Déclaration de M. Alain Juppé, Premier ministre et président du RPR sur les choix de la majorité pour les élections législatives de 1997, notamment l'emploi, l'aide aux entreprises et la construction européenne, Marseille le 24 avril 1997.

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Circonstance : 1ère réunion publique de la campagne des élections législatives de 1997 à Marseille le 24 avril 1997

Texte intégral

Salut à Marseille, salut à la Provence, aux Alpes, à la Côte d'azur.
Salut à la France !
Mes chers amis, il y a quelques instants, un journaliste sympathique me disait : "pourquoi avez-vous décidé de commencer par Marseille ?" Eh bien ma réponse
est toute simple, parce que Marseille c'est l'enthousiasme, Marseille, c'est la générosité, Marseille, sous la conduite de J.-C. Gaudin et de R. Muselier,
c'est ce nouvel élan vers l'an 2000 que nous voulons donner à la France. En 1995, il y a maintenant deux ans, J. Chirac a fixé le cap. Vous vous en souvenez,
Nous avions commencé, comme l'a dit tout à l'heure J.-C. Gaudin, cette campagne ici même : "la France pour tous". "La France pour tous" c'est-à-dire l'esprit
d'entreprise, la cohésion sociale et vous savez que J. Chirac tient ce cap avec résolution. Nous avons d'abord franchi, dans l'action qu'il a souhaité
conduire, une première étape, une étape de redressement après le fiasco socialiste des années 90. Notre action de réforme a été engagée par Edouard Balladur
en 1993, c'était la cohabitation, vous vous en souvenez, et nous l'avons poursuivie depuis 1995, consolidée. Il est aujourd'hui atteint, il suffit pour s'en
convaincre de voir le jugement qui est porté sur notre pays par les grandes institutions européennes et internationales : la France est qualifiée dans le
peloton de tête des grands pays européens.
Si bien que tout à l'heure, en arrivant à Marseille lorsque je voyais certaines affiches sur les piliers de l'autoroute rédigées en ces termes "le socialisme
va relever la France", je me suis demandé si c'était un gag. Nous voici désormais engagés dans une nouvelle étape, l'étape de la marche en avant vers l'an
2000. Et je vous demande d'y réfléchir, sur les 1000 jours - et même un peu moins désormais - qui nous séparent de l'an 2000 ; plus de 300 risquaient d'être
occupés par cette période préélectorale qui était déjà engagée et dont nous savons tous bien quelles sont les conséquences : attentisme des entreprises et de
l'économie, ce qui n'est pas bon pour l'emploi, handicap pour les positions françaises dans les grandes négociations européennes de 1997 et de 1998. J.
Chirac a choisi de donner la parole aux Françaises et aux Français pour que la volonté populaire nous donne maintenant l'élan nécessaire, c'est le choix
démocratique par excellence et c'est le choix du courage.
Et ce soir, aujourd'hui, nous voyons clairement dans quels termes il se pose. François Léotard l'a dit tout à l'heure, marche arrière ou élan vers l'an 2000.
Ce n'est pas, comme semble le croire M. Jospin, le troisième tour de l'élection présidentielle. Ce n'est pas une sorte de repêchage de M. Jospin après ses
déboires vis-à-vis de J. Chirac, c'est un choix de majorité et donc c'est un choix de société.
Et ce choix de majorité, il est clair : c'est le choix entre le mouvement, la modernité, les changements que notre majorité RPR-UDF incarne et le
conservatisme et l'immobilisme que signifierait pour la France l'alliance du PS et du PC.
Là encore, mes chers amis, regardons un peu autour de nous, partout - ou à peu près - en Europe, la gauche a changé. Il n'y a guère qu'en France qu'elle
reste fidèle à ses dogmes et à ses pactes. Vous avez remarqué que l'un des tout derniers partis communistes du monde à s'appeler toujours communiste, c'est
le Parti communiste français. Et ceci n'est pas complètement indifférent parce que cela signifie que notre opposition, par ses alliances et ses idéologies
d'un autre âge, se condamne au conservatisme, c'est-à-dire à l'étatisme et au dirigisme. Je voudrais prendre un seul exemple pour ne pas être trop long,
celui de France Télécom. Mesdames et Messieurs les députés de la majorité que je salue ici et que je remercie de leur présence, s'il y a bien quelque chose
parmi beaucoup d'autres, dont vous pouvez être fiers, c'est d'avoir engagé une réforme en profondeur d'un secteur vital pour l'avenir qui est celui des
télécommunications françaises pour les mettre au premier rang de l'Europe et au premier rang du monde.
