Texte intégral
Monsieur le Rapporteur Général de la Commission des Finances,
Mesdames, Messieurs,
La lutte contre la fraude et lévasion fiscale est une priorité du Gouvernement depuis 2007. Elle est même, je le dis clairement, lun des axes daction les plus importants du ministère que jai lhonneur de diriger.
Cest une question de justice. Les Français nont pas à payer le prix de lincivisme de ceux qui trichent. Ils nont pas à supporter les conséquences dun comportement qui est une offense caractérisée faite à notre Pacte Républicain. Ils nont pas à accepter de payer laddition fiscale que leur laissent tous ceux qui cherchent à échapper par tous les moyens à limpôt.
Cest aussi une question déquité. Face à limpérieuse nécessité de réduire notre dette publique, nous demandons des efforts à tous les Français. Ceux qui, aujourdhui, fraudent ou placent illégalement leur argent à létranger aimeraient échapper à cet effort national, de la même manière quen période de croissance, ils cherchent à échapper à la redistribution de la richesse qui est créée. Je le dis très clairement, le Gouvernement les en empêchera.
Notre détermination à lutter contre toutes les formes de fraude est en effet totale. Le Président de la République la montré, en faisant de la France lun des pays les plus investis dans la lutte contre les paradis fiscaux. Il la montré à nouveau à plusieurs reprises ces derniers jours, lors du G 20 à Cannes, puis en évoquant la lutte contre la fraude sociale à Bordeaux la semaine dernière.
Nous sommes en réalité engagés dans un combat que nous commençons à gagner. Nous commençons à le gagner parce que nous y consacrons des moyens sans précédents. Et ces moyens, Mesdames et Messieurs, nous allons encore les renforcer. Cest la raison pour laquelle jai souhaité vous réunir aujourdhui, avec Gilles Carrez, dont je salue lengagement profond dans ce combat, et avec Philippe Parini, qui livre au quotidien, avec les agents de la DGFIP, une action déterminée pour nous faire avancer.
1. En 4 ans, nous avons doté ladministration fiscale de moyens qui ne lui avaient jamais été donnés pour lutter contre la fraude fiscale.
Il faut dire clairement les choses : notre administration fiscale navait pas tous les outils pour lutter contre les fraudes les plus complexes. Je ne parle pas des formes de fraude les plus classiques et les plus connues. Non, je parle des formes les plus complexes, les plus abouties, et pour faire simple, souvent les plus coûteuses. Cest la fraude par des sociétés éphémères. Lévasion fiscale par des trusts ou des sociétés écrans.
La priorité a donc été de renforcer notre arsenal juridique, technique, informatique et humain pour améliorer notre capacité de contrôle. Cest ce que ce Gouvernement a fait, sous limpulsion dEric Woerth, dont je salue lengagement en la matière. Cest essentiel, parce que le coeur de notre stratégie, cest, et cela restera, le contrôle. Dautres Etats ont fait des choix différents, en particulier en matière de lutte contre lévasion fiscale, par exemple en choisissant la voie de lamnistie fiscale. Ce nest clairement pas notre voie. En matière de lutte contre la fraude et lévasion fiscale, il ny a à nos yeux quune seule stratégie : la peur du gendarme. Et pour que le gendarme fasse peur, il faut quil soit mieux armé que les fraudeurs. Cest le sens du renforcement des outils de ladministration fiscale que nous avons organisé, méthodiquement.
Depuis 2007, ce sont 60 mesures prises pour lutter contre les fraudes, que ce soit dans le domaine fiscal, social ou douanier. 23 mesures concernent tout particulièrement la lutte contre la fraude et lévasion fiscale.
Dabord, nous avons amélioré le cadre de notre action contre les paradis fiscaux. Sous limpulsion du Président de la République dans le cadre du G 20, nous avons dabord incité les paradis fiscaux à rentrer dans le droit chemin avec un paquet de mesures de rétorsion applicables aux opérations économiques avec des Etats et territoires non coopératifs. Cette stratégie qui sest appuyée sur lexpertise de la DLF est payante, puisque, nous avons conclu 36 conventions dassistance administrative permettant déchanger des renseignements. 22 de ces conventions sont dores et déjà entrées en vigueur. Cela ne veut pas dire que tout est rose, jy reviendrai. Mais il vaut mieux avoir 36 conventions signées, et donc un cadre de dialogue et de travail, que la situation antérieure.
