Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Notre débat sur le budget 2002 intervient dans des circonstances singulières. Le 11 septembre, une organisation criminelle, fondée sur les noces tragiques de l'intégrisme et de l'argent, a lancé la première offensive de régression totale en ce nouveau siècle. En ce moment même, une action militaire est engagée en réponse à ces attentats meurtriers. Ces événements, aux conséquences humaines, diplomatiques, politiques considérables, nous concernent tous et ils ne sont pas sans incidences économiques. Ils montrent que, malheureusement, la globalisation des risques n'est pas moins rapide que celle des progrès. Aucun pays n'est à l'abri des menaces que fait peser la terreur sur l'activité et les échanges. L'incertitude et le doute gagnent beaucoup d'esprits.
Ces inquiétudes, nous devons les comprendre, et d'abord comprendre qu'elles sont légitimes. Mais, dans le même temps, notre devoir - celui de tous les responsables - n'est pas d'ajouter le doute au doute. Notre devoir économique, c'est d'analyser autant qu'il est possible les évolutions récentes de la conjoncture et les perspectives ; de réagir face au choc et de favoriser, par les orientations de notre politique économique, un rebond de l'activité. C'est de chercher à renforcer la confiance de nos concitoyens dans les capacités de notre économie, en privilégiant la lucidité et la volonté et en évitant la dangereuse tyrannie du court terme.
Dans cet esprit, vous remerciant toutes et tous pour votre travail précieux, en particulier le Président Henri Emmanuelli, le rapporteur général Didier Migaud ainsi que tous les membres de la Commission des Finances, je souhaite, avant de vous présenter les grandes orientations du budget 2002 préparé avec Florence Parly et sous l'autorité du Premier ministre, revenir d'abord sur les évolutions de la conjoncture. De notre capacité à expliquer les faits, de notre volonté d'éclairer à long terme les choix, de notre solidité dans l'épreuve, dépend aussi le rebond de l'économie elle-même.
I Quelles sont les causes du ralentissement et les perspectives de croissance de notre économie ?
1.1. Aux Etats-Unis et dans la zone Euro, plusieurs éléments récents nous permettent de mieux comprendre les raisons du ralentissement qui a précédé les attentats, les conséquences possibles des événements de septembre et la situation de la France.
Les dernières données américaines, celles disponibles pour la zone Euro, jettent en effet une lumière un peu nouvelle sur le ralentissement de l'activité dans les deux zones. Sauf en France, le ralentissement est intervenu plus tôt qu'on ne l'a généralement dit - en réalité dès le second semestre 2000. Même s'il a été plus marqué aux Etats-Unis, ce ralentissement s'est produit d'une façon quasi simultanée des deux côtés de l'Atlantique. Ce n'est pas seulement l'investissement des entreprises qui a diminué, c'est aussi la consommation des ménages qui s'est tassée. Ce qui signifie qu'au-delà de la spécificité du choc américain (liée au surinvestissement) et de ses effets de transmission sur les entreprises européennes, un phénomène semblable s'est produit au même moment dans les deux zones: ce phénomène, c'est principalement la hausse des prix du pétrole et, plus récemment, celle des prix alimentaires, qui ont grignoté une part du pouvoir d'achat et handicapé la consommation.
Cette analyse implique que le redémarrage en Europe, qui dépendra évidemment beaucoup de la reprise aux Etats-Unis (car le Japon restera vraisemblablement en récession et les pays émergents seront touchés), tiendra aussi à la baisse des prix du pétrole. Si cette baisse se confirme dans les mois à venir, elle constituera une très bonne nouvelle pour nos économies. Elle pourrait contrecarrer les effets négatifs d'un ajournement de la reprise américaine.
1.2. Comment analyser la conjoncture française en 2001 et en 2002 ? D'abord, contrairement à ce que voudraient nous faire croire les Cassandre de tout poil, notamment celles et ceux qui misent sur le recul de la conjoncture pour espérer les faveurs de l'électorat, notre économie n'est pas au sens propre en récession. L'INSEE prévoit un chiffre légèrement supérieur à 2 % en 2001. Il s'appuie sur le dynamisme actuel de la consommation des ménages qui compense l'atonie de la demande des entreprises et une demande externe ralentie. Les baisses d'impôts décidées auparavant et survenues en septembre, ainsi que l'allocation de rentrée scolaire, - au total plus de 6 Mds d' - ont encouragé en France la bonne tenue de la consommation au moment où les attentats auraient pu la déprimer. Les tout derniers indicateurs montrent d'ailleurs que la production industrielle a nettement progressé cet été.
S'agissant de la croissance 2002, nous nous trouvons dans une situation complexe où coexistent deux tendances opposées. D'une part, notre économie présente des fondamentaux solides. Ces quatre dernières années l'emploi a enregistré sa plus forte croissance depuis trente ans. L'effort d'équipement des entreprises a été soutenu, avec une progression annuelle proche de 7 %. La rentabilité des entreprises est restée en général satisfaisante. Le déficit des administrations est nettement inférieur à ce qu'il était en 1997, à l'arrivée de ce gouvernement, même s'il est encore trop élevé. Nous avons su moderniser notre outil industriel, public et privé, tout en développant nos activités de services.
En outre, certaines évolutions récentes peuvent faciliter un rebond de l'activité. Le ralentissement de près d'un point de l'inflation sur douze mois est favorable au pouvoir d'achat des salaires. Baisse de l'inflation et hausse du salaire nominal devraient permettre de compenser en partie l'impact du ralentissement des créations d'emplois sur le pouvoir d'achat du revenu des ménages. Les baisses d'impôts confortent cette dynamique. Une consommation des ménages robuste peut être espérée en 2002. Une reprise modérée de l'investissement est, elle aussi, envisageable début 2002 après l'ajustement de 2001. Car contrairement à l'économie américaine, notre économie ne souffre pas de surinvestissement. Les entreprises françaises devraient bénéficier d'une demande des ménages soutenue et de conditions financières favorables. A ces éléments, qui entraînent à eux seuls une accélération de l'activité par rapport à l'étiage 2001, peuvent s'ajouter les effets d'un rebond de l'activité aux Etats-Unis.
En contrepoint, il y a les conséquences sur la conjoncture des attentats du 11 septembre. En 5 semaines, les analyses des experts et des commentateurs ont beaucoup varié. Dès le lendemain des attentats, j'avais exposé à votre Commission des Finances trois risques immédiats : le risque pétrolier, le risque boursier, le risque psychologique. Le risque pétrolier ne s'est pas produit, nous devons naturellement rester vigilants, surtout maintenant que la riposte militaire des Etats-Unis est engagée. Le risque boursier a bien eu lieu, quoique l'essentiel du choc ait été rattrapée ; la réaction rapide et coordonnée des autorités financières et monétaires a été salutaire. Le troisième risque porte sur la confiance, et c'est peut-être aujourd'hui le plus sérieux. Psychologie et économie sont liées. Ce véritable "choc d'incertitude" conduit souvent à une perplexité des chefs d'entreprise en matière d'investissement. La prime de " risque " sur les projets d'équipement a augmenté et les perspectives de croissance sont plus incertaines. Une réduction des projets d'investissement peut susciter un cercle négatif où la réduction de la dépense des entreprises pèse sur l'emploi et, finalement, sur la consommation. Ce serait donc une erreur que de dissocier le risque sur la consommation et le risque sur l'investissement, et de ne vouloir répondre qu'à l'un d'entre eux. Le Gouvernement ne commettra pas cette faute - j'y reviendrai dans un instant.
Car le choc d'incertitude est d'abord dans nos têtes. Ce que veulent les terroristes, c'est déboussoler nos comportements et déformer notre vision de la réalité. Il y a une vraie bataille à mener sur ce front. Pour la remporter, il fallait d'abord trouver le principe mobilisateur. On a parlé de "patriotisme économique". Du Gouvernement et des bancs de la majorité est venu cet appel. Les acteurs économiques, consommateurs et chefs d'entreprises, l'ont en général relayé. Prolonger cette résistance économique, c'est bien sûr rappeler la vérité des fondamentaux comme je viens rapidement de le faire, c'est aussi engager deux séries d'actions. D'une part, indiquer le cap en réaffirmant les choix budgétaires et fiscaux qui sont les nôtres depuis le début de la législature et qui ont montré leur pertinence face aux chocs que nous avons connus, crises financières ou flambée pétrolière. D'autre part, nous devons faire preuve de réactivité face aux événements, en prenant toutes les mesures susceptibles de favoriser le rebond de l'économie.
II. Les principaux axes du budget 2002.
Pour construire le budget 2002, nous avons dû à la fois dégager des marges et cibler nos priorités.
Depuis 1997, nous avons redéployé chaque année près de 5 Md, contribuant ainsi à financer les mesures nouvelles élaborées par le Gouvernement et souhaitées par les Français. Ce mouvement sera poursuivi en 2002 avec un redéploiement de 6 Md, ce qui sur la période 1998-2002 représentera au total 26 Md. Au terme de cette gestion active de la dépense, plus de 80 % de la progression du budget de l'Etat auront pu être affectés aux secteurs prioritaires que sont l'éducation, l'emploi et la lutte contre les exclusions, la sécurité, la justice, la culture, ainsi que l'environnement. Les budgets correspondant à ces secteurs prioritaires ont progressé de 17,2 % en valeur depuis 1997 contre 3,2 % pour les autres. Le budget de l'éducation a augmenté de 9 Md depuis 1997 ; celui de l'emploi et de la solidarité, de 4 Md. Cette orientation sera poursuivie. Les collectivités locales verront en 2002 leur dotation globale de fonctionnement augmenter de 4,1 %, portant la progression des crédits pour la législature au double du fameux "pacte de stabilité" décidé en leur temps par MM. Chirac et Juppé.
Un effort exceptionnel sera conduit en faveur de l'emploi et de la lutte contre les exclusions qui constitue notre priorité absolue. Dès juillet, le Gouvernement a réagi à la dégradation sur le marché du travail en décidant d'accroître de 50 000 le nombre de contrats aidés disponibles d'ici la fin de l'année (30 000 contrats emploi-solidarité et 20 000 stages). Afin d'accompagner les personnes les plus en difficulté sur le marché du travail, la Ministre de l'Emploi est chargée de mobiliser les services de l'Etat pour que les dispositifs - contrats aidés, emplois jeunes, parcours TRACE - soient pleinement et rapidement activés. L'ensemble des dispositifs destinés à faciliter la reprise d'un emploi ont permis depuis le début de la législature de réduire de près d'1 million le nombre des personnes au chômage, ce qui constitue un résultat sans précédent. Je pense notamment aux allègements de charges sur les bas salaires, à la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle, à la réduction du temps de travail, aux emplois jeunes, à l'accompagnement personnalisé des chômeurs de longue durée dont le nombre a baissé de 40 % depuis 4 ans, ou encore aux importantes mesures améliorant la rémunération du travail pour les bas revenus : prime pour l'emploi, réforme de la taxe d'habitation et des allocations logement. Bref, malgré les difficultés, malgré parfois les véritables sinistres industriels qui blessent toute une région, il est essentiel que l'objectif du plein emploi soit maintenu.
1- En 2002, les dépenses du budget de l'Etat s'élèveront à 266 Md avec une croissance de 0,5 % en volume.
Conformément à la feuille de route que nous nous sommes fixés tout au long de la législature, nous avons retenu 3 priorités principales en 2002.
Nous avons choisi de renforcer et de continuer à moderniser l'Education nationale. Pour la première fois, le seuil des 400 MdF sera franchi (61,4 Md). Cela représente près du quart de nos dépenses. L'importance de ce cap n'est pas tant dans la barre comptable qui est franchie que dans l'utilisation des crédits et les réformes qu'ils rendent possibles. Il s'agit d'une augmentation des crédits de 4 % en 2002 et, depuis 1997, d'une progression de près de 20 %. Affecter concrètement des moyens supplémentaires à nos écoles, à nos collèges, à nos lycées, à nos universités, donc à ceux qui y travaillent au quotidien, c'est préparer l'avenir. Je constate que, dans l'ensemble, sous la conduite du Ministre Jack Lang, la rentrée, les rentrées se sont bien effectuées.
Notre volonté dans ce domaine est parfois brocardée. On entend parfois dire dans l'hémicycle " on n'a pas besoin de tout cela !". Mais sur le terrain, je rencontre peu de parlementaires demander de fermer une petite classe d'une zone rurale " pour faire des économies " J'entends plutôt des élus de zones rurales ou urbaines et de quartiers populaires exiger des moyens supplémentaires, un encadrement renforcé - en enseignants, en infirmières, en emplois-jeunes. Le Gouvernement et la majorité font le maximum pour répondre à ces demandes et accorder davantage de moyens pour mieux éduquer les enfants qui en ont le plus besoin. Nous nous sommes mobilisés pour équiper et sécuriser nos universités ; c'est le sens du plan " Université du troisième millénaire ". Comme nous nous y étions engagés, nous avons pris des mesures en faveur du statut des étudiants. La priorité à l'éducation nationale n'est pas qu'un slogan, c'est un fait. Un fait d'autant plus important que l'actualité démontre combien il est précieux de compléter notre action de formation par un vaste effort culturel-qui atteindra pour la première fois 1 % du budget en 2002 - ; et combien il est essentiel pour la France de pouvoir conforter par l'enseignement de l'école cette valeur fondamentale qu'est la laïcité.
Nous voulons aussi renforcer la sécurité et la justice pour les rendre plus efficaces et plus proches de nos concitoyens. Nous étions évidemment conscients de cette nécessité dès avant le 11 septembre. S'agissant de la sécurité, nous avons depuis 1997 augmenté les crédits de 18 %. La progression sera de 4,5 % en 2002, soit 3 000 policiers et 1 000 gendarmes supplémentaires. Au total, ce sont 251 000 gendarmes et policiers qui contribueront à assurer la sécurité - près de 9 % de plus qu'en 1997. Il n'y a pas de sécurité renforcée sans une justice rapide et efficace : c'est ce qui rend effective la sanction. En 2002, les crédits de la justice augmenteront de 5,7 %. 930 juges seront recrutés. Sur 5 ans, ce budget aura crû de 25 %. Au-delà des chiffres, il y a un état d'esprit à généraliser qui consiste, non pas à agiter le chiffon rouge de l'insécurité à des fins partisanes, mais à garantir à chaque citoyen ce droit républicain, cette liberté majeure qu'est le droit à la sûreté. Je le redis devant vous nettement : nous refusons non seulement l'insécurité mais l'impunité, qui heurte peut être encore davantage nos concitoyens. Nous entendons être justes, mais aussi être fermes. Fermes avec l'insécurité. Fermes avec les causes de l'insécurité. Et, avec le Ministre de l'Intérieur, nous prenons les dispositions concrètes, notamment financières, en ce sens.