Or, qu'est-ce qu'il se passerait à en croire leurs leaders - encore qu'ils se contredisent de jours en jours, on a un peu de mal à s'y retrouver, mais enfin
je crois que cela va durer, il faut s'y habituer -, qu'est-ce qu'il se passerait en cas d'hypothétique victoire de l'opposition : marche arrière toute !
France Télécom renationalisée ou ré-étatisée, plus-exactement, ce qui veut dire que nous serions hors du jeu de la compétition mondiale. Il y aurait 50
milliards de francs à trouver pour compenser le manque à gagner, que le choix des salariés qui ont adhéré à cette réforme, serait brutalement remis en cause
et que l'usager, le client, qui va bénéficier en 1997 d'une baisse de 9 % de ses communications téléphoniques et de 9 % encore en 1998, grâce à cette
politique de rénovation, se verrait privé de cet avantage : un terrible recul pour la technologie française, pour l'industrie française, pour l'emploi
français.
La deuxième conséquence de cette alliance entre le PS et le PC que nous voyons s'affirmer de jour en jour, elle est également très grave pour l'avenir de
notre pays. Vous l'avez vu, par pur calcul électoral, ce qui n'est pas digne d'un homme d'Etat : M. Jospin prend le risque de bloquer la construction
européenne et pas simplement l'euro, l'ensemble du processus d'Union européenne, tout simplement parce que le Parti communiste n'aime pas ça, n'a jamais aimé
ça et continue à ne pas aimer ça. Je comprends le désarroi d'un certain nombre de socialistes qui voient ainsi braver leurs convictions pour le mauvais plat
de lentilles que leur propose R. Hue.
Comment imaginer dans ces conditions de confier la France de l'an 2000 à une coalition du PS et du PC. Je vais vous dire, j'en parlais avec F. Léotard tout à
l'heure lorsque nous arrivions, je lui rappelais qu'une grande chaîne de télévision nous proposait de débattre. Eh bien, lui et moi, ensemble, au nom de
notre majorité du RPR et de l'UDF, oui, nous sommes prêts à débattre à la télévision avec M. Jospin et M. Hue, côte à côte, puisqu'ils veulent gouverner côte
à côte.
Et alors nous pourrons leur parler de notre projet pour l'an 2000, c'est de cela que je voudrais aussi vous parler quelques instants ce soir parce que c'est
cela qui compte, c'est cela qui est important, c'est cela qui va se passer demain. Parce que vous n'en doutez pas, nous allons évidemment gagner !
Notre projet pour l'an 2000, c'est le projet d'une France moderne et équilibrée, entreprenante et fraternelle, décidée à défendre ses intérêts en Europe. Une
France qui d'abord modernisera son Etat, François Léotard l'a dit tout à l'heure : l'Etat, en France, c'est important. Cela a un peu structuré toute notre
histoire et toute notre société. Il faut donc s'en occuper et faire en sorte qu'il soit moderne. Un Etat moderne, cela veut dire quoi ? Cela veut dire
d'abord un Etat fort qui réponde à ce besoin d'autorité et de protection légitime que nous sentons s'exprimer autour de nous, dans toutes les questions de
sécurité et de justice. Nous savons que, dans ce domaine, nos adversaires sont bien incapables de répondre à cette aspiration-là. Là aussi, je voudrais
prendre un exemple, celui de la lutte contre l'immigration illégale et le travail clandestin. On voit bien la différence là ! Elle est claire la différence !
1989, déjà, c'est une sorte d'obsession chez eux : abrogation de la loi Pasqua-Pandraud et on a vu le résultat que cela a donné dans les années qui ont
suivi. Et puis aujourd'hui à nouveau toujours la même obsession : abrogation des lois Pasqua-Debré qui ont reçu - la loi Debré tout récemment, aujourd'hui
même, à quelques détails près - le feu vert du Conseil constitutionnel parce que ce sont des lois de justice et d'équilibre.
