Texte intégral
Allocution au Conseil régional de Rhône-Alpes
Monsieur le président,
Messieurs les présidents de conseil général,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Mesdames et messieurs,
Rhône-Alpes pose toutes les questions ou presque d'un territoire à aménager : des zones rurales à dominante agricole, d'autres plus touristiques. Des villes grandes, moyennes, petites. Des quartiers en difficulté, une métropole européenne. La répartition des hommes et des activités n'y est pas toujours équilibrée : certaines activités industrielles se reconvertissent, d'autres se tournent vers l'avenir. Les difficultés se joignent aux atouts pour ce qui est des voies de communication. A tout cela s'ajoutent les spécificités d'une région frontalière...
Rhône-Alpes est puissante, même si quelques indices récents témoignent d'un dynamisme économique moindre. Il faut qu'elle améliore ses performances. Trois voies s'offrent à elle :
- être plus cohérente en renforçant les liaisons entre les villes, et en insérant mieux l'Ouest de la région dans son développement,
- favoriser l'accession des agglomérations au rang de métropole internationale,
- accroître les relations économiques avec les autres régions françaises, notamment avec le Sud et les pays étrangers limitrophes.
Le troisième contrat de plan, la préparation des programmes d'actions européens sont l'occasion de fixer ces stratégies.
Le Gouvernement a souhaité que Rhône-Alpes contribue à réduire les inégalités entre les régions françaises. Il n'a pas oublié les contraintes particulières qui pèsent sur l'enseignement supérieur et les infrastructures routières de cette région.
Les décisions prises pour le TGV Méditerranée et la liaison transalpine Lyon-Turin sont prometteuses.
Devant le conseil régional de l'Ile-de-France, j'avais insisté sur le projet de contrat interrégional passé dans le bassin parisien. Grâce à celui-ci la région Ile-de-France financera des réalisations hors de son territoire. Ici, j'évoquerai la réflexion qui a été engagée sur la région urbaine de Lyon.
Elle procède de la même volonté de cohérence et de rassemblement. Respectant les singularités et les compétences de chacun, elle obtient des résultats exemplaires.
La politique de la ville est une priorité du Gouvernement. Les crédits impartis ont augmenté de cinq milliards de francs en 1993. Ils sont deux fois plus importants sur la période 1994-1998 que dans les cinq années précédentes. Les procédures ont été simplifiées. Il reste beaucoup à faire.
Le comité interministériel qui s'est tenu sur la ville le 22 février dernier a marqué une nouvelle étape. Il a précisé les conditions auxquelles les crédits d'Etat seront engagés pour être utilisés plus rapidement. Des objectifs, surtout, ont été fixés pour les cinq ans à venir. Des objectifs précis, concrets, soucieux de répondre aux préoccupations réelles des habitants : l'emploi, le cadre de vie, la sécurité, le logement, l'éducation.
Je sais combien vous prenez part à cette politique de la ville. Il s'agit de mettre en oeuvre les principes démocratiques de notre république afin que le pays soit plus uni. Il est indispensable que chacun y consacre à temps, moyens et énergie.
L'aménagement du territoire procède d'une intention. Celle de prendre compte la géographie dans les décisions économiques. Le succès du débat national a montré une attente chez les Français. Le Gouvernement a su y répondre en appliquant trois principes : des décisions immédiates, des réformes en profondeur, une concertation accrue.
Il y a un an, j'exposai la nécessité d'une nouvelle politique d'aménagement du territoire plus ambitieuse. Des décisions ont rapidement été prises pour que le monde rural soit plus peuplé, la croissance de la région Ile-de-France maîtrisée, la politique de la ville renforcée et les inégalités entre les régions atténuées.
La recherche d'un développement harmonieux du pays est la tâche de tous. De l'Etat comme de toutes les institutions publiques et même des décideurs économiques et sociaux.
Aménager le territoire suppose que l'on réforme en profondeur. C'est une mission partagée. La première phase du débat national qui a été engagé en septembre dernier s'achève aujourd'hui. Coordonnée par les préfets, elle a été consacrée à la concertation locale.
Pour engager des réformes profondes, il faut confronter les points de vue, faire appel à l'imagination et à la volonté autant qu'à la raison.
Le Ministre d'Etat et le Ministre délégué ont visité toutes les régions métropolitaines. M. Dominique PERBEN a animé la consultation outre-mer. Plusieurs membres du Gouvernement se sont également déplacés. Je me suis rendu dans dix régions. C'est dire l'intérêt que le Gouvernement prête à ce débat.
La préparation de la loi d'orientation a suivi une méthode nouvelle dont nous mesurons aujourd'hui la richesse. Jamais pareilles contributions n'avaient été réunies depuis plusieurs décennies. Certains ont stigmatisé la concision des échanges lors des rencontres officielles. Je leur dirai qu'ils n'ont pas mesuré l'importance de ces réunions qui ne furent qu'un moment dans un débat plus large. La concision n'ôte rien à la qualité et les réunions tenues dans les conseils régionaux ont permis à toutes les tendances politiques de s'exprimer.
J'ai voulu un équilibre géographique meilleur pour notre pays. Le comité interministériel d'aménagement du territoire s'est tenu en Lozère, dans le plus petit département de la France métropolitaine. J'ai visité quatre régions atlantiques dont la croissance risque de souffrir de celle qui, de Londres à Milan, passe par les vallées du Rhin et du Rhône. Je suis allé dans les régions dont l'industrie se reconvertit difficilement. J'ai vu les zones qui jouxtent les régions étrangères en fort développement. Enfin, à Paris, comme à Lyon, je souhaite mettre l'accent sur la nécessité de villes internationales fortes et harmonieusement implantées dans leur environnement local.
Le débat a aidé le Gouvernement à définir sa politique et à prendre ses décisions.
Nous avons annoncé une réforme du système autoroutier à Metz, une réforme du soutien de l'Etat aux transports publics urbains, à Bordeaux. Nous avons défini à Poitiers les moyens de transférer des emplois publics hors de l'Ile-de-France. Les décisions conséquentes seront prises à la fin du présent semestre. A Nantes, j'ai demandé au Ministre de l'économie d'étudier de nouvelles modalités pour les emprunts régionaux. Le Parlement les a adoptées. J'ai rappelé à Strasbourg qu'il fallait mieux considérer l'environnement. A Toulouse, j'ai précisé les conditions relatives à une meilleure répartition géographique de la recherche.
Pendant le débat, ont été négociés et pour une large part signés, les contrats de plan entre l'Etat et les régions ainsi que les contrats de ville. C'est également pendant cette période que le Gouvernement a négocié avec succès les zones susceptibles de bénéficier des fonds structurels européens. Le montant des fonds réservés à la France a également été précisé. L'ensemble de ces décisions engage l'Union Européenne, le Gouvernement et les collectivités territoriales à hauteur de 200 milliards de francs pour des projets qui verront le jour en cinq ou six ans.
Enfin, le débat a permis à des millions de Français de s'exprimer. Ce fut en quelque sorte un exercice de démocratie directe. Les idées et les propositions foisonnent. Qu'elles émanent de la population ou des acteurs institutionnels, les préoccupations et les contributions se complètent les unes les autres.
Le débat doit répondre à trois questions : quelle France souhaitons-nous pour 2015 ? Quelle place y jouera chaque partie du territoire national ? Quels moyens requiert l'équilibre ainsi dessiné ?
La population donne priorité à l'emploi, à la formation des jeunes, à l'environnement et au cadre de vie. Elle souhaite que les institutions se rapprochent et se concertent davantage. Les responsables publics privilégient la réalisation de grands équipements.
Nous tirons trois leçons de ce débat :
1. Les Français reprennent confiance. Les esprits ont changé. Chacun veut à présent aider à la croissance nationale. Un enthousiasme certain a succédé au scepticisme initial. Tous savent que les volontés ne doivent pas fléchir devant une évolution économique qui serait passivement subie.
2. Les Français souhaitent se rassembler. Ils veulent que le territoire soit aménagé avec plus de justice. Que les intérêts particuliers ou les corporatismes cèdent devant l'union du pays tout entier. Que chacun, chaque institution, s'épanouisse librement selon ses compétences. Les complémentarités, nées de situations différentes sont des atouts.