Deuxièmement, nous avons renforcé la capacité denquête de la DGFiP, pour que ses contrôles soient les mieux ciblés et les plus efficaces possibles. Cette administration modernisée a également accentué la professionnalisation de ses équipes dans lorganisation du contrôle de dossier de personnes à forts enjeux. Léventail des outils juridiques que nous avons mis en place est très large, et nombre des 23 mesures fiscales ont été votées à lunanimité au Parlement. Je veux insister sur quatre outils :
- le droit de communication que nous avons mis en place pour que ladministration fiscale puisse obtenir de toutes les banques installées en France des informations sur les opérations de transferts de fonds réalisées à létranger. Concrètement, le fisc peut désormais connaître très facilement tous les mouvements de fonds réalisés par tel ou tel contribuable avec tel ou tel Etat, avec les numéros de compte à lappui ;
- notre fichier des évadés fiscaux (EVAFISC), qui nous permet davoir une base de données très riche dinformations laissant présumer la détention de comptes bancaires hors de France par des particuliers ou des entreprises. Il est alimenté, par exemple, par ces informations communiquées par les banques ;
- la mise en place de la police fiscale. Elle est partie du constat que le fisc était en échec sur les formes de fraude les plus complexes et quil lui fallait pouvoir utiliser des prérogatives de police judiciaire, par exemple la mise sur écoute. Et ceci, bien sûr, sans avoir à prévenir au préalable le fraudeur présumé, parce quaussi étonnant que cela puisse paraître, jusquà ce que ce Gouvernement mette en place la police fiscale, le fisc devait prévenir le contribuable quil avait des soupçons sur lui avant de pouvoir agir. Cette police fiscale, cest donc aujourdhui 13 agents de la DGFiP, ayant suivi une formation et obtenu la qualité dofficiers fiscaux judiciaires, et placé au sein de la direction centrale de la police judiciaire. En moins dun an dactivité, se sont déjà près de 60 affaires qui sont traitées dans le cadre de la police fiscale ;
- face à un phénomène européen de grande ampleur, nous avons fait de la lutte contre la fraude au carrousel de TVA une priorité. Au niveau national, nous avons pris des mesures législatives dissuasives et placé la lutte contre cette fraude au coeur de la stratégie des services de contrôle fiscal. Au niveau Européen, cest sous la Présidence Française de lUnion européenne au second semestre 2008, qua été adopté le système déchange dinformations entre Etats membres EUROFISC pour mieux lutter contre ces fraudes internationales à la TVA.
Troisième axe de renforcement de nos outils, nous avons amélioré la coopération entre les services de lEtat, à la fois par des croisements de fichiers et des actions communes sur le terrain.
Cette coopération entre les services a joué à plein dans lexploitation des fichiers HSBC et du Lichtenstein par ladministration fiscale, qui a travaillé avec la justice, la police et les douanes.
Elle sapplique également dans la lutte contre les fraudes sociales : par exemple, sur lannée 2010, environ 4 000 signalements ont été transmis par la DGFiP suite à contrôle fiscal au réseau des URSSAF pour quil en tire des conséquences en matière de cotisations sociales.
Sur ce sujet de la coopération, je veux particulièrement insister sur la coopération entre la DGFiP et les forces de police. Elle se traduit par la présence de plus de 100 agents du fisc au sein des services du ministère de lintérieur, notamment :
- 39 agents de la DGFIP dans les groupes dintervention régionaux (GIR) spécialisés dans la lutte contre léconomie souterraine ;
- 50 agents sont affectés à la lutte contre les activités illicites dans les quartiers sensibles, pour contrôler les délinquants sur leur train de vie. Cest extrêmement important pour nos concitoyens dans les quartiers, qui nacceptent pas que des personnes officiellement sans activité aient des signes extérieurs de richesses multiples, liés à des trafics divers et variés. Nous avons dailleurs réformé le droit fiscal il y a deux ans, pour pouvoir taxer les délinquants sur la base des revenus quils tirent de leur trafic.
Nous nous sommes également organisés pour davantage saisir et vendre les biens des trafiquants. Le Gouvernement a mis en place le 1er février 2011 lAgence de gestion et de recouvrement des avoirs criminels saisis et confisqués (AGRASC) dont le rôle consiste précisément à centraliser et gérer tous les biens criminels saisis ou confisqués par la justice. Sur les huit premiers mois de son activité, cette agence a traité 5000 affaires. 160 biens immobiliers, 530 comptes bancaires et 290 véhicules ont été saisis.
Enfin, quatrième et dernier axe, la cellule de régularisation. A partir du moment où le contrôle est une menace de plus en plus probable pour ceux qui ont des comptes non déclarés, nombre dentre eux souhaitaient se mettre en conformité avec le droit plutôt que dêtre rattrapés par le contrôle. Cest la raison pour laquelle, davril 2009 à décembre 2009, ces contribuables ont pu, via la « cellule de régularisation », déclarer leurs actifs et mette fin à leur illégalité, sous réserve de payer des impôts et des pénalités.
2. Mesdames et Messieurs, cette stratégie clairement répressive démontre déjà son efficacité. Les résultats sont au rendez-vous.
Jen veux pour preuve les recettes fiscales que lensemble de ces actions a déjà rapportées à lEtat :
- le contrôle fiscal a rapporté 16 milliards deuros en 2010, soit 1 Md de plus quen 2009 ;
- le nombre de comptes bancaires à létranger déclarés sest établi à près de 77 000 en 2010, contre environ 25 000 en 2007. Cest une très forte progression ;
- je rappelle que la cellule de régularisation a permis de régulariser la situation de 4 700 contribuables. Cela représente 7 milliards davoirs et a rapporté à lEtat 1,2 milliard de droits et pénalités. Cest un excellent résultat qui na aucun équivalent par le passé ;
- par ailleurs, vous le savez, un dispositif de contrôle exceptionnel concernant la liste des 3 000 de laffaire HSBC a été mis en oeuvre. Je peux dores et déjà vous dire que 800 contrôles ont dores et déjà été engagés. Et que sur ces 800 contrôles, 350 sont achevés, avec 160 millions deuros de recettes fiscales à la clé. Concrètement, cela signifie que lexploitation de 10 % de la liste a déjà rapporté 160 M ;
- les fraudes carrousel à la TVA réprimées sur la période 2008-2010 sélèvent au total à 1 milliard deuros. En 2010, ladministration a déposé 29 plaintes pour fraude fiscale et 12 pour escroquerie à lencontre de leurs instigateurs. Le nouveau système EUROFISC a permis en 2011 léchange de plus de 45.000 informations portant sur 16.000 sociétés pour un montant de transactions de 10 milliards deuros.
