Interview de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, à France inter le 2 février 2012, sur le "contrat social" proposé par la fondation Abbé Pierre, l'annonce de l'augmentation de 30% de la surface constructible de logements et la préparation de la campagne pour l'élection présidentielle.

Prononcé le

Média : France Inter

Texte intégral

PASCALE CLARK Si Nicolas SARKOZY était candidat déclaré, aurait-il signé le contrat social de la Fondation Abbé Pierre pour une nouvelle politique du logement ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Ecoutez je ne peux pas vous répondre pour lui mais je peux vous répondre pour moi comme ministre du Logement…
 
PASCALE CLARK Car vous, vous êtes ministre déclaré donc vous pouvez répondre.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET … il y a des choses intéressantes, mais il y a aussi des choses qui ne fonctionnent pas. Dans le contrat de la fondation Abbé Pierre il y a par exemple l’objectif de construire 500.000 logements par an, c’est un bon objectif, aujourd'hui on en construit un peu plus de 400.000. En 2011 en dépit de la crise on aura délivré, toutes catégories confondues, 466.000 permis de construire et puis surtout…
 
PASCALE CLARK 500.000 dont 150.000 logements vraiment sociaux.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Aujourd'hui on finance 130.000 logements sociaux par an, c’est-à-dire entre deux et trois fois plus que ce qui se faisait du temps de Lionel JOSPIN. Evidemment il faut viser d’atteindre 150.000, 130.000 logements sociaux par an c’est quand même beaucoup mieux que ce qu’on faisait par le passé. En revanche, dans le contrat de la fondation Abbé Pierre, c’est vrai qu’il y a des mesures sur lesquelles nous avec Benoît APPARU on sera plus réticents…
 
PASCALE CLARK L’encadrement des loyers ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET L’encadrement des loyers ça semble, c’est une fausse bonne idée. On a essayé, après les deux guerres mondiales on a fait l’encadrement des loyers, ça n’a jamais marché pourquoi ? Parce qu’en fait dans ces cas-là les propriétaires se retirent du marché, surtout les propriétaires n’investissent pas et les logements se dégradent. On a eu des logements à loyers encadrés extrêmement dégradés. Donc ce qu’on a mis en place c'est l’encadrement au moment de l’évolution du bail, au moment du renouvellement du bail, ça par exemple oui, mais l’encadrement des loyers au sens des loyers bloqués, administrés, ce n’est pas une bonne idée. Ce qu’il faut en revanche c’est lutter contre les abus, c’est ce qu’on fait avec la surtaxe sur les loyers excessifs sur les petites surfaces et moi je m’étonne que les socialistes qui nous parlent aujourd’hui d’encadrer le loyer, n’aient pas voté au moins pour les sénateurs socialistes, cette surtaxe, ils ont voté contre.
 
PASCALE CLARK Alors comme Nicolas SARKOZY n’est pas déclaré, on va commenter ses mesures, mercredi prochain sera présenté le texte de loi permettant l’augmentation de 30% de la surface constructible, ça va vite.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui il faut aller vite, il y a deux mesures…
 
PASCALE CLARK Mais ça va tellement vite que du coup on se demande pourquoi ça n’a pas été fait avant.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET On a besoin pour répondre au problème du logement, de construire plus de logements, c’est la solution, il nous en faut plus et il nous en faut de moins chers. C’est vrai que la mesure qui est proposée là c’est une mesure qui parait une mesure choc…
 
PASCALE CLARK Mais c’est annoncé dimanche soir et déjà un texte, en dix jours, donc pourquoi ça n’a pas été fait avant, il y avait quatre ans et demi ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET On en parle depuis longtemps, c’est une mesure choc, c’est une mesure qui soulève d’ailleurs pas mal d’opposition, de critiques. Moi j’ai reçu hier longuement les parlementaires, les associations d’élus pour l’évoquer avec eux, on essaie de trouver un équilibre autour d’une mesure forte et en même temps la possibilité pour les élus qui vraiment ne le sentent pas, qui ne le souhaitent pas, de voter contre pour ne pas appliquer sur leur commune. Mais moi j’espère en convaincre le maximum. Pourquoi, d’ailleurs c’est une mesure simple…
 
PASCALE CLARK Alors il y a un seul article pour le texte, vous l’avez déjà l’article ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Un seul article, oui on l’a déjà, on l’a passé au Conseil d’Etat pour avis…
 
PASCALE CLARK C’est quoi l’article alors ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET C’est un article qui fait une page quand même, ce n’est…
 
PASCALE CLARK Ah oui, parce qu’on avait l’air de dire que c’était une phrase.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Ecoutez, mais ceci dit, c’est très simple. Ca dit voilà, la constructibilité augmente partout, la constructibilité c’est-à-dire le coefficient d’occupation des sols, les limites de hauteur, les limites de gabarit etc, sauf dans les communes qui ne veulent absolument pas et qui veulent voter contre. Partout, là où c’est constructible, c’est-à-dire que ce n’est pas de l’étalement urbain contrairement à ce que j’ai entendu ici ou là, c’est tout le contraire. Là où on peut construire, on peut construire plus, en revanche là où on ne peut pas construire, loi littoral, loi montagne, servitude de risque, on ne construira pas. Et ça permet à la fois d’agrandir, d’agrandir pour loger les enfants, d’agrandir parce qu’il y a une demande très forte sur un terrain, ça permet aussi de construire plus sur un terrain à bâtir, on pouvait construire 100 logements, on en construira 130 donc les logements sortiront moins chers.
 
