Texte intégral
PATRICK COHEN
Quel est votre sentiment ce matin, au lendemain des aveux de votre ex-collègue du gouvernement ?
DELPHINE BATHO
C'est une trahison, c'est, je pense, un coup de poignard dans le dos. C'est une trahison, avant d'être une trahison vis-à-vis de personnes, vis-à-vis d'institutions, vis-à-vis du président de la République, c'est une trahison des valeurs de la gauche et d'une conception de la morale publique.
PATRICK COHEN
Donc c'est une dérive individuelle, c'est comme ça que vous le voyez ?
DELPHINE BATHO
Oui, c'est une dérive personnelle, grave, visiblement, une sorte de spirale du mensonge, comme s'il avait été drogué du mensonge
PATRICK COHEN
Ça, c'est son expression sur son blog à Jérôme CAHUZAC. Le gouvernement, dans son ensemble, n'a rien à se reprocher dans cette affaire, Delphine BATHO ?
DELPHINE BATHO
Les institutions ont fonctionné, le gouvernement a fait, et le président de la République a fait ce qu'il fallait, c'est-à-dire que l'indépendance de la justice a fonctionné, qu'à aucun moment donné, elle n'a été entravée, et que dès lors qu'il y a eu une mise en cause judiciaire, avec l'ouverture d'une information judiciaire, Jérôme CAHUZAC a quitté le gouvernement, et c'est ce qu'il fallait faire.
PATRICK COHEN
Sauf qu'avant que la justice ne soit saisie, vous avez consenti au conflit d'intérêt évident qui consistait à laisser l'administration fiscale enquêter sur celui qui était censé la diriger.
DELPHINE BATHO
Des doutes ne font pas des faits, et dans une démocratie, il n'y a que la justice
PATRICK COHEN
Non, mais quand il y a des doutes, on peut enquêter
DELPHINE BATHO
Il y a eu une enquête, et à aucun moment donné, la justice n'a été entravée, Pierre MOSCOVICI d'ailleurs, ce matin, a indiqué les mesures qu'il avait prises lui-même en terme d'enquête fiscale à partir du mois de janvier, donc le gouvernement a fait son travail de façon irréprochable. Et vous savez, ça n'a pas toujours été le cas, que la justice soit indépendante, qu'elle ne soit pas critiquée, et qu'elle puisse faire jusqu'au bout son travail, y compris dans la mise en cause d'un ministre.
PATRICK COHEN
Mais vous nous dites ce matin que le gouvernement n'avait pas les moyens de savoir la vérité pendant ces 119 jours de mensonge.
DELPHINE BATHO
Non, et s'il l'avait sue, jamais Jérôme CAHUZAC n'aurait été nommé ministre.
PATRICK COHEN
La déclaration de patrimoine que chaque ministre dépose à son entrée en fonction, comme vous-même, j'imagine, Delphine BATHO, personne ne la vérifie ?
DELPHINE BATHO
Bien sûr que si, mais manifestement, elle était mensongère, c'est pour ça que je parle d'un drogué du mensonge
PATRICK COHEN
Et les services fiscaux n'ont rien trouvé
DELPHINE BATHO
Parce que, à chaque étape, vous savez, quand vous êtes élu député, vous faites une déclaration de patrimoine, lorsque vous quittez vos fonctions de député, vous renouvelez votre déclaration de patrimoine, lorsque vous êtes nommé ministre, vous faites une déclaration de patrimoine
PATRICK COHEN
Et il y a des vérifications ?
DELPHINE BATHO
Tout cela est vérifié par la Commission pour la transparence de la vie politique. Donc là, ce qu'on découvre, c'est que ses déclarations étaient mensongères, parce qu'elles ont été contrôlées, ses déclarations, bien sûr ; encore une fois, s'il y avait eu ces informations, jamais Jérôme CAHUZAC n'aurait été ministre du Budget, c'est évident.
PATRICK COHEN
Est-ce que l'aveu de Jérôme CAHUZAC vous fait aujourd'hui douter de son action au Budget, notamment, en matière de lutte contre la fraude fiscale ?
DELPHINE BATHO
Je pense, votre question, elle renvoie à ce que je dis sur le mensonge, comment imaginer que celui qui est chargé de la lutte contre la fraude fiscale puisse avoir un compte en Suisse, et avoir lui-même organisé une fraude fiscale, c'est sidérant, voilà, c'est tout simplement sidérant.
