deuxième génération des pôles dexcellence rurale, avec un financement de 235 millions deuros. Nous avons mobilisé une partie des investissements davenir pour le déploiement du haut et du très haut débit. Nous avons mis en place des financements pour les trains daménagement du territoire, et pour appuyer louverture de 250 maisons médicales en milieu rural. Il est en effet indispensable de définir un socle de services publics qui puissent être offerts à la population sur lensemble du territoire français. Et je sais quici, en Haute-Savoie, vous êtes particulièrement attentifs à la mise en uvre de ces outils.
Au sein de la réforme des collectivités territoriales, la rationalisation de lintercommunalité continue de susciter beaucoup de débats et beaucoup dinterrogations. Ici, en zone frontalière, et naturellement je serai attentif à tous les sujets qua évoqués le président Accoyer il y a quelques instants, notamment dans la discussion avec notre voisin suisse, puisque vous, vous êtes des habitués de léchange avec nos voisins européens, vous savez bien comment eux ont réorganisé leurs territoires : en Allemagne, en Espagne, en Italie, tous ont choisi la manière forte, et ils ont regroupé leurs communes dans des ensembles qui atteignent plusieurs dizaines de milliers dhabitants. Alors cest vrai, ils lont fait parce que leurs territoires sarticulent autour de grandes régions autonomes. Nous, nous avons une histoire, une culture, des paysages qui sont différents, et lhistoire de notre décentralisation est différente ; et donc, la méthode que nous avons choisie est aussi différente.
Nous avons voulu que les regroupements soient volontaires, et nous avons voulu faire naître de nouvelles synergies entre nos départements et nos régions, plutôt que de choisir de supprimer lun des deux échelons ce quauraient sans doute fait nos autres voisins. Alors on pourra peut-être demain, en regardant cette réforme avec un peu de recul, nous reprocher de ne pas être allés assez loin, et de ne pas être allés assez vite. Mais je pense que personne ne pourra nous reprocher, avec le recul, davoir engagé cette dynamique.
Sur le renforcement de lintercommunalité, et sur la méthode choisie, je veux rappeler que lobjectif est double. Dabord, nous voulons couvrir intégralement le territoire national par des Etablissements publics de Coopération intercommunale il sagissait, au fond, de combler les vides, de ne pas laisser des petits morceaux du territoire complètement à lécart de ce mouvement. Et dautre part, nous voulons avoir à la fin du processus des Etablissements publics de Coopération intercommunale dont la taille permette une véritable mise en commun des moyens, et un meilleur service rendu par les communes à nos concitoyens. En zone de montagne, vous savez mieux que moi que la délimitation de ces nouveaux Etablissements publics doit tenir compte des contraintes géographiques. Et Martial Saddier na pas été le dernier à faire valoir ces arguments au Parlement. Voilà pour les objectifs. Et je veux vous dire que le gouvernement nentend pas les remettre en cause.
Concernant maintenant le calendrier, lidée dorigine qui dailleurs, je voudrais le rappeler une nouvelle fois, a été imposée au Gouvernement par le Parlement , cétait davoir achevé lélaboration du schéma départemental de coopération intercommunale avant la fin de cette année. Nombreux sont les élus qui mont demandé plus de temps pour se concerter, plus de temps pour étudier différentes options. Jai déjà eu loccasion de le dire, et je le répète devant vous, et mon expérience délu local me conforte dans cette conviction : je ne crois pas aux mariages forcés. Et cest donc sur ce point que jai décidé de donner de la souplesse. Dans les départements où une large majorité des élus concernés se prononcent en faveur du projet, la procédure doit être conduite à son terme. Les préfets, dailleurs, ont reçu des instructions en ce sens. Mais lorsque ça nest pas le cas, jai souhaité leur accorder le temps nécessaire pour poursuivre le dialogue, et pour faire émerger un accord sur le projet.
Ici, en Haute-Savoie, vous pouvez et vous devez aller de lavant, vers plus dintercommunalité. Il ne sagit pas de prendre du temps pour ne pas résoudre les problèmes ; si un délai supplémentaire est nécessaire, cest pour faire aboutir des projets, et cest pour faire émerger des alternatives. Et donc, dans ce but, les Commissions départementales de coopération intercommunales seront à nouveau consultées par le préfet, sur les évolutions du projet de schéma qui interviendraient au-delà du 31 décembre prochain. Cest dailleurs ce que je viens décrire au Président de lAssociation des maires, au président Pélissard. Cela signifie quà ce stade il nest pas nécessaire de modifier la loi pour prendre le temps de discussions approfondies.
Il ny a pas, Mesdames et Messieurs, de moratoire sur la réforme des collectivités territoriales. Et je veux dire quau-delà de nos sensibilités politiques, je suis convaincu que nous voulons tous la même chose : nous voulons construire des ensembles cohérents, qui reflètent les réalités géographiques autant que les aspirations des habitants. Nous devons fuir les réflexions de court terme ; cela nest pas parce quil y a des inimitiés entre les maires dun territoire, ou parce quil y a des rivalités politiques entre les maires dun territoire, quil faut choisir le découpage de structures intercommunales qui vont perdurer pendant des années et des années, qui vivront bien au-delà des querelles que les uns ou les autres, naturellement, mettent en avant dans lélaboration de ces schémas. Ces schémas doivent répondre à des vraies questions, des questions qui touchent au développement de nos territoires, qui touchent au renforcement de leur attractivité, qui touchent à lamélioration de nos réseaux de transport. Au fond, la seule raison qui doit prévaloir, cest celle de lintérêt général.