Alors là, la différence on la voit bien, on sait à qui on peut faire confiance pour que l'Etat assume ses responsabilités régaliennes, c'est-à-dire qu'il
apporte à ses citoyens la paix publique, la sécurité et aussi la justice. Dans ce domaine, nous devons faire mieux, nous avons engagé, sous le savez, nous
projetons d'engager une réforme de la justice pour arriver à deux résultats : d'abord faire en sorte que le justiciable qui a affaire à la justice n'attende
pas des années avant d'être jugé mais que la justice soit plus rapide, plus simple, plus accessible. Et ensuite que se dissipe une bonne fois pour toutes les
doutes qui peuvent subsister sur le lien entre le pouvoir politique et la justice parce qu'il faut, dans notre pays, résolument - et nous y sommes décidés -
restaurer la morale et l'exemplarité.
Mais moderniser l'Etat, ce n'est pas simplement le rendre plus fort là où il doit assumer ses responsabilités, c'est aussi faire en sorte que cet Etat
moderne respecte mieux le citoyen. Et vous savez qu'il y a bien des domaines où l'Etat n'a que faire et où il paralyse finalement la vie quotidienne ou
l'initiative du citoyen. Il nous faut donc construire ensemble une nouvelle démocratie, qui réponde à deux qualités nouvelles. D'abord la proximité : il faut
que le pouvoir, l'autorité, la responsabilité soient plus proches du terrain, que l'on puisse discuter, que l'on puisse dialoguer, que l'on puisse être
associé aux décisions qui nous nous concernent au jour le jour et cela, malheureusement, ce n'est pas la bureaucratie parisienne qui le permet. Nous aurons
donc besoin d'une nouvelle vague de décentralisation, d'une nouvelle vague de déconcentration, d'une nouvelle vague de simplification des relations entre
l'Etat et le citoyen.
Voilà donc notre première ambition : moderniser l'Etat pour qu'il soit fort là où il doit être fort, pour que l'administration soit proche et accessible là
où le citoyen doit pouvoir reprendre du pouvoir.
Notre deuxième ambition, je vous l'ai dit tout à l'heure, c'est de libérer les initiatives qui sont trop souvent paralysées dans notre pays. Et ce n'est pas
pour le plaisir, c'est parce que nous avons, nous tous qui sommes ici, la conviction que la vraie réponse au problème du chômage, c'est la création
d'entreprises, c'est le développement de l'entreprise, c'est l'innovation, c'est l'investissement, bref c'est la liberté et c'est l'initiative ! Et ce n'est
pas un choix idéologique, c'est un choix par réalisme et par connaissance de ce qu'est la vie de chaque jour.
Nous avons déjà fait beaucoup pour l'emploi, nous avons fait des choses pour aménager, réduire le temps de travail, favoriser la formation des jeunes en
alternance, développer les emplois de proximité, alléger les charges, pour les petites et moyennes entreprises en particulier. Tout ceci commence à donner
des résultats mais pas assez. Il faut aller plus loin, plus vite, plus fort, pas dans le sens de la marche arrière comme on nous le propose en créant,
paraît-il, 700 000 emplois publics, c'est-à-dire des impôts supplémentaires et donc en réalité des initiatives en moins, mais en franchissant une nouvelle
étape. Et nous vous proposerons, le moment venu, lorsque cette nouvelle majorité que nous allons constituer sera en place, un véritable plan de cinq ans pour
poursuivre la baisse des impôts et donc maîtriser les dépenses car vous savez bien que l'on ne peut pas croire les démagogues qui veulent demander plus à
l'impôt et moins aux contribuables. Cela, ça n'existe pas. Si on veut donc baisser les impôts, il faut maîtriser les dépenses.
Nous aurons aussi un plan de cinq ans pour alléger les formalités, les tracasseries, les freins à l'embauche. Un plan de cinq ans pour encourager à
l'initiative, à l'innovation, à la création de ce que l'on appelle les spécialistes capital-risque, c'est-à-dire l'argent qui permet à quelqu'un qui veut
créer son entreprise de démarrer et ensuite de se développer. Cela, ça ne fonctionne pas bien en France aujourd'hui.
