Interview de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, à la presse française le 13 septembre 2001 à Moscou, sur les conséquences des attentats aux Etats-Unis et la réplique américaine, la mise en oeuvre de l'article 5 du traité de l'Otan et la solidarité politique des membres de l'Alliance avec les Etats-Unis, la lutte contre le terrorisme.

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Circonstance : Voyage en Russie de M. Hubert Védrine le 13 septembre 2001

Média : Agence Algérie Presse Service - Presse

Texte intégral

Q - Ressort-il une position commune entre la France et la Russie de votre entretien avec Igor Ivanov sur l'hypothèse d'une réplique des Etats-Unis aux attentats d'avant-hier ?
R - Ce n'est pas le terrain sur lequel nous nous sommes situés. C'était un rendez-vous pris depuis longtemps, nous avions beaucoup de sujets à traiter, naturellement, nous avons parlé des conséquences de ces horribles attentats du 11 septembre et vous avez pu constater que les dirigeants des deux pays, les peuples des deux pays ont immédiatement manifesté une profonde compassion et une grande solidarité humaine à l'égard du peuple américain. C'est la première chose. Maintenant, je ne peux pas aller plus vite que les événements, les Américains eux-mêmes ne sont pas sûrs de ce qui s'est passé, en tout cas des commanditaires de ces actions. Je pense que, quand ils en sauront plus, ils feront part à leurs partenaires dans le reste du monde des conclusions auxquelles cette enquête aura aboutie. A ce moment, on verra quelle est la situation.
Q - On a l'impression que la Russie se montre plus pressée que d'autres pays de tirer des conséquences de ces événements.
R - Non, ils n'ont pas fait de propositions concrètes parce qu'ils ne savent pas plus que les autres ce que sera la suite. Ce que nous savons tous, c'est que le président Bush, après ce qu'il a qualifié de guerre, a annoncé une réplique américaine - et on peut le comprendre - mais on ne sait pas ni quand, ni comment.
Q - Vous êtes d'accord sur la lecture faite aujourd'hui du fameux article 5 disant que tous les pays membres de l'OTAN peuvent répliquer à un acte terroriste comme celui qui a été commis ?
R - Il n'y a pas à interpréter l'article 5, il est très clair. L'article 5 dit que quand il y a une agression contre un des pays membres sur son territoire, c'est une agression contre tous les membres de l'Alliance, c'est d'ailleurs la définition même d'une alliance, en réalité. Et l'article 5 indique que c'est chaque pays qui détermine ce qu'il doit faire par rapport à cette situation. Les membres de l'Alliance ont exprimé politiquement leur solidarité en constatant - ce qui est une évidence - qu'il y a eu cette agression contre le territoire des Etats-Unis. Pour le moment, nous n'en sommes pas plus loin, donc je ne peux pas pousser mon commentaire plus loin, ce soir.
Q - Comment la Russie peut être associée à un plan de représailles ? A des consultations ?
R - Je ne crois pas que la question soit posée en ces termes, ni par les Américains qui n'ont pas encore de plan, à ma connaissance, ni par les Russes - ni même de consultations - par rapport à un plan qui n'existe pas. Ce qui a été exprimé par les membres de l'OTAN, tous les Européens, par les Russes, par beaucoup de pays arabes aussi, par d'autres pays dans le monde, c'est une volonté globale, commune, de lutter contre le terrorisme. Ce qui, naturellement, pour être efficace doit prendre plusieurs aspects. Le Conseil de sécurité des Nations unies peut être d'ailleurs le lieu adéquat pour que cette volonté universelle soit réaffirmée. Pour le moment on en est là.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 septembre 2001)