Enfin, pour améliorer larticulation du travail entre les collectivités, nous avons choisi de mettre en place un dispositif dont le pivot sera le conseiller territorial, qui siègera au conseil général et au conseil régional. Vous savez, il ny avait que deux façons de traiter cette question du mille-feuille : soit on supprime un échelon, soit on organise progressivement la cohérence des échelons avec les mêmes élus. Nous avons choisi cette méthode. Je pense que cest la plus raisonnable, compte tenu de lhistoire de notre pays, compte tenu de lattachement de nos populations aux structures dorganisation du territoire qui sont les nôtres. A partir de linstant où nous conservons les échelons départementaux et régionaux, je crois vraiment que linstauration du conseiller territorial, cest la seule voie possible et audacieuse.
Concrètement, en Haute-Savoie, cela devrait contribuer à mieux coordonner lexercice des compétences entre Lyon et Annecy. Pour élire les conseillers territoriaux, il faudra délimiter de nouveaux cantons, puisque nous avons fait le choix dune élection au scrutin majoritaire pourquoi ? Parce que nous pensons que cest le seul qui garantisse une véritable proximité entre les élus et les citoyens. La loi nous oblige à adopter ce nouveau découpage au plus tard au début de 2013, et donc les travaux qui y conduiront auront lieu au deuxième semestre 2012.
Je suis confiant dans cette évolution de notre décentralisation, et je suis confiant dans les progrès quelle représente pour nos territoires. Pour avoir assumé toutes les responsabilités délu local, je sais la pesanteur des habitudes ; je sais la difficile tâche de développer des projets ; je mesure le poids des attentes et des frustrations qui entourent le beau mais le rude mandat de maire. Mais cest en sachant tout cela que jai la conviction que les réformes sont nécessaires, que les synergies sont essentielles, parce que la France ne peut plus disperser ses actions.
Mesdames et Messieurs, les maires de France sont respectés des citoyens. Et même si jai dit que le métier était de plus en plus difficile, le maire reste certainement lélu, sur notre territoire, dans lequel nos concitoyens ont le plus confiance. Vous êtes estimés, vous êtes écoutés ; en période de crise plus quen toute autre, je vous fais confiance pour tenir à nos concitoyens un langage de vérité.
Alors cest vrai, cette vérité est souvent dure à dire, et elle est souvent plus dure encore à entendre, parce que ce sont notre environnement, notre histoire, nos habitudes, notre mode de vie, qui sont en train dêtre bousculés par les changements du monde. La vérité est parfois douloureuse mais vous savez bien quelle lest infiniment moins que lillusion, la nostalgie et le mensonge. Nous ne sommes pas la première génération à devoir réinventer et remobiliser la France. Beaucoup de nos anciens sont tombés pour notre liberté ; beaucoup ont travaillé dur pour notre prospérité.
Elus de la République, nous sommes les artisans dune ambition française qui vient de loin, et nous navons pas le droit de laisser cette ambition française sabaisser, faute de courage, faute de lucidité. Chacun dentre vous est dépositaire de quelque chose de sacré, quelque chose qui va au-delà du service quotidien de nos concitoyens : je veux parler de la continuité française. Les époques passent, les temps changent, les épreuves surgissent et ressurgissent, mais la France, elle, doit demeurer. Malgré les coups durs, elle doit se battre, elle doit se redresser, elle doit se relancer ; et elle le fera. Elle le fera, parce que ses élus et le peuple français se comportent avec la dignité et avec la solidité qui distinguent les grandes nations. Les Trente Glorieuses sont bel et bien derrière nous, mais les 30 prochaines années ne dépendent que de nous. Alors, pas de morosité, pas de lassitude, pas de démission, pas de divisions inutiles ; prenons nos responsabilités, agissons, réinventons, retroussons-nous les manches, et alors nous réussirons ensemble.
Voilà, Mesdames et Messieurs, le message de franchise et dunité républicaine que je suis heureux de partager avec vous. Et je voudrais en profiter pour vous dire toute lamitié et toute laffection que je porte à la Haute-Savoie.
Source http://www.gouvernement.fr, le 7 novembre 2011
Je voudrais dabord vous dire le plaisir qui est le mien de retrouver une assemblée de maires. Jai été, comme Bernard vient de le rappeler, plus de 18 ans maire dune commune, je préside encore la Communauté de communes et jy étais même dailleurs hier soir, je crois que je nai jamais raté une assemblée de maires de mon département. Jai vu à la fois le caractère extrêmement positif de cette fonction de maire, et en même temps lévolution de cette mission de plus en plus difficile, confronté à beaucoup de nos concitoyens qui sont de plus en plus exigeants. Je voyais hier soir le maire dune commune de la Communauté de communes découragé, parce quil subissait des attaques violentes sur des problèmes durbanisme. Il me décrivait sa vie quotidienne, qui ressemblait dailleurs assez à la mienne au fond, mais cest plus dur quand on est au cur dune petite communauté, quand on connaît tout le monde, quand on doit affronter chaque jour ces regards parfois très agressifs, plus agressifs sans doute aujourdhui que par le passé. Tout cela pour vous dire que je me sens au milieu de vous parfaitement chez moi, et que je mesure toute lampleur des difficultés que vous rencontrez.
