Déclaration de M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, sur les mesures destinées à favoriser la compétitivité des entreprises, notamment la création de la Banque publique d'investissement, et le redressement des comptes publics, à Bouguenais le 15 octobre 2012.

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Circonstance : Déplacement à l'Institut de recherche technologique Jules Verne, à Bouguenais (Loire-Atlantique) le 15 octobre 2012

Texte intégral

Mesdames et messieurs les Ministres,
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Préfet,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Monsieur le Président du conseil régional, Jacques Auxiette,
Mesdames et messieurs les élus, président de la communauté urbaine de Nantes, de l’agglomération de Saint-Nazaire et
Mesdames et messieurs les maires et madame le maire de Bouguenais,
Puisque nous sommes sur sa commune, Monsieur le Maire de Nantes n’est pas loin, je suis heureux d’??tre là aujourd'hui dans un lieu que je connais bien mais qui a déjà beaucoup changé depuis les premières inaugurations.
Je voudrais saluer tout particulièrement le président de l’IRT, Monsieur Lignon, et Monsieur Cassereau, directeur, qui sont tous les deux représentatifs de ce que vous faites ici et de ce que nous voulons faire aussi non seulement ici mais pour la France : des hommes qui aiment l’industrie et qui croient à l’avenir de l’industrie comme beaucoup mais pas assez connus, pas assez mis en valeur. Je pense à ces jeunes que je viens de rencontrer, aussi bien un jeune en apprentissage à Airbus que des jeunes ingénieurs, que des doctorants.
Il y a des jeunes qui ont choisi l’industrie, qui savent qu’il y a un avenir et qui veulent donner le meilleur d’eux-mêmes pour ce magnifique métier de créateur. Je suis heureux et fier parce que je suis au milieu de bâtisseurs. La France a besoin de vos talents pour répondre par la créativité, par l’innovation. C’est ce qui vient de nous être dit tout au long de cette visite, au défi de la croissance, de notre temps et de l’emploi.
Je suis venu vous dire mon refus du déclin de l’industrie française. Je ne suis pas venu par hasard, parce qu’ici c’est le succès d’une démarche que l’on peut constater. Nous sommes ici à Nantes, comme à Saint-Nazaire, dans ce qu’on a appelé longtemps la Basse Loire, dans une terre de tradition industrielle, une terre d’ingénieurs, une terre de techniciens, une terre d’ouvriers, d’hommes et de femmes, de plus en plus nombreuses à travailler dans l’industrie, qui aiment leur métier, et qui souffrent de la voir en difficulté.
Déjà à la fin des années 80, cette région avait connu un traumatisme industriel. Je ne pense pas seulement à la fermeture des chantiers navals de Nantes. Je pense aussi à d’autres industries traditionnelles de la métallurgie qui fermaient les unes après les autres, créant une sorte de désespoir. Pourtant, déjà à cette époque, les hommes et les femmes de Nantes, de Saint-Nazaire comme de l’ouest, ne renonçaient jamais. Ils recommencent sans cesse et relèvent le défi de leur propre redressement. Ce matin, une nouvelle étape de ce redressement nous est montrée. Je rappelle que nous sommes là au cœur d’une démarche qui est d’abord une démarche locale, une démarche ambitieuse, qui est née il y a plus de dix ans autour de chercheurs et d’entreprises issues de différentes filières académiques ou industrielles.
Mesdames, Messieurs, vous avez su mettre en commun avec l’appui sans faille et sans hésitation, dès les premières heures des collectivités locales, vos savoirs, vos compétences, et votre envie surtout de faire ensemble. Vous avez créé un écosystème technologique d’excellence.
Donc merci pour votre accueil et votre disponibilité, et pour m’avoir expliqué, ainsi qu’aux ministres qui m’accompagnent, vos réalisations et projets qui témoignent des immenses atouts dont dispose notre pays. C’est donc un message d’espoir que je suis venu adresser à l’ensemble de notre pays. Ce message est celui de la reconquête industrielle, car ce qui est en jeu c’est notre capacité à créer de l’activité et des emplois sur notre territoire, dans une économie ouverte au sein même de l’Union européenne et sur le monde. De plus en plus de Français vivent le recul de notre industrie avec son cortège de suppressions d’emplois, de fermetures d’usines. Encore un exemple à Angers. Ces Français finissent par douter de l’avenir économique de notre pays. Ils en doutent car ils ont le sentiment d’être les premiers perdants de cette nouvelle histoire de l’économie, celle de l’ouverture au monde et de la mondialisation. Ils pensent que la concurrence de pays émergents est trop forte et craignent qu’elle ne puisse être relevée. Ils observent d’ailleurs à juste titre la dégradation de notre commerce extérieur : soixante-dix milliards d’euros de déficit, quarante-cinq millions pour l’énergie, vingt-cinq milliards pour les échanges commerciaux. C’est une réalité.