Enfin, nous réfléchirons ensemble à la manière de mieux prendre en compte l'originalité d'une entreprise dont on ne parle pas beaucoup : c'est la toute
petite entreprise qui pourtant représente dans notre pays des millions d'emplois. L'entreprise qui a un, deux, trois salariés mais quand on les additionne
toutes, cela fait des millions d'emplois. Or on les traite exactement comme France Télécom, Péchiney ou le Crédit Lyonnais - enfin, ce n'est qu'un exemple.
Il faut donc que nous élaborions ensemble, avec les salariés, avec les partenaires sociaux, un statut de la toute petite entreprise qui lui permette d'être
moins handicapée dans la compétition qu'elle ne l'est aujourd'hui.
Alors ce programme, je ne sais pas si c'est du libéralisme, de l'hyper-libéralisme ou l'hypo-libéralisme - moi, je ne suis pas un théoricien, j'essaie
simplement de réagir avec bon sens -, je sais que cela consiste à libérer l'initiative et que c'est donc bon pour l'emploi et pour les salariés. Et je
voudrais vous citer une phrase que j'ai retrouvée dans ce que disait le général de Gaulle à Marseille, ici, en 1948 - pas ici mais au Parc Chaillot - un
demi-siècle, je vous le cite : "nous voulons, nous, - c'était déjà l'enjeu - que le Budget de l'Etat soit mis en équilibre non par l'accroissement des impôts
mais par la compression des dépenses, la restauration de l'autorité à tous les échelons administratifs, la mise en ordre des entreprises nationalisées, la
réforme du fonctionnement des assurances sociales, nous voulons que la production française soit accrue, notamment par l'avènement de l'association au lieu
et place de la lutte des classes ou de l'exploitation de l'homme par l'homme. Oui l'association dont nous attendons un grand élan de productivité et un
climat social nouveau" : voilà ce que disait le général de Gaulle, voilà d'une certaine manière ce qui reste actuel aujourd'hui.
"Climat social nouveau", disait le général, nous avons là aussi un défi à relever. Après la modernisation de l'Etat et la libération des initiatives, il nous
faut améliorer, rénover, développer notre modèle social parce que nous avons en France une certaine conception du fonctionnement de la société. Et nous
n'avons pas envie d'en changer fondamentalement pour adopter le modèle américain ou britannique ou je ne sais quoi. Nous sommes français, fiers de l'être et
avec la ferme intention de le rester. Et ce modèle social, il fait partie de cette culture française qui est la nôtre. Alors il se caractérise par quoi ? Par
l'attachement à la protection sociale qui a été construit pendant 10, 20, 30, 40 ans, par une certaine conception du dialogue social et des relations dans
l'entreprise et aussi par une certaine conception du service public qui doit être le même pour tous.
Et cela nous y tenons et nous voulons même que cela fasse école en Europe. Nous avons engagé des réformes pour améliorer et rénover ce modèle social : la
réforme de l'assurance maladie, la réforme de la politique familiale, la réforme de l'enseignement supérieur, demain celle de la formation professionnelle.
Et face à cela, que nous propose-t-on ? Mystère. Quelqu'un peut-il me dire ce que ferait une éventuelle majorité PS-PC en matière de sécurité sociale et
d'assurance maladie ? Quand on les écoute, c'est le désarroi le plus total, ou alors la surenchère de distribution d'allocations de toutes sortes, c'est-à-
dire une fuis de plus l'appel aux contribuables.
La nouvelle étape que nous avons à franchir entre nous, c'est une étape de fraternité et de responsabilité. Il nous faudra être plus imaginatif, notamment
pour améliorer les relations du travail au sein de l'entreprise, développer le dialogue social, inventer de nouvelles formes de discussion qui évitent le
recours systématique au conflit ou à la grève. Et nous sommes en train d'y réfléchir, nous aurons, dans ce sens, des initiatives fortes à prendre.
Il nous faut aussi, comme je le disais avant-hier devant les parlementaires réunis à Paris, réfléchir aux effets du modèle ou plus exactement de certains
aspects de ce modèle tel qu'il s'est développé au fil des ans. Est-ce que nous ne sommes pas restés trop longtemps, en matière sociale, exclusivement dans
une logique d'assistance et de distribution d'allocations, ce qui démotive et détourne du travail ?
