Déclaration de Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement, sur les axes de la réforme de l'attribution de logements sociaux, à Paris le 22 mai 2013.

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Circonstance : Concertation avec les groupes de travail sur l'attribution des logements sociaux, à la Cité internationale universitaire de Paris le 22 mai 2013

Texte intégral

Mesdames, Messieurs les ministres,
Mesdames, Messieurs les parlementaires,
Mesdames les élues, Messieurs les élus,
Mesdames les présidentes, Messieurs les présidents,
Mesdames les directrices, Messieurs les directeurs,
Mesdames et Messieurs,

Nous sommes réunis aujourd'hui, et je vous remercie de votre présence nombreuse, pour la conclusion des travaux engagés dans le cadre de la concertation sur les politiques d'attribution des logements sociaux. Quel était l'enjeu ?
Trouver les voies permettant d'introduire plus de lisibilité, de simplicité, de transparence et d'efficacité dans les processus d'attribution des logements sociaux, tel est le cap que j'avais fixé au lancement de cette concertation. Et il a été tenu.
L'enjeu était bel et bien majeur. En somme, il s'agissait, comme je l'avais souligné en ouverture de cette concertation d'une question qui touchait à la cohésion sociale.
Chacun voit bien comment en effet un déficit de transparence dans ce domaine peut venir alimenter tous les fantasmes, conforter tous les égoïsmes, encourager tous les replis.
La pénurie de logements est un poison qui est porteur d'une logique mortifère pour le pacte républicain. Quand on a le sentiment que l'avenir est en berne, que demain est une menace de régression, un risque de chute, une promesse de déclassement, rien ne vous porte spontanément vers la solidarité.
Au contraire l'esprit de concurrence s'infiltre par toutes les fibres du corps social.
Alors s'impose la vieille et triste rengaine de ceux qui disent : « moi je n'ai rien… mais lui il a ??? Pourquoi lui ? »
Lui ? L'autre. Oui « l'autre » ce spectre qui hantent nos discussions, celui dont toutes les permanences d'élus ont entendu parler avec parfois des accents de rage à peine contenus. « L'autre », celui dont mille anecdotes nous disent que son sort est meilleur, que l'État veille sur lui, qu'il a su être malin et profiter du système, « l'autre » cet ennemi d'autant plus mortel qu'au fond, il me ressemble tant.
La question de l'attribution des logements est une boite de pandore, remplie de mythes portant chacun à sa manière, délitement du vivre ensemble. En la réformant, nous devons tordre le cou au démon de la sécession.
Quand on le prend par le prisme de son attribution, le logement vient ainsi s'inscrire au croisement de la question démocratique et de la question sociale. Un toit c'est un droit. Mais un droit dont on a le sentiment de ne pas jouir quand d'autres en disposent, c'est une frustration, une offense, parfois même une humiliation. Le sentiment d'injustice alors vient s'ajouter à la réalité des difficultés de la vie quotidienne, non pas pour inspirer une mobilisation collective et civique, mais le plus souvent pour déclencher la ruée vers le chacun pour soi.
Il est donc urgent d'agir. Là où certains voyaient la nécessité de la charité, j'ai plaidé pour la détermination de la politique. De cette question du logement, le gouvernement a fait une priorité nationale. Il le fallait. Aucune crise, aucune contrainte budgétaire ne doit nous faire dévier de ce cap. Tout particulièrement, nous sommes résolus à agir sur l'offre pour produire des logements en nombre suffisant – et notamment des logements sociaux. Le gouvernement est pleinement mobilisé pour atteindre l'objectif de construction de 150 000 logements sociaux par an.
Des étapes importantes ont déjà été franchies :
- Le 18 janvier dernier, la loi en faveur de la mobilisation du foncier public a été promulguée et ses effets se concrétisent déjà. Vendredi dernier, j'ai accompagné le président de la République à Caen où a été signé un protocole actant la cession foncière à la Ville d'une ancienne caserne de gendarmerie. Cette loi, c'est aussi le passage de l'obligation dite loi SRU de 20 à 25 % : il s'agit de faire en sorte que toutes les collectivités locales participent à cet effort de développement de l'offre de logements sociaux.