3. Enfin les Français ont compris que la crise n'est pas seulement économique. Des transformations en profondeur de nos structures sociales, de nos habitudes et de nos mentalités s'imposent.
On espère fortement des réformes même si certains en craignent tel ou tel effet. Souplesse et clarification en seront les maîtres mots.
La politique d'aménagement du territoire ne vise pas seulement à redistribuer. L'aménagement du territoire ne peut plus être directif ni redistribuer les richesses comme ce fut le cas des années soixante. L'aménagement du territoire doit inciter et créer des richesses.
Il faut soutenir les régions et les métropoles bien placées dans la compétition internationale. Il faut réduire les disparités sociales et géographiques.
Pour cela, il y a une méthode : le pragmatisme et la concertation. Il y a une stratégie : récuser l'homogénéité. Il y a deux objectifs : la prospérité et l'équité. Par-dessus tout, il y a un devoir : renforcer la France toute entière.
Le débat national n'est pas achevé.
Je souhaite que la volonté de rassemblement et de réforme soit aussi présente à l'échelle de la nation qu'elle le fut au niveau local. La diffusion d'un document qui rassemblera les propositions faites, inaugurera la prochaine phase. Comme le document introductif que nous avions diffusé en septembre 1993, c'est un document de travail. Il attend d'être enrichi, modifié et adapté, dans un esprit ouvert et constructif.
Rien ne sera possible pour notre pays si ne se fortifie pas et ne s'étend pas le mouvement de confiance et de réforme qui est né depuis quelques mois. Il faut tout faire pour le préserver, il faut soigneusement éviter d'y porter atteinte, fût-ce avec les meilleures intentions du monde.
La loi d'orientation sur l'aménagement du territoire n'a pour vocation ni d'être une assurance tous risques, ni d'être une addition de mesures corporatistes, ni de figer l'avenir. Elle prépare le pays à affronter toutes les situations et à maintenir le cap que nous lui aurons fixé. Elle prépare la France que nous voulons dans vingt ans.
La tâche est ambitieuse, comme les Français le sont ! Aux responsables nationaux d'agir conformément aux espérances de nos concitoyens.
J'ai confiance. Des contributions de grandes qualité ont vu le jour, notamment au Sénat, grâce à M. Jean FRANCOIS-PONCET et au conseil économique et social.
J'ai confiance. Des oppositions stériles sont tombées, celle de Paris et de la province, celle des villes et des campagnes. C'est un équilibre qu'il faut trouver, un équilibre dynamique qui relancera la croissance.
J'ai confiance parce que les Français eux-mêmes ont voulu se rassembler au-delà de certaines incompréhensions abusivement entretenues. Ainsi notre pays reprendra-t-il vigueur et sera-t-il un nouvel exemple. Demain, chaque Français s'épanouira au sein de la nation.
* Discours devant la Communauté Urbaine de Lyon
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les parlementaires et les élus,
Mesdames et Messieurs,
En m'invitant aujourd'hui, la Communauté Urbaine de Lyon m'a donné l'occasion de préciser la place qui doit être celle de cette grande agglomération, la deuxième de France, dans l'aménagement du territoire.
Vous le savez, la politique d'aménagement du territoire fait l'objet d'un grand débat national. Elle vise d'abord à corriger les inégalités que crée une évolution économique entièrement laissée à elle-même.
Le Gouvernement a voulu éviter la formation d'une France à deux vitesses, où certaines régions, le bassin parisien notamment, ne cesseraient de se renforcer, au détriment de pans entiers de notre territoire.
Des financements publics épars ne sauraient tenir lieu de politique Chaque région doit réussir son développement économique et social, en s'appuyant sur ses forces spécifiques et en remédiant à ses faiblesses.
Une grande Communauté Urbaine comme celle de Lyon a ainsi un rôle essentiel à jouer.
Le centre et la périphérie urbaine sont solidaires, mais ils le sont également des autres régions et du monde rural. C'est un effet de la redistribution fiscale.
La Communauté Urbaine régit le développement futur de la région Lyonnaise. Le schéma directeur de l'agglomération, que vous avez récemment approuvé, est un exemple remarquable de planification concertée.
Enfin, Lyon veille à ce que les politiques de transport, d'écologie urbaine, d'habitat et de développement économique soient mieux coordonnées.
La Communauté Urbaine de Lyon n'est pas repliée sur la ville centrale. Elle anime l'agglomération et ses alentours grâce aux actions qu'elle mène dans le cadre de la région.
Elle illustre les bienfaits d'une bonne intelligence entre les communes.
Votre Communauté Urbaine est l'interlocuteur légitime de l'Etat pour ouvrir et construire les grands dossiers de l'agglomération lyonnaise. Je m'arrêterai sur quelques points importants : les transports collectifs, la politique du logement et de la Ville, la localisation d'activités nouvelles.
Les transports collectifs tout d'abord. Vous êtes parmi les premiers à avoir doté votre agglomération d'un métro moderne. L'Etat vous a aidé pour cette grande réalisation, et vous a récemment encore versé 60 MF dans le cadre du plan de relance.
Vous envisagez aujourd'hui de prolonger les lignes A, B et D du métro et de réaliser un réseau intermédiaire de surface. Vous demandez pour tous ces projets, différemment avancés, l'aide de l'Etat.
Vous le savez, le Ministre de l'Équipement, des Transports et du Tourisme a récemment décidé de réformer le financement des transports collectifs. Des critères d'aide incontestables ont été définis. Une subvention de l'Etat se calcule sur une base objective, indépendamment des choix propres aux collectivités.
Bien sûr, l'Etat contribuera, sur cette base, à développer les transports collectifs de l'agglomération lyonnaise. Il respectera les priorités et les choix techniques des collectivités et, au premier chef, de votre Communauté Urbaine.
La politique du logement et de la Ville est une priorité nationale, mais elle revêt une importance particulière dans votre agglomération.
Le Gouvernement a dégagé d'importants moyens pour relancer la construction. 90 000 logements HLM seront encore construits en 1994, comme en 1993. La plan de relance a également prévu 11 000 logements HLM de plus. Il est plus facile de devenir propriétaire : 55 000 prêts PAP ont été et seront accordés en 1993 et 1994, contre 32 000 en 1992.
Le Gouvernement s'est soucié de faciliter l'accès au logement. Pour aider les familles, les familles nombreuses surtout, à se loger, les plafonds de ressources des HLM ont été relevés suivant le nombre des enfants. Dans votre agglomération, ces relèvements pourront atteindre 6 % pour une famille avec un enfant, 15 % avec deux enfants et 18 % avec trois enfants.
A l'initiative du Ministre du Logement, Hervé de CHARETTE, le Gouvernement proposera, en 1994, 40 000 logements nouveaux aux familles les plus défavorisées. Les organismes HLM fourniront 20 000 logements supplémentaires aux ménages dont les ressources sont inférieures ou égales à 60 % des plafonds. L'Etat a débloqué des crédits nouveaux pour construire 20 000 logements sociaux d'insertion au lieu des 10 000 qui avaient été initialement prévus.
La préoccupation du logement s'inscrit dans une politique de la ville dont la Communauté Urbaine est un partenaire privilégié. L'agglomération lyonnaise nourrit deux grands projets urbains, à Vénissieux et à Vaulx-en-Velin. Les contrats de ville aideront à les réaliser.
Je veillerai personnellement à l'efficacité de cette politique pour laquelle le Gouvernement a exceptionnellement dégagé, en 1993, 5 milliards de Francs.
Nous avons quelques grands objectifs pour les 5 ans à venir. Ils concrétiseront notre politique aux yeux des populations concernées.
Enfin, sur la proposition de Mme VEIL, Ministre d'Etat, Ministre des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville, j'ai pris les mesures nécessaires pour accélérer les procédures. Toute administration qui n'aura pas engagé, au 1er juin prochain, les crédits reçus se les verra retirer. Une autre action, plus efficace, de la politique de la ville en bénéficiera alors.
Votre Communauté Urbaine a su fixer des activités nouvelles et elle pourra continuer à le faire.
Parmi vos réussites, je compte :
- la santé, et notamment l'Agence du médicament,
- les transports urbains, avec le Centre d'étude pour les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques,
- la sécurité enfin avec Interpol.