Pour notre politique de sécurité, les attentats du 11 septembre soulèvent des enjeux spécifiques. Le Gouvernement les prend pleinement en compte. Les crédits consacrés à la défense en 2002 seront supérieurs à 2001. Ils permettront l'achèvement de la professionnalisation de nos armées ainsi que la commande ou la livraison des équipements prévus dans le cadre de la loi de programmation. Mais les dangers que font courir les terroristes concernent d'abord notre sécurité intérieure. Le plan Vigipirate renforcé et le plan Biotox constituent une première réponse. Je viens de souligner la priorité accordée aux effectifs de police et de gendarmerie. De même, nous accroissons les moyens du Secrétariat général à la Défense nationale, dont le budget a été consolidé tout au long de la législature, afin qu'il puisse amplifier ses opérations de défense civile. L'ensemble des ministères concernés par la protection des sites sensibles renforceront leurs dispositifs d'alerte.
J'ajoute qu'à la fois par souci de la justice et par mobilisation contre le terrorisme nous sommes résolus à mener une action vigoureuse dans le domaine de la lutte contre le blanchiment des capitaux et les flux spéculatifs, dans celui de la lutte contre les paradis fiscaux et contre toutes les structures ou entités non transparentes. Avant la tragédie du 11 septembre, nous avions déjà souligné les liens entre ces phénomènes et diverses sortes d'exactions, de trafics et de crimes. Comme nous l'avons montré lors de la présidence française de l'Union européenne, nous entendons être à l'avant garde de la régulation et de l'élimination des comportements fiscaux dommageables. Le récent G7-G8 de Washington a permis des avancées concrètes. Ce qui paraissait chimérique il y a quelques années commence aujourd'hui à faire consensus et à recevoir une application pratique : bâtir un cadre plus transparent et plus solidaire pour l'économie mondiale. Car, c'est bien la question du gouvernement de la globalisation qui est aujourd'hui posée. Construire un monde plus équilibré et mieux régulé, aider vraiment le Sud, agir pour le développement durable, lutter contre la pauvreté, ce n'est pas seulement nous prémunir contre certains excès de la mondialisation -je pense en particulier aux menaces qui pèsent sur l'environnement-, c'est aussi tenir en échec les entreprises terroristes, en traquant et en tarissant les flux financiers qui les alimentent et en désamorçant les frustrations populaires qu'elles manipulent. Pour nous, les financiers du terrorisme ne sont pas moins coupables que les terroristes eux-mêmes.
Notre troisième priorité est de défendre, de protéger et de valoriser l'environnement. Depuis le début de la législature, c'est le budget qui a bénéficié de l'augmentation la plus forte. Pour mettre l'environnement au coeur de nos politiques, il fallait sortir de la pénurie des moyens. L'an prochain, les crédits seront en hausse de 6,3 %. Sur l'ensemble de la législature, la progression avoisine les 60 % et 1000 emplois auront été créés, dont près d'un tiers pour la seule année 2002. C'était l'un des engagements forts de la majorité plurielle ; il est tenu. Nous le prolongerons à travers la position que défendra la France et le Secrétaire d'Etat François Huwart lors de la prochaine réunion de l'Organisation Mondiale du Commerce. Pour s'imposer dans les faits, le développement durable exige une réelle capacité d'expertise et des services suffisants sur le terrain. La maîtrise des risques en est un aspect essentiel. Les événements dramatiques de Toulouse nous le confirment. Comme l'a annoncé le Premier ministre, le contrôle des sites dangereux sera renforcé par la création de 150 postes d'inspecteurs des installations classées. Ces engagements illustrent notre volonté de prendre en compte toutes les dimensions de la sécurité des Français.
2- Le budget 2002 poursuivra le mouvement de baisse et de réforme des impôts.
En août 2000, le Gouvernement avait proposé un plan pluriannuel de baisses d'impôts pour un montant total de 18,3 Md (120 MdF). Pour des raisons structurelles et conjoncturelles, ces baisses d'impôts sont confirmées. L'estimation 2002 prévoit un allègement de 5,95 Md (39 MdF). Au total, cela portera la baisse à 18,9 Md (124 MdF).
L'une des plus importantes décisions pour renforcer le pouvoir d'achat par le retour à l'emploi sera le doublement de la Prime pour l'Emploi (PPE). Créée par la loi du 30 mai 2001, la PPE a été perçue pour la première fois lors de cette rentrée. Plus de 8 millions de foyers en ont déjà bénéficié, soit plus du quart des foyers, pour un montant moyen de 144 (950F). Le nombre des bénéficiaires va augmenter encore avec la prise en compte des personnes qui, malgré les efforts déployés, n'ont pas pu en bénéficier à temps. Au total, ce sont plus de 8,5 millions de foyers qui seront concernés dès cette année par le dispositif. Nous proposons qu'en 2002 le montant de la PPE soit doublé pour atteindre 458 (3 000 F) au niveau d'un SMIC. Les majorations forfaitaires lorsqu'un seul conjoint travaille ou pour enfants à charge seront indexées comme les prix de 2001. Cette mesure représentera 1,1 Md au budget 2002. Elle n'est évidemment en rien contradictoire avec les augmentations de salaires. Elle améliorera les conditions de vie de travailleurs modestes.
Au cours de l'année 2002, les taux du barème de l'impôt sur le revenu continueront également de baisser : - 0,75 % pour les 4 premières tranches et - 0,5 % pour les 2 dernières. Cela représente 1,98 Md (13 MdF) de baisses. Comme en 2001, l'évolution sera calculée et inscrite sur les avis d'imposition à la fin de l'été, ainsi que le taux d'impôt réellement supporté.
L'impôt sur les sociétés passera, lui, à 34,33 %, grâce à une nouvelle réduction de la surtaxe Juppé. Pour les entreprises qui acquittent la contribution sur les bénéfices des sociétés, le taux de l'impôt sur les sociétés diminuera d'un point.
Le plan de suppression de la part salariale de la taxe professionnelle, lancé par la loi de finances pour 1999, se poursuivra. L'abattement sur cette part passera de 152 444 (1000000 F) en 2001 à 914 694 (6000000 F) en 2002.
Nous réaffirmons ainsi notre volonté de consolider la consommation des ménages, de favoriser l'investissement et de soutenir l'emploi.
D'autres mesures s'ajouteront en 2002, cohérentes avec les priorités de la législature.
Elles sont d'abord destinées à renforcer l'impératif de solidarité. Solidarité internationale : vous est proposé un dispositif d'amortissement exceptionnel des équipements pour la recherche sur des maladies qui, comme le Sida, frappent particulièrement les pays pauvres. Solidarité nationale : sont prévues 3 mesures favorisant les associations ainsi qu'à destination du logement social, en particulier pour faciliter l'accès à la location des personnes disposant de faibles revenus.
Seront également mises en place des dispositions fiscales nouvelles en faveur de l'initiative, de l'investissement et de l'innovation. Je souligne notamment l'ouverture progressive du Plan d'Epargne en Actions (PEA) aux actions européennes et l'augmentation corrélative du plafond du PEA à 120 000 (au lieu de 91 469 ).
Enfin, nous avons intégré les enjeux environnementaux dans nos choix fiscaux. Depuis 5 ans, plus de 30 mesures favorables ont été prises. Le budget 2002 en propose de nouvelles, à l'initiative du Ministre de l'Environnement Yves Cochet : un crédit d'impôt de 15 % sur les dépenses d'isolation thermique et de régulation du chauffage s'ajoutera à la baisse de TVA en vigueur depuis 1999 ; une amélioration du crédit d'impôt de 1 500 voté en 2000 pour l'achat d'un véhicule propre ; un meilleur accès des entreprises aux allègements de taxe professionnelle sur les équipements d'économie d'énergie.
Outre ces dispositions prévues par le Gouvernement, votre Commission des Finances a introduit plusieurs amendements qui seront examinés au cours de la discussion. Certains s'inscrivent dans le droit fil des priorités que nous nous sommes fixées, je pense en particulier à l'amélioration du régime micro-foncier qui porte la marque du Rapporteur général Didier Migaud. Je pense aussi au régime fiscal des chèques vacances tel que l'a suggéré le Président Emmanuelli. S'agissant des amendements concernant l'extension de la suppression de la vignette automobile, adoptée l'an dernier et à laquelle sont attachés notamment les parlementaires radicaux, ou de l'indexation de l'Impôt de solidarité sur la fortune récusée par le groupe communiste, les débats nous permettront de préciser les choses. Sur ces sujets comme sur les autres, le Gouvernement adoptera une attitude d'ouverture et de dialogue.
3- Le financement de nos priorités et les allégements d'impôts s'inscrivent dans le cadre d'une gestion publique rénovée et d'une réelle ambition de réformer l'Etat.
Le Gouvernement poursuivra en 2002 l'effort de simplification de la vie des usagers. Après la suppression de plus de 60 impôts ou taxes et l'allégement de nombreuses formalités pour les particuliers et les PME, c'est le sens de l'harmonisation proposée des durées et des délais d'option des petites entreprises pour les régimes fiscaux simplifiés. C'est aussi le but des mesures de simplification du paiement des impôts, notamment la dispense de constituer des garanties pour faire valoir une réclamation si elle porte sur un montant inférieur à 3 000.
La réforme de l'Etat ne s'accomplit pas par imprécations. Elle n'avance pas à coups de dénonciations du service public, ni d'ailleurs à coups de blocages de celui-ci. Pour réussir, elle suppose des actions concrètes et elle implique la concertation comme méthode. C'est le sens de la démarche que nous menons au sein du Minéfi, avec les Secrétaires d'Etat qui m'entourent et le plein soutien du Premier ministre.
Vous savez qu'a ainsi été élaboré et mis en place un nouveau code des marchés publics dont l'impact sera important dès 2002 sur la modernisation de la commande publique et les relations entre les administrations et leurs fournisseurs. Ce changement porte sur des enjeux massifs : près de 10 % de notre PIB, 250 000 marchés publics chaque année dont 190 000 pour les seules collectivités locales. Procédures clarifiées, sécurité juridique renforcée, substitution de la règle du " mieux disant " au rite du " moins disant ", ouverture plus large aux PME, réduction des délais de paiement - cette réforme dont on parlait depuis une dizaine d'années a enfin vu le jour et elle sera positive.
Le même objectif - libérer la décision publique de carcans procéduriers pour aller vers plus d'efficacité- a orienté l'adoption de notre nouvelle "constitution budgétaire". La réforme de l'ordonnance organique de 1959 promulguée le 1er août 2001 constitue, vous le savez pour l'avoir permise après 37 tentatives infructueuses, une double avancée : elle renforce les droits du Parlement - droit d'amendement et contrôle de l'exécution du budget -, elle contribue à l'amélioration de la gestion publique par une plus grande liberté accordée aux gestionnaires en contrepartie d'une plus grande responsabilité. A l'intersection de ces 2 préoccupations, se trouve la création de " programmes " reflétant nos grandes politiques publiques. Accompagnés d'indicateurs, ces programmes renforceront la lisibilité des choix que le Gouvernement proposera au Parlement et structureront l'action de l'administration. Cette loi aura une première traduction concrète dans le budget 2002. Voilà une révolution silencieuse qui fait progresser la réforme de l'Etat, jugée par certains impossible.
C'est dans cet esprit également que nous avons redéfini le programme de gestion de la dette. La représentation nationale disposera pour la 1ère fois en 2002 des indicateurs synthétiques lui permettant d'autoriser en pleine connaissance de cause la politique d'émission de la dette de l'Etat français et de contrôler sa mise en oeuvre. Là aussi, notre démocratie aura progressé.
Enfin, nous préparons le passage au 1er janvier 2002 à l'euro fiduciaire. Cette réforme, qualifiée de plus importante réforme économique et financière depuis 50 ans, sera, j'en suis convaincu, un succès. Elle a été préparée par de très nombreux partenaires que je remercie. La montée en régime s'opère d'une façon satisfaisante au sein même des services de l'Etat. Preuve, là aussi, que l'Etat peut se réformer. Sa pleine application interviendra en 2002.
III Je souhaite examiner trois critiques parfois formulées à l'encontre de notre politique économique et budgétaire.
3.1. Le Gouvernement n'aurait pas su mettre à profit la conjoncture favorable pour maîtriser la dépense publique. Nous parlons fréquemment entre nous de la "norme de dépense", comme si cette notion avait existé de toute éternité. En réalité, c'est ce gouvernement qui s'est donné, je cite, une " norme d'évolution de la dépense de l'Etat, fixée en volume, et indépendante de la conjoncture ". Notre idée initiale a été de rompre avec les politiques brutales et successives de relance et d'annulation de la dépense publique, qui cassaient souvent les efforts réalisés dans un secteur, stoppaient brutalement des projets en cours et décourageaient les gestionnaires.
Certains nous reprochent d'avoir été ou d'être budgétairement trop dispendieux. Voyons les chiffres. Sur les 6 budgets couverts par cette législature, les dépenses du budget de l'Etat auront augmenté au total de 1,8 % alors qu'elles avaient augmenté de 1,8 %, mais chaque année, de 1993 à 1997. Nous avons géré avec sérieux les dépenses de l'Etat, tout en finançant nos priorités. J'observe d'ailleurs que si, pendant la semaine et dans l'hémicycle, l'opposition nous reproche trop de dépenses, le week-end, quand vient le temps des réunions publiques et des émissions médiatiques, elle propose plutôt - y compris par ses représentants les plus éminents - des dépenses supplémentaires et un alourdissement des déficits.