Ces résultats vont encore saccroître, car tous les outils que jévoquais permettent à ladministration fiscale de planifier des contrôles de plus en plus ciblés et donc de plus en plus efficaces :
- la DGFIP a fait usage du droit de communication auprès des 450 banques établies en France pour connaître lidentité de tous les résidents français ayant procédé à des virements dans des paradis fiscaux sur les années 2006 à 2008. 40 000 virements ont été identifiés, pour près de 8 000 contribuables. Un outil danalyse risque spécifique a été développé pour exploiter ces données et cibler les contrôles sur les contribuables pour lesquels un soupçon peut légitimement exister au regard de leur profil. Par exemple, si un contribuable a viré 100 000 vers la Suisse alors quil na officiellement pas de compte bancaire dans ce pays et que sa profession ny implique aucune activité en soi, il y a un doute légitime et donc un contrôle fiscal éventuel ;
- de la même manière, un droit de communication a été réalisé pour obtenir des informations sur les achats réalisés en France en 2007 et 2008 au moyen de cartes de crédits étrangères, afin didentifier les résidents français détenant des comptes à létranger non déclarés. Le test est concluant : près de 100 contrôles ont déjà été lancés, environ 40 sont terminés et ont déjà rapporté près de 9 millions deuros.
Toutes ces informations enrichissent le fichier EVAFISC, qui centralise désormais, après moins d1 an dexistence, 95 000 informations sur des comptes bancaires. Cela signifie concrètement que nous avons, à partir de ces informations, une capacité de programmation de contrôles fiscaux très importante.
Enfin, dans la lutte contre léconomie souterraine dans les quartiers sensibles, la coopération renforcée avec la police et la justice a permis dengager plus de 2 300 contrôles. 200 contrôles achevés ont conduit à des redressements pour 8 millions deuros de droits et pénalités. Dans ce cadre, les nouvelles mesures pour fiscaliser les trafics illicites sont utilisées : taxation par exemple des trafiquants sur la valeur des sommes saisies lors des enquêtes et sur le produits de leurs trafics ; prise en compte des éléments extérieurs de train de vie comme le logement, voitures, motos, voyages, bijoux.
3. Compte tenu de ces résultats et des progrès significatifs réalisés ces dernières années, nous allons poursuivre notre stratégie et accentuer encore notre lutte contre la fraude et lévasion fiscale.
Quelques mots sur notre stratégie dabord. Le Gouvernement ne changera pas de pied par rapport à la voie répressive quil a choisie.
Cest la seule qui soit compatible avec nos principes républicains et cest une voie qui nous rapporte, à nous aussi, des milliards deuros.
Je le répète, nous refusons donc toute mesure damnistie. Ce serait aux antipodes de notre Pacte républicain.
Et je le dis tout aussi clairement, nous ne souhaitons pas non plus nous engager dans le dispositif proposé par lassociation des banques suisses (RUBIK), parce que cela nous conduirait à accepter de transiger avec nos principes. Jen veux pour preuve le fait quavec ce dispositif, les contribuables ne seraient même plus tenus de déclarer les comptes quils détiennent en Suisse. Cest clairement incompatible avec la transparence sur laquelle repose notre fiscalité du patrimoine, quil sagisse de lISF ou des droits de succession.
Nous allons donc continuer à améliorer notre capacité de contrôle et à cibler de mieux en mieux laction des services fiscaux et douaniers.
Premièrement, je veux que dans le cadre de ses contrôles, ladministration fiscale veille scrupuleusement à lapplication du paquet de mesures de rétorsion concernant les Etats non coopératifs. Jai demandé à Philippe PARINI de sen assurer par des contrôles fiscaux ciblés. Par exemple, les entreprises qui versent des rémunérations dans des Etats non coopératifs, comme le Panama, doivent aujourdhui payer une retenue à la source au taux de 50 %. Il faut regarder que cette obligation est bien respectée.
Deuxièmement, le Gouvernement proposera au Parlement daller encore plus loin dans la lutte contre lévasion fiscale et la fraude internationale.
Nous avons, je lai dit, signé un ensemble de conventions. Même si elles constituent un indiscutable progrès, nous devons rester vigilants dans leur mise en oeuvre. Dans la lutte contre la fraude fiscale, il ny a pas de place pour la naïveté. A ce stade, je considère que leur effectivité nest pas encore suffisamment garantie, notamment parce que les éléments à réunir pour pouvoir interroger les administrations fiscales de ces pays sont nombreux, et la réactivité de ces administrations encore insuffisante.
Plus précisément, au cours des huit premiers mois de lannée 2011, plus de 230 requêtes ont été formulées par la France à 18 Etats (Andorre, Suisse, Liechtenstein, Malte Jersey etc.). Ces demandes visaient à connaître par exemple lidentité des actionnaires des structures enregistrées localement ou encore le nom des propriétaires effectifs des actifs.
