Déclaration de Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat, sur l'aide à la création d'entreprises, notamment les dispositions fiscales et financières, Paris le 27 avril 1999.

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Circonstance : Conseil national de la création d'entreprise, Paris le 27 avril 1999

Texte intégral

Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs,
Cette troisième séance du Conseil National de la Création d'Entreprise s'inscrit dans un contexte d'initiatives - travaux des parlementaires, Salon des Entrepreneurs, colloque Synergies pour la création, travaux des parlementaires- qui visent toutes par leurs propositions à soutenir et renforcer la création d'entreprise. La voie suivie tend à faciliter le passage de l'envie de créer à l'acte de création. Les commissions de notre assemblée ont travaillé également et je veux en remercier tous les membres ainsi que leurs présidents. Ils nous diront où ils en sont de leurs travaux et quelles propositions ils ont d'ores et déjà souhaité mettre en avant.
1-Le contexte de cette réunion est marqué par une poursuite de l'effritement du nombre des créations d'entreprises.
Nous partageons tous ici la conviction que la création d'entreprise est, à côté du développement des entreprises existantes, le moteur de la création d'activités, de richesses nouvelles et donc d'emplois. Pourtant, la décennie 1990 a été marquée par un effritement de près de 20 % du nombre des créations et même s'il est sans doute excessif d'ajouter le nombre d'emplois non créés chaque année de ce fait depuis 10 ans, ceux-ci pèsent lourd dans le chômage actuel.
Le contexte économique général est pourtant favorable à l'acte de création: il est plus facile, sans doute, de s'inscrire dans un mouvement général de croissance économique, que dans un environnement de récession. Mais cela ne suffit sans doute pas.
Paradoxalement, la décennie 1990 a été également marquée par un repli des dispositifs d'aide aux créateurs. Nous avons voulu inverser cette situation en recréant une aide pour les jeunes créateurs et une aide pour les chômeurs créateurs. Cette décision s'est accompagnée de deux innovations administratives fortes :
- déléguer la gestion de ces aides aux acteurs d'accompagnement et partant, en faire une aide sélective ;
- lier aide financière remboursable et accompagnement.
Il n'est pas toujours aisé de vouloir innover et la mise au point des textes (décrets, arrêtés, circulaires) a été longue et a appelé des remarques du Conseil d'Etat. Il reste encore maintenant à mettre en place ce dispositif pour qu'il bénéficie aux créateurs et peut-être le représentant du Ministère de l'Emploi pourra-t-il nous donner quelques précisions sur l'état d'avancement de ce dossier.
La Loi de Finances pour 1999 a été l'occasion de nouveaux progrès, notamment par l'institution d'un crédit d'impôt pour les dons aux associations d'aide aux créateurs qui leur permettra de contribuer à aider au développement de l'emploi dans des conditions fiscales avantageuses.
2 - 1998 a été marquée par de nombreux progrès pour les acteurs d'accompagnement.
Je l'ai dit à plusieurs reprises : les Pouvoirs Publics ont besoin de tous les acteurs d'accompagnement pour mener une véritable aide à la création d'entreprise.
Je me réjouis du développement de nouvelles structures sur l'ensemble du territoire : plate-forme d'initiative locale, boutiques de gestion, clubs de créateurs, nouvelles délégations de l'ADIE. Je me réjouis plus encore du fait que la plupart de ces nouvelles structures se soient mises en place en partenariat avec les organismes consulaires et les associations de développement local.
Je sais -et je voudrais les en remercier ici- combien ce développement est lié au soutien des collectivités publiques, de la DATAR et du programme PME de la Caisse des Dépôts et Consignations. J'espère que l'effort des uns et des autres permettra d'aboutir à la fin de cette année à une couverture quasi-totale du territoire national, pour que chaque créateur, quel que soit son lieu d'installation, puisse trouver appui auprès de l'un d'entre-vous.
1998 aura également permis que s'ébauchent des liens entre ces acteurs et les acteurs financiers habituels. L'accord signé entre FIR et la BDPME, qui permettra à FIR de bénéficier des garanties publiques pour les prêts d'honneur qu'il octroie et de proposer aux créateurs un produit nouveau : le contrat de développement-création me parait exemplaire. Exemplaire parce qu'il fait converger vers un dispositif unique les moyens de l'Etat, des collectivités territoriales et des ressources locales. Exemplaire surtout parce qu'il réserve à chacun ce qu'il sait le mieux faire : gérer financièrement les dispositifs de garantie et de prêt pour les uns, sélectionner les projets, aider à les mettre en forme, et doper leurs chances de réussite pour les autres. Le Président DAVID nous en dira peut-être un mot.
Je crois que de nouveaux progrès sont possibles sur cette voie :
- ensemble les acteurs d'accompagnement doivent se faire les hérauts de la création d'entreprise -ils sont de ce point de vue les médiateurs des créateurs ;