Si je suis venu ici à Nantes, c’est pour dire que la France peut être gagnante dans la mondialisation, à une condition : c’est de définir enfin un nouveau modèle industriel, une stratégie de politique industrielle nationale. L’économie française, les entreprises françaises ne retrouveront pas des marchés en se repliant sur elles-mêmes et cette visite nous le démontre. Elles ne réussiront pas à s’en sortir en fermant les frontières, puisque tout ce qu’on fabrique ici n’est pas simplement pour une région, n’est pas simplement pour la France, et ce n’est même pas que pour l’Europe. Si on faisait autrement, comme certains le préconisent, alors oui le déclin serait assuré ; je le refuse et je crois que ceux qui le refusent le refusent avec moi.
Certes pour y parvenir, il faut nous battre et il faut nous battre à tous les niveaux. Le niveau de l’Europe, dans sa manière de traiter les échanges à l’échelle mondiale. Il faut que les échanges commerciaux soient basés sur la réciprocité. Il faut éviter toutes les concurrences déloyales. Il en existe et pas seulement de la part des pays émergents. Je le disais l’autre jour au Parlement, à l’Assemblée nationale comme au Sénat : l’Europe a trop souvent fait preuve dans ses échanges d’une certaine forme de naïveté. Il faut que cette page se tourne. La réorientation européenne que les Français ont souhaitée se fait aussi à ce prix. Il s’agit d’une stratégie défensive. Même si elle est nécessaire, elle est insuffisante. Dans le marché unique européen comme à l’échelle mondiale, la France doit être engagée en première ligne et de façon offensive. C’est un combat que nous avons à mener. C’est notre responsabilité historique. C’est celle de mon gouvernement, que de définir cette stratégie économique et industrielle qui soit claire pour notre pays, à condition bien sûr de l’avoir définie, de la mettre en œuvre et d’en faire la clé de notre redressement.
L’évolution du territoire est porteuse de beaucoup d’enseignements. Bien qu’ayant traversé par le passé des périodes difficiles, le tissu industriel français n’a pas disparu, de par la culture industrielle, de la volonté des hommes qui travaillent ici, qui dirigent ici, qui décident ici, qui forment ici, qui cherchent et qui recherchent, et qui savent travailler ensemble. Notre tissu industriel a trouvé une nouvelle dynamique, parce qu’il est entreprenant, parce qu’il est en développement. Si je suis venu ici, ce n’est pas par nostalgie nantaise : c’est pour mettre en lumière cet exemple.
L’Institut de recherche technologique Jules Verne est lui-même le fruit d’une certaine révolte, mais aussi d’un défi. La révolte, le président Gallois ne m’en voudra pas : il comprendra bien ce que je veux dire, ce fut la mobilisation générale des acteurs locaux. Lorsqu’a été annoncé le plan Power Eight d’Airbus en 2005, il y avait à ce moment-là le risque de vente des usines Airbus de Nantes et de Saint-Nazaire. En quelques mois, les industriels, d’abord ceux d’Airbus, les chercheurs du pôle de compétitivité qui sont présents aujourd'hui et que je salue, EMC2, ont su renverser la vapeur, développer les recherches communes pour faire de Nantes-Saint-Nazaire un centre de référence pour les matériaux composites. L’engagement des collectivités locales, là encore et en particulier la région, avec les deux grandes agglomérations de Nantes et de Saint-Nazaire, a été déterminant pour que ce pôle de compétitivité voie le jour. Mais après la révolte, réaction en quelque sorte à la fatalité, est venu le temps du défi : celui de la création de l’Institut de Recherche Technologique. Le projet nantais fut longtemps regardé de haut parce que l’industrie et les matériaux ne faisaient pas partie des priorités qui étaient mises en valeur à l’époque. Jules Verne est pourtant le premier IRT à avoir été labellisé. Il a même devancé des projets présentés comme plus prestigieux, parfois même dans les médias, comme plus parlant parce que l’industrie ça salit. Parce que l’industrie, c’est dur. Parce que l’industrie, on en a parfois une image d’Epinal. Alors vous voyez bien ici que l’industrie a changé et qu’elle changera encore.