Lyon profitera de nouvelles décisions qui sont aujourd'hui en cours d'instruction. Elle accueillera ainsi de nouvelles activités.
Il y a un quart de siècle, le Général de GAULLE évoquait, à Lyon, l'émergence d'un "vaste ensemble démographique, scientifique et technique, comprenant Saint-Etienne et Grenoble, dont Lyon serait le principal élément".
Le Général de GAULLE appelait la "Capitale de la Région Rhône-Alpes" à s'affirmer comme un "centre de rééquilibrage face à l'effort multiséculaire de centralisation".
Dans cet esprit, la loi du 31 décembre 1966 créait la Communauté Urbaine de Lyon.
Nous voyons aujourd'hui combien cette intuition fut féconde. Votre Communauté a su, en dialoguant avec l'État, répondre à sa mission : je crois en la poursuite de son succès.
* Discours lors du déplacement à Lyon
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux d'avoir l'occasion de m'exprimer aujourd'hui devant vous. L'aménagement du territoire n'a de sens en effet que s'il permet de maintenir et de développer dans les régions, un tissu dense d'entreprises de toutes tailles.
De ce point de vue, la Région Rhône-Alpes est exemplaire. Elle offre le spectacle d'une région dynamique, dotée d'entreprises performantes dont certaines sont au tout premier rang européen.
Tous les secteurs d'activité ou presque y sont représentés ; les petites et moyennes entreprises sont particulièrement nombreuses ; le potentiel de recherche, souvent étroitement associé à l'industrie, est très développé.
C'est le résultat d'une grande tradition, industrielle et commerçante, mais intellectuelle aussi, d'une longue histoire qui a fait pendant des siècles de ces terres le point de jonction de la France et de l'Empire, le point où le grand commerce italien rejoignait la route qui menait aux foires de la Champagne et du Rhin.
C'est aussi et surtout le résultat du travail et du talent des femmes et des hommes de cette région, de leur volonté d'entreprendre et de développer ce pays.
En dépit de la prospérité de votre région, de votre dynamisme, vous devez être nombreux à vous poser les questions que se posent aujourd'hui tous les Français, mais qui ont, pour vous, chefs d'entreprise, une importance, une acuité particulières : quand donc la reprise interviendra-t-elle ? quand la situation de l'emploi cessera-t-elle de se détériorer ?
A ces questions précises, il est malheureusement impossible de répondre en donnant des dates, si l'on veut en tout cas être honnête avec soi-même et avec son auditoire.
Je ne serai donc pas celui qui promet la croissance pour demain ou pour après-demain et qui annonce des remèdes-miracles.
Je crois cependant que la stratégie économique et sociale du Gouvernement est cohérente et adaptée aux besoins de l'heure. Je crois également qu'il y a des signes convergents, même s'ils demeurent discrets, qui montrent que cette stratégie va réussir. C'est les raisons de cet optimisme, raisonné et raisonnable, que je voudrai vous exposer ici.
La stratégie du Gouvernement n'est pas de créer une reprise artificielle, de susciter en période pré-électorale un feu de paille sans lendemain mais dont la France paierait ensuite de longues années les bénéfices illusoires et passagers.
Je sais que la France ne manque pas de bons esprits pour transformer, par la magie du verbe, la mise au goût du jour d'errements anciens en politique nouvelle et courageuse. Qu'on ne compte pas sur moi pour engager notre pays dans cette voie. Le Gouvernement a un cap ; il le tient. Sa politique ne consiste pas à prétendre créer de l'activité et des emplois lorsque la récession s'abat sur toute l'Europe. Elle vise en revanche à mettre en place les conditions, pour que les entreprises produisent, investissent, embauchent.
L'analyse du Gouvernement est que la crise actuelle a trois causes essentielles : tout d'abord un environnement international défavorable, ensuite une confiance insuffisante des agents économiques qui pousse chacun à différer achats et investissements, enfin des obstacles structurels à l'emploi qui incitent à privilégier la machine par rapport à l'homme.
Nous devons donc agir, d'une part pour faire revenir la confiance, d'autre part, pour être dans la meilleure situation afin de profiter pleinement de la reprise lorsque celle-ci manifestera pleinement ses effets en Europe, enfin pour créer les conditions d'une croissance plus créatrice d'emploi que précédemment.
Le Gouvernement déploie ses efforts dans quatre directions : maintenir une politique macroéconomique de stabilité, assurer à la France un horizon international dégagé, adopter en faveur des entreprises une politique structurelle permettant d'accroître leur compétitivité, favoriser l'emploi.
Nous devons tout d'abord restaurer la confiance en plaçant la France dans un cadre macroéconomique qui assure, sur le long terme, la compétitivité de notre économie.
Ceci impose en premier lieu la maîtrise des déficits publics. Les difficultés actuelles, qui alourdissent les charges et diminuent les recettes, rendent cet exercice difficile. Mais il ne peut y avoir de croissance durable sans des finances publiques saines.
En 1993, le déficit devait être de 340 MdsF. En 1994, il est ramené à 300 MdsF. C'est encore beaucoup trop. C'est pourquoi j'ai entendu que notre action s'inscrive dans un cadre à moyen terme : la loi quinquennale de redressement des finances publiques devrait permettre de ramener le déficit budgétaire en 1997 à 2,5 % du PIB, soit environ 200 MdsF.
De même, les déficits sociaux sont maîtrisés. Des mesures ont été prises pour réduire la déficit de la Sécurité sociale, rétablir l'équilibre de l'Unédic, sauvegarder la retraite des cadres. Le Gouvernement s'est également engagé sur une réforme à plus long terme de notre système de protection sociale, dont la philosophie et l'équilibre doivent être préservées, car les français y sont justement attachés. C'est pourquoi le Gouvernement a fait adopter une courageuse réforme des retraites. Dans le même esprit, il s'est engagé dans une réforme de l'assurance-maladie. Naturellement, la plus large concertation est nécessaire pour ces réformes essentielles.
C'est parce que le Gouvernement s'est engagé dans un processus de redressement qui assurera des finances publiques et des finances sociales saines à moyen terme qu'il peut, aujourd'hui, agir de façon ciblée pour accompagner la reprise de la demande.
C'est ainsi qu'il a décidé d'un allégement de 19 MdsF de l'impôt sur le revenu et une revalorisation des retraites et des allocations familiales au 1er janvier, ce qui devrait soutenir la consommation des ménages.
De même, vous le savez, différentes mesures ont été prises en faveur des entreprises et des particuliers, pour inciter à l'achat de voitures neuves. Que n'a-t-on entendu lorsque ces décisions furent annoncées le 30 janvier dernier ! Même s'il est trop tôt pour dresser un bilan définitif, je constate aujourd'hui que les premiers résultats sont très encourageants.
Depuis un an, la baisse des taux d'intérêt est très sensible. Entre mars 1993 et février 1994, la baisse a été de l'ordre de 2 points pour les prêts aux entreprises. Les entreprises doivent saisir cette chance pour augmenter leurs investissements.
C'est incontestable, la France a gagné en compétitivité et s'affirme de plus en plus comme un grand pays exportateur.
Elle a donc besoin d'un horizon international dégagé. Vous savez, à cet égard, les efforts déployés par le Gouvernement pour aboutir à une conclusion positive du cycle d'Uruguay. L'accord du 15 décembre n'est pas parfait. La négociation n'est pas terminée dans tous les secteurs. Nous devons demeurer vigilants, en particulier s'agissant de l'aéronautique. Mais les résultats d'ores et déjà atteints sont positifs : dans les domaines où la France est très compétitive -je pense à la parapharmacie, aux alcools, à la chimie, à la parfumerie, aux services- nous avons obtenu des abaissements significatifs des droits existants ou une meilleure ouverture des marchés.
Enfin et surtout, nous avons obtenu en matière d'antidumping, de protection de la propriété intellectuelle, de règlement des différends des règles nouvelles qui assurent à nos entreprises un cadre juridique plus sûr et plus équitable.