- Le 21 mars, le Président de la République a présenté un plan d'investissement pour le logement. Concrètement, ce plan vise à lever les freins sur les projets de logements en cours, à inciter à l'émergence de projets nouveaux et à accélérer le rythme des rénovations énergétiques. La mise en oeuvre de ce plan est elle aussi déjà concrète : j'étais, pas plus tard qu'hier soir, au banc à l'Assemblée nationale pour défendre le projet de loi habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnances. Ce choix de la loi d'habilitation a été fait pour aller plus vite et être en capacité de répondre à l'urgence sociale qui doit frapper les esprits et nécessite une réponse immédiate. Ce plan prévoit aussi le passage de la TVA à 5% pour le logement social au 1er janvier 2014 : cette mesure, dans un contexte difficile pour les finances publiques, doit constituer également un facteur d'accélération de la construction de logements sociaux, et je compte sur l'ensemble des bailleurs sociaux pour lancer des programmes dès à présent, qui pourront s'équilibrer grâce à ce nouveau taux de TVA et grâce à la mutualisation des fonds propres.
Je ne détaillerai pas davantage l'ensemble des mesures actées, mais je tenais à vous assurer de la détermination du gouvernement à agir vite, à agir puissamment pour développer l'offre de logements. Je n'ignore pas que la bataille sera rude. Mais c'est précisément dans cette dynamique et dans ce cadre global que s'inscrira la réforme des politiques d'attribution des logements sociaux.
Voila pourquoi, je dois dire que je suis particulièrement satisfaite du travail de concertation qui a été mené depuis la mi-janvier. Vous commencez à connaître ma détermination à faire bouger les lignes, et à porter des exigences fortes qui impliquent nécessairement de rompre avec la placidité du statut quo.
A mes yeux cependant, une réforme est d'autant plus réussie qu'elle est portée par l'ensemble des acteurs concernés. Nous ne devons pas être otages de la recherche de consensus, mais vouloir écouter toutes les parties prenantes, partir du réel. Comprendre la complexité du sujet me semble primordial.
Je me félicite donc de la méthode qui a été mise en oeuvre.
Donner une mission mais laisser toute latitude aux bailleurs, aux collectivités, à Action logement, aux locataires, aux demandeurs, aux associations était un pari que je souhaitais faire. Quatre mois plus tard, j'ai le plaisir de constater que ce pari est gagné : la mobilisation de tous a été forte.
Dès en amont, un grand travail de synthèse a été réalisé : des fiches thématiques d'une grande qualité ont été élaborées pour permettre de prendre en compte les travaux existants sur le sujet.
Durant toute la concertation, des documents complémentaires ont été mis en ligne. Des visites de terrains ont été effectuées. Les groupes ont invité des experts à apporter leurs points de vue. Tout autant d'actions qui ont pu alimenter leurs réflexions.
Au-delà de la méthode elle-même, le succès de la concertation relève de la vigoureuse implication de l'ensemble des participants ; les plus de 70 contributions écrites qui ont été produites en apportent la preuve tangible.
Dans les quatre groupes de travail, l'énergie déployée par tous les intervenants a permis de créer une réelle dynamique de groupe et de générer de multiples échanges croisés.
La concertation a été très large : les participants ont non seulement été nombreux mais surtout divers. Je suis très sensible à la présence d'acteurs de terrain qui ont assuré une prise avec le réel. Je voudrais également rendre hommage aux co-présidents des quatre groupes de travail :
- Guy POTIN et Stéphane DAMBRINE pour le groupe sur le rapprochement de l'offre et de la demande et la priorisation des demandes,
- Monique VUAILLAT et Claude JEANNEROT pour le groupe sur l'amélioration du service rendu aux demandeurs,
- Estelle GRELIER et Jean-Martin DELORME pour le groupe sur les politiques d'attribution et les spécificités des territoires,
- Sylvine THOMASSIN et Arnaud CURSENTE pour le groupe sur l'adaptation de l'offre aux besoins.