PATRICK COHEN
Comment rétablir le crédit de la parole publique aujourd'hui après un tel scandale, Delphine BATHO ?
DELPHINE BATHO
D'abord, il faut que la justice passe, qu'elle puisse faire son travail, je pense que les mots très forts qu'ont eus le président de la République et le Premier ministre la netteté de leur positionnement montrent aussi que, il y a un gouvernement et des institutions qui, malgré ce moment difficile parce que c'est un moment difficile, il ne faut pas dire autre chose continuent leur travail.
PATRICK COHEN
Jean-Marc AYRAULT s'est exprimé hier soir à la télévision, il devrait le faire cet après-midi à l'Assemblée nationale. François HOLLANDE
DELPHINE BATHO
Quand je parlais de excusez-moi, mais quand je parlais de coup de poignard dans le dos, c'est aussi parce que ce gouvernement a engagé, en terme de moralisation de la vie publique, avec la baisse du salaire des ministres, avec la charte déontologique, que nous avons signée, vous voyez, encore un moment de mensonge, lorsque nous sommes tous autour de la table du Conseil des ministres et que nous signons cette charte d'engagement très forte, cette charte déontologique. Nous avons engagé peut-être on y reviendra le non-cumul des mandats, donc il y a des choses qui ont été mises en place de façon déterminée en matière de moralisation de la vie publique, et c'est aussi pour ça que c'est choquant, parce que ça jette l'opprobre sur un travail courageux qui a été engagé.
PATRICK COHEN
C'est choquant et c'est ruineux, parce que vous voyez bien que vous aurez beaucoup de mal à convaincre les Français aujourd'hui que cette moralisation a produit des résultats.
DELPHINE BATHO
C'est pourtant la vérité, y compris dans la façon dont la justice indépendante a pu faire son travail dans l'affaire CAHUZAC.
PATRICK COHEN
François HOLLANDE ne devrait-il pas intervenir publiquement, comme le demande l'UMP, pour dire les choses, et préciser la façon, la manière dont il a été informé de l'existence de ce compte détenu par Jérôme CAHUZAC ?
DELPHINE BATHO
Il est intervenu publiquement dès hier et immédiatement, le président
PATRICK COHEN
Par voie de communiqué simplement
DELPHINE BATHO
Oui, mais avec des mots qui sont très clairs et très forts
PATRICK COHEN
En quatre lignes ou cinq lignes, mais la question qui est posée aujourd'hui, c'est celle du doute, François HOLLANDE et Jean-Marc AYRAULT pouvaient-ils ne pas savoir et pouvaient-ils ignorer la vérité sur la situation réelle de leur ministre ?
DELPHINE BATHO
Ils l'ignoraient sinon ils n'auraient encore une fois jamais nommé Jérôme CAHUZAC ministre du Budget. C'est évident.
PATRICK COHEN
Et dans l'intervalle, depuis début décembre, les révélations de MEDIAPART
DELPHINE BATHO
Eh bien, lorsqu'il y a eu ces révélations, il y a eu certainement des doutes, mais tant que les faits ne sont pas établis, tant qu'il n'y a pas de certitude, quand l'intéressé dément, et pas n'importe comment, avec beaucoup de vigueur, vous ne pouvez pas vous baser simplement sur des accusations publiques dans la vie démocratique
PATRICK COHEN
Tout le monde le croit et vous l'avez cru
DELPHINE BATHO
Il y a eu parfois, vous savez, des accusations publiques qui étaient fausses, donc vous êtes obligé de faire confiance à la justice, parce que c'est elle qui est chargée de la manifestation de la vérité, et donc de dire si des accusations sont vraies ou fausses.
PATRICK COHEN
C'est une crise morale, une crise politique ?
DELPHINE BATHO
C'est d'abord la dérive personnelle d'un ex-ministre. Donc une crise politique, non, on est dans une crise économique, une crise sociale, il n'y a pas de crise institutionnelle, il y a un président de la République, il y a un Premier ministre, il y a un gouvernement qui fait son travail, il n'y a pas de crise institutionnelle.
PATRICK COHEN
Mais si le « tous pourris » gagne du terrain dans l'opinion, ça peut déboucher sur une crise politique, Delphine BATHO, vous ne croyez pas ?