Avec un objectif de cinq mille emplois sur ce site qui viennent s’ajouter aux autres emplois existants – je pense aux emplois d’Airbus, mille chercheurs, ce sera bientôt le cas – on est déjà en marche parce que cet IRT a réussi. S’il a réussi, c’est parce que les acteurs locaux avaient déjà fait la preuve avant l’heure de leur capacité collective à produire de la valeur pour les entreprises au service de l’emploi. Cette réussite est remarquable. Elle trace un chemin d’avenir pour l’industrie française. Quand l’envie d’aller de l’avant est présente, quand l’environnement est porteur, quand on est prêt à construire ensemble, le succès récompense l’effort et le partenariat. Vous y êtes. Si le nez du futur A350 est en matériaux composites, c’est grâce au travail collectif réalisé depuis plusieurs années, sur votre site, par des grandes entreprises, des grands groupes industriels mondiaux. Je pense bien sûr à Airbus, mais aussi à des groupes comme Daher, implanté sur plusieurs sites français, mais aussi grâce à des PME locales. Je pense à Coriolis, aux ACB, à Loiretech, et par des chercheurs du pôle universitaire de Nantes, du Mans, de l’Ecole Centrale des Mines, des universités de ces Instituts de Recherche Technologique. Tout cela se passe à Nantes et à Saint-Nazaire, et je suis bien fier, vous l’imaginez, d’avoir pris ma part dans cette aventure. Je le redis : ma visite ici dépasse de très loin les limites de ce territoire, car aujourd'hui il est indispensable de redonner à chacune et à chacun cette envie de se mobiliser. C’est cela qui nous permettra la reconquête de notre excellence industrielle. L’industrie peut redevenir le symbole d’avenir de notre pays.
Cette mobilisation collective, le gouvernement entend la stimuler et la diffuser sur l’ensemble du territoire et vous en apportez la démonstration ici, parce que l’un des facteurs majeurs de la compétitivité, c’est l’innovation. Je dis bien "majeur". Ça ne veut pas dire qu’il n’y en a pas d’autres. Mais vous avez tout au long de cette visite démontré que c’était bien au cœur de la reconquête, et c’est la capacité de nos centres de recherche et de nos entreprises à le diffuser à travers les produits et les services que nous utilisons tous les jours. La France peut s’enorgueillir d’une recherche d’une qualité exceptionnelle, comme en témoigne le Prix Nobel de physique qui vient d’être attribué à Serge Haroche. Ses travaux dans le domaine de l’optique quantique laissent espérer de formidables développements, notamment dans le domaine informatique. Mais le grand problème de nombre d’entreprises, c’est qu’elles ne disposent pas des outils scientifiques et technologiques leur permettant d’accéder à des marchés nouveaux ou de résister à une concurrence externe croissante. C’est ce lien-là, cette stimulation réciproque entre science vive et développement industriel, que nous devons par tous les moyens favoriser.
Les huit Instituts de recherche technologique à l’échelle de la France ont été conçus justement pour cela. Ce sont des lieux où se conjuguent les apports de la science, de l’ingénierie et de l’industrie. C’est là que l’on met au point de nouveaux procédés, des équipements plus performants, des prototypes – nous en avons vus – et qui répondent directement aux besoins des entreprises partenaires. C’est ainsi que l’on favorisera le transfert de technologies innovantes dans le tissu industriel. Pour nos entreprises, et nos PME en particulier, c’est un facteur de compétitivité décisif. Et comme les chercheurs, le gouvernement est en permanence à l’affût de nouvelles initiatives. Et ces initiatives, elles existent partout ! L’Institut français du pétrole, à Lyon, vient de lancer un projet autour des procédés chimiques, tout comme le CNRS et l’Inria, à Grenoble, autour du logiciel. L’Institut Mines-Télécoms, qui regroupe essentiellement des ingénieurs et les trente-quatre Instituts Carnot, qui regroupent des chercheurs, souhaitent créer des plateformes régionales mutualisant des compétences et des moyens, pour mieux diffuser l’innovation vers les entreprises industrielles. De son côté, la direction de la recherche technologique du Commissariat à l’Energie Atomique m’a, ces dernières semaines, proposé de s’inspirer de l’expérience réussie et menée à Grenoble, autour des nanotechnologies, pour lancer trois nouvelles plateformes régionales autour des savoir-faire propres au CEA, à Toulouse, à Bordeaux et ici, à Nantes.
L’intérêt de ces plateformes, c’est de s’appuyer sur les résultats de la recherche fondamentale de très grande qualité pour développer des "technologies génériques", qui bénéficieront à de très nombreux champs industriels. La vocation de ces plateformes sera d’offrir aux PME régionales et donc ici à Nantes-Saint-Nazaire et dans la région, en allant vers elles, directement dans l’entreprise avec des compétences technologiques qu’elles ne possèdent pas et qu’elles n’ont pas les moyens de posséder mais dont je suis sûr que si elles y accèdent, elles pourront les développer.