Vous avez dû, dans des délais très resserrés, tenir les réunions des groupes, assurer leur cohérence, et les faire aboutir à des propositions concrètes. Je crois savoir que les débats ont parfois été vifs, je les remercie d'avoir tenu la barre et amené chacun des groupes à bon port.
Je souhaite également remercier le Comité des sages et, en particulier, son Président, Jean-François DEBAT. La mission que je lui avais confiée, celle d'être le garant du bon fonctionnement de la concertation et, plus encore, celle d'être le garant d'un épilogue cohérent, c'était une mission inédite et délicate. Le comité s'en est admirablement acquitté.
Permettez-moi de rendre un hommage particulier aux deux rapporteures dont je sais que la charge de travail fut particulièrement lourde tout au long de la concertation. Un grand merci donc à Noémie Houard, du Centre d'analyse stratégique – devenu « Commissariat général à la stratégie et à la prospective » entre temps – ainsi qu'à Hélène Sainte-Marie, directrice de projet au sein de la Direction de l'Habitat, de l'Urbanisme et des Paysages.
S'il m'importe de valoriser et de saluer la qualité de ces documents écrits, j'aimerais aussi vous exprimer mon sentiment de fierté. Je sais que les échanges qui se sont tenus furent approfondis et abondants, parfois même virulents. Mais ce que je retiens au premier chef c'est qu'ils furent évolutifs. Le sujet qui nous réunit aujourd'hui est délicat : chaque acteur est mu par ses priorités et par ses contraintes. Confronter les points de vue, c'est donner la possibilité, de mieux saisir les contraintes de chacun et les positions antagonistes qui peuvent en découler, et ainsi, l'occasion de faire évoluer ses propres représentations et déplacer ses propres curseurs.
J'adresse donc des remerciements sincères à l'ensemble des parties prenantes de la concertation qui ont fait de ces presque vingt semaines de concertation, un moment de dialogue d'une rare fécondité. J'ai la certitude qu'elles auront à terme, et quelle que soit la tournure de la réforme, réussi à bousculer des préjugés, à ouvrir des horizons et à faire progresser la réflexion collective.
Grâce au fruit du travail fourni, nous disposons aujourd'hui entre nos mains de propositions riches et nombreuses, qui concilient ambition et pragmatisme.
A présent, il s'agit de donner corps à une réforme globale, en partant de vos propositions, et en proposant des dispositions opérationnelles répondant aux différents objectifs que nous nous sommes fixés.
L'un des premiers enjeux doit être celui de la lisibilité, de la simplicité, de la transparence, de l'information. L'étude qualitative réalisée par Ipsos pendant la concertation nous confirme bien l'image de complexité et d'opacité du système.
Le processus d'attribution des logements sociaux, du dépôt de la demande jusqu'au passage en CAL, est perçu comme un « parcours du combattant » semé d'embuches, de zones d'ombres, d'incompréhensions.
Je tiens aussi à ce que la connaissance de ce système d'attributions de logements sociaux se développe pour tout le monde, et non pas seulement pour celles et ceux qui souhaitent y accéder, car je pense que c'est un enjeu civique. Le logement social doit être un enjeu partagé et transparent.
Les demandeurs, doivent être placés au coeur du système. En conjuguant une information plus claire et plus accessible, la simplicité des procédures, un travail de formation, de sensibilisation et de pédagogie, je suis convaincue qu'il est possible de rendre le demandeur à sa dignité d'acteur, de lui donner de la visibilité et des marges de manoeuvre sur sa demande.
Ce qui doit guider notre réforme, c'est une nécessité de simplicité et d'information mais aussi, bien évidemment une nécessité d'efficacité.