DELPHINE BATHO
C'est ce qu'il faut éviter, ce « tous pourris », et de ce point de vue-là, je ne pense pas qu'on puisse mettre un signe égal entre les turpitudes par exemple de l'affaire SARKOZY, dans le cadre de l'affaire BETTENCOURT, l'affaire TAPIE, et la façon
PATRICK COHEN
SARKOZY, présumé innocent
DELPHINE BATHO
Oui, mais qui met en cause le juge GENTIL, qui dénonce la justice dès lors qu'elle fait son travail, et le comportement de la gauche, qui est d'avoir scrupuleusement veillé à l'indépendance de la justice et de la respecter.
PATRICK COHEN
On reviendra sur l'affaire CAHUZAC avec vous, Delphine BATHO, avec vos réponses aux auditeurs de FRANCE INTER, qui nous appellent au standard : 01.45.24.7000. Ça sera à 08h40. L'Ecologie, votre secteur ministériel, objet aujourd'hui de notre observatoire des promesses avec LE PARISIEN AUJOURD'HUI EN FRANCE, la promesse de François HOLLANDE de privilégier les énergies renouvelables au détriment du nucléaire avait suscité beaucoup de débats pendant la campagne, et plus un mot aujourd'hui, pas un mot, je crois, sauf erreur, dans l'interview du président jeudi dernier. On a l'impression que la crise a chassé les préoccupations
DELPHINE BATHO
Ah non, c'est faux, il en a parlé
PATRICK COHEN
Il en a parlé ?
DELPHINE BATHO
Bien sûr, il en a parlé
PATRICK COHEN
Alors, ça m'a complètement échappé.
DELPHINE BATHO
Il a parlé du grand chantier de la transition énergétique, qui est aussi une réponse à la crise économique, pour développer de nouvelles filières industrielles
PATRICK COHEN
Vous trouvez que François HOLLANDE et Jean-Marc AYRAULT font la pédagogie de l'écologie en ce moment dans leurs discours ?
DELPHINE BATHO
Eh bien, c'est quelque chose qui leur tient à coeur. Nous sommes dans un moment de crise économique où ce qui prime, c'est vrai, c'est les difficultés du quotidien, l'action immédiate du redressement des comptes publics, mais moi, j'ai la responsabilité de préparer le long terme, et notamment cette transition énergétique, qui va engager la France sur les dix, vingt, trente prochaines années, et qui doit en même temps apporter des solutions aux problèmes d'aujourd'hui, que ce soit la précarité énergétique ou que ce soient les créations d'emplois, notamment dans le développement des énergies renouvelables, et des économies d'énergie aussi.
PATRICK COHEN
Quand on dit ça a été engagé hier qu'on va supprimer ou mettre entre parenthèses des normes pour la construction de logements, est-ce que cela vaut aussi pour certaines normes environnementales ?
DELPHINE BATHO
J'organise très prochainement, au mois de juin, des états généraux de la modernisation du droit de l'environnement, oui, il va y avoir des normes environnementales à moderniser, c'est-à-dire qu'on peut tout à fait concilier des hauts standards d'exigence écologique et des procédures qui soient plus fluides, plus allantes, plus efficaces, pour, aujourd'hui, mener un certain nombre de projets, il faut parfois attendre six ans, huit ans, je pense qu'on peut quand même faire mieux, et avoir des procédures environnementales beaucoup plus rapides.
PATRICK COHEN
Mais donc avec des normes qui seront revues à la baisse
DELPHINE BATHO
Non, pas revues à la baisse, il ne s'agit pas d'en rabattre sur l'exigence écologique, mais d'avoir des procédures plus fluides. Si vous voulez, je peux prendre un exemple, lorsqu'on doit construire une digue aujourd'hui, pour protéger le littoral d'une subversion marine, on a ce qu'on appelle des procédures en tuyaux d'orgues, c'est-à-dire qu'il faut faire une enquête publique loi sur l'eau, une autre enquête publique sur la faune et la flore, je vous épargne les détails, mais je pense très bien qu'on peut avoir une procédure unique, qui permettrait d'étudier l'ensemble des impacts environnementaux, en garantissant la participation du public, mais dans des délais qui soient raisonnables.
PATRICK COHEN
La Loi littoral, la Loi montagne seront respectées comme les autres règles d'urbanisme ?