Cest vrai que lactualité est un peu chargée, on pourrait après jaurai pu peut-être trouver une excuse pour ne pas répondre à linvitation du président Mudry, je ne lai pas fait pour plusieurs raisons. Dabord parce que cest pour moi loccasion de rendre hommage à Bernard Accoyer, qui joue depuis près de 5 ans un rôle clé dans le fonctionnement des institutions de la République. Jai beaucoup destime pour Bernard Accoyer pour la solidité de ses convictions, pour son bon sens, pour son ancrage territorial, pour lautorité nécessaire avec laquelle il préside lAssemblée nationale. Il a fait évoluer de manière décisive le fonctionnement du Parlement, je veux rappeler que cest sous sa présidence que lopposition a vu ses droits renforcés, avec la présidence de la Commission des finances, avec le droit de créer des commissions denquête, avec la maîtrise dune partie de lordre du jour pour ses propositions de loi. Je partage avec Bernard Accoyer le même héritage gaulliste, la même conception de laction publique et la même volonté de protéger lindépendance de notre pays, aujourdhui menacé par 30 ans de déficits et dendettement.
Je veux saluer le travail des parlementaires de Haute-Savoie, ils sont caractérisés par un esprit dentreprise, par une ténacité, par un souci du travail bien fait dont on me dit que ce sont les traits de caractère de tous les Hauts-Savoyards. Je veux aussi dire ma reconnaissance à tous les maires et à tous les élus pour le dévouement, pour lénergie personnelle quils déploient dans lexercice de leur mandat.
Mesdames et Messieurs, notre nation est aujourdhui défiée par le basculement de léconomie mondiale et par la remise en cause sévère des acquis de lEurope. Depuis que jai lhonneur de diriger le gouvernement de notre pays, nous avons dû avec le président de la République affronter 3 crises majeures : la crise quon a appelée des "subprimes" en 2008 qui a entraîné une récession économique mondiale ; puis la crise de lendettement des Etats depuis 2010 ; et maintenant la crise de lEurope. Je crois que ces 3 crises qui, en réalité, nen forment quune seule constituent une véritable crise de civilisation. Et je pense que lhistoire, lorsquelle voudra retenir une date pour marquer la fin de la suprématie occidentale, pour marquer le basculement de léconomie vers lAsie, eh bien ! Je pense que lhistoire retiendra les années 2008-2012.
Aujourdhui, contrairement à ce que nous disons souvent dans nos discours, le monde nest pas en train de changer, il a changé et nous ne lavons pas vu ou, en tout cas, nous navons pas voulu le voir. La mondialisation contre laquelle certains voudraient dresser de nouvelles lignes Maginot nest pas un phénomène nouveau, cest même une répétition perpétuelle de lhistoire de lhumanité. La mondialisation, cest un mouvement de lhistoire qui fait quil y a des civilisations qui naissent ou qui renaissent quand dautres déclinent. Les Chinois, les Indiens, les Brésiliens, demain peut-être les pays du printemps arabe, lAfrique réclament leur dû. Et je voudrais dire quil est inutile et quil est injuste de parler de compétition déloyale, est-ce que la compétition était loyale lorsque nous exploitions les richesses naturelles de ces pays pour les transformer chez nous en biens de consommation que nous revendions ?
Nous sommes devant un mouvement inéluctable de rattrapage des pays émergents. Et devant ce mouvement, nous aurions dû depuis longtemps engager la transformation de notre société, moderniser lorganisation de notre Etat et de notre territoire. Nous aurions dû accentuer notre productivité, faire appel à lesprit de responsabilité de chacun, plutôt que de promettre encore plus dassistance et encore plus dinterventions publiques, mais nous ne lavons pas fait.
Nous avons perdu une part de nos richesses du fait de la concurrence, sans rien changer à notre façon de vivre. Alors naturellement nous nous sommes endettés. Eh bien ! Je pense que lheure de vérité a sonné, et je crois quil nest pas utile de sen prendre aux agences de notation, aux banquiers, aux spéculateurs, à je ne sais quel bouc-émissaire. Je pense quil nest pas utile non plus de faire croire quil y a des trésors cachés pour financer nos dépenses publiques. Quand on a le record de la dépense publique, quand on détient le record des prélèvements obligatoires par rapport à la richesse, il ny a pas dautre recette pour réduire lendettement que de réduire les dépenses, cest une réalité qui est incontournable. Et je veux vous dire que pour moi, le seul programme qui vaille en 2012, cest le retour à léquilibre des finances publiques.
Alors je sais que certains me diront que cest un programme qui manque un peu de vision, eh bien ! Je pense exactement le contraire. Je pense que cest le seul programme qui peut protéger les Français et qui peut protéger notre modèle de société. Jai attiré depuis longtemps lattention sur notre situation financière, jai prononcé le mot de faillite pour réveiller nos consciences ; et jai écrit que la France pouvait supporter la vérité. Depuis la crise de 2008, qui a beaucoup aggravé nos déséquilibres financiers, je conduis sous lautorité du président de la République une politique difficile, une politique qui vise à nous ramener à léquilibre budgétaire mais sans étouffer les moteurs déjà très fragiles de la croissance.
