Déclaration de M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur le budget 1998 et "la croissance solidaire", à l'Assemblée nationale le 14 octobre 1997 .

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Circonstance : Présentation du projet de loi de finances pour 1998 à l'Assemblée nationale, le 14 octobre 1997

Texte intégral

Monsieur le Président,
Monsieur le Président de la commission des finances,
Monsieur le rapporteur général,
Mesdames et Messieurs les députés,
Sous l'autorité du Premier ministre, Christian Sautter et moi-même vous présentons aujourd'hui le premier budget préparé par la nouvelle majorité.
Ce premier budget indique une première direction.
Il traduit la volonté du gouvernement de respecter les engagements contractés devant le peuple. L'emploi doit être la finalité de la croissance. La solidarité doit en être le moteur tant il est vrai que la France n'est forte que quand elle est juste. C'est pourquoi nous avons placé ce budget sous le signe de la croissance solidaire.
Pour le résumer, j'utiliserai sept idées, qui constituent, à défaut des sept piliers de la sagesse, les sept piliers du changement :
(1) nous voulons réformer le calendrier budgétaire pour mieux associer le Parlement;
(2) nous escomptons une croissance de 3 % en 1998 et nous recherchons une croissance du même ordre sur la législature ;
(3) nous nous engageons dans la poursuite de la réduction du déficit pour inverser, en l'an 2000, la spirale de la dette ;
(4) nous voulons maîtriser les dépenses publiques pour pouvoir financer les dépenses d'avenir ;
(5) nous engageons enfin la réforme fiscale dont notre pays a besoin ;
(6) nous voulons conclure une nouvelle alliance entre les classes populaires et les classes moyennes ;
(7) nous abordons cette discussion législative déterminé sur les principes mais ouverts sur les modalités.
(1) nous voulons réformer le calendrier budgétaire pour mieux associer le Parlement.
Sur la loi de finances, la tradition veut qu'il y ait peu de délibération et, en tout cas, pas de délibération véritable.
1-1) Ce que nous avons fait avec le PLF 1998
En dépit d'une difficulté supplémentaire - un calendrier amputé de huit semaines -, nous avons engagé la délibération :
*de manière inédite, au sein du gouvernement
*de manière plus traditionnelle, avec le Parlement et notamment la commission des finances
1-2) ce que nous voulons faire à l'avenir
Participer à la réflexion que vous avez engagée à l'initiative de Laurent Fabius et sous la présidence de Henri Emmanuelli
Examiner une modification de la procédure d'élaboration de la loi de finances afin de :
*vous soumettre un document précis sur l'état des finances publiques au plus tard en juin, sur la base duquel nous verrons avec la Commission des Finances comment en débattre.
*fixer comme objectif de préciser avant la fin juillet le cadrage général des finances publiques pour l'année suivante (niveau des déficits et des prélèvements)
*accélérer le dépôt du PLF au Parlement au début septembre, avec des projections sur les années ultérieures.
(2) nous escomptons une croissance de 3% en 1998 et nous recherchons une croissance du même ordre sur la législature.
Depuis 1991, la croissance est faible (en valeur absolue et en valeur relative)
Cette faiblesse explique :
*hier, que le chômage ait connu une telle progression
*aujourd'hui, que nous disposions d'un important potentiel de croissance
2-1) Croissance 1998 : hypothèse 3%
Le plus fort taux depuis le début de la décennie
Un taux supérieur à celui des États-Unis et égal à la moyenne de l'UE.
Une conséquence : 200 000 emplois créés
Trois causes :
La demande intérieure (consommation, investissement)
La demande extérieure
La hausse des stocks
Deux questions :
1- Sur la solidité de l'hypothèse, mise en doute par quelques membres de l'opposition : confirmée par la réunion des commissions des comptes de la nation
2- Corollaire, sur l'influence de la conjoncture avec la hausse des taux d'intérêts de jeudi dernier. Chacun peut avoir son opinion dans cette assemblée. Il ne m'appartient pas, comme ministre de l'économie, de commenter cette décision d'autorités indépendantes. Ce dont je suis certain, c'est que la reprise est solide et que la décision des banques centrales n'affectera pas la prévision économique du gouvernement ... d'autant moins que notre hypothèse de croissance ne reposait pas sur une stabilité des taux d'intérêt à court terme.
