Déclaration de Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, sur l'adaptation de l'habitat aux handicapés et aux personnes âgées et le maintien à domicile des personnes âgées, Bordeaux le 19 septembre 2001.

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Circonstance : Colloque pour le cinquantenaire des PACT-ARIM "Adapter l'habitat existant aux usages" à Bordeaux le 19 septembre 2001

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec un réel plaisir que je me trouve parmi vous aujourd'hui, pour la clôture de cette journée bordelaise, centrée sur le thème de l'adaptation de l'habitat existant.
" Adapter l'habitat existant aux usages ". Voilà à mon sens un objectif particulièrement bien choisi ! C'est une façon de rappeler qu'il faut " adapter l'habitat existant aux usagers ", et non l'inverse ! et pourtant, combien de personnes - et pas seulement âgées - sont gênées dans leur vie quotidienne, et doivent " s'adapter " à un logement qui ne leur est plus accessible sans aide extérieure, à des portes qui ne permettent pas de passer en fauteuil roulant, à un environnement qui ne leur convient plus, à des sanitaires conçus uniquement pour gens bien portants, à l'absence de desserte par les transports en commun, alors que l'on éprouve de plus en plus de difficultés à conduire, ...etc
Sur cet objectif comme sur d'autres, l'action de votre mouvement rejoint mon travail de ministre et celui du gouvernement tout entier, c'est pourquoi je tenais à être parmi vous ce soir.
La rencontre d'aujourd'hui inaugure un cycle de réunions à Lille, Lyon et Paris, dans le cadre de la célébration des 50 ans du PACT-ARIM. Votre mouvement, riche de milliers d'administrateurs et de salariés présents sur l'ensemble du champ social, a su prendre en compte l'aide aux personnes et l'évolution de notre société.
Je sais combien vous vous mobilisez pour adapter l'habitat au vieillissement annoncé de la population française. Ma présence est une façon de saluer votre action, tant à l'égard des décideurs locaux que des caisses de retraite ou des fédérations d'aide à domicile.
Je voudrais rendre hommage à l'apport décisif qui a été celui du mouvement des PACT à notre approche du logement social. Les PACT-ARIM se sont depuis très longtemps engagés, à partir de premières initiatives dans l'ouest de la France, dans des actions d'aide à la réhabilitation d'habitations rurales dispersées occupées par des personnes âgées à faible ressources. Les PACT ont été parmi les premiers à comprendre l'intérêt social qui s'attachait à la réhabilitation de logements inconfortables au coeur des villes, dans des vieux quartiers de Paris, Marseille ou Lyon, ou dans les "courées" du Nord.
Vos associations ont largement contribué à nous faire prendre conscience que le progrès des conditions de vie et de logement ne passe pas nécessairement par le déracinement et le transfert vers une ZUP périphérique, ou une maison de retraite pour les plus âgés. Si l'on parle aujourd'hui de "parc social de fait" pour les logements dégradés dans de vieux quartiers urbains, accueillant des personnes démunies exclues de l'habitat social, c'est pour une part importante à votre mouvement qu'on le doit.
Et puisque vous croyez, comme moi, à une société au service et à l'écoute des individus, quelques soient leurs différences ou leurs difficultés, je voudrais en quelques mots vous faire partager mon engagement de faire changer le regard de la société sur le vieillissement.
Cet engagement, cette motivation, je les conçois autour de deux axes :
construire une politique de prise en charge des personnes âgées en perte d'autonomie,
assurer une participation des personnes âgées à la vie sociale de la collectivité.
Je suis fière des mesures prises par le Gouvernement en faveur des personnes âgées et j'ai la ferme conviction, qu'aux côtés des 35 heures, de la CMU ou des emplois jeunes, l'APA constitue l'une des grandes lois sociales des dernières décennies :
elle institue un droit universel, accessible à tous, quelles que soient leurs ressources,
un droit égal, avec la détermination de montants d'aide édités au plan national,
un droit objectif adapté, puisque basé sur l'élaboration d'un plan d'aide qui tienne réellement compte de la situation individuelle.
L'APA va pouvoir apporter à près de 800.000 personnes en perte d'autonomie, des aides importantes, mobilisant 16,5 milliards de francs en 2001, et 23 milliards dans 3 ans.