Au 31 août 2011, soixante et onze réponses ont été reçues, soit un taux de réponse de 30 %. Lanalyse révèle que les éléments de nature juridique (statuts, noms des actionnaires, bilans de société ) sont généralement transmis. En revanche, la transmission des éléments plus concrets relatifs aux contribuables (information sur les soldes des comptes bancaires, montant des rémunérations) semble soulever plus de difficultés, et certains Etats semblent considérer que la coopération vise à valider une information déjà connue par les autorités françaises, plutôt quà en donner une nouvelle.
Tant que ces conventions ne produiront pas pleinement leurs effets, nous devrons compter dabord sur notre capacité de contrôle national. Elle doit donc pouvoir sexercer le plus longtemps possible face à une situation de suspicion de fraude. Cest la raison pour laquelle je proposerai, dans le cadre du PLFR 2011, que le délai de prescription en matière davoirs détenus à létranger et non déclarés soit systématiquement porté à 10 ans au lieu de 3 ans.
En 2008, nous avions porté ce délai à 10 ans uniquement pour les paradis fiscaux. Je souhaite que ce soit le cas pour tous les pays, sans distinction, puisque les signatures de conventions ont réduit le nombre des paradis fiscaux sur le papier, sans néanmoins nous garantir la coopération effective des Etats signataires.
Cette mesure permettra à ladministration fiscale davoir toujours le temps pour allié, et non plus pour ennemi pour traiter des questions aussi complexes que les comptes bancaires à létranger, les contrats dassurance vie, les trusts ou encore les structures juridiques dans des pays à basse pression fiscale.
Dans le même esprit, je souhaite que la police fiscale, qui a fait la preuve de son efficacité, ait également plus de temps pour agir lorsquelle est saisie, même lorsquil sagit dun Etat avec lequel nous avons signé une convention déchange dinformation.
Actuellement la police fiscale ne peut intervenir que pour les soupçons de fraude liés à un paradis fiscal. Lorsque lEtat sort de la liste des paradis fiscaux, la police fiscale ne peut donc plus agir, puisque les administrations peuvent échanger directement des informations. Nous devons nous laisser le temps dapprécier la réalité, dans la durée, de la coopération entre les services. Je proposerai donc au Parlement que la police fiscale conserve la possibilité dinvestiguer pendant un délai de trois ans supplémentaires à compter de la signature de cette convention.
Troisièmement, je souhaite que ladministration fiscale renouvèle ses opérations dobtention dinformations, pour alimenter le fichier EVAFISC et encore mieux cibler les contrôles.
Plus précisément, lopération « cartes bancaires » sera poursuivie sur les paiements réalisés en 2009, 2010 et 2011 à partir de comptes détenus à létranger. Ces informations alimenteront le fichier EVAFISC et seront analysées pour cibler des contrôles. Cela signifie concrètement que ladministration fiscale a devant elle de quoi planifier dès aujourdhui des années de contrôle dévadés fiscaux.
Lopération concernant le droit de communication portant sur les virements bancaires sera renouvelée pour les virements antérieurs à 2006.
Quatrièmement, je le dis très clairement : le respect du civisme fiscal ne concerne pas seulement les particuliers. Cest un sujet qui intéresse également les entreprises.
Cest pourquoi je souhaite que nous poursuivions notre action sur la frontière entre loptimisation fiscale et la fraude fiscale des entreprises.
Cest le sujet bien sûr des prix de transfert. Les redressements de bénéfices dans ce domaine sélèvent en moyenne à 1,9 Md deuros par an sur les trois dernières années. Les échanges commerciaux ou financiers au sein des groupes internationaux doivent seffectuer sur une base équilibrée. Le risque est bien identifié : cest la tentation pour certains groupes de pratiquer en interne des prix qui aboutissent à localiser artificiellement les bénéfices dans les comptes de leurs filiales établies dans des pays à basse pression fiscale.
Sur cette question, le Gouvernement a déjà agi, en imposant aux entreprises une obligation de documentation. Nous devons regarder sil faut aller plus loin sur ce sujet, mais en gardant à lesprit que la pratique des prix de transfert est, à la base, une opération normale dans la vie de lentreprise. Il faut donc en permanence chercher léquilibre entre la lutte contre la fraude et la vie des affaires. Il faut dailleurs aussi rappeler que dans ce domaine, nos procédures encouragent par ailleurs la sécurité juridique en donnant la possibilité aux entreprises de faire examiner au préalable leur situation par ladministration.
Jentends confier une mission à lInspection Générale des Finances pour quelle expertise notamment les solutions retenues par nos partenaires européens sur cette question complexe des prix de transfert.
Voilà, Mesdames et Messieurs, le bilan et les nouvelles actions que nous allons engager dans les prochaines semaines. Jamais aucun Gouvernement navait affiché de tels résultats concrets en matière de lutte contre la fraude et lévasion fiscale. Ils ne se comptent pas en millions deuros, mais en milliards deuros, et ils sajoutent à notre action en matière de fraudes sociales, qui sest traduite par une augmentation de 20 % des fraudes détectées à la Sécurité Sociale.
Dans ce domaine comme dans les autres, la constance paye. Je le répète, nous ne ferons preuve daucune naïveté. Nous naccepterons jamais de transiger avec nos principes. Nous ne dévierons pas de la voie que nous avons choisie depuis 2007 : le contrôle. Cest la seule voie qui respecte notre Pacte Républicain. Cest la seule voie que les Français acceptent. Cest la seule voie qui protège nos finances publiques et notre modèle social.