De surcroît, notre norme de dépense s'inscrit dans une perspective pluriannuelle et s'intègre dans le programme triennal que nous déposons chaque année à Bruxelles. Cette démarche renforce la stabilité de l'action de l'Etat. Depuis 4 ans, la norme de dépense pour le budget général a constitué un instrument efficace de politique budgétaire, un outil de modération de la dépense, un moyen de redéploiement en faveur des priorités. Cette maîtrise, s'agissant des dépenses de l'Etat, peut bien sûr encore être améliorée et c'est un thème que j'aborde souvent en public comme en privé. Cela ne doit pas cacher les difficultés rencontrées dans le domaine des dépenses sociales, au premier chef en matière d'assurance maladie. Nous n'avons pas encore complètement réussi à convaincre qu'une hausse de la dépense n'était pas automatiquement synonyme d'amélioration de la santé. Du chemin reste à parcourir avec tous les partenaires de la santé publique. L'effort engagé dans le PLFSS 2002 devra certainement être poursuivi.
J'ajoute que c'est cette évolution de la dépense publique moins rapide que celle de la richesse nationale qui a permis et qui permettra de conduire durablement une politique d'allègement des charges et de réduction des déficits et d'envisager, comme c'est nécessaire, le retour progressif à l'équilibre. En 1997, pour eux qui l'auraient oublié, le déficit de l'Etat était de 300 MdF. Nous l'avons ramené aux alentours de 200 MdF en exécution 2000. Ce redressement des finances publiques françaises, qui demande à être poursuivi, a été plus rapide que dans la plupart des grands pays de la zone euro. Alors qu'en 1997, la France était dernière en Europe, elle se situe aujourd'hui dans la moyenne. Les exercices 2001 et 2002 marquent un palier conjoncturel car nous avons choisi de laisser jouer les stabilisateurs automatiques en recettes pour soutenir l'activité. C'est un choix de pilotage économique que nous assumons. Utile dans les circonstances présentes, il ne compromet pas notre objectif de retour à l'équilibre de moyen terme.
3.2. Une deuxième critique parfois émise est que le Gouvernement n'aurait pas suffisamment baissé les impôts, ou au contraire qu'il les aurait trop baissés. De toute façon, trop ou trop peu, il n'aurait pas assez avancé en matière de justice sociale.
Nos concitoyens ont changé de majorité en 1997 parce qu'ils voulaient changer de politique. Ils n'étaient sans doute satisfaits ni des perspectives sociales qui leur étaient offertes, notamment sur la lutte contre le chômage, ni des charges fiscales qui leur étaient imposées, en particulier dans la répartition des efforts consentis. Beaucoup, sauf semble-t-il les auteurs, gardent par exemple en mémoire l'augmentation de 2 points de la TVA décidée par MM. Chirac et Juppé entre 1995 et 1997, qui avait amputé le pouvoir d'achat de près de 60 MdF. Beaucoup se souviennent aussi du renoncement face à la fameuse fracture sociale.
La vision qui nous anime est différente. Nous respectons les principes républicains essentiels de consentement à l'impôt et d'égalité devant les charges publiques. Nous voulons partager avec justice les fruits de la croissance par des mesures fiscales et sociales appropriées. C'est dans cette direction que nous avons souhaité avancer.
Dans la conduite de la politique fiscale depuis 1997, nous nous sommes efforcés de procéder à davantage de redistribution pour le travail et la justice sociale. C'est le sens par exemple de la réforme intervenue des dégrèvements de taxe d'habitation en fonction du revenu ou de la baisse graduée de l'impôt sur le revenu, plus marquée en bas qu'en haut - on oublie souvent de le dire -, ou de la création de la PPE, largement approuvée par les Français.
Nous avons renforcé la consommation et l'investissement des ménages, en particulier des ménages les plus modestes, spécialement pour leur logement. C'est la raison de la baisse du taux normal de TVA et du taux réduit sur la rénovation du logement. C'est le but de la baisse des impôts sur les achats de logement et de la suppression du droit de bail.
Nous avons orienté nos choix fiscaux structurels principalement en faveur du travail. C'était l'objectif de la réforme de la taxe professionnelle, dont la part salariale disparaît progressivement, ainsi que de la lutte contre des niches fiscales improductives pour la collectivité ou des efforts de solidarité demandés aux plus fortunés. La consommation des ménages et les revenus du travail ont été au cur de nos orientations fiscales. Ces choix sont venus conforter les gains de pouvoir d'achat dégagés par les créations d'emplois. Au total, notre politique a permis de rééquilibrer dans un sens favorable au travail le partage de la valeur ajoutée.
Ces choix, nous ne les avons pas faits contre les entreprises. Nous le savons, ce sont elles qui créent d'abord des richesses et des emplois. C'est la raison pour laquelle j'ai toujours insisté pour que nous soutenions l'innovation, le développement des entreprises, la prise de risque et la compétitivité de notre économie. Je pense notamment à la loi sur l'épargne salariale, aux contrats d'assurance-vie en actions, à la création et au développement des bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises, au plan de baisse de l'impôt sur les sociétés, avec un accent spécial pour les PME.
Nous avons inscrit ces baisses dans le cadre de la préparation solidaire de l'avenir. Nous avons souhaité proposer une approche pluriannuelle, parce qu'elle est un gage de visibilité pour les entreprises ou les ménages et une garantie de soutenabilité. Cela, en nous attachant à respecter le principe de responsabilité.
Au total, je crois pouvoir dire que, malgré des insuffisances, les décisions prises dans ce domaine au cours de cette période ont été dans l'ensemble positives, avec notamment divers allègements d'impôt justes dans leurs effets redistributifs, dans leur ampleur et dans leur échéancier.
3.3. Selon certains, enfin, les hypothèses sur lesquelles est bâti le projet de budget pour 2002 manqueraient de réalisme.
Cette critique est émise en général par l'opposition. On pourrait se contenter de lui répondre en rappelant les discours catastrophistes qu'elle a multipliés depuis 4 ans. En période de croissance comme en phase de ralentissement, la nostalgie ne fait pas une politique.
Par exemple à l'automne 1997, lors du débat sur la loi de finances pour 1998, les mêmes considéraient que l'économie française devait s'effondrer à la suite de la crise asiatique. Résultat : notre économie a enregistré une croissance plus forte encore que celle que prévoyait le Gouvernement. En octobre 1998, les conséquences de la crise russe devaient, enrayer l'élan de notre économie entamé mi-1997. Résultat : l'économie française a enregistré une croissance plus forte que celle que prévoyait le Gouvernement. Pour le budget 2000, même critique et même résultat. Curieusement, l'année dernière, pour la 1ère fois, la perspective de croissance n'a pas fait l'objet de critiques sévères... Nous aurions dû nous en inquiéter. Il est vrai que la croissance était alors particulièrement vive. Pourtant, pour la 1ère fois depuis 1997, nous n'atteindrons pas l'objectif que nous nous étions fixé, la croissance cette année devant être d'un peu plus de 2 %, chiffre certes plus fort que celui de la plupart de nos partenaires, mais moins élevé que prévu.
Mais il faut aller au-delà de ce rappel. Toute hypothèse économique - nous évoquons pour 2002 un chiffre de 2,25 % ou 2,5 % -est par nature discutable. Surtout en période bouleversée. Nous avons, avec F. Parly, avec le Premier ministre, avec d'autres, examiné cette question d'une façon approfondie. Et nous avons décidé de maintenir une approche volontaire tout en soulignant qu'il convient d'être très prudent et pragmatique à l'égard de toute estimation.
Pourquoi ce choix ? D'abord parce que dans la conjoncture présente nous constatons que la situation économique dépendra en réalité pour une très large part d'éléments situés hors du champ économique : quelle riposte militaire et non militaire, quelles ripostes à la riposte, quelle durée, quelles réactions des populations dans divers pays, quelles conséquences psychologiques ? On peut redouter une dégradation ; on peut aussi espérer une amélioration et nous y travaillons les uns les autres. En tout cas cet aspect déterminant échappe à l'analyse économique elle-même.
J'ajoute que, si certains chaînons du raisonnement économique peuvent conduire à une analyse baissière, nos fondamentaux restent bons, ils sont même parfois les meilleurs en Europe. C'est le cas notamment pour le taux d'inflation qui est le plus bas de la zone euro. Nos performances d'inflation et de modernisation, nos progrès structurels dans la relation croissance-emploi, nos efforts pour réduire les impôts et les déficits, tout cela continuera de compter. J'y insiste : certains aspects décisifs évoluent -pour le moment en tout cas- dans le bon sens. En particulier le prix du pétrole qui a baissé de plus de 20 % depuis le 11 septembre, ainsi que les taux d'intérêt, ce qui emporte des conséquences positives sur les prix, le pouvoir d'achat et la croissance.
En outre, lorsque nous analysons le comportement de nos voisins européens, nous observons qu'ils retiennent en général des hypothèses supérieures à 2 % de croissance alors même que leurs performances sont voisines des nôtres ou inférieures : l'Allemagne a choisi en tous cas pour l'instant une hypothèse de 2,25 %, la Grande-Bretagne 2,25 %, l'Italie 2,3 %, l'Espagne 2,9 %,
Enfin, nous ne sommes pas -ni le gouvernement, ni les parlementaires- seulement des observateurs. Nous sommes des décideurs. Nous devons être réalistes ; nous devons aussi être volontaires. Nous savons que le pessimisme n'est souvent que l'alibi de l'attentisme ou du défaitisme. Certes, il ne sera pas facile d'atteindre une forte croissance. Nous devons donner le signal d'une démarche et d'une détermination, pour obtenir la croissance la plus soutenue possible. Nous retenons autant un objectif qu'une hypothèse. Et précisément, pour nous donner le maximum de chances d'aller vers cet objectif, nous pensons que, dans le cadre même du budget, des actions de consolidation sont nécessaires, un plan de consolidation de la croissance que je vais maintenant aborder.
IV. Le plan de consolidation de la croissance
Le diagnostic que je viens de porter invite en effet à utiliser l'ensemble des instruments disponibles pour organiser rapidement un plan de consolidation de la croissance. Il doit répondre à plusieurs conditions : soutenir l'investissement et la consommation, appuyer les secteurs les plus touchés, être conforme à nos engagements européens, ne pas peser sur le solde budgétaire 2002. La consolidation doit pouvoir s'opérer à partir de plusieurs séries d'actions :
- Mobiliser la politique monétaire tout en menant une politique budgétaire responsable ;
- Conforter la demande des ménages pour préserver l'emploi ;
- Stimuler l'investissement des entreprises ;
- Aider en particulier les transports aériens et l'assurance, durement touchés par les attentats, et faciliter le redémarrage des télécommunications.
4.1. Le premier instrument de consolidation est européen : c'est la politique monétaire accompagnant au niveau national une politique durable des finances publiques
La question qui nous est posée est simple et le débat qui l'accompagne légitime : quelle est, aujourd'hui, la meilleure politique économique pour favoriser le rebond de l'activité ? Comment utiliser au mieux l'arme monétaire et l'arme budgétaire pour anticiper la reprise ?
Ma conviction est que des marges de manuvre existent pour la politique monétaire. L'inflation est maîtrisée. Une action sur les taux, déjà engagée par la BCE, comporte deux avantages : elle s'exerce à l'échelle de l'Europe entière et non seulement dans un cadre national ; elle apporte une bouffée d'oxygène immédiate à nos entreprises. Même si elle ne fournit pas le démarreur de la reprise, elle peut en fournir le carburant. En favorisant une meilleure tenue du cours des actions, une baisse des taux relâche la pression exercée par les actionnaires sur les comportements des entreprises. La demande de celles-ci (investissements, stocks et consommations intermédiaires) est encouragée. Devant les risques d'assèchement du crédit liés à la montée des primes de risque, une baisse des taux d'intérêt est un instrument adapté. L'assouplissement de la politique monétaire est donc un outil prioritaire pour rétablir des choix d'investissement plus dynamiques. Naturellement, c'est au Conseil des Gouverneurs de la BCE d'en décider.
Dans ce contexte, ce serait une erreur que de compromettre la mobilisation de la politique monétaire par des choix budgétaires inadaptés. Si, comme certains nous le proposent, la dépense dérapait au niveau national, la baisse des taux serait ajournée au niveau européen. Entreprises et consommateurs se réfugieraient dans l'attentisme, par peur de nouvelles hausses d'impôts. Cette relance ferait long feu et nous en subirions les contraintes durablement, y compris dans les résultats de l'emploi. Il nous faut donc confirmer nos objectifs de dépenses pour 2002 et récuser toute dégradation structurelle de nos finances publiques. J'ajoute immédiatement que le choix de laisser jouer les stabilisateurs automatiques en recettes au cas où la reprise tarderait à se cristalliser témoigne que notre sérieux budgétaire n'est en rien de la comptabilité bornée.
Le choix de conjuguer au mieux une politique monétaire réactive et une politique budgétaire durable est partagé par nos partenaires européens. Notre approche n'est donc pas exactement la même que celle adoptée par les Etats-Unis, et cela pour trois raisons : la dégradation de la situation économique aux Etats-Unis est plus prononcée ; la mobilisation de la politique monétaire y a été plus précoce et plus ample qu'en Europe, les marges en la matière y sont sans doute maintenant plus faibles, les baisses d'impôt ont elles aussi été plus précoces et plus importantes en France qu'aux Etats-Unis. Sur 2000-2002, elles atteignent environ 2 points de PIB, soit l'équivalent de l'action de relance aux Etats-Unis.
Au niveau européen toujours, l'objectif de soutenir l'investissement devrait passer utilement par une action ad hoc de la Banque Européenne d'Investissement. Il s'agirait, pour ce qui la concerne, d'accélérer fortement son engagement dans le financement des grands projets d'investissement. Elle pourrait augmenter de 50 % à 75 % la part finançable des projets concrets, par exemple dans les domaines des transports, du tourisme, de l'environnement ou des télécommunications. Un effort ambitieux en faveur d'investissements européens d'infrastructure trouverait ici sa concrétisation par la mobilisation d'environ 12 Mds , voire plus, d'engagements supplémentaires en 2 ans dans l'Union Européenne. Une discussion sur ces possibilités a lieu précisément ces jours-ci. Nous souhaitons que la BEI joue pleinement son rôle en ce sens dans la perspective des propositions qui seront faites au Conseil Européen de Gand.
4.2. Il s'agit aussi de consolider la consommation des ménages.
L'incertitude actuelle majeure concerne l'investissement . Mais, à court terme, le réveil effectif des projets d'investissement passe aussi par une consolidation de la demande des ménages anticipée par les entreprises. Reprise de l'investissement et dynamisme de la consommation se nourrissent mutuellement, il faut donc agir pour l'un et pour l'autre.