Entre 2010 et 2011, nous avons divisé par 3 le rythme de progression des dépenses publiques. Le déficit est passé de 143 milliards à 113 milliards, il sera réduit de 20 % encore en 2012. Entre 2011 et 2012, cest une réduction de 45 milliards deuros que nous réalisons, la moitié sur des économies de dépenses et lautre moitié sur des recettes complémentaires, à travers la réduction de niches fiscales et de niches sociales. Pour donner une idée, un ordre de grandeur de cet effort, dans le même temps lAllemagne parce quelle est plus en avance que nous va réaliser un effort de lordre de 20 milliards ; et la Grande Bretagne parce quelle est en situation plus difficile que nous un effort de lordre de 70 milliards. Le budget 2012 sera lun des budgets les plus rigoureux que la France ait connu depuis 1945. Grâce à ces efforts, vous le savez, nous restons lun des 10 pays au monde avec la meilleure crédibilité financière.
Je veux vous dire que cest un atout que nous devons préserver à tout prix, et que nous préserverons mon cher Bernard en ajustant prochainement nos prévisions de croissance et en accentuant nos efforts budgétaires. Pourquoi ? Parce que cest un atout qui nous permet de financer cette dette que je viens dévoquer, accumulée depuis 30 ans, à un coût relativement faible. Nous empruntons aujourdhui autour de 3 % quand une grande partie de nos voisins européens doivent le faire à plus de 6 %. Et vous qui êtes maires, vous mesurez mieux que quiconque combien il est important de préserver cet atout.
Le triple A de la France, cest le résultat du travail des Français, cest aussi le résultat des efforts que nous avons engagés. La réforme des retraites cest 26 milliards de dépenses de moins dici 2020. La modernisation de lEtat, ce quon appelle "la révision générale des politiques publiques", cest déjà 15 milliards déconomies depuis 4 ans. La rationalisation de la carte militaire, de la carte judiciaire, de loffre de soins, le non-remplacement dun fonctionnaire dEtat sur deux partant à la retraite, ce sont des mesures difficiles, ce sont des mesures qui font grincer des dents, mais ce sont des mesures qui sont incontournables. Et dailleurs vous le savez bien, cest parce quils nont pas engagé ces réformes que plusieurs pays européens sont aujourdhui dans la tourmente. Hélas cette tourmente, elle nous menace tous et elle nous condamne tous à une discipline sans faille.
Lémotion qui a été suscitée par lannonce dun référendum en Grèce nindique pas que les dirigeants européens se méfient des peuples, mais seulement quils ne pouvaient pas accepter quon puisse faire croire aux Grecs quil y avait une option pour leur permettre de bénéficier de la solidarité européenne sans en accepter les contraintes. Et je veux dire que je me félicite que la raison lait emporté, et que les responsables politiques grecs aient choisi de respecter laccord du 27 octobre. Après le vote intervenu cette nuit à Athènes, lobjectif du Gouvernement doit être maintenant de bâtir un consensus politique le plus large possible, afin dadopter et de mettre en uvre sans tarder le plan qui a été arrêté à lunanimité à Bruxelles.
Jai toujours défendu le principe de la solidarité entre les pays de la zone euro, parce que leuro cest lacquis le plus fort de ces 60 années dunification européenne. Leuro au fond maintenant, cest le noyau de la cellule européenne. Eh bien ! Si lon retire ce noyau, alors naturellement la cellule dépérira. Leuro doit être préservé, la défense de notre indépendance, la défense de notre mode de vie, en un mot la défense de notre civilisation européenne passe maintenant par une solidarité européenne sans faille.
Dans un monde dailleurs qui vient de dépasser les 7 milliards dhabitants, il ny a pas besoin dêtre un grand économiste ou un grand stratège politique pour comprendre que 500 millions dEuropéens nont pas dautre choix que de se serrer les coudes, de se serrer les coudes sils ne veulent pas être emportés par le vent de lhistoire qui souffle dans le sens de leur déclin.
La crise européenne a révélé un grave défaut de gouvernance, a révélé un mauvais fonctionnement au fond de nos institutions. Les compromis politiques que nous avons élaborés depuis des années pour tenter de concilier les intérêts de chacun, nont pas résisté à la violence de la réalité que nous devons affronter. Nous nous sommes dotés dune monnaie commune, mais nous avions repoussé à plus tard le temps de mettre en place les institutions politiques et les institutions financières nécessaires à la stabilité, à la survie de cette monnaie commune. Eh bien ! Maintenant, nous avons besoin de ces institutions politiques et financières. Et je veux dire, moi qui étais un adversaire de leuro au nom notamment du fait que je considérais que mettre en place une monnaie avant de mettre en place les institutions qui permettent à cette monnaie davoir sa force, cétait prendre beaucoup de risques. Mais je dis aujourdhui, compte tenu des changements dans le monde, je dis aujourdhui que seule une intégration renforcée au sein de la zone euro nous permettra de résister aux coups qui ébranlent les liens que nous avions patiemment tissés entre les nations européennes depuis la seconde guerre mondiale.