Est-ce qu'il ne faut pas, tout en restant attachés à la solidarité, tout en nous montrant décidés à faire des efforts plus grands encore vis-à-vis de ceux
qui en ont besoin - car c'est cela aussi le modèle français - chercher une forme nouvelle qui pousse à la réinsertion sociale, à la reprise d'un travail ?
C'est toute la philosophie de ce grand texte que nous avons préparé - qui n'est pas voté malheureusement, dont la discussion s'interrompt - mais qui sera un
des grands défis de demain : la loi de cohésion sociale.
Il repose précisément sur cette idée que je viens d'évoquer. Permettez-moi de redire ce que je disais hier, je crois, à ce sujet : quand nous avons présenté
cette loi qui est très innovante, très audacieuse, très imaginative, on nous a dit : on ne sait pas, ce n'est pas bien, ce n'est pas cela. On a commencé à la
discuter et du fait de la dissolution, sa discussion a été interrompue. Et alors que n'ai-je pas entendu de ces censeurs les plus sévères : catastrophe, la
loi ne sera pas votée. J'en ai tiré la conclusion que c'était une bonne loi. C'est une bonne loi, c'est une très bonne loi et nous prenons l'engagement
demain, après les élections de la remettre immédiatement à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. De même que demain, nous reprendrons, nous continuerons,
nous amplifierons quelques uns des grands combats que nous avons engagés et auxquels je tiens personnellement toujours au titre de cette solidarité, de cette
fraternité. Je pense à cette grande cause nationale que j'ai voulue avec X. Emannuelli, la cause de la protection de l'enfance maltraitée. Voilà quelque
chose qui ne peut pas ne pas nous toucher, chacune et chacun d'entre nous au fond de notre coeur. Et la loi, là encore, que nous avons préparée pour réprimer
- parce qu'il y a des cas où il faut réprimer - ceux qui se livrent à des abus sexuels ou à des violences contre les enfants - sera aussi une priorité de
notre future législature.
Enfin, quatrième grand objectif, quatrième grand engagement de cette majorité qui brigue vos suffrages : il faut que nous mettions toute notre énergie à
défendre les intérêts de la France en Europe dans les années qui viennent. Et pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté dans ce domaine, moi, je dis "vive l'Europe
!", parce que j'ai la conviction que c'est une chance pour la France. Et je sais que je serai compris. S'il y a des agriculteurs dans la salle, ils savent
très bien ce qu'ils doivent à la construction européenne depuis 30 ou 40 ans et à la politique agricole commune. Nous n'en serions pas là où nous en sommes
aujourd'hui s'il n'y avait pas eu l'Europe. Et tous les salariés qui sont ici savent sans doute qu'un sur quatre parmi eux - peut-être même un sur trois
aujourd'hui - a du travail parce que son entreprise exporte et que ces exportations vont pour l'essentiel en Europe. Et elles vont en Europe parce qu'il n'y
a plus de barrières douanières entre ces pays et nous. C'est un fantastique atout pour notre prospérité et pour notre développement économique. Et voilà
pourquoi je dis : oui vive l'Europe.
Alors cette Europe, elle est en mutation. Elle va complètement changer dans les cinq ans qui viennent - je ne sais pas si on en a bien conscience - tout
simplement parce qu'elle va s'élargir. On ne peut plus rester dans un petit club fermé. Il y a toutes les nouvelles démocraties qui frappent à la porte et on
va devenir la grande Europe. Je crois que c'est bien et je crois que cela peut être un atout, à condition bien sur d'éviter que cette grande Europe ne
s'affaiblisse et d'y faire les réformes nécessaires : la réforme des institutions qui doivent devenir plus proches, moins bureaucratiques ; la réforme de la
monnaie - pour avoir une monnaie unique à l'égal du dollar et du yen -; la réforme également de la sécurité européenne pour que nous assumions mieux nos
responsabilités. Et puis cette volonté si bien exprimée par J. Chirac de donner à la construction européenne une dimension humaine, une dimension sociale
qu'elle n'a pas encore aujourd'hui. Voilà ce qui est en cause et tout de suite puisque les discussions vont avoir lieu en juillet 1997, fin 1997 et début
1998. Et pour cela - c'est l'une des vertus majeures de la dissolution -, il faut que la France, son Président bien sûr, mais aussi son Gouvernement soient
en position de force pour faire en sorte que nos intérêts dans cette Europe soient défendus efficacement comme ils doivent l'être. Voilà aussi l'engagement
que nous prenons devant vous.