Afin de consolider la demande des ménages, il vous est proposé, outre les mesures 2002 évoquées plus haut, d'anticiper dès la fin 2001 une augmentation de la prime pour l'emploi (PPE). Grâce à une mobilisation exceptionnelle des services, cette opération pourrait être engagée d'ici la fin de l'année et versée en janvier. Cette mesure utile pour favoriser l'emploi et la consommation des ménages représentera, s'il s'agit d'une augmentation de 50 %, 0,6 Mds (4 MdsF), et pour un éventuel doublement 1,2 Mds (8 MdsF) supplémentaires allant aux personnes dont le revenu mensuel du travail est inférieur à environ 1600 euros. La volonté du gouvernement est de concilier le soutien à l'activité et la consolidation des finances publiques. L'anticipation de la PPE qui, techniquement, figurera dans le collectif 2001, n'entraînera aucun effet sur l'évolution du déficit en 2002. Nous proposons cette anticipation. Avant de fixer l'exacte augmentation retenue, le gouvernement écoutera la représentation nationale, et particulièrement les parlementaires de la majorité.
4.3 Stimuler l'investissement des entreprises.
Après examen des différentes pistes possibles, la meilleure solution pour conforter l'investissement des entreprises apparaît celle d'un amortissement exceptionnel, bien ciblée sur son objet. Cette mesure -un amortissement exceptionnel de 30 % des investissements pour les biens acquis entre demain, 17 octobre 2001, et le 31 mars 2002- améliorera le calendrier d'action des entreprises. Elle ne constituera pas une dépense pérenne pour les finances publiques. Elle évitera que trop d'entreprises ne décalent dans le temps leurs projets d'investissement. Elle permettra de compenser en partie la prime de risque apparue depuis quelques semaines. A ce titre elle sera favorable à l'emploi. Cette mesure sera inscrite dans le projet de loi de finances rectificative pour 2001.
Cette action en faveur de l'investissement sera complétée par un effort significatif pour soulager la trésorerie des entreprises. Depuis 1993, l'Etat a envers les entreprises une dette née lors de la suppression du décalage d'un mois dans le remboursement de la TVA. Cette dette devait être remboursée progressivement jusqu'en 2007. Nous nous proposons d'effectuer, dès le début 2002 et par anticipation, son remboursement intégral. Cela correspondra à l'injection rapide d'une trésorerie d'environ 1,2 MdT dans près de 15 000 entreprises. Ce remboursement anticipé prendra comptablement la forme d'un remboursement de dette, sans impact sur le solde d'exécution de la loi de Finances.
Certaines PME - le Secrétaire d'Etat François Patriat y insiste à juste titre- éprouvent depuis quelques semaines davantage de difficultés dans leurs relations avec les banques. Si ce phénomène n'est pas généralisé, il freine cependant l'activité. Nous voulons renforcer l'effort public en faveur des PME, de la création d'entreprises et de l'innovation. Outre l'assouplissement déjà décidé pour le passage des petites entreprises aux 35 heures, plusieurs séries d'actions seront donc déployées, auxquelles l'Etat consacrera 150 MT.
La BDPME recevra une dotation en capital exceptionnelle destinée à augmenter la capacité d'engagement des fonds de garantie gérés par Sofaris et à conforter l'action du Crédit d'Equipement des PME. Ces sommes permettront d'accroître rapidement l'offre générale de crédit aux PME et de soutenir leur effort d'investissement.
Dans la période actuelle de ralentissement, certains secteurs innovants se heurtent à des obstacles accrus pour financer leur activité. Or, tout en consolidant la croissance d'aujourd'hui, nous devons préparer les développements futurs. Dans cet esprit, conformément au souhait exprimé par beaucoup d'entre vous, une action spéciale sera engagée pour les biotechnologies, secteur qui présente un intérêt stratégique. La France doit se placer dans la tête du peloton européen pour le nombre, la qualité et les perspectives de développement des entreprises de biotechnologies. Nous avons donc décidé de créer au sein de la BDPME un fonds spécifique, qui garantira les prêts à long terme souscrits par les entreprises biotech pour démultiplier leur effort de recherche et favoriser leur transition en société pharmaceutique.
Enfin, un fonds de co-investissement pour les jeunes entreprises technologiques sera immédiatement installé. Doté de 60 MT à parité par l'Etat et la Caisse des Dépôts, ce Fonds interviendra aux côtés des fonds d'amorçage ou des fonds de capital-risque, et à leur demande. Il contribuera au renforcement des fonds propres des jeunes entreprises et facilitera leur croissance.
L'ensemble de ces dispositions devrait consolider significativement l'investissement.
4.4.Aider les secteurs menacés par les attentats et favoriser le redémarrage de ceux que le ralentissement a pénalisés.
A la suite des attentats du 11 septembre, plusieurs secteurs ont été particulièrement touchés. Le transport aérien a subi un choc important. Les trafics ont baissé, certaines compagnies -déjà fragilisées avant les événements - sont aujourd'hui dans une position difficile. Cela se répercute sur l'industrie aéronautique. Nous sommes loin de la crise de 1991 ; néanmoins, nous devons être vigilants et actifs, comme l'est mon collègue J.C. Gayssot, et agir de façon coordonnée avec nos partenaires européens. Le Gouvernement a annoncé hier un plan de soutien d'un montant total de 300 M. Pour rétablir la confiance des usagers dans le transport aérien, il faut accroître la sécurité aérienne et des aéroports. Au-delà, le gouvernement a décidé d'octroyer deux aides économiques ponctuelles au secteur aérien. La première permettra aux compagnies d'affronter les conséquences financières de la fermeture du ciel aérien américain dans les jours qui ont suivi les attentats, à hauteur de 50 MT. De plus, nous prolongerons le 24 octobre, jusqu'à la fin de l'année, le dispositif instauré mi-septembre, de garantie des compagnies aériennes contre les risques de guerre et de terrorisme. L'ensemble de ces dispositions seront bénéfiques pour le secteur aérien.
Les attentats du 11 septembre ont également touché le secteur des assurances. Il est trop tôt pour connaître exactement l'ampleur de tous les sinistres. On estime que les compagnies françaises pourraient être concernées à hauteur d'environ 1 Md. C'est un choc important, même s'il reste contenu par rapport notamment aux dommages des tempêtes de Noël 1999. Au-delà des dommages directs, les assureurs doivent pouvoir conserver leur rôle d'amortisseur des fluctuations des cours boursiers, en ne vendant pas structurellement des actions pour dégager les liquidités nécessaires au versement des indemnités. Afin de lisser l'impact sur leur bilan, la Commission de contrôle des assurances examinera au cas par cas le niveau des provisions pour dépréciation durable, compte tenu des situations exceptionnelles, pour permettre l'étalement dans le temps. La provision d'égalisation, qui vise à prévenir certains risques d'intensité exceptionnelle, verra son champ étendu pour couvrir les risques de terrorisme, de guerre et transport aérien ; sa durée sera augmentée. Enfin, la franchise sur la taxe sur les boni de liquidations sera relevée afin de favoriser la constitution de provisions suffisantes.
J'indique enfin que, en liaison avec les départements ministériels compétents, un contact immédiat est pris avec le secteur du tourisme pour analyser la situation et préciser les dispositions favorables possibles.
Faciliter le redémarrage de l'investissement dans les télécommunications.
Le secteur des télécommunications est actuellement en difficulté, avec des conséquences majeures pour les équipementiers, cette situation pesant fortement sur l'emploi. L'une des raisons - d'ailleurs pas la seule - est l'incertitude concernant le téléphone dit de troisième génération, l'UMTS. Et il est exact que la situation du secteur, depuis un an, a considérablement changé. Afin de faciliter la mise en uvre de cette nouvelle technologie et pour tenir compte des nouvelles données économiques et industrielles, le Gouvernement, sur la proposition de C. Pierret et de moi-même, et dans le respect des prérogatives de l'Autorité de Régulation des Télécommunications (ART), a décidé d'adopter le dispositif suivant :
Nous souhaitons que la procédure soit ouverte pour les deux licences UMTS restantes dans les délais les plus rapides. Le prix se composera d'une partie fixe, avec un "ticket d'entrée" fixé à 619 M, payable en 2002 pour les nouveaux entrants, et d'une partie variable assise sur le chiffre d'affaires généré par l'activité UMTS de chaque opérateur. La durée des licences sera portée de 15 à 20 ans (pour tenir compte des retards de calendrier). L'ART souhaitera sans doute réaffirmer la possibilité de mutualiser et de partager les infrastructures entre les opérateurs et maintenir l'exigence, essentielle, de couverture la plus large du territoire.
Comme l'exigent le droit et l'équité, les mêmes conditions s'appliqueront aux licences déjà attribuées, qui ne seront pas remises en cause.
Les dispositions nécessaires pour ces adaptations seront prévues dans la présente loi de finances.
Il nous a semblé, en effet, après un examen très attentif, que ces conditions tenaient un compte raisonnable des reports techniques dans la mise en oeuvre de cette technologie et qu'elles devaient permettre la concrétisation de notre stratégie industrielle. Au total, la puissance publique devrait percevoir des sommes proches de celles initialement prévues, avec une séquence de paiement adaptée. Les moins-values de recettes pour le Fonds de Réserve pour les Retraites pourront être compensées par le versement de recettes de privatisation. L'ensemble du secteur devrait s'en trouver relancé.
L'effort d'investissement de l'Etat dans ces différents secteurs utilisera le canal des dotations en capital. Ce sont en effet nos entreprises publiques qui vont agir, qu'il s'agisse d'Aéroports de Paris (ADP), des aéroports de province ou de la BDPME. L'Etat jouera pleinement son rôle d'actionnaire en les dotant financièrement. Le Fonds de Réserve des Retraites bénéficiera également de recettes d'ouverture du capital. Face à un passif de long terme clairement identifié, l'Etat a donc décidé d'affecter des éléments de son actif. Concernant les dépenses de fonctionnement - surtout en matière de nouveaux moyens humains consacrés à la sécurité aéroportuaire - le ministre des Transports a annoncé hier une augmentation des taxes de sûreté.
Les ressources en capital nécessaires proviendront de l'ouverture du capital, à des investisseurs de long terme et au marché, d'une entreprise du secteur autoroutier, Autoroutes du Sud de la France, ASF. Conformément au droit, cette opération ne nécessite pas de disposition législative. A l'issue de l'opération, l'Etat restera majoritaire dans la société. En étant coté, ASF, dont les personnels sont déjà régis par le droit privé, disposera sur les marchés financiers des moyens de se développer en France et à l'étranger dans le secteur des concessions, tout comme Cofiroute, société privée, a pu le faire.
Au total, ce plan de consolidation de la croissance comportera des effets concrets sur le revenu, sur la consommation et sur l'investissement. Il s'inscrit dans notre stratégie à moyen terme des finances publiques. L'évolution de la dépense publique ainsi que le déficit de l'Etat resteront inchangés en 2002 par rapport au projet de budget. L'équilibre de moyen terme ne sera pas modifié.
Au-delà de ses effets mécaniques, il témoigne de l'engagement du Gouvernement à préserver notre potentiel de croissance
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, la conviction qui nous anime est que, pour obtenir un sentier de croissance soutenu, les autorités publiques doivent jouer sur tous les leviers en leur pouvoir, indiquer clairement leurs choix, ne pas inquiéter à bon compte, ne pas rassurer à mauvais escient.
La bourrasque est réelle, l'incertitude, notamment extra-économique, est incontestable. Mais j'ai essayé de montrer que, grâce aux Français, notre économie dispose des ressources rendant possible le rebond. Nos performances globales et sectorielles ,qu'il s'agisse du rythme moyen de la croissance, de la maîtrise de l'inflation, de la qualité de la gestion, du dynamisme de nos entreprises, nous placent dans le peloton de tête européen et mondial. Nous devons garder à l'esprit ces réalités qui sont aussi celles d'une action désormais envisagée à l'échelle européenne.
Car dans cet environnement international troublé, le budget que nous vous présentons est le premier totalement présenté en euros. Cette révolution tranquille n'est pas indifférente à l'évolution de la situation économique. Dans 77 jours, plus de 300 millions d'Européens utiliseront la monnaie unique avec laquelle ils se seront familiarisés dès la mi-décembre grâce aux 53 millions de sachets de premiers euros. Cet événement marquera l'aboutissement d'un processus pour les acteurs économiques, les citoyens, mais aussi la promesse d'une Europe qui doit être plus forte et plus solidaire. Dans les événements dramatiques que nous connaissons, l'euro nous a protégés : sans lui, le franc aurait peut-être été attaqué, les taux d'intérêt auraient augmenté, les politiques monétaires au sein de l'Union auraient divergé, nos économies auraient été encore plus fragilisées. Je suis convaincu que l'euro continuera à jouer ce rôle de bouclier pour notre économie et notre pouvoir d'achat.
Alors, quel rôle pour la politique économique ? Si l'Etat ne peut pas tout, il doit faire tout ce qui est en son pouvoir afin de favoriser la croissance. Pour le Gouvernement de Lionel Jospin, le consensus grandissant autour de cette idée -"oui, la politique peut jouer un rôle utile"- représente, sinon un hommage tardif, en tout cas un progrès. Et si les ultra-libéraux d'hier manifestent désormais envers l'Etat le zèle des néophytes, nous acceptons avec bonhomie l'apport de ces nouveaux convertis. Depuis 1997, notre politique économique a permis à notre pays de profiter mieux que d'autres de la bonne conjoncture internationale. Dans un contexte plus difficile, elle doit nous permettre d'engager le rebond pour les prochains trimestres.
Nous savons qu'il n'y a jamais de certitude en économie. Particulièrement en des temps comme ceux-ci. Les terroristes peuvent malheureusement tuer des vies, ils ne doivent pas pouvoir détruire nos économies et nos sociétés. Notre tâche n'est pas, ne peut pas être de prévoir à deux décimales près tout ce qui se passera dans 8 ou 15 mois. Ce serait en réalité le calcul sans la volonté, la prévision dans l'imprévoyance. Mais puisque telle est notre responsabilité que les citoyens se tournent vers nous pour définir le sens de l'action à mener - dans les deux acceptions du mot "sens", signification et direction - , notre devoir est de répondre. La réponse qui vous est proposée par le budget 2002 et par le plan de consolidation de la croissance que je viens de présenter est claire : c'est celle de l'activité, de la volonté, et de la solidarité.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 17 octobre 2001)
Mesdames et Messieurs les Députés,
Notre débat sur le budget 2002 intervient dans des circonstances singulières. Le 11 septembre, une organisation criminelle, fondée sur les noces tragiques de l'intégrisme et de l'argent, a lancé la première offensive de régression totale en ce nouveau siècle. En ce moment même, une action militaire est engagée en réponse à ces attentats meurtriers. Ces événements, aux conséquences humaines, diplomatiques, politiques considérables, nous concernent tous et ils ne sont pas sans incidences économiques. Ils montrent que, malheureusement, la globalisation des risques n'est pas moins rapide que celle des progrès. Aucun pays n'est à l'abri des menaces que fait peser la terreur sur l'activité et les échanges. L'incertitude et le doute gagnent beaucoup d'esprits.