Et au cur de cette solidarité européenne, au cur de cette dynamique, il y a la France et il y a lAllemagne. Il y a la France et il y a lAllemagne, pas seulement parce que nos deux pays représentent la moitié du Produit Intérieur Brut de la zone euro, mais parce quil faut se souvenir que cest la France et lAllemagne qui sont à lorigine du mouvement européen, après avoir été les adversaires que lon sait. Et je veux dire que les critiques entendues ces derniers jours sur le couple franco-allemand sont à la fois dérisoires et infondées, mais surtout elles marquent un terrible contresens. Sil ny avait pas limpulsion de lAllemagne et de la France, il serait impossible de franchir une nouvelle étape qui est pourtant absolument nécessaire dans lintégration européenne. Et dailleurs je mets chacun dentre vous au défi de me citer une seule initiative, depuis 18 mois, qui soit venue dailleurs que de la France et de lAllemagne pour proposer des solutions à la crise européenne. Dune certaine façon sil y avait dautres initiatives, la France et lAllemagne pourraient se passer de travailler à rechercher des solutions. Mais depuis 18 mois, force est de constater que toutes les propositions qui ont été mises sur la table, même si cest souvent très difficile de parvenir à un accord entre nos deux pays, sont venues de la France et de lAllemagne.
Le rapprochement franco-allemand ça nest pas seulement un projet en soi, cest un point de départ pour entraîner lensemble du continent vers une nouvelle frontière. Cette nouvelle frontière cest une zone euro puissante, dont les économies progressivement convergent et qui éclairent le chemin de lUnion européenne dans la confrontation avec les nouvelles puissances économiques. Ce rapprochement exige des efforts de part et dautre, et pour la France vous le savez le défi cest de rejoindre lAllemagne sur le terrain de la compétitivité, de la réforme des retraites au triplement du crédit impôt recherche, de la réforme des universités à lassouplissement des 35 h. Nous avons posé les bases dune compétitivité accrue, mais cela nest quune première étape et il va falloir en franchir dautres.
LEurope a besoin dun leadership, mais le monde a aussi besoin dêtre conduit avec responsabilité. Et je veux dire que la présidence du G20 a montré la capacité du président de la République de faire bouger les lignes. Au sommet de Cannes, lengagement de renforcer les moyens du Fonds monétaire international a été pris, si besoin sen fait sentir. Le Fonds monétaire aura les moyens de jouer son rôle de rempart contre les crises systémiques. Et par ailleurs, les pays du G20 ont décidé dutiliser toutes les marges de manuvre pour soutenir la croissance. Cela veut dire que les pays dont la situation budgétaire est solide, je pense notamment à lAllemagne et à la Chine, devront faire jouer les stabilisateurs économiques, automatiques, au fond stimuler la demande intérieure pour soutenir la croissance. Les pays qui disposent dexcédents extérieurs importants et on pense naturellement surtout à la Chine sengagent à augmenter la demande intérieure et à accélérer la flexibilité de leur régime de change, afin de réduire à moyen terme laccumulation de réserves. Il faut savoir quaujourdhui, 80 % des réserves de change dans le monde sont détenus par les pays émergents, dont 60 % par la Chine.
Nous avons également obtenu des progrès en matière de régulation financière, puisque les grandes banques seront désormais soumises à de nouvelles obligations en matière de développement. Le G20 a reconnu la légitimité dune taxation du système financier, dont notamment une taxation des transactions financières. Alors comme dhabitude, les sceptiques diront que tout ceci reste insuffisant, et les idéalistes regretteront que le monde ne fut pas soudainement ré-enchanté. Mais les réalistes que nous sommes savent que la France a tenu efficacement son rôle international, et elle la fait en étant fidèle à ses valeurs universelles.
Mesdames et Messieurs, en vous parlant de la crise, en vous parlant de lEurope et du G20, je vous parle comme je parle aux élus de la nation. Parce que pour moi, il ny a pas dun côté lEtat et de lautre les collectivités locales qui saffronteraient dans une sorte de remake de lépoque féodale. Il ny a quune République dont lEtat et les collectivités sont les acteurs complémentaires, il ny a pas dun côté le Gouvernement qui serait le défenseur de lintérêt général et, de lautre, les maires qui défendraient le seul intérêt de leur commune. Il ny a quune seule nation française dont nous sommes les garants, vous et moi à égalité de responsabilités.
En Haute-Savoie, un travail considérable de développement du territoire a été accompli en lien avec lEtat. En un demi-siècle, votre département a totalement changé de visage, il est ancré dans une dynamique de croissance fondée sur léconomie de la montagne, sur les filières industrielles, agroalimentaires, sur les filières du médicament et de la mécanique. Comme tous nos départements, vous vous battez avec résolution pour offrir à vos communes des infrastructures technologiques, éducatives, sociales, sanitaires auxquelles nos concitoyens à juste titre aspirent. Mais au cur de ce combat pour le progrès il y a et jy reviens la question de nos finances publiques.
Un effort collectif simpose à nous tous, parce que la dette publique nous la partageons. Les marchés, les agences de notation et nos partenaires internationaux ne font pas de distinction entre la dette de lEtat, celle des collectivités et celle des organismes sociaux. Et dailleurs les relations sont évidentes entre les finances de lEtat et celles des collectivités locales, il suffit pour cela dévoquer les dotations aux collectivités. Vous savez bien quà lheure actuelle lEtat sendette en partie pour financer les dotations de fonctionnement quil vous verse. Ce seul exemple doit nous inciter (Etat, collectivités locales) à rechercher plus de cohérence dans la gestion des fonds publics, et il doit inciter les collectivités locales entre elles à fédérer leurs projets, à rationaliser leurs dépenses et à rationaliser leur organisation.