Mes chers amis, les campagnes électorales ont ceci de bon - et c'est la démocratie, qu'elles permettent aux Français d'y voir plus clair sur les intentions
de chacun. C'est un grand moment une campagne électorale. C'est un moment de dialogue, de contact, de décision. Et je voudrais dire à chaque candidate et
chaque candidat qui sont venus de toutes les régions, de tous les départements de cette région que nous sommes à leurs côtés et que nous allons tout faire
pour les aider dans ce combat qu'ils ont entrepris. En fait ils le gagneront d'abord grâce à eux-mêmes, à leur mérite, à leur proximité sur le terrain. Mais
nous sommes solidaires et je vous, demande de les applaudir tous dans le combat qu'ils vont mener.
Depuis quelques jours, on comprend mieux ce que signifierait une éventuelle - je préfère dire hypothétique - alternance. Les socialistes puissamment aidés
par leurs alliés communistes sans les voix desquels ils ne peuvent escompter la moindre majorité, se trompent de siècle. C'est à se demander s'ils voient le
monde tel qu'il est. Ils veulent si on en croit leurs chefs rétablir le service militaire obligatoire, arrêter les privatisations et même renationaliser sans
doute pour nous préparer quelques nouveaux Crédit Lyonnais, abroger les lois Pasqua-Debré contre l'immigration illégale, remettre en cause l'Union
européenne, j'en passe et des meilleurs, bref ils se trompent de siècle.
Quant à nous, l'union de L'UDF et du RPR, vous savez le nouvel élan que nous voulons donner à la France pour la conduire vers l'an 2000. Notre combat - et je
terminerai par là - est aussi, et peut-être surtout, un combat pour des valeurs. On se bat bien sûr pour la prospérité économique, on se bat aussi pour des
valeurs. Ces valeurs, ce sont les valeurs républicaines : la liberté, l'égalité, la fraternité, la laïcité ; des valeurs actuelles, modernes. Ce sont aussi
les valeurs humanistes : le respect de la personne humaine, la tolérance, l'ouverture d'esprit, le refus de la démagogie simplificatrice. Et ce sont enfin
les valeurs patriotiques : l'amour de la France, la fierté d'être Français, l'attachement à notre culture, à notre histoire, à notre langue, à notre terre,
bref à notre identité, à ce que nous sommes. C'est tout cela qui est en cause aujourd'hui et c'est pour tout cela que je vous appelle à vous mobiliser, je
l'ai dit, avec pugnacité - parce que comme l'opposition n'a pas grand chose à proposer, elle a choisi de se conduire avec véhémence, brutalité et agressivité
vis-à-vis de nous, comme si cela tenait lieu de programme -, avec confiance aussi et dans l'union. Dans cette union dont nous donnons ici l'image sur cette
tribune, dont vous donnez l'image dans cette salle. J'ai particulièrement été heureux de voir se lever tout à l'heure côte-à-côte, tout à fait mélangés des
petits drapeaux RPR et PR. Les jeunes qui sont là au coude à coude et unis.
J'ai souhaité enfin que cette campagne se déroule dans l'enthousiasme et dans la joie. Et on s'est un peu moqué, je crois, ce matin, de ce que j'ai dit - "il
faut que ce soit une campagne joyeuse et heureuse". Eh bien je persiste et je signe. Je sais qu'en France il y a du malheur, de la misère, du chômage et que
nous devons être solidaires des Français qui souffrent. Mais est-ce que c'est en étant nous-mêmes abattus, désespérés, moroses que nous pouvons les aider ?
C'est au contraire en donnant à notre pays l'élan dont il a besoin et donc en nous montrons nous-mêmes confiants - confiants dans ce à quoi nous croyons,
confiants dans ce que nous allons faire -, enthousiastes, et donc joyeux, que nous pourrons donner à la France l'élan vers l'an 2000. Et je vous demande donc
tous, mes chers amis, ce soir, il nous faut donner à J. Chirac les moyens d'accomplir sa tâche dans les cinq ans qui viennent - j'allais dire presque dans
les douze ans qui viennent -, donnons lui donc le temps et l'élan.Vive J. Chirac, Vive la République et vive la France !