J’ai donc donné mon accord, je vous l’annonce ce matin, pour mettre rapidement en œuvre ces trois expérimentations à Toulouse, Bordeaux et Nantes, en veillant à deux principes communs à tous ces projets. Le premier principe, c’est de fédérer et d’associer l’ensemble des acteurs intéressés, en tenant compte des spécificités de chacun - je pense bien sûr au CNRS, ici à Nantes. Il ne s’agit pas de reconnaître à tel ou tel organisme un monopole de l’innovation, mais d’encourager tous les opérateurs de la recherche à mettre en commun leurs efforts en faveur de la compétitivité. Nous souffrons trop du cloisonnement.
Le deuxième principe, c’est la nécessaire évaluation de chaque expérimentation, avant d’en engager de nouvelles. Vous voyez à travers ces exemples, nos territoires recèlent d’énergies qui ne demandent qu’à se mettre en mouvement. Il suffit souvent de donner une première impulsion pour que les projets se concrétisent ; et c’est précisément le rôle de l’État. Le rôle de l’État qui doit non pas s’occuper de tout, non pas produire quand il n’a plus de pouvoir ou de moyen de la norme ou de la réglementation, mais jouer son rôle de stratège, d’impulseur, et de s’appuyer sur les territoires, et en particulier les régions avec lesquelles le gouvernement vient de renforcer son partenariat. J’ai signé le 12 septembre, avec le président Rousset, président de la région Aquitaine et président des régions de France, quinze engagements notamment en matière d’innovation, mais il porte aussi sur toutes les politiques de l’emploi, sur la formation professionnelle. Il porte aussi sur tous les soutiens à l’innovation et tous les trois mois, j’ai pris l’engagement de réunir tous les présidents de régions pour faire un point d’étape sur ce qui aura été engagé car c’est main dans la main avec les collectivités locales que vous avez construit cet Institut de Recherche Technologique Jules Verne. C’est la volonté des acteurs locaux, ce sont aussi les risques qu’ils ont su prendre, leur capacité à faire des choix rapides, en dehors de toute bureaucratie paralysante qui expliquent votre réussite. Je salue notamment le rôle majeur de la région des Pays de la Loire, présidée par Jacques Auxiette.
Ce sont ces collectivités territoriales qui sont les mieux placées pour détecter et fédérer les futurs partenaires, autour d’une thématique et d’un objectif communs. Telle est ma conviction profonde, partagée avec le Président de la République. Elle nous a conduits à renforcer le rôle des régions avec à leurs côtés les grandes métropoles là où elles existent, dans les politiques économiques et d’innovation et ce sera un des éléments mais que nous n’attendons pas que la loi passe pour le mettre en œuvre, qui sera inscrit dans le futur grand acte de la décentralisation. Par l’État, lui aussi, entend jouer pleinement son rôle car il est le garant de la cohérence d’ensemble et de la mise en réseau des compétences, et il saura respecter, il saura encourager, il saura accompagner les dynamiques territoriales. C’est pourquoi j’ai également voulu que les régions jouent un rôle majeur dans la mise en œuvre de la Banque publique d’investissement. Le projet de loi portant la création de la Banque Publique d’Investissement sera présenté mercredi prochain au Conseil des ministres, cette semaine. C’est donc une semaine en faveur de l’industrie et qui ne va pas s’arrêter. Ce n’est pas l’événement d’un jour ni d’une semaine : c’est l’engagement dans la durée parce que ce que nous engageons, c’est une réforme majeure, au service du développement des PME et des entreprises de taille intermédiaire, trop petites en France. Quatre mille six cents, treize mille en Allemagne, autant en Grande Bretagne. Il faut les aider, les aider à grossir et à grandir.
La Banque Publique d’Investissement constituera un véritable service public de proximité de financement des entreprises. Elle sera à l’écoute des entreprises, partenaire financier responsable, capable de les accompagner durablement. Chaque chef d’entreprise sera accueilli par une équipe professionnelle et réactive, qui lui proposera une réponse adaptée à sa situation et à ses besoins. Et pour faire face à ses missions, la Banque Publique d’Investissement verra ses moyens augmenter par rapport aux dispositifs actuels, à la fois en matière de crédit et de garantie, mais aussi en matière d’investissement en fonds propres. Ainsi, nous avons d’ores et déjà décidé d’accroître le refinancement possible de la BPI auprès du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignation, alimenté par les ressources du Livret A et du Livret de développement durable, dont nous avons augmenté les plafonds. Mais je vous l’ai dit, les régions seront étroitement associées. Au niveau national, elles seront présentes au conseil d’administration de la BPI et présideront le comité national d’orientation. Au niveau local, elles piloteront le comité régional d’orientation et elles pourront présider le comité d’investissement régional, lorsqu’elles auront mutualisé leurs moyens d’intervention en fonds propres avec la BPI et c’est le cas ici dans les Pays de la Loire. Le partenariat entre l’Etat et les régions garantira l’efficacité de la BPI, qui devra prioritairement financer l’innovation, accompagner les entreprises à l’export et c’est grâce à ce nouveau dispositif que l’Etat accompagnera les initiatives que j’évoquais tout à l’heure.