En particulier, je tiens à souligner que ce plan d'aide individualisé permettra à la personne âgée de financer des services ou des travaux visant l'adaptation de son habitat
en finançant des frais de transports ou un accueil temporaire,
en s'attachant les services de spécialistes tels qu'ergothérapeutes ou techniciens du bâtiment,
en entreprenant les éventuels travaux nécessaires pour rendre accessible son logement, ou celui des proches qui l'hébergent,
Alors que l'ancienne PSD limitait à 10% des fonds versés les sommes investies dans l'adaptation du logement, l'APA non seulement supprime ce plafond, mais pourra être versée en une fois pour faire face à une dépense importante concernant le bâti.
Ces dépenses figureront dans un plan d'aide élaboré par une équipe médico-sociale départementale. La grille AGGIR, outil d'évaluation de l'autonomie sera modifiée, afin de mieux prendre en compte les maladies neurovégétatives ou la cécité.
J'insiste, ce plan d'aide adapté donc aux besoins de la personne doit être conçu avec et autour de la personne, c'est à dire en tenant compte de son environnement physique mais aussi affectif, familial ou social. Je tiens comme important que les personnes qui relèvent de GIR 5 et 6 bénéficient également d'un plan d'aide. Ainsi une prévention efficace pourra-t-elle être développée.
C'est en ce sens, je crois, que l'APA est la plus innovante. Souvenons-nous que la personne âgée est, comme nous tous ici, une personne complexe, avec ses joies, ses peines et ses aspirations que nous devons savoir écouter et comprendre.
Si la mise en uvre de la nouvelle allocation constitue le point névralgique de la loi, d'autres dispositions de ce texte méritent d'être citées.
Il s'agit tout d'abord des éléments relatifs à l'aide à domicile.
Ce secteur a trop longtemps pâti d'un manque d'ambition ou de volonté des décideurs. C'est la raison pour laquelle il était urgent d'agir.
C'est en ce sens que la loi propose la création d'un fonds de modernisation de l'aide à domicile doté de 500 millions de francs. Le développement de la qualité du service sera assuré par la mise en place d'une formation adaptée et d'un nouveau diplôme.
Parce que dans leur immense majorité les personnes âgées souhaitent rester chez elles, le maintien à domicile est la priorité de la politique nationale. Dans une visée prospectrice, nous élargirons encore le champ du maintien à domicile en utilisant trois leviers : la professionnalisation de l'aide à domicile, grâce notamment au fonds de modernisation ; la coordination gérontologique autour de la personne ; l'adaptation de son habitat.
Maintenir une personne à domicile ne signifie pas la cloîtrer dans son logement, mais au contraire lui permettre autant que possible de le quitter et d'y revenir pour vivre sa vie de tous les jours : c'est tout l'enjeu de l'accessibilité au sens large.
Les Ministères de l'Emploi et de la solidarité et de l'Équipement travaillent au quotidien pour développer les offres de services financiers et techniques au service des personnes âgées. Une convention a ainsi été signée en février 2001. Elle associe également l'ANAH et la CNAV, et prévoit notamment des actions de sensibilisation vers le public et les professionnels.
Un colloque se tiendra en février 2002 sur le thème de l'accessibilité , co-piloté par les deux Ministères, présentant à la fois les difficultés des personnes handicapées et celles, si nombreuses, des personnes âgées en perte d'autonomie. Parmi les 6 axes retenus figure la problématique du " se loger et habiter ", les autre étant se déplacer, apprendre, travailler, vivre ses loisirs ou participer.
Les "sites pour la vie autonome", qui seront au nombre de 1 par département en 2003, permettront de constituer de véritables Centres Ressources pour les personnes à mobilité réduite, ou souffrant d'un habitat inadapté, qu'elle que soit l'origine de leurs handicaps. Les PACT sont étroitement associés au développement de ce nouvel outil.
" Adapter l'habitat ", c'est ouvrir une thématique large, englobant à la fois les formes individuelles et collectives de l'hébergement.
Parler d'habitat, c'est mettre l'habitant au coeur de notre projet, quel que soit son domicile, individuel ou collectif, qu'il soit propriétaire ou locataire, c'est reconsidérer l'ensemble de nos dispositifs de financement pour les harmoniser et le coordonner, c'est envisager la création d'un fonds d'intervention d'urgence au niveau départemental, c'est intégrer un volet habitat dans les schémas gérontologiques. Sur tous ces projets, je travaille avec Marie-Noëlle Lienemann afin que des propositions concrètes puissent être rapidement mises en oeuvre, pour simplifier les réponses apportées aux usagers.