Ces inquiétudes, nous devons les comprendre, et d'abord comprendre qu'elles sont légitimes. Mais, dans le même temps, notre devoir - celui de tous les responsables - n'est pas d'ajouter le doute au doute. Notre devoir économique, c'est d'analyser autant qu'il est possible les évolutions récentes de la conjoncture et les perspectives ; de réagir face au choc et de favoriser, par les orientations de notre politique économique, un rebond de l'activité. C'est de chercher à renforcer la confiance de nos concitoyens dans les capacités de notre économie, en privilégiant la lucidité et la volonté et en évitant la dangereuse tyrannie du court terme.
Dans cet esprit, vous remerciant toutes et tous pour votre travail précieux, en particulier le Président Henri Emmanuelli, le rapporteur général Didier Migaud ainsi que tous les membres de la Commission des Finances, je souhaite, avant de vous présenter les grandes orientations du budget 2002 préparé avec Florence Parly et sous l'autorité du Premier ministre, revenir d'abord sur les évolutions de la conjoncture. De notre capacité à expliquer les faits, de notre volonté d'éclairer à long terme les choix, de notre solidité dans l'épreuve, dépend aussi le rebond de l'économie elle-même.
I Quelles sont les causes du ralentissement et les perspectives de croissance de notre économie ?
1.1. Aux Etats-Unis et dans la zone Euro, plusieurs éléments récents nous permettent de mieux comprendre les raisons du ralentissement qui a précédé les attentats, les conséquences possibles des événements de septembre et la situation de la France.
Les dernières données américaines, celles disponibles pour la zone Euro, jettent en effet une lumière un peu nouvelle sur le ralentissement de l'activité dans les deux zones. Sauf en France, le ralentissement est intervenu plus tôt qu'on ne l'a généralement dit - en réalité dès le second semestre 2000. Même s'il a été plus marqué aux Etats-Unis, ce ralentissement s'est produit d'une façon quasi simultanée des deux côtés de l'Atlantique. Ce n'est pas seulement l'investissement des entreprises qui a diminué, c'est aussi la consommation des ménages qui s'est tassée. Ce qui signifie qu'au-delà de la spécificité du choc américain (liée au surinvestissement) et de ses effets de transmission sur les entreprises européennes, un phénomène semblable s'est produit au même moment dans les deux zones: ce phénomène, c'est principalement la hausse des prix du pétrole et, plus récemment, celle des prix alimentaires, qui ont grignoté une part du pouvoir d'achat et handicapé la consommation.
Cette analyse implique que le redémarrage en Europe, qui dépendra évidemment beaucoup de la reprise aux Etats-Unis (car le Japon restera vraisemblablement en récession et les pays émergents seront touchés), tiendra aussi à la baisse des prix du pétrole. Si cette baisse se confirme dans les mois à venir, elle constituera une très bonne nouvelle pour nos économies. Elle pourrait contrecarrer les effets négatifs d'un ajournement de la reprise américaine.
1.2. Comment analyser la conjoncture française en 2001 et en 2002 ? D'abord, contrairement à ce que voudraient nous faire croire les Cassandre de tout poil, notamment celles et ceux qui misent sur le recul de la conjoncture pour espérer les faveurs de l'électorat, notre économie n'est pas au sens propre en récession. L'INSEE prévoit un chiffre légèrement supérieur à 2 % en 2001. Il s'appuie sur le dynamisme actuel de la consommation des ménages qui compense l'atonie de la demande des entreprises et une demande externe ralentie. Les baisses d'impôts décidées auparavant et survenues en septembre, ainsi que l'allocation de rentrée scolaire, - au total plus de 6 Mds d' - ont encouragé en France la bonne tenue de la consommation au moment où les attentats auraient pu la déprimer. Les tout derniers indicateurs montrent d'ailleurs que la production industrielle a nettement progressé cet été.
S'agissant de la croissance 2002, nous nous trouvons dans une situation complexe où coexistent deux tendances opposées. D'une part, notre économie présente des fondamentaux solides. Ces quatre dernières années l'emploi a enregistré sa plus forte croissance depuis trente ans. L'effort d'équipement des entreprises a été soutenu, avec une progression annuelle proche de 7 %. La rentabilité des entreprises est restée en général satisfaisante. Le déficit des administrations est nettement inférieur à ce qu'il était en 1997, à l'arrivée de ce gouvernement, même s'il est encore trop élevé. Nous avons su moderniser notre outil industriel, public et privé, tout en développant nos activités de services.
En outre, certaines évolutions récentes peuvent faciliter un rebond de l'activité. Le ralentissement de près d'un point de l'inflation sur douze mois est favorable au pouvoir d'achat des salaires. Baisse de l'inflation et hausse du salaire nominal devraient permettre de compenser en partie l'impact du ralentissement des créations d'emplois sur le pouvoir d'achat du revenu des ménages. Les baisses d'impôts confortent cette dynamique. Une consommation des ménages robuste peut être espérée en 2002. Une reprise modérée de l'investissement est, elle aussi, envisageable début 2002 après l'ajustement de 2001. Car contrairement à l'économie américaine, notre économie ne souffre pas de surinvestissement. Les entreprises françaises devraient bénéficier d'une demande des ménages soutenue et de conditions financières favorables. A ces éléments, qui entraînent à eux seuls une accélération de l'activité par rapport à l'étiage 2001, peuvent s'ajouter les effets d'un rebond de l'activité aux Etats-Unis.
En contrepoint, il y a les conséquences sur la conjoncture des attentats du 11 septembre. En 5 semaines, les analyses des experts et des commentateurs ont beaucoup varié. Dès le lendemain des attentats, j'avais exposé à votre Commission des Finances trois risques immédiats : le risque pétrolier, le risque boursier, le risque psychologique. Le risque pétrolier ne s'est pas produit, nous devons naturellement rester vigilants, surtout maintenant que la riposte militaire des Etats-Unis est engagée. Le risque boursier a bien eu lieu, quoique l'essentiel du choc ait été rattrapée ; la réaction rapide et coordonnée des autorités financières et monétaires a été salutaire. Le troisième risque porte sur la confiance, et c'est peut-être aujourd'hui le plus sérieux. Psychologie et économie sont liées. Ce véritable "choc d'incertitude" conduit souvent à une perplexité des chefs d'entreprise en matière d'investissement. La prime de " risque " sur les projets d'équipement a augmenté et les perspectives de croissance sont plus incertaines. Une réduction des projets d'investissement peut susciter un cercle négatif où la réduction de la dépense des entreprises pèse sur l'emploi et, finalement, sur la consommation. Ce serait donc une erreur que de dissocier le risque sur la consommation et le risque sur l'investissement, et de ne vouloir répondre qu'à l'un d'entre eux. Le Gouvernement ne commettra pas cette faute - j'y reviendrai dans un instant.
Car le choc d'incertitude est d'abord dans nos têtes. Ce que veulent les terroristes, c'est déboussoler nos comportements et déformer notre vision de la réalité. Il y a une vraie bataille à mener sur ce front. Pour la remporter, il fallait d'abord trouver le principe mobilisateur. On a parlé de "patriotisme économique". Du Gouvernement et des bancs de la majorité est venu cet appel. Les acteurs économiques, consommateurs et chefs d'entreprises, l'ont en général relayé. Prolonger cette résistance économique, c'est bien sûr rappeler la vérité des fondamentaux comme je viens rapidement de le faire, c'est aussi engager deux séries d'actions. D'une part, indiquer le cap en réaffirmant les choix budgétaires et fiscaux qui sont les nôtres depuis le début de la législature et qui ont montré leur pertinence face aux chocs que nous avons connus, crises financières ou flambée pétrolière. D'autre part, nous devons faire preuve de réactivité face aux événements, en prenant toutes les mesures susceptibles de favoriser le rebond de l'économie.
II. Les principaux axes du budget 2002.
Pour construire le budget 2002, nous avons dû à la fois dégager des marges et cibler nos priorités.
Depuis 1997, nous avons redéployé chaque année près de 5 Md, contribuant ainsi à financer les mesures nouvelles élaborées par le Gouvernement et souhaitées par les Français. Ce mouvement sera poursuivi en 2002 avec un redéploiement de 6 Md, ce qui sur la période 1998-2002 représentera au total 26 Md. Au terme de cette gestion active de la dépense, plus de 80 % de la progression du budget de l'Etat auront pu être affectés aux secteurs prioritaires que sont l'éducation, l'emploi et la lutte contre les exclusions, la sécurité, la justice, la culture, ainsi que l'environnement. Les budgets correspondant à ces secteurs prioritaires ont progressé de 17,2 % en valeur depuis 1997 contre 3,2 % pour les autres. Le budget de l'éducation a augmenté de 9 Md depuis 1997 ; celui de l'emploi et de la solidarité, de 4 Md. Cette orientation sera poursuivie. Les collectivités locales verront en 2002 leur dotation globale de fonctionnement augmenter de 4,1 %, portant la progression des crédits pour la législature au double du fameux "pacte de stabilité" décidé en leur temps par MM. Chirac et Juppé.
Un effort exceptionnel sera conduit en faveur de l'emploi et de la lutte contre les exclusions qui constitue notre priorité absolue. Dès juillet, le Gouvernement a réagi à la dégradation sur le marché du travail en décidant d'accroître de 50 000 le nombre de contrats aidés disponibles d'ici la fin de l'année (30 000 contrats emploi-solidarité et 20 000 stages). Afin d'accompagner les personnes les plus en difficulté sur le marché du travail, la Ministre de l'Emploi est chargée de mobiliser les services de l'Etat pour que les dispositifs - contrats aidés, emplois jeunes, parcours TRACE - soient pleinement et rapidement activés. L'ensemble des dispositifs destinés à faciliter la reprise d'un emploi ont permis depuis le début de la législature de réduire de près d'1 million le nombre des personnes au chômage, ce qui constitue un résultat sans précédent. Je pense notamment aux allègements de charges sur les bas salaires, à la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle, à la réduction du temps de travail, aux emplois jeunes, à l'accompagnement personnalisé des chômeurs de longue durée dont le nombre a baissé de 40 % depuis 4 ans, ou encore aux importantes mesures améliorant la rémunération du travail pour les bas revenus : prime pour l'emploi, réforme de la taxe d'habitation et des allocations logement. Bref, malgré les difficultés, malgré parfois les véritables sinistres industriels qui blessent toute une région, il est essentiel que l'objectif du plein emploi soit maintenu.
1- En 2002, les dépenses du budget de l'Etat s'élèveront à 266 Md avec une croissance de 0,5 % en volume.
Conformément à la feuille de route que nous nous sommes fixés tout au long de la législature, nous avons retenu 3 priorités principales en 2002.
Nous avons choisi de renforcer et de continuer à moderniser l'Education nationale. Pour la première fois, le seuil des 400 MdF sera franchi (61,4 Md). Cela représente près du quart de nos dépenses. L'importance de ce cap n'est pas tant dans la barre comptable qui est franchie que dans l'utilisation des crédits et les réformes qu'ils rendent possibles. Il s'agit d'une augmentation des crédits de 4 % en 2002 et, depuis 1997, d'une progression de près de 20 %. Affecter concrètement des moyens supplémentaires à nos écoles, à nos collèges, à nos lycées, à nos universités, donc à ceux qui y travaillent au quotidien, c'est préparer l'avenir. Je constate que, dans l'ensemble, sous la conduite du Ministre Jack Lang, la rentrée, les rentrées se sont bien effectuées.
Notre volonté dans ce domaine est parfois brocardée. On entend parfois dire dans l'hémicycle " on n'a pas besoin de tout cela !". Mais sur le terrain, je rencontre peu de parlementaires demander de fermer une petite classe d'une zone rurale " pour faire des économies " J'entends plutôt des élus de zones rurales ou urbaines et de quartiers populaires exiger des moyens supplémentaires, un encadrement renforcé - en enseignants, en infirmières, en emplois-jeunes. Le Gouvernement et la majorité font le maximum pour répondre à ces demandes et accorder davantage de moyens pour mieux éduquer les enfants qui en ont le plus besoin. Nous nous sommes mobilisés pour équiper et sécuriser nos universités ; c'est le sens du plan " Université du troisième millénaire ". Comme nous nous y étions engagés, nous avons pris des mesures en faveur du statut des étudiants. La priorité à l'éducation nationale n'est pas qu'un slogan, c'est un fait. Un fait d'autant plus important que l'actualité démontre combien il est précieux de compléter notre action de formation par un vaste effort culturel-qui atteindra pour la première fois 1 % du budget en 2002 - ; et combien il est essentiel pour la France de pouvoir conforter par l'enseignement de l'école cette valeur fondamentale qu'est la laïcité.
Nous voulons aussi renforcer la sécurité et la justice pour les rendre plus efficaces et plus proches de nos concitoyens. Nous étions évidemment conscients de cette nécessité dès avant le 11 septembre. S'agissant de la sécurité, nous avons depuis 1997 augmenté les crédits de 18 %. La progression sera de 4,5 % en 2002, soit 3 000 policiers et 1 000 gendarmes supplémentaires. Au total, ce sont 251 000 gendarmes et policiers qui contribueront à assurer la sécurité - près de 9 % de plus qu'en 1997. Il n'y a pas de sécurité renforcée sans une justice rapide et efficace : c'est ce qui rend effective la sanction. En 2002, les crédits de la justice augmenteront de 5,7 %. 930 juges seront recrutés. Sur 5 ans, ce budget aura crû de 25 %. Au-delà des chiffres, il y a un état d'esprit à généraliser qui consiste, non pas à agiter le chiffon rouge de l'insécurité à des fins partisanes, mais à garantir à chaque citoyen ce droit républicain, cette liberté majeure qu'est le droit à la sûreté. Je le redis devant vous nettement : nous refusons non seulement l'insécurité mais l'impunité, qui heurte peut être encore davantage nos concitoyens. Nous entendons être justes, mais aussi être fermes. Fermes avec l'insécurité. Fermes avec les causes de l'insécurité. Et, avec le Ministre de l'Intérieur, nous prenons les dispositions concrètes, notamment financières, en ce sens.
