Interview de Mme Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, à "20 minutes" le 3 décembre 2015, sur l'avancée des négociations engagées lors de la conférence sur le climat (COP 21).

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Q - On a entendu lundi des déclarations volontaristes des chefs d'État pour parvenir à un accord, mais aussi des propos dissonants. Quand le Premier ministre indien dit qu'un accord ne peut pas imposer la fin des énergies fossiles, est-ce un élément qui pourrait bloquer les négociations ?
R - Le Premier ministre indien, Narendra Modi, voulait dire qu'on ne peut pas, du jour au lendemain, mettre fin au processus de développement d'un pays où, dans certaines régions, 70% de la population n'a pas accès à l'électricité. Le problème se pose pour d'autres pays. Ils craignent que si on arrête l'exploitation des énergies fossiles, on freine le développement. Il est donc impératif de pouvoir faire baisser le prix des énergies renouvelables pour assurer à ces pays le même niveau de développement que celui qu'ont atteint les pays industrialisés en utilisant, par le passé, les énergies fossiles.
Q - La France s'est engagée à doubler ses investissements dans les énergies propres, concrètement comment cela se traduira-t-il ?
R - Cela passera par le programme d'investissement d'avenir qui, d'ici à 2020, disposera de 400 millions d'euros par an. Ce budget ira à la recherche sur les technologies innovantes en matière de mobilité, d'énergies, d'économie circulaire ou d'efficacité énergétique.
Q - Si on parvient à un accord, qu'est-ce qui changera en France ? Verra-t-on plus de mesures écologiques ?
R - Un accord à la COP21 permettrait d'accélérer la transition énergétique. La loi a été votée, mais des rapports de force peuvent se remettre en mouvement pour que les textes d'application soient moins ambitieux, je constate par exemple des réticences sur les textes concernant le bâtiment. Ensuite, nous allons monter en puissance sur les territoires à énergie positive, qui ont eu un grand succès. On en compte 250 aujourd'hui et je veux arriver à 500. Enfin, je vais accélérer les appels d'offres pour les énergies renouvelables.
Q - Pour accueillir la COP21, la France se voulait exemplaire en matière d'écologie. Mais il reste des points noirs comme l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, l'abandon de l'écotaxe, le retard pris sur le projet de loi pour la biodiversité...
R - Le président a annoncé que la loi sur la biodiversité serait inscrite à l'ordre du jour du Sénat au premier trimestre 2016. Sur les transports, je vais lancer un appel à projets pour la voiture électrique bon marché. Une voiture qui coûterait de 5.000 à 7.000 euros grâce à un système de location de la batterie. Quant à l'écotaxe, elle a finalement été faite plus intelligemment avec la taxe sur le gasoil. Sur l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, il faudra trouver une solution et renouer le dialogue.
Q - Pensez-vous que tous les chefs d'État qui étaient présents lundi sont vraiment prêts à regarder leurs problèmes différemment, en ne perdant pas de vue l'écologie ?
R - François Hollande s'est impliqué avec beaucoup de détermination et d'authenticité. Chez les autres chefs d'État, ça bouge aussi. Un langage universel sur l'écologie a émergé. Tout le monde sait maintenant ce que sont l'effet de serre, le réchauffement climatique, la déforestation et la biodiversité.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 7 décembre 2015