Notre économie est de plus en plus compétitive par rapport à la plupart de ses grands concurrents ; les barrières à l'exportation tombent. A vous, chefs d'entreprise, de profiter de cette situation exceptionnelle pour exporter encore davantage. Je sais vos efforts, je sais que les parts de marché de la France ne cessent de progresser. Mais, en 1994, cet effort doit encore être plus intense. La croissance est repartie dans les pays qui, les premiers, étaient entrés en récession, notamment aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. Le plan de relance lancé par les Japonais devrait également soutenir la demande mondiale. Voilà de bonnes raisons pour accentuer encore nos efforts, pour exporter plus et créer ainsi en France des richesses et des emplois.
Le troisième axe de l'action gouvernementale consiste à renforcer la compétitivité de nos entreprises.
Naturellement, la baisse des taux que j'évoquais il y a quelques instants est un élément clé de cette stratégie puisqu'elle permet de diminuer les charges financières et de développer l'investissement productif.
Le Gouvernement a adopté diverses mesures fiscales qui vont dans le même sens. Ainsi, la suppression du décalage d'un mois en matière de TVA a permis en 1993 une amélioration sensible de la situation de trésorerie des entreprises et tout particulièrement des PME.
Parallèlement à cet effort fiscal, le Gouvernement a allégé les charges sociales sur les bas salaires. Cette mesure sera étendue progressivement jusqu'à un salaire égal à 1,6 fois le SMIC.
Avons-nous, ce faisant, répondu complètement à toutes les attentes ?
Evidemment non. Je suis conscient du chemin qu'il reste à parcourir, de l'ampleur du redressement à effectuer. Mais le Gouvernement n'a pas à rougir de son bilan, moins d'un an après son entrée en fonction. Il poursuivra dans la même ligne son action pour renforcer encore, par des réformes structurelles, la compétitivité des entreprises. Plusieurs chantiers s'ouvrent à nous. Je pense à la nécessaire amélioration des règles sur les délais de paiement. Je pense également à l'évolution des règles du jeu de la sous-traitance, que je souhaite bientôt voir consacrer par un code de bonne conduite. Je pense enfin à la recherche. Vous savez qu'une grande consultation nationale a été lancée sur ce sujet par le Ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Ce n'est pas un hasard si la réunion sur les liens entre la recherche et l'innovation dans l'entreprise a eu lieu à Grenoble.
Cette cité a su en effet depuis longtemps développer des pôles de recherche de très haut niveau au sein d'universités et d'écoles prestigieuses et associer étroitement les entreprises régionales à leurs travaux. Je suis convaincu que ce grand débat national permettra de trouver des idées neuves afin de rendre notre outil de recherche plus performant et plus utile pour les entreprises. C'est dans le maintien d'un rythme soutenu d'innovation et de progrès technique que réside en effet l'une des conditions essentielles de la compétitivité.
Vous le voyez, le Gouvernement agit et continuera d'agir pour renforcer la compétitivité des entreprises. Ma conception de l'entreprise est claire : c'est d'abord, avant tout, le lieu de création des richesses. Aucun pays n'est durablement fort sans un réseau dense d'entreprises prospères. Aucun pays ne peut lutter contre le chômage, développer durablement l'emploi sans aider d'abord ses entreprises à investir, à produire, à exporter.
Car la première préoccupation du Gouvernement, c'est l'emploi.
Là encore, le Gouvernement s'est attaché à créer un cadre qui soit favorable aux initiatives des entreprises.
La réduction des charges sociales pour les plus bas salaires est un élément essentiel de notre stratégie : cette mesure permettra en effet d'accroître l'embauche des salariés les moins qualifiés, qui sont souvent aussi ceux qui sont le plus touchés par le chômage. A terme, 100 à 150.000 emplois devraient pouvoir être ainsi créés.
Le Gouvernement a également décidé de lier, en 1994, l'accélération du remboursement de la TVA aux efforts accomplis en matière d'emploi ou de formation de jeunes.
Par ailleurs, une loi quinquennale relative à l'emploi, au travail et à la formation professionnelle a été votée.
Elle ouvre de nouveaux champs à la négociation interprofessionnelle et à la négociation de branches. La mise en place du temps réduit indemnisé de longue durée, qui permet de maintenir les salariés dans l'entreprise en cas de difficulté conjoncturelle et l'adaptation du mode d'indemnisation, afin d'inciter le retour à l'emploi des chômeurs, sont d'ores et déjà des thèmes sur lesquels discutent les partenaires sociaux. D'autres sont prévus : l'accès à la formation, l'organisation du travail, le développement de la formation professionnelle initiale. En outre, la loi quinquennale doit permettre la création d'emplois de service dans les nombreux secteurs où il existe des besoins sociaux non satisfaits.
Enfin, la loi quinquennale a créé un mécanisme destiné à favoriser l'embauche des jeunes : le contrat d'insertion professionnelle. Les malentendus auxquels avait donné lieu la publication des décrets d'application de la loi sur ce point ont, je l'espère, été dissipés à l'issue de la rencontre que j'ai eue hier avec les partenaires sociaux. Il n'est jamais entré dans mes intentions de créer un SMIC jeunes. Les décrets en cause sont maintenus. Ils seront complétés avant la fin du mois, de telle manière que le tutorat comporte une vraie formation au sein de l'entreprise et que les jeunes diplômés qui auraient besoin du secours du contrat d'insertion professionnelle ne puissent en aucun cas être rémunérés au-dessous du SMIC.
La politique du Gouvernement, en matière d'emploi, n'est nullement dirigiste. Elle vise à créer un cadre, des conditions favorables. Aux partenaires sociaux ensuite d'engager des négociations, aux entreprises d'agir, chacune à son rythme, compte tenu de ses contraintes et de ses possibilités.
Mais chacun doit être conscient de ses responsabilités. En tant que chefs d'entreprises, mais aussi en tant que citoyens, vous savez l'importance du combat national engagé contre le chômage. Je suis sûr que vous saurez prendre les bonnes décisions et mobiliser toutes les forces de vos entreprises pour créer les emplois dont la France a tant besoin.
Je voudrais insister enfin sur un dernier point, qui n'est pas souvent perçu. Les mesures prises par le Gouvernement sont adaptées à la situation et à la société française, j'y ai veillé. Mais la plupart de nos grands partenaires confrontés également aux problèmes du chômage adoptent, chacun avec ses spécificités propres, des mesures similaires. Il y aura au printemps une réunion des 7 grands pays industrialisés à Détroit pour comparer les expériences nationales en la matière. Je ne serais pas surpris, pour ma part, que cette comparaison mette en lumière certaines similitudes. Ceci montrera que la France n'est pas à la traîne et que bien souvent, elle montre même le chemin.
Est-ce à dire pour autant que tout est résolu ? Hélas non. Mais la politique économique et sociale du Gouvernement, qui, vous le voyez, est cohérente et déterminée, porte ses premiers fruits et les indices se multiplient qui confirment nos raisons d'espérer :
- tout d'abord, la situation internationale s'améliore ; je l'ai dit.
- Deuxième motif d'espoir, les anticipations des agents économiques changent. Toutes les enquêtes montrent que la perception par les ménages et par les entreprises de l'avenir économique devient plus optimiste.
- Troisième indice de ce retournement, l'évolution de l'activité, dans certains secteurs sensibles, comme le bâtiment ou les biens intermédiaires. Après un recul très net au premier semestre 1993, les indicateurs se redressent en fin d'année. Dans ces circonstances, la prévision de croissance de 1,4 % pour 1994 est réaliste. Hélas, l'évolution de l'emploi ne suit qu'avec retard l'amélioration de la situation économique. Je note cependant que la progression se ralentit. Il y avait 200 000 demandeurs d'emploi supplémentaire au premier semestre 1993, 100 000 au deuxième semestre. De même, les offres d'emplois comptabilisées par l'ANPE ont augmenté de plus de 30 % depuis un an.
Ces signes de reprise sont donc nombreux, même s'ils demeurent encore peu spectaculaires.Chaque jour qui passe nous en apporte de nouveaux. Il faut regarder l'avenir avec espoir. Je suis sûr que l'économie française, qui a d'immenses possibilités et des forces insoupçonnées, sortira bientôt de cette crise. Plus compétitive que bien de ses concurrents, elle bénéficiera, plus qu'eux, de la reprise qui s'amorce. Je suis sûr enfin que les chefs d'entreprise et tous les citoyens sauront comprendre le défi immense que représente la lutte contre le chômage et l'exclusion dans ce pays. C'est notre combat à tous aujourd'hui, ce sera, je l'espère, demain, le succès de la France.