Pour notre politique de sécurité, les attentats du 11 septembre soulèvent des enjeux spécifiques. Le Gouvernement les prend pleinement en compte. Les crédits consacrés à la défense en 2002 seront supérieurs à 2001. Ils permettront l'achèvement de la professionnalisation de nos armées ainsi que la commande ou la livraison des équipements prévus dans le cadre de la loi de programmation. Mais les dangers que font courir les terroristes concernent d'abord notre sécurité intérieure. Le plan Vigipirate renforcé et le plan Biotox constituent une première réponse. Je viens de souligner la priorité accordée aux effectifs de police et de gendarmerie. De même, nous accroissons les moyens du Secrétariat général à la Défense nationale, dont le budget a été consolidé tout au long de la législature, afin qu'il puisse amplifier ses opérations de défense civile. L'ensemble des ministères concernés par la protection des sites sensibles renforceront leurs dispositifs d'alerte.
J'ajoute qu'à la fois par souci de la justice et par mobilisation contre le terrorisme nous sommes résolus à mener une action vigoureuse dans le domaine de la lutte contre le blanchiment des capitaux et les flux spéculatifs, dans celui de la lutte contre les paradis fiscaux et contre toutes les structures ou entités non transparentes. Avant la tragédie du 11 septembre, nous avions déjà souligné les liens entre ces phénomènes et diverses sortes d'exactions, de trafics et de crimes. Comme nous l'avons montré lors de la présidence française de l'Union européenne, nous entendons être à l'avant garde de la régulation et de l'élimination des comportements fiscaux dommageables. Le récent G7-G8 de Washington a permis des avancées concrètes. Ce qui paraissait chimérique il y a quelques années commence aujourd'hui à faire consensus et à recevoir une application pratique : bâtir un cadre plus transparent et plus solidaire pour l'économie mondiale. Car, c'est bien la question du gouvernement de la globalisation qui est aujourd'hui posée. Construire un monde plus équilibré et mieux régulé, aider vraiment le Sud, agir pour le développement durable, lutter contre la pauvreté, ce n'est pas seulement nous prémunir contre certains excès de la mondialisation -je pense en particulier aux menaces qui pèsent sur l'environnement-, c'est aussi tenir en échec les entreprises terroristes, en traquant et en tarissant les flux financiers qui les alimentent et en désamorçant les frustrations populaires qu'elles manipulent. Pour nous, les financiers du terrorisme ne sont pas moins coupables que les terroristes eux-mêmes.
Notre troisième priorité est de défendre, de protéger et de valoriser l'environnement. Depuis le début de la législature, c'est le budget qui a bénéficié de l'augmentation la plus forte. Pour mettre l'environnement au coeur de nos politiques, il fallait sortir de la pénurie des moyens. L'an prochain, les crédits seront en hausse de 6,3 %. Sur l'ensemble de la législature, la progression avoisine les 60 % et 1000 emplois auront été créés, dont près d'un tiers pour la seule année 2002. C'était l'un des engagements forts de la majorité plurielle ; il est tenu. Nous le prolongerons à travers la position que défendra la France et le Secrétaire d'Etat François Huwart lors de la prochaine réunion de l'Organisation Mondiale du Commerce. Pour s'imposer dans les faits, le développement durable exige une réelle capacité d'expertise et des services suffisants sur le terrain. La maîtrise des risques en est un aspect essentiel. Les événements dramatiques de Toulouse nous le confirment. Comme l'a annoncé le Premier ministre, le contrôle des sites dangereux sera renforcé par la création de 150 postes d'inspecteurs des installations classées. Ces engagements illustrent notre volonté de prendre en compte toutes les dimensions de la sécurité des Français.
2- Le budget 2002 poursuivra le mouvement de baisse et de réforme des impôts.
En août 2000, le Gouvernement avait proposé un plan pluriannuel de baisses d'impôts pour un montant total de 18,3 Md (120 MdF). Pour des raisons structurelles et conjoncturelles, ces baisses d'impôts sont confirmées. L'estimation 2002 prévoit un allègement de 5,95 Md (39 MdF). Au total, cela portera la baisse à 18,9 Md (124 MdF).
L'une des plus importantes décisions pour renforcer le pouvoir d'achat par le retour à l'emploi sera le doublement de la Prime pour l'Emploi (PPE). Créée par la loi du 30 mai 2001, la PPE a été perçue pour la première fois lors de cette rentrée. Plus de 8 millions de foyers en ont déjà bénéficié, soit plus du quart des foyers, pour un montant moyen de 144 (950F). Le nombre des bénéficiaires va augmenter encore avec la prise en compte des personnes qui, malgré les efforts déployés, n'ont pas pu en bénéficier à temps. Au total, ce sont plus de 8,5 millions de foyers qui seront concernés dès cette année par le dispositif. Nous proposons qu'en 2002 le montant de la PPE soit doublé pour atteindre 458 (3 000 F) au niveau d'un SMIC. Les majorations forfaitaires lorsqu'un seul conjoint travaille ou pour enfants à charge seront indexées comme les prix de 2001. Cette mesure représentera 1,1 Md au budget 2002. Elle n'est évidemment en rien contradictoire avec les augmentations de salaires. Elle améliorera les conditions de vie de travailleurs modestes.
Au cours de l'année 2002, les taux du barème de l'impôt sur le revenu continueront également de baisser : - 0,75 % pour les 4 premières tranches et - 0,5 % pour les 2 dernières. Cela représente 1,98 Md (13 MdF) de baisses. Comme en 2001, l'évolution sera calculée et inscrite sur les avis d'imposition à la fin de l'été, ainsi que le taux d'impôt réellement supporté.
L'impôt sur les sociétés passera, lui, à 34,33 %, grâce à une nouvelle réduction de la surtaxe Juppé. Pour les entreprises qui acquittent la contribution sur les bénéfices des sociétés, le taux de l'impôt sur les sociétés diminuera d'un point.
Le plan de suppression de la part salariale de la taxe professionnelle, lancé par la loi de finances pour 1999, se poursuivra. L'abattement sur cette part passera de 152 444 (1000000 F) en 2001 à 914 694 (6000000 F) en 2002.
Nous réaffirmons ainsi notre volonté de consolider la consommation des ménages, de favoriser l'investissement et de soutenir l'emploi.
D'autres mesures s'ajouteront en 2002, cohérentes avec les priorités de la législature.
Elles sont d'abord destinées à renforcer l'impératif de solidarité. Solidarité internationale : vous est proposé un dispositif d'amortissement exceptionnel des équipements pour la recherche sur des maladies qui, comme le Sida, frappent particulièrement les pays pauvres. Solidarité nationale : sont prévues 3 mesures favorisant les associations ainsi qu'à destination du logement social, en particulier pour faciliter l'accès à la location des personnes disposant de faibles revenus.
Seront également mises en place des dispositions fiscales nouvelles en faveur de l'initiative, de l'investissement et de l'innovation. Je souligne notamment l'ouverture progressive du Plan d'Epargne en Actions (PEA) aux actions européennes et l'augmentation corrélative du plafond du PEA à 120 000 (au lieu de 91 469 ).
Enfin, nous avons intégré les enjeux environnementaux dans nos choix fiscaux. Depuis 5 ans, plus de 30 mesures favorables ont été prises. Le budget 2002 en propose de nouvelles, à l'initiative du Ministre de l'Environnement Yves Cochet : un crédit d'impôt de 15 % sur les dépenses d'isolation thermique et de régulation du chauffage s'ajoutera à la baisse de TVA en vigueur depuis 1999 ; une amélioration du crédit d'impôt de 1 500 voté en 2000 pour l'achat d'un véhicule propre ; un meilleur accès des entreprises aux allègements de taxe professionnelle sur les équipements d'économie d'énergie.
Outre ces dispositions prévues par le Gouvernement, votre Commission des Finances a introduit plusieurs amendements qui seront examinés au cours de la discussion. Certains s'inscrivent dans le droit fil des priorités que nous nous sommes fixées, je pense en particulier à l'amélioration du régime micro-foncier qui porte la marque du Rapporteur général Didier Migaud. Je pense aussi au régime fiscal des chèques vacances tel que l'a suggéré le Président Emmanuelli. S'agissant des amendements concernant l'extension de la suppression de la vignette automobile, adoptée l'an dernier et à laquelle sont attachés notamment les parlementaires radicaux, ou de l'indexation de l'Impôt de solidarité sur la fortune récusée par le groupe communiste, les débats nous permettront de préciser les choses. Sur ces sujets comme sur les autres, le Gouvernement adoptera une attitude d'ouverture et de dialogue.
3- Le financement de nos priorités et les allégements d'impôts s'inscrivent dans le cadre d'une gestion publique rénovée et d'une réelle ambition de réformer l'Etat.
Le Gouvernement poursuivra en 2002 l'effort de simplification de la vie des usagers. Après la suppression de plus de 60 impôts ou taxes et l'allégement de nombreuses formalités pour les particuliers et les PME, c'est le sens de l'harmonisation proposée des durées et des délais d'option des petites entreprises pour les régimes fiscaux simplifiés. C'est aussi le but des mesures de simplification du paiement des impôts, notamment la dispense de constituer des garanties pour faire valoir une réclamation si elle porte sur un montant inférieur à 3 000.
La réforme de l'Etat ne s'accomplit pas par imprécations. Elle n'avance pas à coups de dénonciations du service public, ni d'ailleurs à coups de blocages de celui-ci. Pour réussir, elle suppose des actions concrètes et elle implique la concertation comme méthode. C'est le sens de la démarche que nous menons au sein du Minéfi, avec les Secrétaires d'Etat qui m'entourent et le plein soutien du Premier ministre.
Vous savez qu'a ainsi été élaboré et mis en place un nouveau code des marchés publics dont l'impact sera important dès 2002 sur la modernisation de la commande publique et les relations entre les administrations et leurs fournisseurs. Ce changement porte sur des enjeux massifs : près de 10 % de notre PIB, 250 000 marchés publics chaque année dont 190 000 pour les seules collectivités locales. Procédures clarifiées, sécurité juridique renforcée, substitution de la règle du " mieux disant " au rite du " moins disant ", ouverture plus large aux PME, réduction des délais de paiement - cette réforme dont on parlait depuis une dizaine d'années a enfin vu le jour et elle sera positive.
Le même objectif - libérer la décision publique de carcans procéduriers pour aller vers plus d'efficacité- a orienté l'adoption de notre nouvelle "constitution budgétaire". La réforme de l'ordonnance organique de 1959 promulguée le 1er août 2001 constitue, vous le savez pour l'avoir permise après 37 tentatives infructueuses, une double avancée : elle renforce les droits du Parlement - droit d'amendement et contrôle de l'exécution du budget -, elle contribue à l'amélioration de la gestion publique par une plus grande liberté accordée aux gestionnaires en contrepartie d'une plus grande responsabilité. A l'intersection de ces 2 préoccupations, se trouve la création de " programmes " reflétant nos grandes politiques publiques. Accompagnés d'indicateurs, ces programmes renforceront la lisibilité des choix que le Gouvernement proposera au Parlement et structureront l'action de l'administration. Cette loi aura une première traduction concrète dans le budget 2002. Voilà une révolution silencieuse qui fait progresser la réforme de l'Etat, jugée par certains impossible.
C'est dans cet esprit également que nous avons redéfini le programme de gestion de la dette. La représentation nationale disposera pour la 1ère fois en 2002 des indicateurs synthétiques lui permettant d'autoriser en pleine connaissance de cause la politique d'émission de la dette de l'Etat français et de contrôler sa mise en oeuvre. Là aussi, notre démocratie aura progressé.
Enfin, nous préparons le passage au 1er janvier 2002 à l'euro fiduciaire. Cette réforme, qualifiée de plus importante réforme économique et financière depuis 50 ans, sera, j'en suis convaincu, un succès. Elle a été préparée par de très nombreux partenaires que je remercie. La montée en régime s'opère d'une façon satisfaisante au sein même des services de l'Etat. Preuve, là aussi, que l'Etat peut se réformer. Sa pleine application interviendra en 2002.
III Je souhaite examiner trois critiques parfois formulées à l'encontre de notre politique économique et budgétaire.
3.1. Le Gouvernement n'aurait pas su mettre à profit la conjoncture favorable pour maîtriser la dépense publique. Nous parlons fréquemment entre nous de la "norme de dépense", comme si cette notion avait existé de toute éternité. En réalité, c'est ce gouvernement qui s'est donné, je cite, une " norme d'évolution de la dépense de l'Etat, fixée en volume, et indépendante de la conjoncture ". Notre idée initiale a été de rompre avec les politiques brutales et successives de relance et d'annulation de la dépense publique, qui cassaient souvent les efforts réalisés dans un secteur, stoppaient brutalement des projets en cours et décourageaient les gestionnaires.
Certains nous reprochent d'avoir été ou d'être budgétairement trop dispendieux. Voyons les chiffres. Sur les 6 budgets couverts par cette législature, les dépenses du budget de l'Etat auront augmenté au total de 1,8 % alors qu'elles avaient augmenté de 1,8 %, mais chaque année, de 1993 à 1997. Nous avons géré avec sérieux les dépenses de l'Etat, tout en finançant nos priorités. J'observe d'ailleurs que si, pendant la semaine et dans l'hémicycle, l'opposition nous reproche trop de dépenses, le week-end, quand vient le temps des réunions publiques et des émissions médiatiques, elle propose plutôt - y compris par ses représentants les plus éminents - des dépenses supplémentaires et un alourdissement des déficits.