Cest vrai quau cours de ce quinquennat le paysage des finances locales a profondément évolué. Nous avons réformé la taxe professionnelle, parce quon ne pouvait pas rester le seul pays européen à taxer les investissements des entreprises. Nous avons ainsi redonné des marges de compétitivité à nos entreprises, tout en veillant à accompagner les effets de la réforme pour les collectivités locales. Nous avons développé dans des proportions jamais atteintes la péréquation entre les collectivités locales ; nous lavons fait pour les départements lannée dernière, cette année ce sera le tour du secteur communal, avec la création dun fonds de péréquation qui va redistribuer un peu plus de 250 millions deuros dès 2012.
Enfin, nous avons veillé à traiter les situations financières les plus difficiles. Au plan national, ce sont les finances des départements qui ont le plus souffert de la crise, parce que leur compétence sociale est une compétence cruciale. Fin 2010, avec le Parlement, nous avons mis en place un plan daide aux départements en difficultés, qui a déjà bénéficié à 40 dentre eux. Le Gouvernement a été sensible aussi à la question des emprunts dits toxiques, que certaines banques distribuaient il y a quelques années. Pour que ces produits ne réapparaissent pas sous de nouvelles formes, nous avons mis au point une charte avec les banques ; et pour faciliter la renégociation de ces emprunts avec les banques, nous avons confié une médiation à un inspecteur général des Finances. Certaines collectivités de votre département y ont fait appel, mais je veux dire devant vous, et en madressant à travers vous à tous les élus de notre pays, que cette médiation est beaucoup trop peu sollicitée par les collectivités, qui disent avoir des soucis avec ces emprunts toxiques. Je ne peux quinciter toutes les collectivités concernées à recourir à la médiation, et pas seulement au moment où les frais financiers senvolent. Je crois vraiment quen ce domaine lEtat a fait le devoir qui était le sien.
Je sais aussi que vous vous inquiétez du devenir du financement bancaire des collectivités locales. Jai annoncé au début du mois doctobre la mobilisation de 3 milliards deuros issus du Fonds dépargne de la Caisse des Dépôts, pour compenser linsuffisance des financements offerts par les banques aux collectivités locales et aux hôpitaux, pour cette fin dannée 2011. Ce dispositif est maintenant en place. La distribution des prêts sera effectuée pour moitié directement par la Caisse des Dépôts, et pour moitié par les banques commerciales. Ladjudication aux banques, qui sest déroulée hier, sest déroulée dans de très bonnes conditions, et les enveloppes seront disponibles pour les collectivités locales et pour les établissements hospitaliers dès mardi prochain, le 8 novembre, soit auprès des banques, soit auprès des directions régionales de la Caisse des Dépôts.
Sagissant des modalités de ces prêts, le Gouvernement a consulté les représentants des collectivités, et a pleinement pris en compte leurs recommandations. Ainsi, cette enveloppe pourra permettre de financer, au-delà des opérations dinvestissement inscrites au budget 2011, des opérations relevant des budgets pour 2012, dans la limite de 20 % du montant total. Par ailleurs, quatre types de prêts à taux fixe et à taux variable seront offerts, afin de donner un maximum de flexibilité aux collectivités locales dans la gestion de leur emprunt ; et le taux fixe pour des prêts à 15 ans sera denviron 4,5 %. Jai par ailleurs souhaité que la Caisse des Dépôts et les établissements partenaires dressent un état précis de la situation du financement des collectivités locales au 30 novembre, afin que nous puissions disposer dun diagnostic fiable permettant, le cas échéant, de majorer lenveloppe initialement prévue, si cela savère nécessaire.
Au-delà de cette réponse, qui est une réponse conjoncturelle, pour faire face au resserrement du crédit lié à la crise financière, nous avons décidé dapporter une réponse structurelle, pour faire face à la transformation du paysage des finances locales. Ce paysage des finances locales est en train de changer pour deux raisons. La première raison, cest quil y a des nouvelles règlementations bancaires internationales qui ne vont pas inciter les banques commerciales à prêter aux collectivités locales. Et la deuxième raison elle est plus conjoncturelle, celle-là , ce sont les difficultés de la banque Dexia ; ces difficultés, vous le savez, avaient démarré avec la crise de 2008. Elles nous ont engagés, cette année, compte tenu de la rechute de la crise financière, à réaliser une restructuration très profonde de cet établissement.
Et donc nous avons décidé, et ceci sera opérationnel au début de lannée 2012, de créer un pôle public de financement des territoires autour de la Banque Postale et de la Caisse des Dépôts. Au fond, il y aura désormais un établissement public, comme il y en avait autrefois, qui sera spécifiquement dédié au financement des collectivités locales, et qui pourra donc prêter aux collectivités locales en-dehors des contraintes qui sont celles qui pèsent sur les banques commerciales. Nous voulons en effet, à travers cet établissement, que vous ayez accès à une offre de financement qui soit à la fois simple, et qui soit surtout transparente ; et nous voulons que cette offre constitue une référence de bonnes pratiques sur le marché, pour les banques commerciales qui pourraient continuer à prêter aux collectivités locales.