Monsieur le président,
Messieurs les présidents de conseil général,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Mesdames et messieurs,
Rhône-Alpes pose toutes les questions ou presque d'un territoire à aménager : des zones rurales à dominante agricole, d'autres plus touristiques. Des villes grandes, moyennes, petites. Des quartiers en difficulté, une métropole européenne. La répartition des hommes et des activités n'y est pas toujours équilibrée : certaines activités industrielles se reconvertissent, d'autres se tournent vers l'avenir. Les difficultés se joignent aux atouts pour ce qui est des voies de communication. A tout cela s'ajoutent les spécificités d'une région frontalière...
Rhône-Alpes est puissante, même si quelques indices récents témoignent d'un dynamisme économique moindre. Il faut qu'elle améliore ses performances. Trois voies s'offrent à elle :
- être plus cohérente en renforçant les liaisons entre les villes, et en insérant mieux l'Ouest de la région dans son développement,
- favoriser l'accession des agglomérations au rang de métropole internationale,
- accroître les relations économiques avec les autres régions françaises, notamment avec le Sud et les pays étrangers limitrophes.
Le troisième contrat de plan, la préparation des programmes d'actions européens sont l'occasion de fixer ces stratégies.
Le Gouvernement a souhaité que Rhône-Alpes contribue à réduire les inégalités entre les régions françaises. Il n'a pas oublié les contraintes particulières qui pèsent sur l'enseignement supérieur et les infrastructures routières de cette région.
Les décisions prises pour le TGV Méditerranée et la liaison transalpine Lyon-Turin sont prometteuses.
Devant le conseil régional de l'Ile-de-France, j'avais insisté sur le projet de contrat interrégional passé dans le bassin parisien. Grâce à celui-ci la région Ile-de-France financera des réalisations hors de son territoire. Ici, j'évoquerai la réflexion qui a été engagée sur la région urbaine de Lyon.
Elle procède de la même volonté de cohérence et de rassemblement. Respectant les singularités et les compétences de chacun, elle obtient des résultats exemplaires.
La politique de la ville est une priorité du Gouvernement. Les crédits impartis ont augmenté de cinq milliards de francs en 1993. Ils sont deux fois plus importants sur la période 1994-1998 que dans les cinq années précédentes. Les procédures ont été simplifiées. Il reste beaucoup à faire.
Le comité interministériel qui s'est tenu sur la ville le 22 février dernier a marqué une nouvelle étape. Il a précisé les conditions auxquelles les crédits d'Etat seront engagés pour être utilisés plus rapidement. Des objectifs, surtout, ont été fixés pour les cinq ans à venir. Des objectifs précis, concrets, soucieux de répondre aux préoccupations réelles des habitants : l'emploi, le cadre de vie, la sécurité, le logement, l'éducation.
Je sais combien vous prenez part à cette politique de la ville. Il s'agit de mettre en oeuvre les principes démocratiques de notre république afin que le pays soit plus uni. Il est indispensable que chacun y consacre à temps, moyens et énergie.
L'aménagement du territoire procède d'une intention. Celle de prendre compte la géographie dans les décisions économiques. Le succès du débat national a montré une attente chez les Français. Le Gouvernement a su y répondre en appliquant trois principes : des décisions immédiates, des réformes en profondeur, une concertation accrue.
Il y a un an, j'exposai la nécessité d'une nouvelle politique d'aménagement du territoire plus ambitieuse. Des décisions ont rapidement été prises pour que le monde rural soit plus peuplé, la croissance de la région Ile-de-France maîtrisée, la politique de la ville renforcée et les inégalités entre les régions atténuées.
La recherche d'un développement harmonieux du pays est la tâche de tous. De l'Etat comme de toutes les institutions publiques et même des décideurs économiques et sociaux.
Aménager le territoire suppose que l'on réforme en profondeur. C'est une mission partagée. La première phase du débat national qui a été engagé en septembre dernier s'achève aujourd'hui. Coordonnée par les préfets, elle a été consacrée à la concertation locale.
Pour engager des réformes profondes, il faut confronter les points de vue, faire appel à l'imagination et à la volonté autant qu'à la raison.
Le Ministre d'Etat et le Ministre délégué ont visité toutes les régions métropolitaines. M. Dominique PERBEN a animé la consultation outre-mer. Plusieurs membres du Gouvernement se sont également déplacés. Je me suis rendu dans dix régions. C'est dire l'intérêt que le Gouvernement prête à ce débat.
La préparation de la loi d'orientation a suivi une méthode nouvelle dont nous mesurons aujourd'hui la richesse. Jamais pareilles contributions n'avaient été réunies depuis plusieurs décennies. Certains ont stigmatisé la concision des échanges lors des rencontres officielles. Je leur dirai qu'ils n'ont pas mesuré l'importance de ces réunions qui ne furent qu'un moment dans un débat plus large. La concision n'ôte rien à la qualité et les réunions tenues dans les conseils régionaux ont permis à toutes les tendances politiques de s'exprimer.
J'ai voulu un équilibre géographique meilleur pour notre pays. Le comité interministériel d'aménagement du territoire s'est tenu en Lozère, dans le plus petit département de la France métropolitaine. J'ai visité quatre régions atlantiques dont la croissance risque de souffrir de celle qui, de Londres à Milan, passe par les vallées du Rhin et du Rhône. Je suis allé dans les régions dont l'industrie se reconvertit difficilement. J'ai vu les zones qui jouxtent les régions étrangères en fort développement. Enfin, à Paris, comme à Lyon, je souhaite mettre l'accent sur la nécessité de villes internationales fortes et harmonieusement implantées dans leur environnement local.
Le débat a aidé le Gouvernement à définir sa politique et à prendre ses décisions.
Nous avons annoncé une réforme du système autoroutier à Metz, une réforme du soutien de l'Etat aux transports publics urbains, à Bordeaux. Nous avons défini à Poitiers les moyens de transférer des emplois publics hors de l'Ile-de-France. Les décisions conséquentes seront prises à la fin du présent semestre. A Nantes, j'ai demandé au Ministre de l'économie d'étudier de nouvelles modalités pour les emprunts régionaux. Le Parlement les a adoptées. J'ai rappelé à Strasbourg qu'il fallait mieux considérer l'environnement. A Toulouse, j'ai précisé les conditions relatives à une meilleure répartition géographique de la recherche.
Pendant le débat, ont été négociés et pour une large part signés, les contrats de plan entre l'Etat et les régions ainsi que les contrats de ville. C'est également pendant cette période que le Gouvernement a négocié avec succès les zones susceptibles de bénéficier des fonds structurels européens. Le montant des fonds réservés à la France a également été précisé. L'ensemble de ces décisions engage l'Union Européenne, le Gouvernement et les collectivités territoriales à hauteur de 200 milliards de francs pour des projets qui verront le jour en cinq ou six ans.
Enfin, le débat a permis à des millions de Français de s'exprimer. Ce fut en quelque sorte un exercice de démocratie directe. Les idées et les propositions foisonnent. Qu'elles émanent de la population ou des acteurs institutionnels, les préoccupations et les contributions se complètent les unes les autres.
Le débat doit répondre à trois questions : quelle France souhaitons-nous pour 2015 ? Quelle place y jouera chaque partie du territoire national ? Quels moyens requiert l'équilibre ainsi dessiné ?
La population donne priorité à l'emploi, à la formation des jeunes, à l'environnement et au cadre de vie. Elle souhaite que les institutions se rapprochent et se concertent davantage. Les responsables publics privilégient la réalisation de grands équipements.
Nous tirons trois leçons de ce débat :
1. Les Français reprennent confiance. Les esprits ont changé. Chacun veut à présent aider à la croissance nationale. Un enthousiasme certain a succédé au scepticisme initial. Tous savent que les volontés ne doivent pas fléchir devant une évolution économique qui serait passivement subie.
2. Les Français souhaitent se rassembler. Ils veulent que le territoire soit aménagé avec plus de justice. Que les intérêts particuliers ou les corporatismes cèdent devant l'union du pays tout entier. Que chacun, chaque institution, s'épanouisse librement selon ses compétences. Les complémentarités, nées de situations différentes sont des atouts.