Une conclusion : la croissance est repartie.
Conséquence logique : il ne s'agit plus de rechercher une relance, mais de conforter durablement la reprise
Pronostic personnel : si l'hypothèse était infirmée, je pense que ce serait à la hausse et pas à la baisse - l'Union européenne, par exemple, table sur une croissance de 3,1 % -.
2-2) Croissance sur la législature : objectif 3 %
Deux conditions :
Que les ménages retrouvent la confiance
Que les entreprises investissent (nécessité à la fois quantitative et qualitative)
A ces deux conditions, il faut en ajouter une troisième : que la croissance soit plus riche en emplois. Tel était l'objet de la conférence sur l'emploi qui s'est tenue vendredi dernier et qui a ouvert de nombreux chantiers, sur la réduction du temps de travail et sur bien d'autres sujets.
Beaucoup d'observateurs qui ont examiné avec objectivité les conclusions de cette conférence l'ont confirmé : le gouvernement a choisi de respecter ses engagements autour d'une ligne pragmatique et souple. Dès lors, je le dis avec force, les Français ne comprendraient pas que le patronat privilégie une ligne dogmatique et rigide. L'intérêt des entreprises n'est pas différent de celui du reste du pays : il est de redonner confiance à nos concitoyens en faisant enfin reculer le chômage.
(3) nous nous engageons dans la poursuite de la réduction du déficit pour inverser, en l'an 2000, la spirale de la dette
En vingt ans, le poids de la dette par rapport au PIB est passé de 20 % à 57 %
En moins de dix ans, la part du service de la dette est passée, dans la structure des dépenses publiques, de 10 % à près de 20 %
Depuis 1995, reconnaissons-le, le déficit budgétaire a été réduit.
*à l'évidence moins que l'opposition ne l'avait annoncé
*sans doute pas comme il aurait fallu (en augmentant les prélèvements et non en soutenant la croissance)
Aujourd'hui, nous franchissons une étape supplémentaire.
3-1) En 1998, nous ramènerons le déficit à 3 %
Pourquoi ?
La première raison, c'est que nous voulons faire l'euro. C'est pourquoi, contrairement aux discours tenus depuis de longues années, et ce aussi bien par la gauche que par la droite, le gouvernement assume toutes les décisions qu'il a été amené à prendre depuis son entrée en fonction, même si nul ne peut le considérer responsable de la situation budgétaire dont il a hérité.
Certaines de ces décisions ont été votées par l'Assemblée nationale il y a peu. D'autres sont présentes dans la loi de finances dont nous commençons l'examen aujourd'hui. Toutes ensemble, elles vont permettre de réduire le déficit de plus d'un point de PIB, soit plus de 80 MdF en l'espace de dix-huit mois.
Nous voulons faire l'euro :
*pour une certaine vision de la France : nous préférons partager une souveraineté réelle que cultiver les apparences d'une souveraineté sans partage.
*pour une certaine vision de l'Europe : nous sommes convaincus - et nous travaillons avec ténacité en ce sens - que la mise en place de l'euro doit entraîner, et entraînera, un approfondissement de l'Europe politique et obligera à coordonner davantage les politiques économiques. Je suis d'ailleurs en mesure de vous annoncer dès à présent une excellente nouvelle : j'ai obtenu ce matin même à Münster l'accord de nos partenaires allemands sur les domaines et les mécanismes de cette coordination, autour d'un conseil de l'euro et du conseil Ecofin.
*pour une certaine vision du monde : nous ne nous résignons pas à une situation qui voit la seule monnaie américaine servir au reste du monde de repère et de refuge ; nous voulons peser pour la construction d'un système monétaire international plus coopératif ; nous pensons que l'euro constituera un levier puissant pour y contribuer.
Au-delà, il existe deux raisons supplémentaires pour poursuivre la réduction du déficit budgétaire :
Parce que nous voulons privilégier l'avenir.