DELPHINE BATHO
Oui, c'est des lois très importantes, il faut continuer
PATRICK COHEN
C'est-à-dire, pour être concret, pour les auditeurs qui ne le savent pas, on ne bétonnera pas le littoral
DELPHINE BATHO
Évidemment
PATRICK COHEN
Ou les zones de montagnes pour construire des logements à toute force, comme c'est l'objectif aujourd'hui affiché par le gouvernement
DELPHINE BATHO
C'est quelque chose de fondamental pour la France d'avoir un littoral protégé du mieux possible et préservé du mieux possible de la pression foncière, donc il n'est pas question de remettre en cause, bien sûr, la Loi littoral.
PATRICK COHEN
Le comité pour la fiscalité écologique, que vous avez installé il y a quelques mois, vient de rendre un projet d'avis qui sera examiné le 18 avril, et qui préconise la réduction progressive de l'écart de taxation entre l'essence et le gazole, vous respecterez cet avis ou ça sera examiné ensuite, ça sera arbitré en haut lieu ?
DELPHINE BATHO
Le gouvernement n'a pas pris de décision, et l'avis dont vous faites mention n'a pas encore été discuté avec les organisations syndicales, les associations de consommateurs, les représentants des entreprises, les ONG environnementales, donc il faut laisser ce comité faire son travail, ensuite, moi, ce que j'ai pointé, c'est un problème de pollution aux particules, en ce moment même, il y a encore un pic de pollution aux particules, et le problème des vieux véhicules diesel, qui sont en cause, pas seulement, mais notamment dans cette pollution aux particules.
PATRICK COHEN
Donc c'est un souci, c'est ce que dit aussi le projet d'avis, que c'est la réduction de la l'écart de taxation est justifié sous l'angle environnemental, et on a appris hier soir que le gazole continuait de baisser alors que l'essence augmente, pour les automobilistes qui nous écoutent, voilà. Donc, il faut agir, mais vous ne savez pas encore comment
DELPHINE BATHO
Oui, mais pour l'instant, non, ce n'est pas qu'on ne sait pas encore comment
PATRICK COHEN
Ça n'est pas arbitré
DELPHINE BATHO
C'est que pour l'instant, ce n'est pas arbitré.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 5 avril 2013
Quel est votre sentiment ce matin, au lendemain des aveux de votre ex-collègue du gouvernement ?
DELPHINE BATHO
C'est une trahison, c'est, je pense, un coup de poignard dans le dos. C'est une trahison, avant d'être une trahison vis-à-vis de personnes, vis-à-vis d'institutions, vis-à-vis du président de la République, c'est une trahison des valeurs de la gauche et d'une conception de la morale publique.
PATRICK COHEN
Donc c'est une dérive individuelle, c'est comme ça que vous le voyez ?
DELPHINE BATHO
Oui, c'est une dérive personnelle, grave, visiblement, une sorte de spirale du mensonge, comme s'il avait été drogué du mensonge
PATRICK COHEN
Ça, c'est son expression sur son blog à Jérôme CAHUZAC. Le gouvernement, dans son ensemble, n'a rien à se reprocher dans cette affaire, Delphine BATHO ?
DELPHINE BATHO
Les institutions ont fonctionné, le gouvernement a fait, et le président de la République a fait ce qu'il fallait, c'est-à-dire que l'indépendance de la justice a fonctionné, qu'à aucun moment donné, elle n'a été entravée, et que dès lors qu'il y a eu une mise en cause judiciaire, avec l'ouverture d'une information judiciaire, Jérôme CAHUZAC a quitté le gouvernement, et c'est ce qu'il fallait faire.
PATRICK COHEN
Sauf qu'avant que la justice ne soit saisie, vous avez consenti au conflit d'intérêt évident qui consistait à laisser l'administration fiscale enquêter sur celui qui était censé la diriger.
DELPHINE BATHO
Des doutes ne font pas des faits, et dans une démocratie, il n'y a que la justice
PATRICK COHEN
Non, mais quand il y a des doutes, on peut enquêter
DELPHINE BATHO
Il y a eu une enquête, et à aucun moment donné, la justice n'a été entravée, Pierre MOSCOVICI d'ailleurs, ce matin, a indiqué les mesures qu'il avait prises lui-même en terme d'enquête fiscale à partir du mois de janvier, donc le gouvernement a fait son travail de façon irréprochable. Et vous savez, ça n'a pas toujours été le cas, que la justice soit indépendante, qu'elle ne soit pas critiquée, et qu'elle puisse faire jusqu'au bout son travail, y compris dans la mise en cause d'un ministre.