Je vous remercie
source http://www.budget.gouv.fr, le 24 novembre 2011
Mesdames, Messieurs,
La lutte contre la fraude et lévasion fiscale est une priorité du Gouvernement depuis 2007. Elle est même, je le dis clairement, lun des axes daction les plus importants du ministère que jai lhonneur de diriger.
Cest une question de justice. Les Français nont pas à payer le prix de lincivisme de ceux qui trichent. Ils nont pas à supporter les conséquences dun comportement qui est une offense caractérisée faite à notre Pacte Républicain. Ils nont pas à accepter de payer laddition fiscale que leur laissent tous ceux qui cherchent à échapper par tous les moyens à limpôt.
Cest aussi une question déquité. Face à limpérieuse nécessité de réduire notre dette publique, nous demandons des efforts à tous les Français. Ceux qui, aujourdhui, fraudent ou placent illégalement leur argent à létranger aimeraient échapper à cet effort national, de la même manière quen période de croissance, ils cherchent à échapper à la redistribution de la richesse qui est créée. Je le dis très clairement, le Gouvernement les en empêchera.
Notre détermination à lutter contre toutes les formes de fraude est en effet totale. Le Président de la République la montré, en faisant de la France lun des pays les plus investis dans la lutte contre les paradis fiscaux. Il la montré à nouveau à plusieurs reprises ces derniers jours, lors du G 20 à Cannes, puis en évoquant la lutte contre la fraude sociale à Bordeaux la semaine dernière.
Nous sommes en réalité engagés dans un combat que nous commençons à gagner. Nous commençons à le gagner parce que nous y consacrons des moyens sans précédents. Et ces moyens, Mesdames et Messieurs, nous allons encore les renforcer. Cest la raison pour laquelle jai souhaité vous réunir aujourdhui, avec Gilles Carrez, dont je salue lengagement profond dans ce combat, et avec Philippe Parini, qui livre au quotidien, avec les agents de la DGFIP, une action déterminée pour nous faire avancer.
1. En 4 ans, nous avons doté ladministration fiscale de moyens qui ne lui avaient jamais été donnés pour lutter contre la fraude fiscale.
Il faut dire clairement les choses : notre administration fiscale navait pas tous les outils pour lutter contre les fraudes les plus complexes. Je ne parle pas des formes de fraude les plus classiques et les plus connues. Non, je parle des formes les plus complexes, les plus abouties, et pour faire simple, souvent les plus coûteuses. Cest la fraude par des sociétés éphémères. Lévasion fiscale par des trusts ou des sociétés écrans.
La priorité a donc été de renforcer notre arsenal juridique, technique, informatique et humain pour améliorer notre capacité de contrôle. Cest ce que ce Gouvernement a fait, sous limpulsion dEric Woerth, dont je salue lengagement en la matière. Cest essentiel, parce que le coeur de notre stratégie, cest, et cela restera, le contrôle. Dautres Etats ont fait des choix différents, en particulier en matière de lutte contre lévasion fiscale, par exemple en choisissant la voie de lamnistie fiscale. Ce nest clairement pas notre voie. En matière de lutte contre la fraude et lévasion fiscale, il ny a à nos yeux quune seule stratégie : la peur du gendarme. Et pour que le gendarme fasse peur, il faut quil soit mieux armé que les fraudeurs. Cest le sens du renforcement des outils de ladministration fiscale que nous avons organisé, méthodiquement.
Depuis 2007, ce sont 60 mesures prises pour lutter contre les fraudes, que ce soit dans le domaine fiscal, social ou douanier. 23 mesures concernent tout particulièrement la lutte contre la fraude et lévasion fiscale.
Dabord, nous avons amélioré le cadre de notre action contre les paradis fiscaux. Sous limpulsion du Président de la République dans le cadre du G 20, nous avons dabord incité les paradis fiscaux à rentrer dans le droit chemin avec un paquet de mesures de rétorsion applicables aux opérations économiques avec des Etats et territoires non coopératifs. Cette stratégie qui sest appuyée sur lexpertise de la DLF est payante, puisque, nous avons conclu 36 conventions dassistance administrative permettant déchanger des renseignements. 22 de ces conventions sont dores et déjà entrées en vigueur. Cela ne veut pas dire que tout est rose, jy reviendrai. Mais il vaut mieux avoir 36 conventions signées, et donc un cadre de dialogue et de travail, que la situation antérieure.