Je veux saluer ici – je disais que la région Pays de la Loire était prête - l’initiative que vous avez prise il y a quelques jours, Monsieur le Président, de lancer une action d’avant-garde, un emprunt obligataire à l’échelle de votre région. Celle-ci a collecté cent quinze millions d’euros dont quatre-vingt-cinq millions auprès des particuliers, le reste auprès d’établissements bancaires, quatre-vingt-cinq millions auprès de particuliers en quelques jours. C’est bien la preuve qu’ici, lorsqu’on parle d’industries alors que c’est fait pour financer les PME, que nos compatriotes savent de quoi on parle et qu’ils y croient. Ils ont confiance. N’ayons donc pas peur tout le temps de ce qui ne va pas, des difficultés d’un jour. Battons-nous. Vous vous battez, c’est une belle référence. Et puis avec ça, grâce à la mobilisation des établissements financiers régionaux, c’est près de cinq cents millions que vous allez être capables de mobiliser, ce n’est pas rien, en concordance avec le rôle que nous assignons à la BPI qui rejoint donc la volonté du gouvernement qui est clair, mais qu’on le comprenne bien, qu’on ne lance pas des polémiques inutiles. François Hollande l’a dit pendant sa campagne électorale, "nous voulons mettre la finance au service de l’économie et de l’investissement", vous en faites la démonstration.
Oui, l’épargne doit aller vers l’investissement productif, c’est donc un signal fort qui est adressé aux marchés financiers, il est adressé aussi aux banques, et ici les établissements bancaires régionaux l’ont compris et je les remercie, mais c’est aussi un message aux citoyens. C’est comme ça que nous redynamiserons nos territoires, en accompagnant les besoins des chefs d’entreprises, en suscitant les partenariats, en permettant de nouveaux projets de se concrétiser, et des nouveaux projets j’en connais beaucoup, y compris ici, vous nous en avez parlé, je pense à ces grandes entreprises comme EDF, comme Alstom, comme Areva, qui se sont regroupées au sein de consortiums pour construire des parcs d’éoliennes offshores. D’ailleurs en fin d’année je viendrai ici lancer la construction de l’usine de nacelles éoliennes Alstom à Saint-Nazaire, voilà une bonne nouvelle. Il y a des entreprises qui ouvrent, je compte sur ces entreprises pour prendre appui sur les savoir-faire locaux, la soudure par exemple, notamment je pense aussi que vous preniez appui sur des grandes entreprises comme les chantiers STX qui sont prêts à relever le défi avec vous, qui ont déjà commencé à discuter. Oui, là nous avons l’opportunité de développer une filière française de l’éolien, il ne s’agit pas pour le gouvernement de financer un investissement coûteux, seulement pour les énergies renouvelables, il s’agit aussi de relever un défi industriel, pas de favoriser les filières industrielles chinoises, ou d’ailleurs, c’est notre responsabilité.
On vous parle et on me parle de compétitivité. De quoi ai-je parlé depuis le début de mon discours, sinon de compétitivité ? La compétitivité c’est cela aussi. C’est la recherche, c’est l’innovation, ce sont les partenariats qui s’établissent au sein des filières, c’est un environnement propice, l’accompagnement des projets par les collectivités locales et l’Etat, par des financements adaptés. La volonté de mon gouvernement c’est de s’engager pleinement en faveur de la compétitivité, au service de la croissance et de de l’emploi. C’est donc ce chantier de la compétitivité que je suis venu lancer aujourd’hui avec vous, et c’est pourquoi cette journée est si importante à mes yeux.
Le redressement des comptes publics est aussi le premier pilier du redressement de notre économie, n’en déplaise à ceux qui doutent, mais je le répète ici devant vous : il n’est pas acceptable que le premier budget de la France, c’est vrai pour aujourd’hui, mais c’est vrai pour demain, pour les générations futures, soit le budget du remboursement des intérêts de la dette. Alors le gouvernement a dit "stop, n’ayons pas toujours des discussions intellectuelles". Je revendique le sérieux budgétaire, parce que pour moi le sérieux budgétaire c’est la garantie que demain la dette, qui a augmenté de 600 milliards en 5 ans, reculera, et que nous serons plus crédibles, et que nous pourrons investir dans l’innovation, que nous pourrons investir dans la recherche, que nous pourrons investir dans la formation, c’est ça qui devrait être le premier budget de la France, et ce n’est plus le cas. Et donc ce sérieux budgétaire c’est la garantie que la France pourra continuer à bénéficier aussi de taux bas, qui irriguent ensuite toute notre économie, je pense aux emprunts des entreprises, je pense à ceux des particuliers. Oui, le sérieux budgétaire c’est la garantie de la compétitivité et c’est la garantie du redressement productif.