Compte tenu de la tension existante, le système doit pouvoir optimiser l'occupation des logements. Il est également déterminant que la réforme tienne compte de la spécificité des territoires. Il est évident que des territoires soumis à une forte tension dans le parc social ou, à l'inverse, des territoires où la demande est faible, ne sont de toute évidence pas confrontés aux mêmes enjeux.
La question de la fluidité des parcours et celle de la mobilité dans le parc social ne doivent pas être oubliées, non seulement pour les enjeux qu'elles présentent en elles-mêmes, mais aussi par l'effet positif qu'elles ont y compris sur les attributions de ceux qui accèdent au parc social.
Il existe souvent le sentiment d'« assignation à résidence» dans le parc social mais aussi dans un logement donné. L'idée que l'on est a bloqué, et que notre vie se déroulera ici, sans autre horizon de changement. Cette crainte conduit les demandeurs, trop souvent, à viser un logement idéal dont ils se disent qu'ils devront y rester leur vie entière. Et, de fait, cette crainte peut être un frein à leur accès au parc social.
La mobilité dans le parc social, c'est aussi, bien sûr, une possibilité d'optimisation du parc.
Enfin, cette réforme ne doit pas constituer un recul de la mise en oeuvre du droit au logement, ce qui serait un comble, et constituerait un coup de poignard dans le dos de celles et ceux qui se battent pour faire face à la crise et à l'urgence sociale.
Certains m'ont fait part de leurs inquiétudes sur le sujet. J'en profite pour affirmer avec force mon attachement au droit au logement opposable. J'en prends l'engagement devant vous, rien ne viendra remettre en cause la portée du DALO et l'obligation consécutive de reloger les ménages reconnus comme devant être relogés de manière prioritaire et urgente. J'ai d'ailleurs demandé aux préfets de déployer des efforts particuliers pour activer l'ensemble des leviers en faveur du renforcement du dispositif de relogement de ces ménages, comme cela avait été annoncé dans le cadre du Plan de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale.
Ces objectifs rappelés, la réforme que je vous propose pourrait s'articuler autour de quatre axes, que je vais esquisser devant vous et qui n'en sont encore qu'aux prémices, le but étant bien de poursuivre ensemble la construction de cette réforme, j'y reviendrai tout à l'heure.
1) Le premier axe est celui de la simplification de la demande.
Des étapes ont déjà été franchies, mais il reste beaucoup à faire : c'est le constat que fait le rapport et je le partage.
Après le numéro unique, le formulaire unique, nous devons aller vers un dépôt unique de dossier. Chaque demandeur n'aura à déposer sa demande qu'en un seul lieu, et elle vaudra pour l'ensemble des réservataires et des bailleurs. Il pourra également la déposer sur Internet.
J'ai bien conscience que cela ne se fera pas en un jour, car la technique n'est pas simple et parce que les modes de fonctionnement sont divers. Mais les progrès technologiques doivent nous permettre de franchir cette étape.
Les propositions faites dans le cadre du système de partage de la connaissance et de la demande proposé par le premier groupe de travail et reprises par le comité des sages devront nous permettre d'avancer sur ce sujet. Et comme le soulignent les travaux menés, ce partage de la demande est aussi un préalable pour améliorer la connaissance des demandes, à laquelle je suis très attachée, à la fois pour améliorer la programmation de l'offre et pour informer l'ensemble des demandeurs.
2) Car le second axe de cette réforme est celui de l'information des demandeurs
Chacun connaît des demandeurs de logement qui ont le sentiment d'être perdu dans un labyrinthe sans issue. Leur colère le dispute à leur désespoir. Qu'ils aient accès aux informations les concernant est un impératif essentiel. C'est une des clefs de la lutte contre le sentiment d'abandon qui frappe un trop grand nombre de nos concitoyens et concitoyennes.
En amont, il s'agit de faire mieux connaître l'ensemble du processus d'attribution.