Deuxièmement, nous avons renforcé la capacité denquête de la DGFiP, pour que ses contrôles soient les mieux ciblés et les plus efficaces possibles. Cette administration modernisée a également accentué la professionnalisation de ses équipes dans lorganisation du contrôle de dossier de personnes à forts enjeux. Léventail des outils juridiques que nous avons mis en place est très large, et nombre des 23 mesures fiscales ont été votées à lunanimité au Parlement. Je veux insister sur quatre outils :
- le droit de communication que nous avons mis en place pour que ladministration fiscale puisse obtenir de toutes les banques installées en France des informations sur les opérations de transferts de fonds réalisées à létranger. Concrètement, le fisc peut désormais connaître très facilement tous les mouvements de fonds réalisés par tel ou tel contribuable avec tel ou tel Etat, avec les numéros de compte à lappui ;
- notre fichier des évadés fiscaux (EVAFISC), qui nous permet davoir une base de données très riche dinformations laissant présumer la détention de comptes bancaires hors de France par des particuliers ou des entreprises. Il est alimenté, par exemple, par ces informations communiquées par les banques ;
- la mise en place de la police fiscale. Elle est partie du constat que le fisc était en échec sur les formes de fraude les plus complexes et quil lui fallait pouvoir utiliser des prérogatives de police judiciaire, par exemple la mise sur écoute. Et ceci, bien sûr, sans avoir à prévenir au préalable le fraudeur présumé, parce quaussi étonnant que cela puisse paraître, jusquà ce que ce Gouvernement mette en place la police fiscale, le fisc devait prévenir le contribuable quil avait des soupçons sur lui avant de pouvoir agir. Cette police fiscale, cest donc aujourdhui 13 agents de la DGFiP, ayant suivi une formation et obtenu la qualité dofficiers fiscaux judiciaires, et placé au sein de la direction centrale de la police judiciaire. En moins dun an dactivité, se sont déjà près de 60 affaires qui sont traitées dans le cadre de la police fiscale ;
- face à un phénomène européen de grande ampleur, nous avons fait de la lutte contre la fraude au carrousel de TVA une priorité. Au niveau national, nous avons pris des mesures législatives dissuasives et placé la lutte contre cette fraude au coeur de la stratégie des services de contrôle fiscal. Au niveau Européen, cest sous la Présidence Française de lUnion européenne au second semestre 2008, qua été adopté le système déchange dinformations entre Etats membres EUROFISC pour mieux lutter contre ces fraudes internationales à la TVA.
Troisième axe de renforcement de nos outils, nous avons amélioré la coopération entre les services de lEtat, à la fois par des croisements de fichiers et des actions communes sur le terrain.
Cette coopération entre les services a joué à plein dans lexploitation des fichiers HSBC et du Lichtenstein par ladministration fiscale, qui a travaillé avec la justice, la police et les douanes.
Elle sapplique également dans la lutte contre les fraudes sociales : par exemple, sur lannée 2010, environ 4 000 signalements ont été transmis par la DGFiP suite à contrôle fiscal au réseau des URSSAF pour quil en tire des conséquences en matière de cotisations sociales.
Sur ce sujet de la coopération, je veux particulièrement insister sur la coopération entre la DGFiP et les forces de police. Elle se traduit par la présence de plus de 100 agents du fisc au sein des services du ministère de lintérieur, notamment :
- 39 agents de la DGFIP dans les groupes dintervention régionaux (GIR) spécialisés dans la lutte contre léconomie souterraine ;
- 50 agents sont affectés à la lutte contre les activités illicites dans les quartiers sensibles, pour contrôler les délinquants sur leur train de vie. Cest extrêmement important pour nos concitoyens dans les quartiers, qui nacceptent pas que des personnes officiellement sans activité aient des signes extérieurs de richesses multiples, liés à des trafics divers et variés. Nous avons dailleurs réformé le droit fiscal il y a deux ans, pour pouvoir taxer les délinquants sur la base des revenus quils tirent de leur trafic.
Nous nous sommes également organisés pour davantage saisir et vendre les biens des trafiquants. Le Gouvernement a mis en place le 1er février 2011 lAgence de gestion et de recouvrement des avoirs criminels saisis et confisqués (AGRASC) dont le rôle consiste précisément à centraliser et gérer tous les biens criminels saisis ou confisqués par la justice. Sur les huit premiers mois de son activité, cette agence a traité 5000 affaires. 160 biens immobiliers, 530 comptes bancaires et 290 véhicules ont été saisis.
Enfin, quatrième et dernier axe, la cellule de régularisation. A partir du moment où le contrôle est une menace de plus en plus probable pour ceux qui ont des comptes non déclarés, nombre dentre eux souhaitaient se mettre en conformité avec le droit plutôt que dêtre rattrapés par le contrôle. Cest la raison pour laquelle, davril 2009 à décembre 2009, ces contribuables ont pu, via la « cellule de régularisation », déclarer leurs actifs et mette fin à leur illégalité, sous réserve de payer des impôts et des pénalités.
2. Mesdames et Messieurs, cette stratégie clairement répressive démontre déjà son efficacité. Les résultats sont au rendez-vous.
Jen veux pour preuve les recettes fiscales que lensemble de ces actions a déjà rapportées à lEtat :
- le contrôle fiscal a rapporté 16 milliards deuros en 2010, soit 1 Md de plus quen 2009 ;
- le nombre de comptes bancaires à létranger déclarés sest établi à près de 77 000 en 2010, contre environ 25 000 en 2007. Cest une très forte progression ;
- je rappelle que la cellule de régularisation a permis de régulariser la situation de 4 700 contribuables. Cela représente 7 milliards davoirs et a rapporté à lEtat 1,2 milliard de droits et pénalités. Cest un excellent résultat qui na aucun équivalent par le passé ;
- par ailleurs, vous le savez, un dispositif de contrôle exceptionnel concernant la liste des 3 000 de laffaire HSBC a été mis en oeuvre. Je peux dores et déjà vous dire que 800 contrôles ont dores et déjà été engagés. Et que sur ces 800 contrôles, 350 sont achevés, avec 160 millions deuros de recettes fiscales à la clé. Concrètement, cela signifie que lexploitation de 10 % de la liste a déjà rapporté 160 M ;
- les fraudes carrousel à la TVA réprimées sur la période 2008-2010 sélèvent au total à 1 milliard deuros. En 2010, ladministration a déposé 29 plaintes pour fraude fiscale et 12 pour escroquerie à lencontre de leurs instigateurs. Le nouveau système EUROFISC a permis en 2011 léchange de plus de 45.000 informations portant sur 16.000 sociétés pour un montant de transactions de 10 milliards deuros.