L’objectif du gouvernement de 3%, nous ne l’avons pas inventé. Nous nous fixons à nous-mêmes, sans que personne n’exige de nous de l’extérieur, parce que c’est la souveraineté de la France qui est en cause, c’est son indépendance nationale, c’est donc un impératif et il sera tenu. Je sais que pour y parvenir il faut faire des efforts, cet effort, ces efforts, ils sont demandés à tous, ils sont demandés aux grandes entreprises et aux ménages, essentiellement les plus aisés, même s’il est demandé à tous, mais d’abord à ceux qui peuvent le plus. Je sais que c’est un effort important, mais notre devoir c’est qu’il soit équitablement réparti, et l’Etat en assume sa part, ainsi chacun contribuera à l’effort collectif, à hauteur d’un tiers chacun, un tiers pour l’Etat, en diminuant la dépense, un tiers pour les grandes entreprises, en protégeant les PME, un tiers pour les ménages, en protégeant les classes moyennes et les classes populaires, c’est ce que j’ai appelé le redressement dans la justice. Mais il y a bien le mot "redressement", qui dit bien ce qu’il veut dire, car le redressement c’est le contraire du déclin, c’est donc un défi. J’entends bien sûr les réactions des uns et des autres, notamment celle des entrepreneurs, ceux qui cèdent leur entreprise, ou réinvestissent le produit qu’ils ont obtenu ainsi dans une autre. Le débat va s’ouvrir au Parlement cette semaine, sur la loi de Finances 2013, et ensuite sur la loi de financement de la Sécurité Sociale. Le gouvernement proposera des ajustements pour concilier justement justice fiscale et efficacité économique, et je remercie Fleur Pellerin, ministre déléguée aux PME et à l’Innovation, pour le travail de concertation, avec Pierre Moscovici, qui a été mené avec les professionnels concernés au cours des derniers jours, mais je voudrais vous dire qu’il faut éviter de tomber dans le simplisme, évitons tout dogmatisme. On n’est pas dans le tout ou rien. Ce que je veux encourager c’est l’investissement productif, c’est la prise de risques, la création, la transmission d’entreprise, tout ce qui va favoriser la compétitivité, mais par contre, et c’est le sens de la réforme, de traiter les revenus du capital comme ceux du travail, et nous ne reviendrons pas sur ce principe, c’est de favoriser l’investissement productif, l’investissement d’avenir et non la rente. C’est le sens de cette réforme. La volonté de mon gouvernement c’est d’appuyer le développement des PME, pas de pénaliser les entrepreneurs, aucune mesure proposée en matière d’impôt sur les sociétés, dans le projet de loi de Finances, n’affecte les PME, elles sont au contraire protégées, le crédit d’impôt recherche est même étendu à une grande partie de leurs dépenses d’innovation. Je souhaite encourager les entrepreneurs qui réussissent, à réinvestir leur talent tout au long de leur vie, sans les priver d’une juste rétribution de leurs efforts. Les exonérations spécifiques sont maintenues pour les titres détenus par les dirigeants d’entreprises, enfin je souhaite que l’implication des entrepreneurs, des dirigeants, des associés, dans le développement de leur société et les risques personnels élevés qu’ils prennent soient reconnus. C’est pourquoi le régime fiscal des plus-values réalisées lorsqu’ils cèdent leurs parts ne sera pas modifié, et je souhaite qu’il soit stabilisé pendant la législature pour donner de la visibilité aux entrepreneurs. Combien de fois on me parle de lisibilité, lisibilité fiscale, lisibilité réglementaire, ou des normes, parce que quand on investit ce n’est pas pour 6 mois, quand on investit ce n’est pas pour 1 an, surtout dans l’industrie, ce sont des périodes plus longues, donc plus il y a la stabilité, plus on peut se lancer, et ça je le comprends fort bien, et ce n’est pas d’aujourd’hui que je le sais.