Je voudrais dire un mot maintenant de la réforme territoriale, dont je sais que vous avez débattu ce matin. Cette réforme, elle provoque évidemment, comme toutes les réformes, des remous, des critiques, des contestations. Souvenez-vous de celle du début des années 80, souvenez-vous de la réforme de lintercommunalité : toutes les réformes de lorganisation de notre territoire ont suscité bien des critiques. Mais je veux dire que jassume sa philosophie, sa philosophie qui consiste à restructurer le territoire, à rationaliser nos structures.
Vous savez, on ne peut pas dun côté expliquer quil y a un grand malaise du monde rural du fait de la mondialisation, du fait du changement des habitudes de vie, du fait que les activités ne sont plus les mêmes quautrefois, que beaucoup dactivités nécessitent une concentration dénergie, de moyens, de formations, qui ne sont plus tout à fait adaptés à la structure des territoires ruraux , et puis de lautre côté, en tirer la conséquence que rien ne doit changer dans lorganisation de notre territoire national.
Nous avons, parallèlement à cette réforme, conduit des Assises des territoires ruraux, qui ont été les premières depuis 20 ans. Nous avons mis en place la deuxième génération des pôles dexcellence rurale, avec un financement de 235 millions deuros. Nous avons mobilisé une partie des investissements davenir pour le déploiement du haut et du très haut débit. Nous avons mis en place des financements pour les trains daménagement du territoire, et pour appuyer louverture de 250 maisons médicales en milieu rural. Il est en effet indispensable de définir un socle de services publics qui puissent être offerts à la population sur lensemble du territoire français. Et je sais quici, en Haute-Savoie, vous êtes particulièrement attentifs à la mise en uvre de ces outils.
Au sein de la réforme des collectivités territoriales, la rationalisation de lintercommunalité continue de susciter beaucoup de débats et beaucoup dinterrogations. Ici, en zone frontalière, et naturellement je serai attentif à tous les sujets qua évoqués le président Accoyer il y a quelques instants, notamment dans la discussion avec notre voisin suisse, puisque vous, vous êtes des habitués de léchange avec nos voisins européens, vous savez bien comment eux ont réorganisé leurs territoires : en Allemagne, en Espagne, en Italie, tous ont choisi la manière forte, et ils ont regroupé leurs communes dans des ensembles qui atteignent plusieurs dizaines de milliers dhabitants. Alors cest vrai, ils lont fait parce que leurs territoires sarticulent autour de grandes régions autonomes. Nous, nous avons une histoire, une culture, des paysages qui sont différents, et lhistoire de notre décentralisation est différente ; et donc, la méthode que nous avons choisie est aussi différente.
Nous avons voulu que les regroupements soient volontaires, et nous avons voulu faire naître de nouvelles synergies entre nos départements et nos régions, plutôt que de choisir de supprimer lun des deux échelons ce quauraient sans doute fait nos autres voisins. Alors on pourra peut-être demain, en regardant cette réforme avec un peu de recul, nous reprocher de ne pas être allés assez loin, et de ne pas être allés assez vite. Mais je pense que personne ne pourra nous reprocher, avec le recul, davoir engagé cette dynamique.
Sur le renforcement de lintercommunalité, et sur la méthode choisie, je veux rappeler que lobjectif est double. Dabord, nous voulons couvrir intégralement le territoire national par des Etablissements publics de Coopération intercommunale il sagissait, au fond, de combler les vides, de ne pas laisser des petits morceaux du territoire complètement à lécart de ce mouvement. Et dautre part, nous voulons avoir à la fin du processus des Etablissements publics de Coopération intercommunale dont la taille permette une véritable mise en commun des moyens, et un meilleur service rendu par les communes à nos concitoyens. En zone de montagne, vous savez mieux que moi que la délimitation de ces nouveaux Etablissements publics doit tenir compte des contraintes géographiques. Et Martial Saddier na pas été le dernier à faire valoir ces arguments au Parlement. Voilà pour les objectifs. Et je veux vous dire que le gouvernement nentend pas les remettre en cause.
Concernant maintenant le calendrier, lidée dorigine qui dailleurs, je voudrais le rappeler une nouvelle fois, a été imposée au Gouvernement par le Parlement , cétait davoir achevé lélaboration du schéma départemental de coopération intercommunale avant la fin de cette année. Nombreux sont les élus qui mont demandé plus de temps pour se concerter, plus de temps pour étudier différentes options. Jai déjà eu loccasion de le dire, et je le répète devant vous, et mon expérience délu local me conforte dans cette conviction : je ne crois pas aux mariages forcés. Et cest donc sur ce point que jai décidé de donner de la souplesse. Dans les départements où une large majorité des élus concernés se prononcent en faveur du projet, la procédure doit être conduite à son terme. Les préfets, dailleurs, ont reçu des instructions en ce sens. Mais lorsque ça nest pas le cas, jai souhaité leur accorder le temps nécessaire pour poursuivre le dialogue, et pour faire émerger un accord sur le projet.
Ici, en Haute-Savoie, vous pouvez et vous devez aller de lavant, vers plus dintercommunalité. Il ne sagit pas de prendre du temps pour ne pas résoudre les problèmes ; si un délai supplémentaire est nécessaire, cest pour faire aboutir des projets, et cest pour faire émerger des alternatives. Et donc, dans ce but, les Commissions départementales de coopération intercommunales seront à nouveau consultées par le préfet, sur les évolutions du projet de schéma qui interviendraient au-delà du 31 décembre prochain. Cest dailleurs ce que je viens décrire au Président de lAssociation des maires, au président Pélissard. Cela signifie quà ce stade il nest pas nécessaire de modifier la loi pour prendre le temps de discussions approfondies.