De surcroît, notre norme de dépense s'inscrit dans une perspective pluriannuelle et s'intègre dans le programme triennal que nous déposons chaque année à Bruxelles. Cette démarche renforce la stabilité de l'action de l'Etat. Depuis 4 ans, la norme de dépense pour le budget général a constitué un instrument efficace de politique budgétaire, un outil de modération de la dépense, un moyen de redéploiement en faveur des priorités. Cette maîtrise, s'agissant des dépenses de l'Etat, peut bien sûr encore être améliorée et c'est un thème que j'aborde souvent en public comme en privé. Cela ne doit pas cacher les difficultés rencontrées dans le domaine des dépenses sociales, au premier chef en matière d'assurance maladie. Nous n'avons pas encore complètement réussi à convaincre qu'une hausse de la dépense n'était pas automatiquement synonyme d'amélioration de la santé. Du chemin reste à parcourir avec tous les partenaires de la santé publique. L'effort engagé dans le PLFSS 2002 devra certainement être poursuivi.
J'ajoute que c'est cette évolution de la dépense publique moins rapide que celle de la richesse nationale qui a permis et qui permettra de conduire durablement une politique d'allègement des charges et de réduction des déficits et d'envisager, comme c'est nécessaire, le retour progressif à l'équilibre. En 1997, pour eux qui l'auraient oublié, le déficit de l'Etat était de 300 MdF. Nous l'avons ramené aux alentours de 200 MdF en exécution 2000. Ce redressement des finances publiques françaises, qui demande à être poursuivi, a été plus rapide que dans la plupart des grands pays de la zone euro. Alors qu'en 1997, la France était dernière en Europe, elle se situe aujourd'hui dans la moyenne. Les exercices 2001 et 2002 marquent un palier conjoncturel car nous avons choisi de laisser jouer les stabilisateurs automatiques en recettes pour soutenir l'activité. C'est un choix de pilotage économique que nous assumons. Utile dans les circonstances présentes, il ne compromet pas notre objectif de retour à l'équilibre de moyen terme.
3.2. Une deuxième critique parfois émise est que le Gouvernement n'aurait pas suffisamment baissé les impôts, ou au contraire qu'il les aurait trop baissés. De toute façon, trop ou trop peu, il n'aurait pas assez avancé en matière de justice sociale.
Nos concitoyens ont changé de majorité en 1997 parce qu'ils voulaient changer de politique. Ils n'étaient sans doute satisfaits ni des perspectives sociales qui leur étaient offertes, notamment sur la lutte contre le chômage, ni des charges fiscales qui leur étaient imposées, en particulier dans la répartition des efforts consentis. Beaucoup, sauf semble-t-il les auteurs, gardent par exemple en mémoire l'augmentation de 2 points de la TVA décidée par MM. Chirac et Juppé entre 1995 et 1997, qui avait amputé le pouvoir d'achat de près de 60 MdF. Beaucoup se souviennent aussi du renoncement face à la fameuse fracture sociale.
La vision qui nous anime est différente. Nous respectons les principes républicains essentiels de consentement à l'impôt et d'égalité devant les charges publiques. Nous voulons partager avec justice les fruits de la croissance par des mesures fiscales et sociales appropriées. C'est dans cette direction que nous avons souhaité avancer.
Dans la conduite de la politique fiscale depuis 1997, nous nous sommes efforcés de procéder à davantage de redistribution pour le travail et la justice sociale. C'est le sens par exemple de la réforme intervenue des dégrèvements de taxe d'habitation en fonction du revenu ou de la baisse graduée de l'impôt sur le revenu, plus marquée en bas qu'en haut - on oublie souvent de le dire -, ou de la création de la PPE, largement approuvée par les Français.
Nous avons renforcé la consommation et l'investissement des ménages, en particulier des ménages les plus modestes, spécialement pour leur logement. C'est la raison de la baisse du taux normal de TVA et du taux réduit sur la rénovation du logement. C'est le but de la baisse des impôts sur les achats de logement et de la suppression du droit de bail.
Nous avons orienté nos choix fiscaux structurels principalement en faveur du travail. C'était l'objectif de la réforme de la taxe professionnelle, dont la part salariale disparaît progressivement, ainsi que de la lutte contre des niches fiscales improductives pour la collectivité ou des efforts de solidarité demandés aux plus fortunés. La consommation des ménages et les revenus du travail ont été au cur de nos orientations fiscales. Ces choix sont venus conforter les gains de pouvoir d'achat dégagés par les créations d'emplois. Au total, notre politique a permis de rééquilibrer dans un sens favorable au travail le partage de la valeur ajoutée.
Ces choix, nous ne les avons pas faits contre les entreprises. Nous le savons, ce sont elles qui créent d'abord des richesses et des emplois. C'est la raison pour laquelle j'ai toujours insisté pour que nous soutenions l'innovation, le développement des entreprises, la prise de risque et la compétitivité de notre économie. Je pense notamment à la loi sur l'épargne salariale, aux contrats d'assurance-vie en actions, à la création et au développement des bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises, au plan de baisse de l'impôt sur les sociétés, avec un accent spécial pour les PME.
Nous avons inscrit ces baisses dans le cadre de la préparation solidaire de l'avenir. Nous avons souhaité proposer une approche pluriannuelle, parce qu'elle est un gage de visibilité pour les entreprises ou les ménages et une garantie de soutenabilité. Cela, en nous attachant à respecter le principe de responsabilité.
Au total, je crois pouvoir dire que, malgré des insuffisances, les décisions prises dans ce domaine au cours de cette période ont été dans l'ensemble positives, avec notamment divers allègements d'impôt justes dans leurs effets redistributifs, dans leur ampleur et dans leur échéancier.
3.3. Selon certains, enfin, les hypothèses sur lesquelles est bâti le projet de budget pour 2002 manqueraient de réalisme.
Cette critique est émise en général par l'opposition. On pourrait se contenter de lui répondre en rappelant les discours catastrophistes qu'elle a multipliés depuis 4 ans. En période de croissance comme en phase de ralentissement, la nostalgie ne fait pas une politique.
Par exemple à l'automne 1997, lors du débat sur la loi de finances pour 1998, les mêmes considéraient que l'économie française devait s'effondrer à la suite de la crise asiatique. Résultat : notre économie a enregistré une croissance plus forte encore que celle que prévoyait le Gouvernement. En octobre 1998, les conséquences de la crise russe devaient, enrayer l'élan de notre économie entamé mi-1997. Résultat : l'économie française a enregistré une croissance plus forte que celle que prévoyait le Gouvernement. Pour le budget 2000, même critique et même résultat. Curieusement, l'année dernière, pour la 1ère fois, la perspective de croissance n'a pas fait l'objet de critiques sévères... Nous aurions dû nous en inquiéter. Il est vrai que la croissance était alors particulièrement vive. Pourtant, pour la 1ère fois depuis 1997, nous n'atteindrons pas l'objectif que nous nous étions fixé, la croissance cette année devant être d'un peu plus de 2 %, chiffre certes plus fort que celui de la plupart de nos partenaires, mais moins élevé que prévu.
Mais il faut aller au-delà de ce rappel. Toute hypothèse économique - nous évoquons pour 2002 un chiffre de 2,25 % ou 2,5 % -est par nature discutable. Surtout en période bouleversée. Nous avons, avec F. Parly, avec le Premier ministre, avec d'autres, examiné cette question d'une façon approfondie. Et nous avons décidé de maintenir une approche volontaire tout en soulignant qu'il convient d'être très prudent et pragmatique à l'égard de toute estimation.
Pourquoi ce choix ? D'abord parce que dans la conjoncture présente nous constatons que la situation économique dépendra en réalité pour une très large part d'éléments situés hors du champ économique : quelle riposte militaire et non militaire, quelles ripostes à la riposte, quelle durée, quelles réactions des populations dans divers pays, quelles conséquences psychologiques ? On peut redouter une dégradation ; on peut aussi espérer une amélioration et nous y travaillons les uns les autres. En tout cas cet aspect déterminant échappe à l'analyse économique elle-même.
J'ajoute que, si certains chaînons du raisonnement économique peuvent conduire à une analyse baissière, nos fondamentaux restent bons, ils sont même parfois les meilleurs en Europe. C'est le cas notamment pour le taux d'inflation qui est le plus bas de la zone euro. Nos performances d'inflation et de modernisation, nos progrès structurels dans la relation croissance-emploi, nos efforts pour réduire les impôts et les déficits, tout cela continuera de compter. J'y insiste : certains aspects décisifs évoluent -pour le moment en tout cas- dans le bon sens. En particulier le prix du pétrole qui a baissé de plus de 20 % depuis le 11 septembre, ainsi que les taux d'intérêt, ce qui emporte des conséquences positives sur les prix, le pouvoir d'achat et la croissance.
En outre, lorsque nous analysons le comportement de nos voisins européens, nous observons qu'ils retiennent en général des hypothèses supérieures à 2 % de croissance alors même que leurs performances sont voisines des nôtres ou inférieures : l'Allemagne a choisi en tous cas pour l'instant une hypothèse de 2,25 %, la Grande-Bretagne 2,25 %, l'Italie 2,3 %, l'Espagne 2,9 %,
Enfin, nous ne sommes pas -ni le gouvernement, ni les parlementaires- seulement des observateurs. Nous sommes des décideurs. Nous devons être réalistes ; nous devons aussi être volontaires. Nous savons que le pessimisme n'est souvent que l'alibi de l'attentisme ou du défaitisme. Certes, il ne sera pas facile d'atteindre une forte croissance. Nous devons donner le signal d'une démarche et d'une détermination, pour obtenir la croissance la plus soutenue possible. Nous retenons autant un objectif qu'une hypothèse. Et précisément, pour nous donner le maximum de chances d'aller vers cet objectif, nous pensons que, dans le cadre même du budget, des actions de consolidation sont nécessaires, un plan de consolidation de la croissance que je vais maintenant aborder.
IV. Le plan de consolidation de la croissance
Le diagnostic que je viens de porter invite en effet à utiliser l'ensemble des instruments disponibles pour organiser rapidement un plan de consolidation de la croissance. Il doit répondre à plusieurs conditions : soutenir l'investissement et la consommation, appuyer les secteurs les plus touchés, être conforme à nos engagements européens, ne pas peser sur le solde budgétaire 2002. La consolidation doit pouvoir s'opérer à partir de plusieurs séries d'actions :
- Mobiliser la politique monétaire tout en menant une politique budgétaire responsable ;
- Conforter la demande des ménages pour préserver l'emploi ;
- Stimuler l'investissement des entreprises ;
- Aider en particulier les transports aériens et l'assurance, durement touchés par les attentats, et faciliter le redémarrage des télécommunications.
4.1. Le premier instrument de consolidation est européen : c'est la politique monétaire accompagnant au niveau national une politique durable des finances publiques
La question qui nous est posée est simple et le débat qui l'accompagne légitime : quelle est, aujourd'hui, la meilleure politique économique pour favoriser le rebond de l'activité ? Comment utiliser au mieux l'arme monétaire et l'arme budgétaire pour anticiper la reprise ?
Ma conviction est que des marges de manuvre existent pour la politique monétaire. L'inflation est maîtrisée. Une action sur les taux, déjà engagée par la BCE, comporte deux avantages : elle s'exerce à l'échelle de l'Europe entière et non seulement dans un cadre national ; elle apporte une bouffée d'oxygène immédiate à nos entreprises. Même si elle ne fournit pas le démarreur de la reprise, elle peut en fournir le carburant. En favorisant une meilleure tenue du cours des actions, une baisse des taux relâche la pression exercée par les actionnaires sur les comportements des entreprises. La demande de celles-ci (investissements, stocks et consommations intermédiaires) est encouragée. Devant les risques d'assèchement du crédit liés à la montée des primes de risque, une baisse des taux d'intérêt est un instrument adapté. L'assouplissement de la politique monétaire est donc un outil prioritaire pour rétablir des choix d'investissement plus dynamiques. Naturellement, c'est au Conseil des Gouverneurs de la BCE d'en décider.
Dans ce contexte, ce serait une erreur que de compromettre la mobilisation de la politique monétaire par des choix budgétaires inadaptés. Si, comme certains nous le proposent, la dépense dérapait au niveau national, la baisse des taux serait ajournée au niveau européen. Entreprises et consommateurs se réfugieraient dans l'attentisme, par peur de nouvelles hausses d'impôts. Cette relance ferait long feu et nous en subirions les contraintes durablement, y compris dans les résultats de l'emploi. Il nous faut donc confirmer nos objectifs de dépenses pour 2002 et récuser toute dégradation structurelle de nos finances publiques. J'ajoute immédiatement que le choix de laisser jouer les stabilisateurs automatiques en recettes au cas où la reprise tarderait à se cristalliser témoigne que notre sérieux budgétaire n'est en rien de la comptabilité bornée.
Le choix de conjuguer au mieux une politique monétaire réactive et une politique budgétaire durable est partagé par nos partenaires européens. Notre approche n'est donc pas exactement la même que celle adoptée par les Etats-Unis, et cela pour trois raisons : la dégradation de la situation économique aux Etats-Unis est plus prononcée ; la mobilisation de la politique monétaire y a été plus précoce et plus ample qu'en Europe, les marges en la matière y sont sans doute maintenant plus faibles, les baisses d'impôt ont elles aussi été plus précoces et plus importantes en France qu'aux Etats-Unis. Sur 2000-2002, elles atteignent environ 2 points de PIB, soit l'équivalent de l'action de relance aux Etats-Unis.
Au niveau européen toujours, l'objectif de soutenir l'investissement devrait passer utilement par une action ad hoc de la Banque Européenne d'Investissement. Il s'agirait, pour ce qui la concerne, d'accélérer fortement son engagement dans le financement des grands projets d'investissement. Elle pourrait augmenter de 50 % à 75 % la part finançable des projets concrets, par exemple dans les domaines des transports, du tourisme, de l'environnement ou des télécommunications. Un effort ambitieux en faveur d'investissements européens d'infrastructure trouverait ici sa concrétisation par la mobilisation d'environ 12 Mds , voire plus, d'engagements supplémentaires en 2 ans dans l'Union Européenne. Une discussion sur ces possibilités a lieu précisément ces jours-ci. Nous souhaitons que la BEI joue pleinement son rôle en ce sens dans la perspective des propositions qui seront faites au Conseil Européen de Gand.
4.2. Il s'agit aussi de consolider la consommation des ménages.
L'incertitude actuelle majeure concerne l'investissement . Mais, à court terme, le réveil effectif des projets d'investissement passe aussi par une consolidation de la demande des ménages anticipée par les entreprises. Reprise de l'investissement et dynamisme de la consommation se nourrissent mutuellement, il faut donc agir pour l'un et pour l'autre.