En aval, il s'agit d'informer les demandeurs sur le suivi de leur demande. Des progrès immenses peuvent être faits en la matière. Je souhaite en particulier que nous nous donnions les moyens, collectivement, de pouvoir informer sur les délais théoriques d'attente, en fonction de la demande. En effet, je suis convaincue que cette information sera de nature à améliorer l'efficacité globale du système. Parce que les demandeurs pourront mieux orienter leur demande. Parce qu'ils pourront mieux construire leurs projets de vie en connaissance de cause.
Nous devons définir ensemble le socle commun d'information à donner aux demandeurs, tout au long du processus de demande jusqu'à l'attribution.
Des propositions élaborées ont été faites sur cette question, articulées autour du service commun d'information, d'enregistrement et d'accueil des demandeurs. Il s'agit à présent de les expertiser et d'élaborer les outils nécessaires. Ma priorité est bien, comme le suggère le comité des sages, de partir de l'existant, que ce soit chez les bailleurs, chez les réservataires, dans les mairies, les centres d'action sociale, ou dans les ADIL qui assurent une mission d'information sur le logement.
Ces deux outils que sont l'établissement d'un dossier unique de la demande et l'accès de tous à une information commune sont la condition primordiale de la transparence. Elles sont la première pierre de la réforme des attributions que nous lançons aujourd'hui. C'est pourquoi, elles seront présentées au Parlement dans les semaines qui viennent et pourront être votées pour être mise en oeuvre dès l'année 2014.
3) Troisième axe : Un portage au niveau des intercommunalités
La question de l'échelle territoriale pertinente est essentielle. Je suis bien convaincue qu'« une politique d'attribution juste et efficace ne peut être définie, sur le fondement d'un cadre national, qu'au plan local ou territorial », pour reprendre les termes du comité des sages. Je retiens des travaux de concertation que le niveau intercommunal pour porter la politique d'attribution fait sens aux yeux de nombreux acteurs.
Et je partage l'idée que le rôle de pivot de l'organisation et du pilotage de la politique d'attribution des logements sociaux doit être confié aux agglomérations – au moins sur les territoires où la tension en matière de logement le justifie. Il ne s'agit pas de revenir sur le pouvoir des maires en la matière, mais bien de porter une politique intercommunale, en cohérence avec le PLH. Cette disposition devra bien sûr s'articuler avec les autres évolutions en cours en matière de décentralisation. Qu'on ne s'y trompe pas, il ne s'agit pas d'ouvrir une querelle sur la géographie des pouvoirs, mais bien de renforcer l'efficacité de nos politiques publiques, au service de celles et ceux qui nous ont donné mandat pour les conduire.
C'est pourquoi, je suis convaincue que pour parvenir à ce que le niveau intercommunal soit reconnu comme le niveau pertinent du traitement des demandes, cette réforme devra s'articuler de manière complémentaire avec les lois de décentralisation, dont la première partie est d'ors et déjà discutée au Parlement. Néanmoins dès aujourd'hui nous encouragerons toutes les collectivités volontaires et prêtes à effectuer cette mission au niveau de l'intercommunalité.
4) Quatrième axe : un système de hiérarchisation des demandes comme outil d'aides à la décision
Je l'ai déjà dit, mais en particulier sur ce point, les travaux de concertation ont réellement permis de faire avancer ce sujet complexe avec des débats approfondis, constructifs, étayés.
Le principe est largement partagé, et je le partage dans la mesure où il reste un outil d'aide à la décision. Car, comme je l'ai dit au lancement de cette concertation, l'attribution d'un logement social – au-delà de tous les aspects très techniques – est une question profondément humaine, pour le ménage concerné. Et aucun système complètement automatisé ne peut répondre à la globalité des situations. C'est de destinée qu'il s'agit. Aucune mécanique, aucune ingénierie, aucune automatisation ne pourra trancher avec justice des questions parfois épineuses, et il ne s'agit pas d'ajouter au caractère désincarné et parfois cruel pour qui n'en maîtrise pas les arcanes des processus de décision. Il faut gagner en efficacité sans perdre en humanité.