Ces résultats vont encore saccroître, car tous les outils que jévoquais permettent à ladministration fiscale de planifier des contrôles de plus en plus ciblés et donc de plus en plus efficaces :
- la DGFIP a fait usage du droit de communication auprès des 450 banques établies en France pour connaître lidentité de tous les résidents français ayant procédé à des virements dans des paradis fiscaux sur les années 2006 à 2008. 40 000 virements ont été identifiés, pour près de 8 000 contribuables. Un outil danalyse risque spécifique a été développé pour exploiter ces données et cibler les contrôles sur les contribuables pour lesquels un soupçon peut légitimement exister au regard de leur profil. Par exemple, si un contribuable a viré 100 000 vers la Suisse alors quil na officiellement pas de compte bancaire dans ce pays et que sa profession ny implique aucune activité en soi, il y a un doute légitime et donc un contrôle fiscal éventuel ;
- de la même manière, un droit de communication a été réalisé pour obtenir des informations sur les achats réalisés en France en 2007 et 2008 au moyen de cartes de crédits étrangères, afin didentifier les résidents français détenant des comptes à létranger non déclarés. Le test est concluant : près de 100 contrôles ont déjà été lancés, environ 40 sont terminés et ont déjà rapporté près de 9 millions deuros.
Toutes ces informations enrichissent le fichier EVAFISC, qui centralise désormais, après moins d1 an dexistence, 95 000 informations sur des comptes bancaires. Cela signifie concrètement que nous avons, à partir de ces informations, une capacité de programmation de contrôles fiscaux très importante.
Enfin, dans la lutte contre léconomie souterraine dans les quartiers sensibles, la coopération renforcée avec la police et la justice a permis dengager plus de 2 300 contrôles. 200 contrôles achevés ont conduit à des redressements pour 8 millions deuros de droits et pénalités. Dans ce cadre, les nouvelles mesures pour fiscaliser les trafics illicites sont utilisées : taxation par exemple des trafiquants sur la valeur des sommes saisies lors des enquêtes et sur le produits de leurs trafics ; prise en compte des éléments extérieurs de train de vie comme le logement, voitures, motos, voyages, bijoux.
3. Compte tenu de ces résultats et des progrès significatifs réalisés ces dernières années, nous allons poursuivre notre stratégie et accentuer encore notre lutte contre la fraude et lévasion fiscale.
Quelques mots sur notre stratégie dabord. Le Gouvernement ne changera pas de pied par rapport à la voie répressive quil a choisie.
Cest la seule qui soit compatible avec nos principes républicains et cest une voie qui nous rapporte, à nous aussi, des milliards deuros.
Je le répète, nous refusons donc toute mesure damnistie. Ce serait aux antipodes de notre Pacte républicain.
Et je le dis tout aussi clairement, nous ne souhaitons pas non plus nous engager dans le dispositif proposé par lassociation des banques suisses (RUBIK), parce que cela nous conduirait à accepter de transiger avec nos principes. Jen veux pour preuve le fait quavec ce dispositif, les contribuables ne seraient même plus tenus de déclarer les comptes quils détiennent en Suisse. Cest clairement incompatible avec la transparence sur laquelle repose notre fiscalité du patrimoine, quil sagisse de lISF ou des droits de succession.
Nous allons donc continuer à améliorer notre capacité de contrôle et à cibler de mieux en mieux laction des services fiscaux et douaniers.
Premièrement, je veux que dans le cadre de ses contrôles, ladministration fiscale veille scrupuleusement à lapplication du paquet de mesures de rétorsion concernant les Etats non coopératifs. Jai demandé à Philippe PARINI de sen assurer par des contrôles fiscaux ciblés. Par exemple, les entreprises qui versent des rémunérations dans des Etats non coopératifs, comme le Panama, doivent aujourdhui payer une retenue à la source au taux de 50 %. Il faut regarder que cette obligation est bien respectée.
Deuxièmement, le Gouvernement proposera au Parlement daller encore plus loin dans la lutte contre lévasion fiscale et la fraude internationale.
Nous avons, je lai dit, signé un ensemble de conventions. Même si elles constituent un indiscutable progrès, nous devons rester vigilants dans leur mise en oeuvre. Dans la lutte contre la fraude fiscale, il ny a pas de place pour la naïveté. A ce stade, je considère que leur effectivité nest pas encore suffisamment garantie, notamment parce que les éléments à réunir pour pouvoir interroger les administrations fiscales de ces pays sont nombreux, et la réactivité de ces administrations encore insuffisante.
Plus précisément, au cours des huit premiers mois de lannée 2011, plus de 230 requêtes ont été formulées par la France à 18 Etats (Andorre, Suisse, Liechtenstein, Malte Jersey etc.). Ces demandes visaient à connaître par exemple lidentité des actionnaires des structures enregistrées localement ou encore le nom des propriétaires effectifs des actifs.
