Interview de M. Jean-Marc Ayrault, président du Groupe socialiste à l'Assemblée nationale, au magazine du PS "La France qui change" , le 13 novembre 2001, sur le bilan de la gauche au pouvoir de 1997 à 2002.

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Média : La France qui change

Texte intégral

Le président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale fait le bilan des ombres et des lumières de ce quinquennat parlementaire où les grandes réforme ni les chausse-trapes n'ont pas manqué.


Sur ces cinq années, quelles ont été les lois qui vous ont tenu le plus à cur ?
Symboliquement, évidemment les 35 heures. Personne ne croyait que nous tiendrions cette promesse. Et pourtant nous l'avons faite. Ce jour là, la gauche a renoué avec l'audace. Elle a retrouvé le fil des grandes réformes sociales qui va de Léon Blum à François Mitterrand. Mon autre satisfaction est d'avoir aidé le gouvernement à remplir tous les termes du contrat passé avec les Français. La CMU, le PACS, la parité, l'indépendance de la justice, le quinquennat. Tout cela pourra légitimement rester gravé dans les esprits. Les 255 députés socialistes, dont la moitié était novice en 1997, ont fait du beau travail. Ma plus grande émotion a été l'adoption du PACS. C'était une proposition très controversée des députés socialistes. Ça a été dur, très dur. Nous avons commis des erreurs. Mais nous l'avons défendue jusqu'au bout et c'est devenu aujourd'hui un symbole de tolérance et d'ouverture.
Cela n'a pas toujours été facile avec la Gauche plurielle...
Quand j'ai pris mes fonctions, je me suis dit, "ce n'est pas gagné d'avance." J'étais néophyte dans ce rôle et il fallait faire vivre ensemble cinq familles ! Eh bien à l'arrivée je peux dire, sans forfanterie, mission accomplie ! Un véritable partenariat s'est instauré dans la majorité plurielle où nous avons su conjuguer nos différences dans le respect des autres. Le groupe socialiste n'a pas ménagé sa peine et n'a jamais fait défaut au gouvernement. L'aboutissement n'a pas été un compromis a minima mais de grandes réformes à la fois audacieuses et modernes.
Alors c'est vrai, nous avons eu des divergences. Les projets de loi de financement de la sécurité sociale, par exemple, nous ont parfois donné du fil à retordre. Mais l'esprit unitaire a fini toujours par prévaloir sur l'esprit de chapelle. Notre bilan ne se divise pas. Ce que nous avons réussi, nous l'avons réussi ensemble. Chacun y a sa part. Chacun peut et devait s'en prévaloir.
Certains considèrent que le Parlement serait resté spectateur
Balivernes ! C'est la première fois sous la Vè République que le Parlement a occupé une place aussi centrale dans la vie publique. Une anecdote. Quand j'ai été élu président du groupe socialiste, Lionel Jospin m'a confié : "le gouvernement est nommé par le Président, mais sa légitimité vient de l'Assemblée. C'est à l'Assemblée que notre politique s'élaborera".

Il a tenu parole. Il est le premier chef du gouvernement à n'avoir jamais utilisé les procédures contraignantes (comme le 49/3). Il est le premier à avoir été aussi présent, à mettre un point d'honneur à répondre personnellement aux séances de questions d'actualité. Tous les textes ont fait l'objet d'un travail commun gouvernement - Assemblée. Nous avons multiplié les commissions d'enquêtes et les missions d'information. Enfin, et la droite devrait s'en souvenir, les droits de l'opposition ont été respectés à la lettre et dans l'esprit. Nous n'avons jamais eu recours à des subterfuges de procédure. Un mot résume le mieux ces cinq ans : le respect. Cette expérience nous servira pour la modernisation de la constitution qui sera l'un des grands débats des rendez-vous électoraux.


(source http://www.parti-socialiste.fr, le 3 décembre 2001)