Ceci posé, la question de la mise en oeuvre opérationnelle n'est pour autant pas simple. Et, tout particulièrement sur cette question, je refuse qu'on procède à l'aveuglette. Je souhaite en conséquence qu'un travail précis et approfondi soit mené sur le sujet dans les mois à venir. Si nous voulons que la cotation soit un appui transparent et efficace à la prise de décision, alors il doit être partagé et reconnu par tous. C'est pourquoi je souhaite que soient étendues et favorisées toutes les expérimentations. À partir de ce retour d'expérience, nous créerons les conditions de sa généralisation.
Mesdames, Messieurs, comme vous le voyez la réforme que nous entreprenons est vaste. Elle est attendue depuis longtemps par les Françaises et les Français. Soyons clairs. Cette réforme ne résoudra pas à elle seule la crise du logement. Cette réforme ne se fera pas en un jour. Elle se fera par étapes, de la manière la plus volontaire et déterminée. C'est pourquoi notre travail ensemble ici ne fait que commencer.
Comment le travail va-t-il se poursuivre ? Comment la réforme va t-elle s'opérer ? En partant de ces axes et en prenant appui sur la dynamique importante qui s'est mise en place pendant cette concertation, je souhaite passer à une seconde phase consacrée à la mise en oeuvre de la réforme.
Nous avons échangé sur les objectifs et les propositions à retenir. Il est temps de passer aux travaux pratiques. Là encore, j'ai besoin de vous. De votre intelligence, de votre vigilance, de votre esprit constructif, de votre irremplaçable. À expérience, de votre envie de changement.
J'en ai informé Jean-Francois Debat avant de vous rejoindre, je souhaite que vous continuiez votre travail. Je mettrai en place un comité de suivi partenarial de la réforme, qui sera chargé à la fois de m'accompagner dans la poursuite de la définition de cette réforme, et dans les modalités de mise en oeuvre. Il s'articulera aussi, selon des dispositions encore à définir, sur des relais dans les territoires, car cette réforme ne peut se faire de haut en bas et sans articulation avec les territoires et les acteurs de terrain. Il en sera donc de même que pour la concertation initiale qui s'est attachée à associer acteurs de terrain, et des territoires divers. Ces relais locaux seront aussi des ambassadeurs de la réforme, pour qu'elle soit effective.
Enfin, en termes de méthode, je tiens à préciser deux points :
- nous nous appuierons sur ce qui fonctionne ; le but n'est pas de balayer l'existant d'un revers de main et de remettre en cause de manière aveugle le système ; mais de s'appuyer sur les outils actuels et d'en corriger les faiblesses ;
- je fais mien le souhait émis par le comité des sages de voir s'instaurer concomitamment à la mise en place de la réforme une évaluation du dispositif. Il est essentiel que nous puissions en mesurer les effets et ainsi pouvoir le faire évoluer pour s'adapter aux réalités.
Je vous remercie pour le travail accompli, et je vous donne rendez-vous pour la suite, en vous demandant donc de bien vouloir poursuivre votre mobilisation exemplaire. Le temps qui s'ouvre est celui de l'action. La boussole, en est l'intérêt général. La ligne politique c'est la volonté d'assurer la dignité de chacun par l'effectivité du droit de tous à disposer d'un logement ou abriter sa famille, sa vie, construire ses projets ou murir ses espoirs.
La réforme de l'attribution des logements sociaux que nous construisons ensemble est un pas modeste mais déterminant dans cette direction. Soyez-en convaincus, et partant de là, prenez votre bâton de pèlerin, et à votre tour, mettez-les immobiles en mouvement, sommez les conservateurs de quitter les rivages de l'habitude, déplacez les barrières à défaut de faire tomber les montagnes, pour que notre pays soit digne de la promesse à laquelle il a donné le nom de République.
Je vous remercie.
Source http://www.territoires.gouv.fr, le 23 mai 2013