Parce que nous voulons retrouver des marges de manoeuvre budgétaire.
C'est pourquoi :
3-2) En 1999 et au-delà, nous poursuivrons la réduction du déficit des comptes publics.
Nous ne partageons pas l'hostilité idéologique à la dépense publique, même si nous n'avons de leçons à recevoir de personne ne matière d'économies.
Nous croyons que la dépense publique peut et doit être efficace. C'est pourquoi nous voulons retrouver des marges de manoeuvre budgétaire :
en procédant à des redéploiements pour renforcer l'efficacité de chaque franc dépensé.
en réduisant le déficit pour mettre un terme à la déformation de la structure du budget au détriment des dépenses d'intervention.
Conclusions :
Un engagement : en l'an 2 000, pour la première fois depuis vingt ans, nous inverserons la spirale de la dette.
Une explication : cette année, pour réduire le déficit des comptes publics à 3 %, nous avons d'abord et avant tout réalisé des économies substantielles.
(4) nous voulons maîtriser les dépenses publiques, financer les dépenses d'avenir et de solidarité et renforcer l'efficacité de la dépense publique
Sur 0,55 % de réduction du déficit, les économies sur le budget de l'État, rapportées à la progression de la richesse nationale, en représentent 0,5 %.
4-1) Une maîtrise réelle
- + 1,36 % pour les dépenses publiques contre 1,4 % pour l'inflation : en termes réels, la progression des dépenses publiques est nulle, voire en légère diminution.
C'est la plus faible progression depuis plus de vingt ans.
A ceux qui argueraient de la loi de finances pour 1997, je répondrai qu'elle a été effectivement présentée avec une stabilisation en francs courants mais... votée avec une légère augmentation en francs constants ... et exécutée avec une progression plus importante encore puisque l'évaluation des comptes à laquelle il a été procédé a montré que les dépenses avaient connu un dérapage de 12 à 20 MdF.
4-2) Des priorités affirmées.
Dans cette stabilisation globale, il y a seize budgets qui baissent, en francs constants, voire en francs courants, et dix-huit budgets qui augmentent.
Nous vous présentons aujourd'hui un budget qui est un budget pour l'avenir, pour la jeunesse (priorité à l'éducation et à la recherche, à la culture et au logement, relance de l'investissement civil public, lancement des emplois pour les jeunes dans le secteur public et associatif, réduction du déficit et donc de la charge qui pèsera sur les générations futures...).
Si l'on ajoute à cela :
*dans le domaine politique, l'inscription automatique des jeunes sur les listes électorales et,
*dans le domaine économique, l'engagement de l'État, lors de la conférence sur l'emploi, à contribuer à l'extension du mécanisme qui permet aux salariés ayant cotisé plus de quarante années et n'ayant pas encore atteint soixante ans, de partir en préretraite contre l'embauche d'un jeune dans le secteur privé,
*on peut dire que la politique du gouvernement est une politique pour la jeunesse.
Vous vous en souvenez : le mot d'ordre du parti socialiste pendant la récente campagne électorale était : "changeons d'avenir". Nous le faisons entrer dans les faits.
(5) nous engageons la réforme fiscale dont notre pays a besoin
5-1) Nous voulons faire une réforme fiscale sur une législature
Nous récusons aussi bien :
*le mythe du grand soir fiscal, cette sorte de volontarisme forcené qui nie la réalité,
*la thèse de l'impossible réforme, cette espèce d'hyperréalisme qui annihile la volonté.
Nous pensons que l'un et l'autre expliquent que, faute d'ambition, de vision, de ténacité ou de courage, la réforme fiscale dont notre pays a besoin a sans cesse été reportée.
Nous voulons engager des réformes graduelles qui, en une législature, feront de la réforme fiscale une réalité.
5-2) Nous voulons clairement fixer les objectifs.
Premier objectif : stabiliser puis faire décroître les prélèvements obligatoires.
Après le précédent record de 44,5 % en 1988, nous avons réussi à faire baisser les PO à près de 43,5 % en 1993.
Depuis 1993, les PO ont à nouveau considérablement augmenté : 45,6 % en 1996 ; 46 % en 1997.