PATRICK COHEN
Mais vous nous dites ce matin que le gouvernement n'avait pas les moyens de savoir la vérité pendant ces 119 jours de mensonge.
DELPHINE BATHO
Non, et s'il l'avait sue, jamais Jérôme CAHUZAC n'aurait été nommé ministre.
PATRICK COHEN
La déclaration de patrimoine que chaque ministre dépose à son entrée en fonction, comme vous-même, j'imagine, Delphine BATHO, personne ne la vérifie ?
DELPHINE BATHO
Bien sûr que si, mais manifestement, elle était mensongère, c'est pour ça que je parle d'un drogué du mensonge
PATRICK COHEN
Et les services fiscaux n'ont rien trouvé
DELPHINE BATHO
Parce que, à chaque étape, vous savez, quand vous êtes élu député, vous faites une déclaration de patrimoine, lorsque vous quittez vos fonctions de député, vous renouvelez votre déclaration de patrimoine, lorsque vous êtes nommé ministre, vous faites une déclaration de patrimoine
PATRICK COHEN
Et il y a des vérifications ?
DELPHINE BATHO
Tout cela est vérifié par la Commission pour la transparence de la vie politique. Donc là, ce qu'on découvre, c'est que ses déclarations étaient mensongères, parce qu'elles ont été contrôlées, ses déclarations, bien sûr ; encore une fois, s'il y avait eu ces informations, jamais Jérôme CAHUZAC n'aurait été ministre du Budget, c'est évident.
PATRICK COHEN
Est-ce que l'aveu de Jérôme CAHUZAC vous fait aujourd'hui douter de son action au Budget, notamment, en matière de lutte contre la fraude fiscale ?
DELPHINE BATHO
Je pense, votre question, elle renvoie à ce que je dis sur le mensonge, comment imaginer que celui qui est chargé de la lutte contre la fraude fiscale puisse avoir un compte en Suisse, et avoir lui-même organisé une fraude fiscale, c'est sidérant, voilà, c'est tout simplement sidérant.
PATRICK COHEN
Comment rétablir le crédit de la parole publique aujourd'hui après un tel scandale, Delphine BATHO ?
DELPHINE BATHO
D'abord, il faut que la justice passe, qu'elle puisse faire son travail, je pense que les mots très forts qu'ont eus le président de la République et le Premier ministre la netteté de leur positionnement montrent aussi que, il y a un gouvernement et des institutions qui, malgré ce moment difficile parce que c'est un moment difficile, il ne faut pas dire autre chose continuent leur travail.
PATRICK COHEN
Jean-Marc AYRAULT s'est exprimé hier soir à la télévision, il devrait le faire cet après-midi à l'Assemblée nationale. François HOLLANDE
DELPHINE BATHO
Quand je parlais de excusez-moi, mais quand je parlais de coup de poignard dans le dos, c'est aussi parce que ce gouvernement a engagé, en terme de moralisation de la vie publique, avec la baisse du salaire des ministres, avec la charte déontologique, que nous avons signée, vous voyez, encore un moment de mensonge, lorsque nous sommes tous autour de la table du Conseil des ministres et que nous signons cette charte d'engagement très forte, cette charte déontologique. Nous avons engagé peut-être on y reviendra le non-cumul des mandats, donc il y a des choses qui ont été mises en place de façon déterminée en matière de moralisation de la vie publique, et c'est aussi pour ça que c'est choquant, parce que ça jette l'opprobre sur un travail courageux qui a été engagé.
PATRICK COHEN
C'est choquant et c'est ruineux, parce que vous voyez bien que vous aurez beaucoup de mal à convaincre les Français aujourd'hui que cette moralisation a produit des résultats.
DELPHINE BATHO
C'est pourtant la vérité, y compris dans la façon dont la justice indépendante a pu faire son travail dans l'affaire CAHUZAC.
PATRICK COHEN
François HOLLANDE ne devrait-il pas intervenir publiquement, comme le demande l'UMP, pour dire les choses, et préciser la façon, la manière dont il a été informé de l'existence de ce compte détenu par Jérôme CAHUZAC ?