Je l’ai dit, la compétitivité c’est le pilier du redressement, mais il est indispensable du retour à l’équilibre des finances publiques, et pour mettre un terme à l’érosion des marges et à l’autofinancement de nos entreprises industrielles, il faut aussi résorber le déficit de notre commerce extérieur. Hors énergie, c’est 25 milliards de transactions commerciales. J’ai fixé comme objectif qu’à la fin du quinquennat nous arrivions à l’équilibre. C’est un objectif qui paraît simple, mais il est très exigeant. Il demande la mobilisation la mobilisation de tous les acteurs. La grande conférence sociale initiée en juillet dernier a engagé les négociations, et j’espère qu’elles auront un impact positif sur la compétitivité de nos entreprises. La négociation sur la sécurisation de l’emploi, je sais qu’elle n’est pas facile, elle a démarré le 4 octobre, mais je souhaite qu’elle aboutisse. C’est aussi la négociation sur le coût du travail et l’évolution nécessaire des modes de financement de la protection sociale, chacun doit comprendre que le dialogue social n’est pas l’adversaire de la compétitivité, il est à l’inverse le meilleur moyen de la renforcer durablement. Rien ne se fera sans le concours des organisations syndicales et des chefs d’entreprises, je crois au dialogue social, je crois à la négociation, mais le dialogue social ce n’est pas l’invective, c’est le respect du partenaire, c’est l’écoute des points de vue de l’autre, et ça est vrai pour chacun, et c’est la recherche du compromis. Parce que je crois que la gravité de la situation de notre pays est tellement importante qu’elle conduira à mettre chacun face à ses responsabilités, en tout cas le gouvernement prendra les siennes. Mais j’ai confiance, en ce moment a lieu une négociation, je le disais à plusieurs jeunes que je croissais à l’instant, la négociation sur le contrat de génération. plutôt que de faire partir trop tôt un senior, qui n’a d’ailleurs pas toujours ses droits à la retraite et qui très vite se retrouve au RSA alors qu’il a un vrai savoir-faire, eh bien nous voulons mettre en place ce contrat de génération, qui de fait existe, ce jeune apprenti me parlait du savoir-faire de ses tuteurs qui lui transmettaient à Airbus le savoir-faire qui était le leur, nous voulons l’installer dans les entreprises, 500 000 emplois de seniors préservés et 500 000 emplois de jeunes en CDI, avec une négociation pour qu’il n’y ait pas d’effet d’aubaine, pour que les aides accordées soient justes. Mais j’ai confiance parce que je suis sûr que dans quelques jours, quelques semaines au plus tard, cette négociation aboutira et que nous pourrons au Parlement nous saisir des réformes législatives nécessaires pour que dès le début de l’année prochaine les premiers contrats de génération soient signés.
C’est donc une politique d’ampleur, agissant sur tous les leviers de la compétitivité, que mon gouvernement a décidé d’engager. C’est dans cet esprit que j’ai confié à Louis Gallois une mission. Je le salue, non seulement parce qu’il est présent aujourd’hui, dans un lieu qu’il connaît bien, mais je le salue et je le remercie d’avoir accepté ma proposition de devenir commissaire général à l’Investissement, un commissariat général à l’Investissement qui finance cet IRT. Je l’ai chargé d’une mission complémentaire, et il me remettra son rapport le 5 novembre prochain. Je sais qu’il parlera sans tabou, parce qu’il a sa liberté d’expression, et elle est nécessaire. Son rapport servira de base de travail au gouvernement. Je réunirai aussitôt un séminaire gouvernemental consacré à cette question de la compétitivité. Il définira une feuille de route globale et des orientations pour la suite des travaux que mène le Haut conseil du financement de la protection sociale. Mon gouvernement s’appuiera bien évidemment sur ce rapport, le rapport de Louis Gallois, avec qui nous échangeons régulièrement, et qui a lui-même beaucoup consulté, beaucoup consulté, et comme je m’y étais engagé. Il présentera également, Monsieur le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, son rapport à la Conférence nationale de l’industrie. Je sais qu’il est attendu. Je serai régulièrement en contact avec les entreprises pour préparer ces avancées importantes.