3. Enfin les Français ont compris que la crise n'est pas seulement économique. Des transformations en profondeur de nos structures sociales, de nos habitudes et de nos mentalités s'imposent.
On espère fortement des réformes même si certains en craignent tel ou tel effet. Souplesse et clarification en seront les maîtres mots.
La politique d'aménagement du territoire ne vise pas seulement à redistribuer. L'aménagement du territoire ne peut plus être directif ni redistribuer les richesses comme ce fut le cas des années soixante. L'aménagement du territoire doit inciter et créer des richesses.
Il faut soutenir les régions et les métropoles bien placées dans la compétition internationale. Il faut réduire les disparités sociales et géographiques.
Pour cela, il y a une méthode : le pragmatisme et la concertation. Il y a une stratégie : récuser l'homogénéité. Il y a deux objectifs : la prospérité et l'équité. Par-dessus tout, il y a un devoir : renforcer la France toute entière.
Le débat national n'est pas achevé.
Je souhaite que la volonté de rassemblement et de réforme soit aussi présente à l'échelle de la nation qu'elle le fut au niveau local. La diffusion d'un document qui rassemblera les propositions faites, inaugurera la prochaine phase. Comme le document introductif que nous avions diffusé en septembre 1993, c'est un document de travail. Il attend d'être enrichi, modifié et adapté, dans un esprit ouvert et constructif.
Rien ne sera possible pour notre pays si ne se fortifie pas et ne s'étend pas le mouvement de confiance et de réforme qui est né depuis quelques mois. Il faut tout faire pour le préserver, il faut soigneusement éviter d'y porter atteinte, fût-ce avec les meilleures intentions du monde.
La loi d'orientation sur l'aménagement du territoire n'a pour vocation ni d'être une assurance tous risques, ni d'être une addition de mesures corporatistes, ni de figer l'avenir. Elle prépare le pays à affronter toutes les situations et à maintenir le cap que nous lui aurons fixé. Elle prépare la France que nous voulons dans vingt ans.
La tâche est ambitieuse, comme les Français le sont ! Aux responsables nationaux d'agir conformément aux espérances de nos concitoyens.
J'ai confiance. Des contributions de grandes qualité ont vu le jour, notamment au Sénat, grâce à M. Jean FRANCOIS-PONCET et au conseil économique et social.
J'ai confiance. Des oppositions stériles sont tombées, celle de Paris et de la province, celle des villes et des campagnes. C'est un équilibre qu'il faut trouver, un équilibre dynamique qui relancera la croissance.
J'ai confiance parce que les Français eux-mêmes ont voulu se rassembler au-delà de certaines incompréhensions abusivement entretenues. Ainsi notre pays reprendra-t-il vigueur et sera-t-il un nouvel exemple. Demain, chaque Français s'épanouira au sein de la nation.
* Discours devant la Communauté Urbaine de Lyon
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les parlementaires et les élus,
Mesdames et Messieurs,
En m'invitant aujourd'hui, la Communauté Urbaine de Lyon m'a donné l'occasion de préciser la place qui doit être celle de cette grande agglomération, la deuxième de France, dans l'aménagement du territoire.
Vous le savez, la politique d'aménagement du territoire fait l'objet d'un grand débat national. Elle vise d'abord à corriger les inégalités que crée une évolution économique entièrement laissée à elle-même.
Le Gouvernement a voulu éviter la formation d'une France à deux vitesses, où certaines régions, le bassin parisien notamment, ne cesseraient de se renforcer, au détriment de pans entiers de notre territoire.
Des financements publics épars ne sauraient tenir lieu de politique Chaque région doit réussir son développement économique et social, en s'appuyant sur ses forces spécifiques et en remédiant à ses faiblesses.
Une grande Communauté Urbaine comme celle de Lyon a ainsi un rôle essentiel à jouer.
Le centre et la périphérie urbaine sont solidaires, mais ils le sont également des autres régions et du monde rural. C'est un effet de la redistribution fiscale.
La Communauté Urbaine régit le développement futur de la région Lyonnaise. Le schéma directeur de l'agglomération, que vous avez récemment approuvé, est un exemple remarquable de planification concertée.
Enfin, Lyon veille à ce que les politiques de transport, d'écologie urbaine, d'habitat et de développement économique soient mieux coordonnées.
La Communauté Urbaine de Lyon n'est pas repliée sur la ville centrale. Elle anime l'agglomération et ses alentours grâce aux actions qu'elle mène dans le cadre de la région.
Elle illustre les bienfaits d'une bonne intelligence entre les communes.
Votre Communauté Urbaine est l'interlocuteur légitime de l'Etat pour ouvrir et construire les grands dossiers de l'agglomération lyonnaise. Je m'arrêterai sur quelques points importants : les transports collectifs, la politique du logement et de la Ville, la localisation d'activités nouvelles.
Les transports collectifs tout d'abord. Vous êtes parmi les premiers à avoir doté votre agglomération d'un métro moderne. L'Etat vous a aidé pour cette grande réalisation, et vous a récemment encore versé 60 MF dans le cadre du plan de relance.
Vous envisagez aujourd'hui de prolonger les lignes A, B et D du métro et de réaliser un réseau intermédiaire de surface. Vous demandez pour tous ces projets, différemment avancés, l'aide de l'Etat.
Vous le savez, le Ministre de l'Équipement, des Transports et du Tourisme a récemment décidé de réformer le financement des transports collectifs. Des critères d'aide incontestables ont été définis. Une subvention de l'Etat se calcule sur une base objective, indépendamment des choix propres aux collectivités.
Bien sûr, l'Etat contribuera, sur cette base, à développer les transports collectifs de l'agglomération lyonnaise. Il respectera les priorités et les choix techniques des collectivités et, au premier chef, de votre Communauté Urbaine.
La politique du logement et de la Ville est une priorité nationale, mais elle revêt une importance particulière dans votre agglomération.
Le Gouvernement a dégagé d'importants moyens pour relancer la construction. 90 000 logements HLM seront encore construits en 1994, comme en 1993. La plan de relance a également prévu 11 000 logements HLM de plus. Il est plus facile de devenir propriétaire : 55 000 prêts PAP ont été et seront accordés en 1993 et 1994, contre 32 000 en 1992.
Le Gouvernement s'est soucié de faciliter l'accès au logement. Pour aider les familles, les familles nombreuses surtout, à se loger, les plafonds de ressources des HLM ont été relevés suivant le nombre des enfants. Dans votre agglomération, ces relèvements pourront atteindre 6 % pour une famille avec un enfant, 15 % avec deux enfants et 18 % avec trois enfants.
A l'initiative du Ministre du Logement, Hervé de CHARETTE, le Gouvernement proposera, en 1994, 40 000 logements nouveaux aux familles les plus défavorisées. Les organismes HLM fourniront 20 000 logements supplémentaires aux ménages dont les ressources sont inférieures ou égales à 60 % des plafonds. L'Etat a débloqué des crédits nouveaux pour construire 20 000 logements sociaux d'insertion au lieu des 10 000 qui avaient été initialement prévus.
La préoccupation du logement s'inscrit dans une politique de la ville dont la Communauté Urbaine est un partenaire privilégié. L'agglomération lyonnaise nourrit deux grands projets urbains, à Vénissieux et à Vaulx-en-Velin. Les contrats de ville aideront à les réaliser.
Je veillerai personnellement à l'efficacité de cette politique pour laquelle le Gouvernement a exceptionnellement dégagé, en 1993, 5 milliards de Francs.
Nous avons quelques grands objectifs pour les 5 ans à venir. Ils concrétiseront notre politique aux yeux des populations concernées.
Enfin, sur la proposition de Mme VEIL, Ministre d'Etat, Ministre des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville, j'ai pris les mesures nécessaires pour accélérer les procédures. Toute administration qui n'aura pas engagé, au 1er juin prochain, les crédits reçus se les verra retirer. Une autre action, plus efficace, de la politique de la ville en bénéficiera alors.
Votre Communauté Urbaine a su fixer des activités nouvelles et elle pourra continuer à le faire.
Parmi vos réussites, je compte :
- la santé, et notamment l'Agence du médicament,
- les transports urbains, avec le Centre d'étude pour les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques,
- la sécurité enfin avec Interpol.
Lyon profitera de nouvelles décisions qui sont aujourd'hui en cours d'instruction. Elle accueillera ainsi de nouvelles activités.