En 1998, les PO seront stabilisés, voire commenceront une légère décrue.
Deuxième objectif : rendre notre fiscalité plus juste en procédant à un double rééquilibrage
D'une part, entre le travail et le capital
D'autre part, entre la fiscalité directe et la fiscalité indirecte.
Troisième objectif : rendre notre fiscalité plus efficace :
en soutenant le développement économique et l'innovation
en assurant une plus grande simplicité
en luttant contre la fraude
5-3) Nous voulons procéder avec méthode
En 1998, nous avons pour l'essentiel modifié l'assiette de l'IR et de l'IS.
En 1999, nous vous proposons de réformer la fiscalité locale et la fiscalité du patrimoine.
pour la réforme de la fiscalité locale :
s'agissant de la TP, je serais heureux que, sous la responsabilité de son président, la commission des finances fasse des propositions
s'agissant de la TH et notamment du problème des bases, je souhaite que se mette en place un groupe de travail réunissant les élus et l'administration.
pour la réforme de la fiscalité du patrimoine, qui doit se faire à prélèvements constants, le Conseil des impôts est déjà en train de travailler. Au vu du rapport qu'il remettra bientôt, nous examinerons les modalités de travail en commun entre le Parlement et le gouvernement.
(6) nous voulons conclure une nouvelle alliance entre les classes populaires et les classes moyennes
6-1) Nous voulons que le plus grand nombre retrouve une espérance
Les classes populaires et les classes moyennes ont été, plus que d'autres, les victimes de la politiques conduites ces dernières années :
*progression du chômage
*limitation des revenus
*précarisation du travail
*perte de repères
*déficit d'avenir (pour eux et pour leurs enfants)
Nous ne voulons pas dresser les unes contre les autres
*donner à ceux qui sont les plus pauvres en prenant à ceux qui ne sont pas riches
*promouvoir la classe moyenne en marginalisant la classe populaire
6-2) Nous récusons le mauvais procès de "laminage" des classes moyennes
J'ai entendu "le budget lamine les classes moyennes", avec un exemple : la réduction d'impôt pour les emplois à domicile.
Nous sommes favorables à ce que l'État contribue à solvabiliser les services de proximité et notamment les emplois à domicile.
Nous avons créé - Martine Aubry notamment - la réduction d'impôt pour les emplois à domicile parce que nous voulions :
*favoriser l'emploi
*lutter contre le travail au noir
*offrir des solutions, notamment pour les cadres des zones urbaines qui ont, plus que d'autres, des contraintes de temps de travail et de temps de transports, et, moins que d'autres, des possibilités alternatives de gardes d'enfants.
La majorité précédente a porté le plafond de 26 000 F à 90 000 F. Nous avons considéré que cet avantage devenait excessif, choquant dans son principe et inutile quant à sont objet initial. C'est pourquoi nous proposons de le ramener à 45 000 F par an.
On peut discuter, notamment du cumul avec d'autres dispositions mais on ne peut pas, de manière cohérente, affirmer :
*que cette mesure touche "la classe moyenne" quand elle ne concerne que 5% de ceux qui utilisaient un tel type d'emploi et 0,23% de l'ensemble des familles.
*qu'il est scandaleux que l'État finance à 80% des emplois pour les jeunes dans le secteur public et légitime qu'il finance à 75% des emplois à domicile dans le secteur privé.
(7) nous abordons cette discussion législative déterminé sur les principes mais ouvert sur les modalités.