- ensemble les acteurs d'accompagnement doivent soutenir plus de créateurs, chacun dans son domaine d'excellence ;
- ensemble ils pourraient se doter de services communs pour optimiser leur action.
Cela pourrait être par exemple le cas pour la collecte des dons aux associations. Pourquoi ne parviendriez-vous pas à organiser une campagne commune de publicité pour faire connaître cette possibilité de dons ? Pourquoi ne conduiriez-vous pas une campagne à l'égard des grands mécènes que pourraient être encore davantage nos grandes entreprises nationales ? Pourquoi ne géreriez-vous pas ensemble les moyens financiers dont vous disposez ?
Ces progrès ne seront possibles que si le travail des uns et des autres est mieux connu, mieux défini. Le nouveau groupe de travail du Conseil National de la Création d'Entreprise, consacré à l'évaluation de la qualité de cet accompagnement, a justement pour mission de préciser "les bonnes pratiques" en ce domaine et de vérifier que la validation de chacune des étapes se fait bien. Je serais très attentive aux conclusions de ces travaux ainsi qu'au suivi de la qualité de l'accompagnement.
3 Une nouvelle mobilisation :
Des progrès ont été réalisés depuis deux ans quant à l'environnement juridique et fiscal de la création d'entreprise. Nous ne pouvons nous en satisfaire lorsque nous les confrontons aux réalités de la création d'entreprise. Je le répète : si nous avions la même densité entreprenariale que la Grande-Bretagne, nous compterions plus d'un million d'entreprise supplémentaires, soit à minima autant d'emplois.
J'ai décidé d'organiser deux manifestations locales à Brest et à Lille, d'ici l'été, pour confronter les réflexions de chacun et nous confronter tous ensemble à la réalité de ces deux localités en matière de création d'entreprise. Ce travail, ainsi que les réflexions de cette commission, nous permettront d'organiser au mois de septembre ou d'octobre, des assises de la création d'entreprise, qui permettront de nouveaux progrès. Permettez-moi d'évoquer quelques pistes susceptibles de donner lieu à propositions :
- le cas du créateur qui échoue : est-il normal qu'un salarié qui possède des droits à indemnisation les perdent totalement s'il démissionne de son entreprise pour créer ? Même si nous ne parvenons pas a répondre à l'ensemble de la question de l'assurance-chômage des chefs d'entreprise, il me semble que l'on pourrait améliorer la situation du salarié qui crée et échoue.
- les cotisations sociales au démarrage : tout le monde le sait, il est exceptionnel de réaliser d'emblée une activité suffisante pour réaliser des bénéficies. Or, les cotisations sociales sont prélevées au démarrage de l'activité et sur une base forfaitaire qui s'avère supérieure à bien des revenus réels de la première année. Je crois que nous pourrions mieux adapter les nécessaires cotisations à la réalité économique des créations.
- le maillage des instruments financiers et le capital de proximité. Chaque année, 130.000 créations se réalisent avec en moyenne 36.000 francs seulement, les autres mettent en oeuvre des moyens plus importants mais quelques milliers de cas seulement dépassent 500.000 francs, seuil minimum d'intervention du capital-risque. Seul le crédit ou l'épargne de proximité permettent de répondre aux besoins du plus grand nombre des créateurs. Plusieurs mesures existent, nous en avons fait adopter nous-mêmes quelques-unes, comme le crédit d'impôt pour les dons aux associations d'aides à la création d'entreprise. Elles ne vaudront pourtant que tant que des acteurs locaux existeront pour les mettre en oeuvre et plusieurs expériences originales ont été tentées récemment : banque solidaire, clubs d'épargne de proximité... Elles n'ont toutes d'autre vocation que de permettre une meilleure insertion des créations dans les circuits normaux de financement.
- la simplification des formalités liées à la création d'entreprises. Le dispositif législatif et réglementaire a été amélioré. Des efforts ont été demandés aux CCI et des financements prévus pour l'amélioration des CFE. Je souhaite que dans ce domaine, on aille plus loin et notamment dans la coordination entre les CFE des chambres de métiers et ceux des chambres de commerce et d'industrie. Les administrations elles-mêmes sont invitées à accélérer leurs propres procédures de telle sorte, que la délivrance du K bis soit accélérée. Cela suppose également une coopération efficace des greffes, chacun doit avoir le souci de l'efficacité au service du créateur. Il ne doit pas y avoir de chasse gardée. Enfin, je ne vous cache pas que je trouve le coût global de la création, toutes démarches confondues, encore trop élevé. C'est un point qui reste à travailler avec l'ensemble des partenaires, y compris l'Etat.
C'est en orchestrant tous ces chantiers que nous parviendrons à réveiller l'esprit d'entreprise en France. C'est en organisant un dialogue constructif envers tous les acteurs qui participent à la création d'entreprise, que nous permettrons aux efforts de tous de converger et à ceux qui hésitent encore de nous rejoindre. Nous en reparlerons prochainement.
(Source http://www.pme-commerce-artisanat.gouv.fr, le 03 mai 1999)