DELPHINE BATHO
Il est intervenu publiquement dès hier et immédiatement, le président
PATRICK COHEN
Par voie de communiqué simplement
DELPHINE BATHO
Oui, mais avec des mots qui sont très clairs et très forts
PATRICK COHEN
En quatre lignes ou cinq lignes, mais la question qui est posée aujourd'hui, c'est celle du doute, François HOLLANDE et Jean-Marc AYRAULT pouvaient-ils ne pas savoir et pouvaient-ils ignorer la vérité sur la situation réelle de leur ministre ?
DELPHINE BATHO
Ils l'ignoraient sinon ils n'auraient encore une fois jamais nommé Jérôme CAHUZAC ministre du Budget. C'est évident.
PATRICK COHEN
Et dans l'intervalle, depuis début décembre, les révélations de MEDIAPART
DELPHINE BATHO
Eh bien, lorsqu'il y a eu ces révélations, il y a eu certainement des doutes, mais tant que les faits ne sont pas établis, tant qu'il n'y a pas de certitude, quand l'intéressé dément, et pas n'importe comment, avec beaucoup de vigueur, vous ne pouvez pas vous baser simplement sur des accusations publiques dans la vie démocratique
PATRICK COHEN
Tout le monde le croit et vous l'avez cru
DELPHINE BATHO
Il y a eu parfois, vous savez, des accusations publiques qui étaient fausses, donc vous êtes obligé de faire confiance à la justice, parce que c'est elle qui est chargée de la manifestation de la vérité, et donc de dire si des accusations sont vraies ou fausses.
PATRICK COHEN
C'est une crise morale, une crise politique ?
DELPHINE BATHO
C'est d'abord la dérive personnelle d'un ex-ministre. Donc une crise politique, non, on est dans une crise économique, une crise sociale, il n'y a pas de crise institutionnelle, il y a un président de la République, il y a un Premier ministre, il y a un gouvernement qui fait son travail, il n'y a pas de crise institutionnelle.
PATRICK COHEN
Mais si le « tous pourris » gagne du terrain dans l'opinion, ça peut déboucher sur une crise politique, Delphine BATHO, vous ne croyez pas ?
DELPHINE BATHO
C'est ce qu'il faut éviter, ce « tous pourris », et de ce point de vue-là, je ne pense pas qu'on puisse mettre un signe égal entre les turpitudes par exemple de l'affaire SARKOZY, dans le cadre de l'affaire BETTENCOURT, l'affaire TAPIE, et la façon
PATRICK COHEN
SARKOZY, présumé innocent
DELPHINE BATHO
Oui, mais qui met en cause le juge GENTIL, qui dénonce la justice dès lors qu'elle fait son travail, et le comportement de la gauche, qui est d'avoir scrupuleusement veillé à l'indépendance de la justice et de la respecter.
PATRICK COHEN
On reviendra sur l'affaire CAHUZAC avec vous, Delphine BATHO, avec vos réponses aux auditeurs de FRANCE INTER, qui nous appellent au standard : 01.45.24.7000. Ça sera à 08h40. L'Ecologie, votre secteur ministériel, objet aujourd'hui de notre observatoire des promesses avec LE PARISIEN AUJOURD'HUI EN FRANCE, la promesse de François HOLLANDE de privilégier les énergies renouvelables au détriment du nucléaire avait suscité beaucoup de débats pendant la campagne, et plus un mot aujourd'hui, pas un mot, je crois, sauf erreur, dans l'interview du président jeudi dernier. On a l'impression que la crise a chassé les préoccupations
DELPHINE BATHO
Ah non, c'est faux, il en a parlé
PATRICK COHEN
Il en a parlé ?
DELPHINE BATHO
Bien sûr, il en a parlé
PATRICK COHEN
Alors, ça m'a complètement échappé.
DELPHINE BATHO
Il a parlé du grand chantier de la transition énergétique, qui est aussi une réponse à la crise économique, pour développer de nouvelles filières industrielles
PATRICK COHEN
Vous trouvez que François HOLLANDE et Jean-Marc AYRAULT font la pédagogie de l'écologie en ce moment dans leurs discours ?