Au 31 août 2011, soixante et onze réponses ont été reçues, soit un taux de réponse de 30 %. Lanalyse révèle que les éléments de nature juridique (statuts, noms des actionnaires, bilans de société ) sont généralement transmis. En revanche, la transmission des éléments plus concrets relatifs aux contribuables (information sur les soldes des comptes bancaires, montant des rémunérations) semble soulever plus de difficultés, et certains Etats semblent considérer que la coopération vise à valider une information déjà connue par les autorités françaises, plutôt quà en donner une nouvelle.
Tant que ces conventions ne produiront pas pleinement leurs effets, nous devrons compter dabord sur notre capacité de contrôle national. Elle doit donc pouvoir sexercer le plus longtemps possible face à une situation de suspicion de fraude. Cest la raison pour laquelle je proposerai, dans le cadre du PLFR 2011, que le délai de prescription en matière davoirs détenus à létranger et non déclarés soit systématiquement porté à 10 ans au lieu de 3 ans.
En 2008, nous avions porté ce délai à 10 ans uniquement pour les paradis fiscaux. Je souhaite que ce soit le cas pour tous les pays, sans distinction, puisque les signatures de conventions ont réduit le nombre des paradis fiscaux sur le papier, sans néanmoins nous garantir la coopération effective des Etats signataires.
Cette mesure permettra à ladministration fiscale davoir toujours le temps pour allié, et non plus pour ennemi pour traiter des questions aussi complexes que les comptes bancaires à létranger, les contrats dassurance vie, les trusts ou encore les structures juridiques dans des pays à basse pression fiscale.
Dans le même esprit, je souhaite que la police fiscale, qui a fait la preuve de son efficacité, ait également plus de temps pour agir lorsquelle est saisie, même lorsquil sagit dun Etat avec lequel nous avons signé une convention déchange dinformation.
Actuellement la police fiscale ne peut intervenir que pour les soupçons de fraude liés à un paradis fiscal. Lorsque lEtat sort de la liste des paradis fiscaux, la police fiscale ne peut donc plus agir, puisque les administrations peuvent échanger directement des informations. Nous devons nous laisser le temps dapprécier la réalité, dans la durée, de la coopération entre les services. Je proposerai donc au Parlement que la police fiscale conserve la possibilité dinvestiguer pendant un délai de trois ans supplémentaires à compter de la signature de cette convention.
Troisièmement, je souhaite que ladministration fiscale renouvèle ses opérations dobtention dinformations, pour alimenter le fichier EVAFISC et encore mieux cibler les contrôles.
Plus précisément, lopération « cartes bancaires » sera poursuivie sur les paiements réalisés en 2009, 2010 et 2011 à partir de comptes détenus à létranger. Ces informations alimenteront le fichier EVAFISC et seront analysées pour cibler des contrôles. Cela signifie concrètement que ladministration fiscale a devant elle de quoi planifier dès aujourdhui des années de contrôle dévadés fiscaux.
Lopération concernant le droit de communication portant sur les virements bancaires sera renouvelée pour les virements antérieurs à 2006.
Quatrièmement, je le dis très clairement : le respect du civisme fiscal ne concerne pas seulement les particuliers. Cest un sujet qui intéresse également les entreprises.
Cest pourquoi je souhaite que nous poursuivions notre action sur la frontière entre loptimisation fiscale et la fraude fiscale des entreprises.
Cest le sujet bien sûr des prix de transfert. Les redressements de bénéfices dans ce domaine sélèvent en moyenne à 1,9 Md deuros par an sur les trois dernières années. Les échanges commerciaux ou financiers au sein des groupes internationaux doivent seffectuer sur une base équilibrée. Le risque est bien identifié : cest la tentation pour certains groupes de pratiquer en interne des prix qui aboutissent à localiser artificiellement les bénéfices dans les comptes de leurs filiales établies dans des pays à basse pression fiscale.
Sur cette question, le Gouvernement a déjà agi, en imposant aux entreprises une obligation de documentation. Nous devons regarder sil faut aller plus loin sur ce sujet, mais en gardant à lesprit que la pratique des prix de transfert est, à la base, une opération normale dans la vie de lentreprise. Il faut donc en permanence chercher léquilibre entre la lutte contre la fraude et la vie des affaires. Il faut dailleurs aussi rappeler que dans ce domaine, nos procédures encouragent par ailleurs la sécurité juridique en donnant la possibilité aux entreprises de faire examiner au préalable leur situation par ladministration.
Jentends confier une mission à lInspection Générale des Finances pour quelle expertise notamment les solutions retenues par nos partenaires européens sur cette question complexe des prix de transfert.
Voilà, Mesdames et Messieurs, le bilan et les nouvelles actions que nous allons engager dans les prochaines semaines. Jamais aucun Gouvernement navait affiché de tels résultats concrets en matière de lutte contre la fraude et lévasion fiscale. Ils ne se comptent pas en millions deuros, mais en milliards deuros, et ils sajoutent à notre action en matière de fraudes sociales, qui sest traduite par une augmentation de 20 % des fraudes détectées à la Sécurité Sociale.
Dans ce domaine comme dans les autres, la constance paye. Je le répète, nous ne ferons preuve daucune naïveté. Nous naccepterons jamais de transiger avec nos principes. Nous ne dévierons pas de la voie que nous avons choisie depuis 2007 : le contrôle. Cest la seule voie qui respecte notre Pacte Républicain. Cest la seule voie que les Français acceptent. Cest la seule voie qui protège nos finances publiques et notre modèle social.
Je vous remercie
source http://www.budget.gouv.fr, le 24 novembre 2011