Afin de consolider la demande des ménages, il vous est proposé, outre les mesures 2002 évoquées plus haut, d'anticiper dès la fin 2001 une augmentation de la prime pour l'emploi (PPE). Grâce à une mobilisation exceptionnelle des services, cette opération pourrait être engagée d'ici la fin de l'année et versée en janvier. Cette mesure utile pour favoriser l'emploi et la consommation des ménages représentera, s'il s'agit d'une augmentation de 50 %, 0,6 Mds (4 MdsF), et pour un éventuel doublement 1,2 Mds (8 MdsF) supplémentaires allant aux personnes dont le revenu mensuel du travail est inférieur à environ 1600 euros. La volonté du gouvernement est de concilier le soutien à l'activité et la consolidation des finances publiques. L'anticipation de la PPE qui, techniquement, figurera dans le collectif 2001, n'entraînera aucun effet sur l'évolution du déficit en 2002. Nous proposons cette anticipation. Avant de fixer l'exacte augmentation retenue, le gouvernement écoutera la représentation nationale, et particulièrement les parlementaires de la majorité.
4.3 Stimuler l'investissement des entreprises.
Après examen des différentes pistes possibles, la meilleure solution pour conforter l'investissement des entreprises apparaît celle d'un amortissement exceptionnel, bien ciblée sur son objet. Cette mesure -un amortissement exceptionnel de 30 % des investissements pour les biens acquis entre demain, 17 octobre 2001, et le 31 mars 2002- améliorera le calendrier d'action des entreprises. Elle ne constituera pas une dépense pérenne pour les finances publiques. Elle évitera que trop d'entreprises ne décalent dans le temps leurs projets d'investissement. Elle permettra de compenser en partie la prime de risque apparue depuis quelques semaines. A ce titre elle sera favorable à l'emploi. Cette mesure sera inscrite dans le projet de loi de finances rectificative pour 2001.
Cette action en faveur de l'investissement sera complétée par un effort significatif pour soulager la trésorerie des entreprises. Depuis 1993, l'Etat a envers les entreprises une dette née lors de la suppression du décalage d'un mois dans le remboursement de la TVA. Cette dette devait être remboursée progressivement jusqu'en 2007. Nous nous proposons d'effectuer, dès le début 2002 et par anticipation, son remboursement intégral. Cela correspondra à l'injection rapide d'une trésorerie d'environ 1,2 MdT dans près de 15 000 entreprises. Ce remboursement anticipé prendra comptablement la forme d'un remboursement de dette, sans impact sur le solde d'exécution de la loi de Finances.
Certaines PME - le Secrétaire d'Etat François Patriat y insiste à juste titre- éprouvent depuis quelques semaines davantage de difficultés dans leurs relations avec les banques. Si ce phénomène n'est pas généralisé, il freine cependant l'activité. Nous voulons renforcer l'effort public en faveur des PME, de la création d'entreprises et de l'innovation. Outre l'assouplissement déjà décidé pour le passage des petites entreprises aux 35 heures, plusieurs séries d'actions seront donc déployées, auxquelles l'Etat consacrera 150 MT.
La BDPME recevra une dotation en capital exceptionnelle destinée à augmenter la capacité d'engagement des fonds de garantie gérés par Sofaris et à conforter l'action du Crédit d'Equipement des PME. Ces sommes permettront d'accroître rapidement l'offre générale de crédit aux PME et de soutenir leur effort d'investissement.
Dans la période actuelle de ralentissement, certains secteurs innovants se heurtent à des obstacles accrus pour financer leur activité. Or, tout en consolidant la croissance d'aujourd'hui, nous devons préparer les développements futurs. Dans cet esprit, conformément au souhait exprimé par beaucoup d'entre vous, une action spéciale sera engagée pour les biotechnologies, secteur qui présente un intérêt stratégique. La France doit se placer dans la tête du peloton européen pour le nombre, la qualité et les perspectives de développement des entreprises de biotechnologies. Nous avons donc décidé de créer au sein de la BDPME un fonds spécifique, qui garantira les prêts à long terme souscrits par les entreprises biotech pour démultiplier leur effort de recherche et favoriser leur transition en société pharmaceutique.
Enfin, un fonds de co-investissement pour les jeunes entreprises technologiques sera immédiatement installé. Doté de 60 MT à parité par l'Etat et la Caisse des Dépôts, ce Fonds interviendra aux côtés des fonds d'amorçage ou des fonds de capital-risque, et à leur demande. Il contribuera au renforcement des fonds propres des jeunes entreprises et facilitera leur croissance.
L'ensemble de ces dispositions devrait consolider significativement l'investissement.
4.4.Aider les secteurs menacés par les attentats et favoriser le redémarrage de ceux que le ralentissement a pénalisés.
A la suite des attentats du 11 septembre, plusieurs secteurs ont été particulièrement touchés. Le transport aérien a subi un choc important. Les trafics ont baissé, certaines compagnies -déjà fragilisées avant les événements - sont aujourd'hui dans une position difficile. Cela se répercute sur l'industrie aéronautique. Nous sommes loin de la crise de 1991 ; néanmoins, nous devons être vigilants et actifs, comme l'est mon collègue J.C. Gayssot, et agir de façon coordonnée avec nos partenaires européens. Le Gouvernement a annoncé hier un plan de soutien d'un montant total de 300 M. Pour rétablir la confiance des usagers dans le transport aérien, il faut accroître la sécurité aérienne et des aéroports. Au-delà, le gouvernement a décidé d'octroyer deux aides économiques ponctuelles au secteur aérien. La première permettra aux compagnies d'affronter les conséquences financières de la fermeture du ciel aérien américain dans les jours qui ont suivi les attentats, à hauteur de 50 MT. De plus, nous prolongerons le 24 octobre, jusqu'à la fin de l'année, le dispositif instauré mi-septembre, de garantie des compagnies aériennes contre les risques de guerre et de terrorisme. L'ensemble de ces dispositions seront bénéfiques pour le secteur aérien.
Les attentats du 11 septembre ont également touché le secteur des assurances. Il est trop tôt pour connaître exactement l'ampleur de tous les sinistres. On estime que les compagnies françaises pourraient être concernées à hauteur d'environ 1 Md. C'est un choc important, même s'il reste contenu par rapport notamment aux dommages des tempêtes de Noël 1999. Au-delà des dommages directs, les assureurs doivent pouvoir conserver leur rôle d'amortisseur des fluctuations des cours boursiers, en ne vendant pas structurellement des actions pour dégager les liquidités nécessaires au versement des indemnités. Afin de lisser l'impact sur leur bilan, la Commission de contrôle des assurances examinera au cas par cas le niveau des provisions pour dépréciation durable, compte tenu des situations exceptionnelles, pour permettre l'étalement dans le temps. La provision d'égalisation, qui vise à prévenir certains risques d'intensité exceptionnelle, verra son champ étendu pour couvrir les risques de terrorisme, de guerre et transport aérien ; sa durée sera augmentée. Enfin, la franchise sur la taxe sur les boni de liquidations sera relevée afin de favoriser la constitution de provisions suffisantes.
J'indique enfin que, en liaison avec les départements ministériels compétents, un contact immédiat est pris avec le secteur du tourisme pour analyser la situation et préciser les dispositions favorables possibles.
Faciliter le redémarrage de l'investissement dans les télécommunications.
Le secteur des télécommunications est actuellement en difficulté, avec des conséquences majeures pour les équipementiers, cette situation pesant fortement sur l'emploi. L'une des raisons - d'ailleurs pas la seule - est l'incertitude concernant le téléphone dit de troisième génération, l'UMTS. Et il est exact que la situation du secteur, depuis un an, a considérablement changé. Afin de faciliter la mise en uvre de cette nouvelle technologie et pour tenir compte des nouvelles données économiques et industrielles, le Gouvernement, sur la proposition de C. Pierret et de moi-même, et dans le respect des prérogatives de l'Autorité de Régulation des Télécommunications (ART), a décidé d'adopter le dispositif suivant :
Nous souhaitons que la procédure soit ouverte pour les deux licences UMTS restantes dans les délais les plus rapides. Le prix se composera d'une partie fixe, avec un "ticket d'entrée" fixé à 619 M, payable en 2002 pour les nouveaux entrants, et d'une partie variable assise sur le chiffre d'affaires généré par l'activité UMTS de chaque opérateur. La durée des licences sera portée de 15 à 20 ans (pour tenir compte des retards de calendrier). L'ART souhaitera sans doute réaffirmer la possibilité de mutualiser et de partager les infrastructures entre les opérateurs et maintenir l'exigence, essentielle, de couverture la plus large du territoire.
Comme l'exigent le droit et l'équité, les mêmes conditions s'appliqueront aux licences déjà attribuées, qui ne seront pas remises en cause.
Les dispositions nécessaires pour ces adaptations seront prévues dans la présente loi de finances.
Il nous a semblé, en effet, après un examen très attentif, que ces conditions tenaient un compte raisonnable des reports techniques dans la mise en oeuvre de cette technologie et qu'elles devaient permettre la concrétisation de notre stratégie industrielle. Au total, la puissance publique devrait percevoir des sommes proches de celles initialement prévues, avec une séquence de paiement adaptée. Les moins-values de recettes pour le Fonds de Réserve pour les Retraites pourront être compensées par le versement de recettes de privatisation. L'ensemble du secteur devrait s'en trouver relancé.
L'effort d'investissement de l'Etat dans ces différents secteurs utilisera le canal des dotations en capital. Ce sont en effet nos entreprises publiques qui vont agir, qu'il s'agisse d'Aéroports de Paris (ADP), des aéroports de province ou de la BDPME. L'Etat jouera pleinement son rôle d'actionnaire en les dotant financièrement. Le Fonds de Réserve des Retraites bénéficiera également de recettes d'ouverture du capital. Face à un passif de long terme clairement identifié, l'Etat a donc décidé d'affecter des éléments de son actif. Concernant les dépenses de fonctionnement - surtout en matière de nouveaux moyens humains consacrés à la sécurité aéroportuaire - le ministre des Transports a annoncé hier une augmentation des taxes de sûreté.
Les ressources en capital nécessaires proviendront de l'ouverture du capital, à des investisseurs de long terme et au marché, d'une entreprise du secteur autoroutier, Autoroutes du Sud de la France, ASF. Conformément au droit, cette opération ne nécessite pas de disposition législative. A l'issue de l'opération, l'Etat restera majoritaire dans la société. En étant coté, ASF, dont les personnels sont déjà régis par le droit privé, disposera sur les marchés financiers des moyens de se développer en France et à l'étranger dans le secteur des concessions, tout comme Cofiroute, société privée, a pu le faire.
Au total, ce plan de consolidation de la croissance comportera des effets concrets sur le revenu, sur la consommation et sur l'investissement. Il s'inscrit dans notre stratégie à moyen terme des finances publiques. L'évolution de la dépense publique ainsi que le déficit de l'Etat resteront inchangés en 2002 par rapport au projet de budget. L'équilibre de moyen terme ne sera pas modifié.
Au-delà de ses effets mécaniques, il témoigne de l'engagement du Gouvernement à préserver notre potentiel de croissance
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, la conviction qui nous anime est que, pour obtenir un sentier de croissance soutenu, les autorités publiques doivent jouer sur tous les leviers en leur pouvoir, indiquer clairement leurs choix, ne pas inquiéter à bon compte, ne pas rassurer à mauvais escient.
La bourrasque est réelle, l'incertitude, notamment extra-économique, est incontestable. Mais j'ai essayé de montrer que, grâce aux Français, notre économie dispose des ressources rendant possible le rebond. Nos performances globales et sectorielles ,qu'il s'agisse du rythme moyen de la croissance, de la maîtrise de l'inflation, de la qualité de la gestion, du dynamisme de nos entreprises, nous placent dans le peloton de tête européen et mondial. Nous devons garder à l'esprit ces réalités qui sont aussi celles d'une action désormais envisagée à l'échelle européenne.
Car dans cet environnement international troublé, le budget que nous vous présentons est le premier totalement présenté en euros. Cette révolution tranquille n'est pas indifférente à l'évolution de la situation économique. Dans 77 jours, plus de 300 millions d'Européens utiliseront la monnaie unique avec laquelle ils se seront familiarisés dès la mi-décembre grâce aux 53 millions de sachets de premiers euros. Cet événement marquera l'aboutissement d'un processus pour les acteurs économiques, les citoyens, mais aussi la promesse d'une Europe qui doit être plus forte et plus solidaire. Dans les événements dramatiques que nous connaissons, l'euro nous a protégés : sans lui, le franc aurait peut-être été attaqué, les taux d'intérêt auraient augmenté, les politiques monétaires au sein de l'Union auraient divergé, nos économies auraient été encore plus fragilisées. Je suis convaincu que l'euro continuera à jouer ce rôle de bouclier pour notre économie et notre pouvoir d'achat.
Alors, quel rôle pour la politique économique ? Si l'Etat ne peut pas tout, il doit faire tout ce qui est en son pouvoir afin de favoriser la croissance. Pour le Gouvernement de Lionel Jospin, le consensus grandissant autour de cette idée -"oui, la politique peut jouer un rôle utile"- représente, sinon un hommage tardif, en tout cas un progrès. Et si les ultra-libéraux d'hier manifestent désormais envers l'Etat le zèle des néophytes, nous acceptons avec bonhomie l'apport de ces nouveaux convertis. Depuis 1997, notre politique économique a permis à notre pays de profiter mieux que d'autres de la bonne conjoncture internationale. Dans un contexte plus difficile, elle doit nous permettre d'engager le rebond pour les prochains trimestres.
Nous savons qu'il n'y a jamais de certitude en économie. Particulièrement en des temps comme ceux-ci. Les terroristes peuvent malheureusement tuer des vies, ils ne doivent pas pouvoir détruire nos économies et nos sociétés. Notre tâche n'est pas, ne peut pas être de prévoir à deux décimales près tout ce qui se passera dans 8 ou 15 mois. Ce serait en réalité le calcul sans la volonté, la prévision dans l'imprévoyance. Mais puisque telle est notre responsabilité que les citoyens se tournent vers nous pour définir le sens de l'action à mener - dans les deux acceptions du mot "sens", signification et direction - , notre devoir est de répondre. La réponse qui vous est proposée par le budget 2002 et par le plan de consolidation de la croissance que je viens de présenter est claire : c'est celle de l'activité, de la volonté, et de la solidarité.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 17 octobre 2001)