PASCALE CLARK Oui mais ajouter une chambre, construire un garage ou une véranda ça ne fait pas plus de logement ça.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET A plus 30%, vous pouvez construire plus qu’une chambre ou une véranda, c'est ça la différence.
 
PASCALE CLARK Oui enfin ce n’est pas 30% obligés non plus, ce n’est pas 30% obligatoires, c’est comme on veut.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Ce n’est pas 30% obligés mais vous pouvez le faire si vous voulez, vous n’êtes pas juste sur l’aménagement et la marge et puis il y a la mesure sur le foncier public, on n’en a pas assez parlé, la mise à disposition de terrain en vue d’avoir 50.000 logements en Ile-de-France, 50.000 en province, c’est le prolongement d’une mesure qui existe déjà aujourd'hui mais sur la période 2008 – 2012 on avait un objectif de 70.000 terrains sur foncier public, c’est sur un de ces terrains que le président de la République se déplace aujourd’hui, on aura fait 55.000, on aura atteint 80% de notre objectif, là on veut atteindre 100% et avec des moyens si vous voulez pour s’obliger soi-même à construire, qui sont forts.
 
PASCALE CLARK Alors autre contradiction relevée par les professionnelle sur l’augmentation de la surface où il est possible de construire, pourquoi les prix baisseraient puisque construire plus, ça veut dire payer plus cher les prix des terrains. Où est la logique parce que Nicolas SARKOZY a promis une baisse.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Alors d’abord, même si le prix du terrain augmente de 30%, si vous construisez 30% de logements en plus et comme le prix du terrain ne représente qu’une part du prix du logement final, pardon c’est un peu compliqué, mais arithmétiquement le logement final il sort quand même moins cher qu’avant.
 
PASCALE CLARK Je ne sais pas comment, mais on n’a peut-être pas le temps de l’expliquer là.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Si, le terrain n’est qu’un ingrédient du logement final, donc même s’il augmente de 30% et si vous produisez 30% en plus, arithmétiquement, le logement sort moins cher, mais ceci dit le fond du sujet n’est pas là, le fond du sujet c’est qu’aujourd'hui ce qui coince dans la grande chaîne de production des logements, c’est le foncier, notamment en Ile-de-France, voilà c’est le foncier, c’est là que ça coince et ça ne sert à rien d’injecter toujours plus d’argent public à l’entrée dans la production ou à la sortie dans l’aide à la personne pour pouvoir acheter si ça continue à coincer au niveau du foncier. Voilà il faut débloquer le foncier, ce sont des mesures fortes qui sont ici proposées pour le faire.
 
PASCALE CLARK Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET vous accueillez Nicolas SARKOZY tout à l’heure dans votre ville de Longjumeau, il y aura d’abord une visite à Mennecy, savez-vous combien il y a de logements sociaux à Mennecy ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui un peu plus de 15 logements sociaux…
 
PASCALE CLARK 15% ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET 15%...
 
PASCALE CLARK Alors que la loi SRU c’est 20%...
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui mais je vous invite à regarder tout ce qui a été fait sur les différentes communes de l’Essonne, Mennecy c’est une des communes qui rattrape, qui va atteindre ses 20%. Et puis je vous signale qu’après le président de la République vient à Longjumeau, là il y a plus de 30%.
 
PASCALE CLARK Vous pourriez être la porte-parole de la campagne de Nicolas SARKOZY ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Ecoutez c'est le candidat qui aujourd'hui n’est pas candidat qui peut faire ce genre de choix, donc je ne peux pas répondre à votre question. Aujourd’hui d’abord il n’y a pas de candidat et ensuite il n’a pas choisi.
 
PASCALE CLARK Oui mais ce serait « oui » s’il vous le demandait ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Moi je souhaite participer à cette campagne à la place qu’on jugera utile.
 
PASCALE CLARK Dernière question, vous faites la une ce week-end de M, le magazine du Monde et le titre c’est : Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET l’atout chic du président, l’anti-MORANO.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Ecoutez, je n’aime pas trop le titre, d’abord je ne suis pas anti qui que ce soit…
 
PASCALE CLARK C’est « chic » qui vous gêne ou c’est « l’anti MORANO » ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET C’est les deux en fait, voilà il y a quelque chose d’un peu slogan dans le titre et je ne suis pas anti qui que ce soit et surtout pas anti Nadine MORANO qui est une collègue que j’apprécie et qui est très combative et d’ailleurs on me prête dans l’article une citation que je ne revendique pas.
 
Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 2 février 2012