DELPHINE BATHO
Eh bien, c'est quelque chose qui leur tient à coeur. Nous sommes dans un moment de crise économique où ce qui prime, c'est vrai, c'est les difficultés du quotidien, l'action immédiate du redressement des comptes publics, mais moi, j'ai la responsabilité de préparer le long terme, et notamment cette transition énergétique, qui va engager la France sur les dix, vingt, trente prochaines années, et qui doit en même temps apporter des solutions aux problèmes d'aujourd'hui, que ce soit la précarité énergétique ou que ce soient les créations d'emplois, notamment dans le développement des énergies renouvelables, et des économies d'énergie aussi.
PATRICK COHEN
Quand on dit ça a été engagé hier qu'on va supprimer ou mettre entre parenthèses des normes pour la construction de logements, est-ce que cela vaut aussi pour certaines normes environnementales ?
DELPHINE BATHO
J'organise très prochainement, au mois de juin, des états généraux de la modernisation du droit de l'environnement, oui, il va y avoir des normes environnementales à moderniser, c'est-à-dire qu'on peut tout à fait concilier des hauts standards d'exigence écologique et des procédures qui soient plus fluides, plus allantes, plus efficaces, pour, aujourd'hui, mener un certain nombre de projets, il faut parfois attendre six ans, huit ans, je pense qu'on peut quand même faire mieux, et avoir des procédures environnementales beaucoup plus rapides.
PATRICK COHEN
Mais donc avec des normes qui seront revues à la baisse
DELPHINE BATHO
Non, pas revues à la baisse, il ne s'agit pas d'en rabattre sur l'exigence écologique, mais d'avoir des procédures plus fluides. Si vous voulez, je peux prendre un exemple, lorsqu'on doit construire une digue aujourd'hui, pour protéger le littoral d'une subversion marine, on a ce qu'on appelle des procédures en tuyaux d'orgues, c'est-à-dire qu'il faut faire une enquête publique loi sur l'eau, une autre enquête publique sur la faune et la flore, je vous épargne les détails, mais je pense très bien qu'on peut avoir une procédure unique, qui permettrait d'étudier l'ensemble des impacts environnementaux, en garantissant la participation du public, mais dans des délais qui soient raisonnables.
PATRICK COHEN
La Loi littoral, la Loi montagne seront respectées comme les autres règles d'urbanisme ?
DELPHINE BATHO
Oui, c'est des lois très importantes, il faut continuer
PATRICK COHEN
C'est-à-dire, pour être concret, pour les auditeurs qui ne le savent pas, on ne bétonnera pas le littoral
DELPHINE BATHO
Évidemment
PATRICK COHEN
Ou les zones de montagnes pour construire des logements à toute force, comme c'est l'objectif aujourd'hui affiché par le gouvernement
DELPHINE BATHO
C'est quelque chose de fondamental pour la France d'avoir un littoral protégé du mieux possible et préservé du mieux possible de la pression foncière, donc il n'est pas question de remettre en cause, bien sûr, la Loi littoral.
PATRICK COHEN
Le comité pour la fiscalité écologique, que vous avez installé il y a quelques mois, vient de rendre un projet d'avis qui sera examiné le 18 avril, et qui préconise la réduction progressive de l'écart de taxation entre l'essence et le gazole, vous respecterez cet avis ou ça sera examiné ensuite, ça sera arbitré en haut lieu ?
DELPHINE BATHO
Le gouvernement n'a pas pris de décision, et l'avis dont vous faites mention n'a pas encore été discuté avec les organisations syndicales, les associations de consommateurs, les représentants des entreprises, les ONG environnementales, donc il faut laisser ce comité faire son travail, ensuite, moi, ce que j'ai pointé, c'est un problème de pollution aux particules, en ce moment même, il y a encore un pic de pollution aux particules, et le problème des vieux véhicules diesel, qui sont en cause, pas seulement, mais notamment dans cette pollution aux particules.
PATRICK COHEN
Donc c'est un souci, c'est ce que dit aussi le projet d'avis, que c'est la réduction de la l'écart de taxation est justifié sous l'angle environnemental, et on a appris hier soir que le gazole continuait de baisser alors que l'essence augmente, pour les automobilistes qui nous écoutent, voilà. Donc, il faut agir, mais vous ne savez pas encore comment
DELPHINE BATHO
Oui, mais pour l'instant, non, ce n'est pas qu'on ne sait pas encore comment
PATRICK COHEN
Ça n'est pas arbitré
DELPHINE BATHO
C'est que pour l'instant, ce n'est pas arbitré.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 5 avril 2013