Il y a un quart de siècle, le Général de GAULLE évoquait, à Lyon, l'émergence d'un "vaste ensemble démographique, scientifique et technique, comprenant Saint-Etienne et Grenoble, dont Lyon serait le principal élément".
Le Général de GAULLE appelait la "Capitale de la Région Rhône-Alpes" à s'affirmer comme un "centre de rééquilibrage face à l'effort multiséculaire de centralisation".
Dans cet esprit, la loi du 31 décembre 1966 créait la Communauté Urbaine de Lyon.
Nous voyons aujourd'hui combien cette intuition fut féconde. Votre Communauté a su, en dialoguant avec l'État, répondre à sa mission : je crois en la poursuite de son succès.
* Discours lors du déplacement à Lyon
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux d'avoir l'occasion de m'exprimer aujourd'hui devant vous. L'aménagement du territoire n'a de sens en effet que s'il permet de maintenir et de développer dans les régions, un tissu dense d'entreprises de toutes tailles.
De ce point de vue, la Région Rhône-Alpes est exemplaire. Elle offre le spectacle d'une région dynamique, dotée d'entreprises performantes dont certaines sont au tout premier rang européen.
Tous les secteurs d'activité ou presque y sont représentés ; les petites et moyennes entreprises sont particulièrement nombreuses ; le potentiel de recherche, souvent étroitement associé à l'industrie, est très développé.
C'est le résultat d'une grande tradition, industrielle et commerçante, mais intellectuelle aussi, d'une longue histoire qui a fait pendant des siècles de ces terres le point de jonction de la France et de l'Empire, le point où le grand commerce italien rejoignait la route qui menait aux foires de la Champagne et du Rhin.
C'est aussi et surtout le résultat du travail et du talent des femmes et des hommes de cette région, de leur volonté d'entreprendre et de développer ce pays.
En dépit de la prospérité de votre région, de votre dynamisme, vous devez être nombreux à vous poser les questions que se posent aujourd'hui tous les Français, mais qui ont, pour vous, chefs d'entreprise, une importance, une acuité particulières : quand donc la reprise interviendra-t-elle ? quand la situation de l'emploi cessera-t-elle de se détériorer ?
A ces questions précises, il est malheureusement impossible de répondre en donnant des dates, si l'on veut en tout cas être honnête avec soi-même et avec son auditoire.
Je ne serai donc pas celui qui promet la croissance pour demain ou pour après-demain et qui annonce des remèdes-miracles.
Je crois cependant que la stratégie économique et sociale du Gouvernement est cohérente et adaptée aux besoins de l'heure. Je crois également qu'il y a des signes convergents, même s'ils demeurent discrets, qui montrent que cette stratégie va réussir. C'est les raisons de cet optimisme, raisonné et raisonnable, que je voudrai vous exposer ici.
La stratégie du Gouvernement n'est pas de créer une reprise artificielle, de susciter en période pré-électorale un feu de paille sans lendemain mais dont la France paierait ensuite de longues années les bénéfices illusoires et passagers.
Je sais que la France ne manque pas de bons esprits pour transformer, par la magie du verbe, la mise au goût du jour d'errements anciens en politique nouvelle et courageuse. Qu'on ne compte pas sur moi pour engager notre pays dans cette voie. Le Gouvernement a un cap ; il le tient. Sa politique ne consiste pas à prétendre créer de l'activité et des emplois lorsque la récession s'abat sur toute l'Europe. Elle vise en revanche à mettre en place les conditions, pour que les entreprises produisent, investissent, embauchent.
L'analyse du Gouvernement est que la crise actuelle a trois causes essentielles : tout d'abord un environnement international défavorable, ensuite une confiance insuffisante des agents économiques qui pousse chacun à différer achats et investissements, enfin des obstacles structurels à l'emploi qui incitent à privilégier la machine par rapport à l'homme.
Nous devons donc agir, d'une part pour faire revenir la confiance, d'autre part, pour être dans la meilleure situation afin de profiter pleinement de la reprise lorsque celle-ci manifestera pleinement ses effets en Europe, enfin pour créer les conditions d'une croissance plus créatrice d'emploi que précédemment.
Le Gouvernement déploie ses efforts dans quatre directions : maintenir une politique macroéconomique de stabilité, assurer à la France un horizon international dégagé, adopter en faveur des entreprises une politique structurelle permettant d'accroître leur compétitivité, favoriser l'emploi.
Nous devons tout d'abord restaurer la confiance en plaçant la France dans un cadre macroéconomique qui assure, sur le long terme, la compétitivité de notre économie.
Ceci impose en premier lieu la maîtrise des déficits publics. Les difficultés actuelles, qui alourdissent les charges et diminuent les recettes, rendent cet exercice difficile. Mais il ne peut y avoir de croissance durable sans des finances publiques saines.
En 1993, le déficit devait être de 340 MdsF. En 1994, il est ramené à 300 MdsF. C'est encore beaucoup trop. C'est pourquoi j'ai entendu que notre action s'inscrive dans un cadre à moyen terme : la loi quinquennale de redressement des finances publiques devrait permettre de ramener le déficit budgétaire en 1997 à 2,5 % du PIB, soit environ 200 MdsF.
De même, les déficits sociaux sont maîtrisés. Des mesures ont été prises pour réduire la déficit de la Sécurité sociale, rétablir l'équilibre de l'Unédic, sauvegarder la retraite des cadres. Le Gouvernement s'est également engagé sur une réforme à plus long terme de notre système de protection sociale, dont la philosophie et l'équilibre doivent être préservées, car les français y sont justement attachés. C'est pourquoi le Gouvernement a fait adopter une courageuse réforme des retraites. Dans le même esprit, il s'est engagé dans une réforme de l'assurance-maladie. Naturellement, la plus large concertation est nécessaire pour ces réformes essentielles.
C'est parce que le Gouvernement s'est engagé dans un processus de redressement qui assurera des finances publiques et des finances sociales saines à moyen terme qu'il peut, aujourd'hui, agir de façon ciblée pour accompagner la reprise de la demande.
C'est ainsi qu'il a décidé d'un allégement de 19 MdsF de l'impôt sur le revenu et une revalorisation des retraites et des allocations familiales au 1er janvier, ce qui devrait soutenir la consommation des ménages.
De même, vous le savez, différentes mesures ont été prises en faveur des entreprises et des particuliers, pour inciter à l'achat de voitures neuves. Que n'a-t-on entendu lorsque ces décisions furent annoncées le 30 janvier dernier ! Même s'il est trop tôt pour dresser un bilan définitif, je constate aujourd'hui que les premiers résultats sont très encourageants.
Depuis un an, la baisse des taux d'intérêt est très sensible. Entre mars 1993 et février 1994, la baisse a été de l'ordre de 2 points pour les prêts aux entreprises. Les entreprises doivent saisir cette chance pour augmenter leurs investissements.
C'est incontestable, la France a gagné en compétitivité et s'affirme de plus en plus comme un grand pays exportateur.
Elle a donc besoin d'un horizon international dégagé. Vous savez, à cet égard, les efforts déployés par le Gouvernement pour aboutir à une conclusion positive du cycle d'Uruguay. L'accord du 15 décembre n'est pas parfait. La négociation n'est pas terminée dans tous les secteurs. Nous devons demeurer vigilants, en particulier s'agissant de l'aéronautique. Mais les résultats d'ores et déjà atteints sont positifs : dans les domaines où la France est très compétitive -je pense à la parapharmacie, aux alcools, à la chimie, à la parfumerie, aux services- nous avons obtenu des abaissements significatifs des droits existants ou une meilleure ouverture des marchés.
Enfin et surtout, nous avons obtenu en matière d'antidumping, de protection de la propriété intellectuelle, de règlement des différends des règles nouvelles qui assurent à nos entreprises un cadre juridique plus sûr et plus équitable.
Notre économie est de plus en plus compétitive par rapport à la plupart de ses grands concurrents ; les barrières à l'exportation tombent. A vous, chefs d'entreprise, de profiter de cette situation exceptionnelle pour exporter encore davantage. Je sais vos efforts, je sais que les parts de marché de la France ne cessent de progresser. Mais, en 1994, cet effort doit encore être plus intense. La croissance est repartie dans les pays qui, les premiers, étaient entrés en récession, notamment aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. Le plan de relance lancé par les Japonais devrait également soutenir la demande mondiale. Voilà de bonnes raisons pour accentuer encore nos efforts, pour exporter plus et créer ainsi en France des richesses et des emplois.