La participation du Parlement à la loi de finances peut se faire soit
7-1) Par une contribution à l'élaboration des dispositions
C'est pourquoi nous avons engagé la concertation avec
*la commission des finances
*les responsables de la commission des finances (Président et rapporteur général) et les présidents des groupes de la majorité
C'est ainsi que sont nées plusieurs dispositions :
F. Hollande pour le crédit d'impôt pour les travaux d'entretien à domicile
Henri Emmanuelli pour le crédit d'impôt emploi
C'est pourquoi également nous préparerons ensemble la réforme de la fiscalité locale et de la fiscalité du patrimoine
7-2) Par des amendements au PLF
La discussion qui s'engage aujourd'hui est :
Juridiquement et financièrement contrainte (article 40)
Politiquement ouverte, dès lors que deux principes seront respectés :
la cohérence avec l'équilibre global de la loi de finances
l'opportunité, dans tous les sens du mots, de la mesure proposée c'est-à-dire que : le moment doit être adapté ; le contenu doit être souhaitable
Il y a six mois, jour pour jour, une rumeur enflait. Elle allait se transformer en une décision : celle de la dissolution. Les explications avancées pour la justifier ont alors été nombreuses. Si nombreuses qu'elles en sont devenues opaques. Ou, plutôt, elles en sont devenues transparentes : aux explications avancées, il fallait en ajouter, à vrai dire en substituer, une autre, la vraie : la dissolution était prononcée parce que la majorité d'alors avait la conviction qu'il fallait procéder aux élections législatives avant et non après l'adoption du budget pour 1998. Dans les conditions qu'elle s'était imposée, le bouclage du budget était impossible, la situation risquait d'être explosive. La dissolution a donc été prononcée. Les élections ont eu lieu. La gauche l'a emporté. Et, c'est l'élaboration de ce budget impossible qui nous a incombé.
Je ne procède pas à ce retour en arrière pour relancer une quelconque polémique mais, tout simplement ; pour trancher une question : la conviction que le budget était impossible à boucler était-elle erronée ou justifiée ? Le retour de la confiance et de la croissance peut laisser penser qu'elle était erronée. La réalité oblige à dire qu'elle était, au moins largement, justifiée.
La loi de finances initiale pour 1997 avait été votée avec un déficit des comptes publics de 3,0 %. Et pourtant, lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités au mois de juin dernier - Alain Juppé, dans la lettre qu'il a transmise à Lionel Jospin au moment de la passation de pouvoirs, l'a d'ailleurs confirmé - notre pays était engagé pour 1998 sur une pente supérieure non pas à 3,0 % mais à ... 4 %.
Pourquoi une telle situation ? Pour deux raisons : l'évaluation des comptes publics a montré que le déficit pour 1997 se situait dans une fourchette comprise entre 3,5 % et 3,7 % du PIB ; la disparition de la soulte de France-Télécom représentait 0,45 % de déficit supplémentaire. En prenant le niveau moyen de l'audit, cela fait 3,6 % + 0,45 %, soit, au total, une situation de départ supérieure à 4 %.
Depuis, j'ai entendu dire : "vous avez de la chance, la croissance repart, le budget devient facile à élaborer". Là encore, et malheureusement, l'argument est erroné. Oui, la croissance repart. Non, elle ne change quasiment rien à la préparation du budget.
Pourquoi ? Parce que les premières esquisses de la loi de finances pour 1998 avaient été préparées dès mars 1997 sur une hypothèse de croissance de 2,7 %. Nous sommes aujourd'hui à 3 %, soit 0,3 % de plus. Cela représente 24 MdF de richesse nationale supplémentaire. Les prélèvements d'État étant de 15 % environ, cela représente 3,6 MdF pour l'État... en théorie ! En pratique, en effet, la situation est différente : notre croissance est en partie liée aux exportations - qui n'acquittent pas de TVA - et, par ailleurs, des ressources fiscales importantes comme l'IR ou l'IS ont pour référence les revenus ou les bénéfices de l'année précédente.
Aussi, si le retour de la croissance est, sur le plan économique, déterminant à moyen terme, il est, sur le plan budgétaire, sans effet ou presque à court terme. La "manne providentielle" n'excédera guère 1 MdF. Il faut s'en réjouir. Mais on ne peut trouver là la cause qui permettrait d'expliquer que Lionel Jospin est en train de réussir une addition élémentaire quand Alain Juppé aurait été contraint de résoudre une équation sans solution.
Ainsi, le "budget impossible" pour 1998 reste un budget difficile. Un budget difficile ne peut être un budget indolore. Mais un budget difficile peut être un budget qui respecte les engagements pris devant le peuple. C'est ce que nous avons voulu faire. C'est ce à quoi nous sommes, je l'espère, parvenus.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 1 août 2002)