Dans deux jours, je me rendrai avec 25 entreprises françaises à Singapour, qui est le troisième partenaire commercial de la France en Asie, véritable plateforme pour toute cette région du monde, où la France – et ensuite aux Philippines – où la France a des partenaires en plein développement, où justement le bilan du commerce extérieur nous est favorable, et pour notre industrie, qui correspond à beaucoup d’activités qui sont conduites ici, mais j’y vais pour défendre les atouts de la France, être aux côtés des entrepreneurs, de ces grands groupes, mais aussi de ces ETI, de ces PME, qui ne veulent qu’une chose, c’est réussir à la fois pour elles-mêmes, mais aussi pour la France, parce que je suis convaincu, comme les autres, les chefs d’entreprises, comme leurs salariés, ont le souci du patriotisme et de la défense des intérêts de la France, et dès mon retour je me rendrai à Toulouse, inaugurer la ligne d’assemblage de l’A350, dont vous avez conçu ici le nez avant, en matériaux composites. Je me rendrai le lendemain à Saclay, pour évoquer la question cruciale des formations utiles à nos entreprises industrielles. Pour relever ce défi, tous les membres du gouvernement seront mobilisés, avec les deux ministres que j’ai cités il y aura bientôt l’ouverture, Madame la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, les Assisses de la recherche que j’ouvrirai. Oui, il s’agit d’une politique globale qui concerne chaque membre du gouvernement, il faut en aucun cas nous laisser détourner de notre route, des préoccupations secondaires, et c’est avec le président de la République que nous définirons notre trajectoire de compétitivité pour les années qui viennent. Alors on me dit "la trajectoire c’est moins bien que le choc", mais ce que je veux provoquer, Mesdames, Messieurs, c’est un choc de confiance, c’est un choc de mobilisation. On me dit : "mais en Allemagne, Monsieur Schröder avait provoqué un choc". Faut-il un peu prendre de recul et s’informer ? Cela ne s’est pas passé en huit jours, cela a mis plusieurs années avant de se faire, il y a eu un démarrage, il y a eu un début, il y a eu une suite. C’est la voie que nous voulons entreprendre, c’est de commencer, comme nous le faisons, comme vous l’avez fait avant nous, ici.
Mesdames, Messieurs, encore merci de m’avoir accueilli à l’Institut de recherche technologique Jules Verne, merci de m’avoir donné l’occasion de vous parler de l’avenir, de notre industrie et donc de la France. L’industrie de demain c’est celle que vous inventez ici, c’est celle qui permettra à notre pays de renouer avec une croissance durable, une industrie innovante, performante, qui forme la jeunesse de notre pays, qui lui donne le goût du risque, mais l’amour aussi, des métiers industriels. Mais une industrie qui intègre, et vous l’avez démontré tout au long de cette visite, les exigences de la transition écologique, une industrie qui accède à des financements adaptés, qui conquiert des parts de marché en dehors de nos frontières, et qui crée de la croissance, qui crée des emplois, qui crée aussi du progrès, qui crée aussi de la cohésion sociale, qui crée du sentiment d’appartenance et de confiance. Oui, c’est important de dire tout cela aujourd’hui, tant notre pays a tendance à douter, mais regardons autour de nous, sortons du microcosme, d’une forme de parisianisme bien-pensant. La France elle est là, elle est partout, c’est vous, alors soyons fiers de nous-mêmes. Ce que je retiens de notre parcours, c’est le partenariat gagnant/gagnant entre les grands groupes qui ne traitent pas les PME comme des simples sous-traitants mais comme des partenaires irremplaçables dans leur propre développement, qui jouent un rôle irremplaçable de structuration, d’accès à la recherche, aux marchés internationaux, pour les PME, les entreprises de taille intermédiaire, pour mettre au point ces nouveaux procédés et faire monter en gamme notre industrie. C’est en progressant dans ce sens, autour de logiques de filières, de clusters, que nous parviendrons à mobiliser autour d’une nouvelle ambition industrielle.
Mon gouvernement, en lien avec les collectivités territoriales, et notamment les régions, est déterminé à engager les réformes nécessaires pour que la France redevienne un grand pays industriel, il est décidé à impulser cette dynamique nouvelle, comme la vôtre. Moi je crois au génie français, oui je crois à la capacité de nos ouvriers, de nos techniciens, de nos ingénieurs, de nos chercheurs. Je crois à ces grandes entreprises industrielles mais qui ne peuvent pas exister si elles n’ont pas aussi autour d’elles des entreprises de services, n’opposons pas l’industrie aux services, services à l’industrie, services aux personnes, il suffit de regarder ce qui se passe dans nos grandes métropoles, dans nos grandes régions dynamiques sur le plan industriel, il y a des emplois pour tous, et de toutes qualifications. Mais si je vous dis cela, Mesdames et Messieurs, chers amis, c’est parce que je crois à l’avenir de la France. Nous allons gagner cette bataille. Vous en donnez la preuve, redonnez son rang de grande puissance à notre pays. L’industrie nouvelle que vous forgez sera aussi le lieu d’un nouveau compromis social, d’un nouveau pacte social, et qui permettra à sortir de plus de décennies, de difficultés, de recul, et aussi de montée des inégalités. C’est un chemin. Il sera sans doute trop long pour ceux qui souffrent aujourd’hui du chômage et du découragement. C’est le chemin que nous devons emprunter, c’est le chemin du courage, c’est le chemin de la volonté, c’est le chemin de la détermination. Rien ne me fera me détourner de cette exigence. Parce que cette exigence c’est le mandat qu’avec le président de la République nous avons reçu du peuple français. Je suis venu ici puiser non seulement les forces nécessaires, mais aussi la conviction que la France va y arriver, que la France va gagner.
Source http://www.gouvernement.fr, le 16 octobre 2012