Le troisième axe de l'action gouvernementale consiste à renforcer la compétitivité de nos entreprises.
Naturellement, la baisse des taux que j'évoquais il y a quelques instants est un élément clé de cette stratégie puisqu'elle permet de diminuer les charges financières et de développer l'investissement productif.
Le Gouvernement a adopté diverses mesures fiscales qui vont dans le même sens. Ainsi, la suppression du décalage d'un mois en matière de TVA a permis en 1993 une amélioration sensible de la situation de trésorerie des entreprises et tout particulièrement des PME.
Parallèlement à cet effort fiscal, le Gouvernement a allégé les charges sociales sur les bas salaires. Cette mesure sera étendue progressivement jusqu'à un salaire égal à 1,6 fois le SMIC.
Avons-nous, ce faisant, répondu complètement à toutes les attentes ?
Evidemment non. Je suis conscient du chemin qu'il reste à parcourir, de l'ampleur du redressement à effectuer. Mais le Gouvernement n'a pas à rougir de son bilan, moins d'un an après son entrée en fonction. Il poursuivra dans la même ligne son action pour renforcer encore, par des réformes structurelles, la compétitivité des entreprises. Plusieurs chantiers s'ouvrent à nous. Je pense à la nécessaire amélioration des règles sur les délais de paiement. Je pense également à l'évolution des règles du jeu de la sous-traitance, que je souhaite bientôt voir consacrer par un code de bonne conduite. Je pense enfin à la recherche. Vous savez qu'une grande consultation nationale a été lancée sur ce sujet par le Ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Ce n'est pas un hasard si la réunion sur les liens entre la recherche et l'innovation dans l'entreprise a eu lieu à Grenoble.
Cette cité a su en effet depuis longtemps développer des pôles de recherche de très haut niveau au sein d'universités et d'écoles prestigieuses et associer étroitement les entreprises régionales à leurs travaux. Je suis convaincu que ce grand débat national permettra de trouver des idées neuves afin de rendre notre outil de recherche plus performant et plus utile pour les entreprises. C'est dans le maintien d'un rythme soutenu d'innovation et de progrès technique que réside en effet l'une des conditions essentielles de la compétitivité.
Vous le voyez, le Gouvernement agit et continuera d'agir pour renforcer la compétitivité des entreprises. Ma conception de l'entreprise est claire : c'est d'abord, avant tout, le lieu de création des richesses. Aucun pays n'est durablement fort sans un réseau dense d'entreprises prospères. Aucun pays ne peut lutter contre le chômage, développer durablement l'emploi sans aider d'abord ses entreprises à investir, à produire, à exporter.
Car la première préoccupation du Gouvernement, c'est l'emploi.
Là encore, le Gouvernement s'est attaché à créer un cadre qui soit favorable aux initiatives des entreprises.
La réduction des charges sociales pour les plus bas salaires est un élément essentiel de notre stratégie : cette mesure permettra en effet d'accroître l'embauche des salariés les moins qualifiés, qui sont souvent aussi ceux qui sont le plus touchés par le chômage. A terme, 100 à 150.000 emplois devraient pouvoir être ainsi créés.
Le Gouvernement a également décidé de lier, en 1994, l'accélération du remboursement de la TVA aux efforts accomplis en matière d'emploi ou de formation de jeunes.
Par ailleurs, une loi quinquennale relative à l'emploi, au travail et à la formation professionnelle a été votée.
Elle ouvre de nouveaux champs à la négociation interprofessionnelle et à la négociation de branches. La mise en place du temps réduit indemnisé de longue durée, qui permet de maintenir les salariés dans l'entreprise en cas de difficulté conjoncturelle et l'adaptation du mode d'indemnisation, afin d'inciter le retour à l'emploi des chômeurs, sont d'ores et déjà des thèmes sur lesquels discutent les partenaires sociaux. D'autres sont prévus : l'accès à la formation, l'organisation du travail, le développement de la formation professionnelle initiale. En outre, la loi quinquennale doit permettre la création d'emplois de service dans les nombreux secteurs où il existe des besoins sociaux non satisfaits.
Enfin, la loi quinquennale a créé un mécanisme destiné à favoriser l'embauche des jeunes : le contrat d'insertion professionnelle. Les malentendus auxquels avait donné lieu la publication des décrets d'application de la loi sur ce point ont, je l'espère, été dissipés à l'issue de la rencontre que j'ai eue hier avec les partenaires sociaux. Il n'est jamais entré dans mes intentions de créer un SMIC jeunes. Les décrets en cause sont maintenus. Ils seront complétés avant la fin du mois, de telle manière que le tutorat comporte une vraie formation au sein de l'entreprise et que les jeunes diplômés qui auraient besoin du secours du contrat d'insertion professionnelle ne puissent en aucun cas être rémunérés au-dessous du SMIC.
La politique du Gouvernement, en matière d'emploi, n'est nullement dirigiste. Elle vise à créer un cadre, des conditions favorables. Aux partenaires sociaux ensuite d'engager des négociations, aux entreprises d'agir, chacune à son rythme, compte tenu de ses contraintes et de ses possibilités.
Mais chacun doit être conscient de ses responsabilités. En tant que chefs d'entreprises, mais aussi en tant que citoyens, vous savez l'importance du combat national engagé contre le chômage. Je suis sûr que vous saurez prendre les bonnes décisions et mobiliser toutes les forces de vos entreprises pour créer les emplois dont la France a tant besoin.
Je voudrais insister enfin sur un dernier point, qui n'est pas souvent perçu. Les mesures prises par le Gouvernement sont adaptées à la situation et à la société française, j'y ai veillé. Mais la plupart de nos grands partenaires confrontés également aux problèmes du chômage adoptent, chacun avec ses spécificités propres, des mesures similaires. Il y aura au printemps une réunion des 7 grands pays industrialisés à Détroit pour comparer les expériences nationales en la matière. Je ne serais pas surpris, pour ma part, que cette comparaison mette en lumière certaines similitudes. Ceci montrera que la France n'est pas à la traîne et que bien souvent, elle montre même le chemin.
Est-ce à dire pour autant que tout est résolu ? Hélas non. Mais la politique économique et sociale du Gouvernement, qui, vous le voyez, est cohérente et déterminée, porte ses premiers fruits et les indices se multiplient qui confirment nos raisons d'espérer :
- tout d'abord, la situation internationale s'améliore ; je l'ai dit.
- Deuxième motif d'espoir, les anticipations des agents économiques changent. Toutes les enquêtes montrent que la perception par les ménages et par les entreprises de l'avenir économique devient plus optimiste.
- Troisième indice de ce retournement, l'évolution de l'activité, dans certains secteurs sensibles, comme le bâtiment ou les biens intermédiaires. Après un recul très net au premier semestre 1993, les indicateurs se redressent en fin d'année. Dans ces circonstances, la prévision de croissance de 1,4 % pour 1994 est réaliste. Hélas, l'évolution de l'emploi ne suit qu'avec retard l'amélioration de la situation économique. Je note cependant que la progression se ralentit. Il y avait 200 000 demandeurs d'emploi supplémentaire au premier semestre 1993, 100 000 au deuxième semestre. De même, les offres d'emplois comptabilisées par l'ANPE ont augmenté de plus de 30 % depuis un an.
Ces signes de reprise sont donc nombreux, même s'ils demeurent encore peu spectaculaires.Chaque jour qui passe nous en apporte de nouveaux. Il faut regarder l'avenir avec espoir. Je suis sûr que l'économie française, qui a d'immenses possibilités et des forces insoupçonnées, sortira bientôt de cette crise. Plus compétitive que bien de ses concurrents, elle bénéficiera, plus qu'eux, de la reprise qui s'amorce. Je suis sûr enfin que les chefs d'entreprise et tous les citoyens sauront comprendre le défi immense que représente la lutte contre le chômage et l'exclusion dans ce pays. C'est notre combat à tous aujourd'hui, ce sera, je l'espère, demain, le succès de la France.