Adapter l'habitat, c'est aussi accompagner l'évolution de petites structures de type "cantou" ou "Marpa", plus proches du domicile collectif que de l'hébergement institutionnel classique. J'ai confié sur ce point une mission de réflexion et de proposition à Jean-Michel PALACH. Je suis convaincu qu'il nous faut développer tous les maillons intermédiaires entre le domicile et l'hébergement traditionnel ; cela veut dire appuyer les petites unités de vie, faciliter l'accueil de jour ou l'accueil temporaire en établissement, assurer, notamment grâce à une bonne coordination gérontologique, la fourniture de tous les services en prestations nécessaires au maintien à domicile. Qu'on parte du domicile ou de l'établissement, il faut toujours assurer la conjonction d'un lieu de vie qui puisse être perçu comme un "chez soi" et de l'ensemble des prestations nécessaires à la compensation des handicaps et à une vie aussi autonome que possible.
La politique que nous menons en faveur des personnes âgées repose également sur l'information des personnes et la coordination des acteurs.
La mise en place de centres locaux d'information et de coordination (CLIC) permettra d'assurer un accueil personnalisé, gratuit, de proximité, aux personnes âgées et à leur famille.
Lieu d'écoute et de dialogue, ce centre de ressources doit prendre en compte la complexité de la demande individuelle - J'entends que l'axe logement y soit présent. La personne âgée doit pouvoir obtenir auprès de son CLIC toute l'information dont elle a besoin pour entreprendre l'adaptation de son habitat ; je compte sur les PACT-ARIM pour nous y aider, en apportant leurs compétences en la matière ! Je soulignerai encore une fois l'intérêt d'une articulation avec les sites pour la vie autonome, et l'importance d'une mise en relation avec des techniciens tels que les ergothérapeutes.
J'attends beaucoup de ces CLIC, qui devraient au terme du plan, être un maillage de 1000 sur le territoire national, afin de fédérer les initiatives locales. Si nous voulons que nos aînés bénéficient des aides que nous leur devons, c'est par une synergie entre administrations, fédérations d'établissement, caisses de retraite, services d'aide à domicile, conseils généraux, CCAS, CODERPA, mais aussi organismes de l'habitat, et les PACT-ARIM , en premier lieu que nous y parviendrons.
Votre mouvement partage beaucoup de nos projets dans le vaste champ du social.
C'est pourquoi, au-delà des subventions traditionnelles du Ministère, il est apparu nécessaire de finaliser ce chemin commun par une convention pour les années à venir.
Ainsi ai-je le plaisir de vous confirmer la signature dans les jours qui viennent d'une convention triennale 2001-2003, renouvelant le soutien du Ministère de l'Emploi et de la Solidarité à la FNC-PACT ARIM, pour la poursuite des programmes en faveur du logement des jeunes, de l'habitat des personnes âgées, et des personnes handicapées, ou pour l'insertion des personnes défavorisées.
Deux programmes nouveaux sont également soutenus concernant les gens du voyage, ou la filière d'auto-réhabilitation.
Cette convention permettra un financement à hauteur de 3.000.000 F de l'ensemble des actions.
J'ai plaisir à souligner qu'il s'agit notamment, en ce qui concerne les personnes âgées :
de clairement positionner l'offre de formation du PACT ARIM dans le domaine de l'adaptation de l'habitat auprès des professionnels du réseau,
de créer un groupe de suivi des démarches gérontologiques articulant une politique de l'habitat,
de sensibiliser les acteurs par la création de logements témoins,
enfin de favoriser des partenariats avec UNADMR ou MSA.
Cette convention est le symbole du travail que nous avons engagé en commun, elle est le fruit d'un échange fructueux des compétences, elle affirme la place que tient la FN PACT ARIM dans tous les secteurs où le besoin d'habitat s'avère structurant d'une politique sociale.
Parce que j'apprécie votre travail, parce que je connais votre histoire, parce que je défends une politique qui peut vous ouvrir de nouveaux espaces, je tenais à être avec vous aujourd'hui.
"Un toit pour chacun", cette belle devise que vous avez choisi, c'est la mixité sociale dans l'habitat, mais c'est aussi la mixité des âges. Je sais pouvoir compter sur vous pour construire les conditions d'un "habitat pour tous les âges", dans une société ouverte à tous.

(Source http://www.social.gouv.fr, le 30 octobre 2001)