Il ny a pas, Mesdames et Messieurs, de moratoire sur la réforme des collectivités territoriales. Et je veux dire quau-delà de nos sensibilités politiques, je suis convaincu que nous voulons tous la même chose : nous voulons construire des ensembles cohérents, qui reflètent les réalités géographiques autant que les aspirations des habitants. Nous devons fuir les réflexions de court terme ; cela nest pas parce quil y a des inimitiés entre les maires dun territoire, ou parce quil y a des rivalités politiques entre les maires dun territoire, quil faut choisir le découpage de structures intercommunales qui vont perdurer pendant des années et des années, qui vivront bien au-delà des querelles que les uns ou les autres, naturellement, mettent en avant dans lélaboration de ces schémas. Ces schémas doivent répondre à des vraies questions, des questions qui touchent au développement de nos territoires, qui touchent au renforcement de leur attractivité, qui touchent à lamélioration de nos réseaux de transport. Au fond, la seule raison qui doit prévaloir, cest celle de lintérêt général.
Enfin, pour améliorer larticulation du travail entre les collectivités, nous avons choisi de mettre en place un dispositif dont le pivot sera le conseiller territorial, qui siègera au conseil général et au conseil régional. Vous savez, il ny avait que deux façons de traiter cette question du mille-feuille : soit on supprime un échelon, soit on organise progressivement la cohérence des échelons avec les mêmes élus. Nous avons choisi cette méthode. Je pense que cest la plus raisonnable, compte tenu de lhistoire de notre pays, compte tenu de lattachement de nos populations aux structures dorganisation du territoire qui sont les nôtres. A partir de linstant où nous conservons les échelons départementaux et régionaux, je crois vraiment que linstauration du conseiller territorial, cest la seule voie possible et audacieuse.
Concrètement, en Haute-Savoie, cela devrait contribuer à mieux coordonner lexercice des compétences entre Lyon et Annecy. Pour élire les conseillers territoriaux, il faudra délimiter de nouveaux cantons, puisque nous avons fait le choix dune élection au scrutin majoritaire pourquoi ? Parce que nous pensons que cest le seul qui garantisse une véritable proximité entre les élus et les citoyens. La loi nous oblige à adopter ce nouveau découpage au plus tard au début de 2013, et donc les travaux qui y conduiront auront lieu au deuxième semestre 2012.
Je suis confiant dans cette évolution de notre décentralisation, et je suis confiant dans les progrès quelle représente pour nos territoires. Pour avoir assumé toutes les responsabilités délu local, je sais la pesanteur des habitudes ; je sais la difficile tâche de développer des projets ; je mesure le poids des attentes et des frustrations qui entourent le beau mais le rude mandat de maire. Mais cest en sachant tout cela que jai la conviction que les réformes sont nécessaires, que les synergies sont essentielles, parce que la France ne peut plus disperser ses actions.
Mesdames et Messieurs, les maires de France sont respectés des citoyens. Et même si jai dit que le métier était de plus en plus difficile, le maire reste certainement lélu, sur notre territoire, dans lequel nos concitoyens ont le plus confiance. Vous êtes estimés, vous êtes écoutés ; en période de crise plus quen toute autre, je vous fais confiance pour tenir à nos concitoyens un langage de vérité.
Alors cest vrai, cette vérité est souvent dure à dire, et elle est souvent plus dure encore à entendre, parce que ce sont notre environnement, notre histoire, nos habitudes, notre mode de vie, qui sont en train dêtre bousculés par les changements du monde. La vérité est parfois douloureuse mais vous savez bien quelle lest infiniment moins que lillusion, la nostalgie et le mensonge. Nous ne sommes pas la première génération à devoir réinventer et remobiliser la France. Beaucoup de nos anciens sont tombés pour notre liberté ; beaucoup ont travaillé dur pour notre prospérité.
Elus de la République, nous sommes les artisans dune ambition française qui vient de loin, et nous navons pas le droit de laisser cette ambition française sabaisser, faute de courage, faute de lucidité. Chacun dentre vous est dépositaire de quelque chose de sacré, quelque chose qui va au-delà du service quotidien de nos concitoyens : je veux parler de la continuité française. Les époques passent, les temps changent, les épreuves surgissent et ressurgissent, mais la France, elle, doit demeurer. Malgré les coups durs, elle doit se battre, elle doit se redresser, elle doit se relancer ; et elle le fera. Elle le fera, parce que ses élus et le peuple français se comportent avec la dignité et avec la solidité qui distinguent les grandes nations. Les Trente Glorieuses sont bel et bien derrière nous, mais les 30 prochaines années ne dépendent que de nous. Alors, pas de morosité, pas de lassitude, pas de démission, pas de divisions inutiles ; prenons nos responsabilités, agissons, réinventons, retroussons-nous les manches, et alors nous réussirons ensemble.
Voilà, Mesdames et Messieurs, le message de franchise et dunité républicaine que je suis heureux de partager avec vous. Et je voudrais en profiter pour vous dire toute lamitié et toute laffection que je porte à la Haute-Savoie.
Source http://www.gouvernement.fr, le 7 novembre 2011