Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs les députés,
J'ai l'honneur de soutenir au nom du Gouvernement, en lecture définitive, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 ; à l'issue de ce débat, votre assemblée aura le dernier mot.
Dans quelques instants, je demanderai à votre assemblée de se prononcer en faveur du texte que vous aviez adopté à l'issue de la deuxième lecture. En effet, le Sénat a préféré, cette année encore, rejeter en bloc le texte que vous lui aviez transmis.
Bien entendu, vous n'ignorez pas les désaccords majeurs qui persistent entre d'un côté le Gouvernement et votre majorité, et de l'autre la majorité sénatoriale.
Votre rapporteur vous en fera certainement le compte rendu précis dans quelques instants, mais je voudrais revenir sur quelques-uns de ces désaccords.
Je constate tout d'abord, et c'est une évidence, que nous divergeons sur l'appréciation à donner sur l'état des comptes sociaux.
La majorité sénatoriale considère que les comptes produits par le Gouvernement sont volontairement inexacts, qu'il se livre à des " manipulations ", pour financer ses grandes réformes sociales.
Devant le Sénat, je n'ai pu laisser de telles affirmations sans réponses et, dans la mesure où elles rejoignent sans surprise les propos de l'opposition dans votre assemblée, permettez-moi d'y revenir quelques instants.
Personne ne peut d'abord contester que le régime général est redevenu excédentaire en 1999. La majorité sénatoriale le reconnaît elle-même et il faudrait beaucoup de mauvaise foi pour le nier.
Nous savons tous, sur ces bancs, que c'est en grande partie le résultat de la politique économique volontariste menée par le Gouvernement : moins de chômeurs, c'est plus de cotisations sociales.
Non seulement nous avons renoué avec les excédents en 1999, mais les prévisions pour 2001 et 2002 confirment nettement cette tendance.
Il ne fait donc aucun doute que la sécurité sociale est en meilleure santé financière que du temps où la précédente majorité exerçait les responsabilités de sa gestion : un équilibre global depuis 1998, un déficit cumulé de plus de 200 milliards de francs entre 1994 et 1997, cela fait quand même une différence !
C'est ce qui nous a permis au cours de notre débat de décider des mesures nouvelles pour améliorer la protection sociale de nos concitoyens :
- pour une meilleure prise en charge des malades, vous avez notamment voté un plan de soutien en faveur de l'hôpital public, et vous avez décidé de renforcer la prévention bucco-dentaire des jeunes ;
- pour soutenir les familles, vous notamment avez créé un congé de paternité, et vous avez développé les places d'accueil pour les autistes ;
- pour lutter contre les risques liés aux conditions de travail, vous avez considérablement amélioré la protection des salariés, et nous avons fait ensemble un premier pas vers la réparation intégrale des accidents du travailJe puis vous annoncer en outre que le Gouvernement a décidé comme plusieurs d'entre vous l'aviez proposé, de supprimer par la voie réglementaire la condition de deux années de vie commune pour le bénéfice de la rente d'ayant droits versée en cas de décès de la victime d'accident du travail.
Toutes ces mesures sont attendues et seront appréciées de nos concitoyens.
Quant aux hypothèses économiques pour 2002, rien pour l'heure ne permet de démentir l'hypothèse de croissance de 5 % de la masse salariale.
Je me souviens pourtant des déclarations catastrophistes de certains députés de l'opposition lors de la présentation de ce projet de loi en septembre.
Pourtant, comme je l'ai annoncé au Sénat, l'année 2001 devrait nous révéler de meilleurs résultats que prévu en matière recettes de la sécurité sociale, puisque l'ACOSS a eu connaissance des encaissements à la fin du troisième trimestre, qui montrent un acquis de croissance de la masse salariale déjà très élevé.
Tout porte donc à croire que la prévision de croissance de la masse salariale de 5,9 % pour l'ensemble de l'année 2001 sera dépassée.
Selon les travaux d'ajustement des comptes en droits constatés menés actuellement par l'ACOSS, il apparaît que les comptes définitifs de l'année 2001 pourraient être -et ce ne sont encore que des hypothèses- pourraient être majorés de l'ordre de 18 milliards de francs.
J'ai cru nécessaire d'en informer le Parlement, même si ces chiffres ne restent que des hypothèses.
Pour conclure sur les comptes, je crois que ce débat d'apparence technique et comptable est plus politique et révélateur qu'il n'y paraît, car derrière ces arguments, ce sont bien des divergences fondamentales qui nous opposent quant aux orientations que nous devons donner à nos politiques sociales.
La droite parle des comptes sociaux et jamais des assurés sociaux. C'est d'ailleurs cette attitude que les Français ont rejetée en 1997.
Nos différences, ce sont celles qui séparent de façon évidente la gauche de la droite.
Des différences qui donnent à la gauche un bilan incomparable à celui de la droite en matière de salaires et de pouvoir d'achat, de soutien à la croissance, d'emploi et de lutte contre le chômage, de protection contre la maladie, de moyens pour les hôpitaux, de prise en charge de la dépendance des personnes âgées, de lutte contre l'exclusion, de soutien aux familles et à la petite enfance
Je rappellerai cette évidence : le Gouvernement a fait depuis 1997 beaucoup plus que ces prédécesseurs pour améliorer la qualité de vie de nos concitoyens, et pour venir en aide aux plus faibles dans notre société.
Bien sûr, il y a encore beaucoup à faire, personne ne peut le contester, face aux inégalités sociales et à la pauvreté, face aux difficultés de nos services publics, face aux situations de chômage qui touchent encore deux millions de nos concitoyens.
Depuis le début de la législature, le Gouvernement a pris soin d'inscrire dans chacun des projets de loi de financement de la sécurité sociale, un nombre important de mesures qui répondent à ces difficultés.
En marge de nos débats, un certain nombre d'annonces ont pu être faites, et je voudrais d'ailleurs revenir sur une question qui n'est pas du ressort du PLFSS, mais qui concerne très directement la protection sociale de plusieurs millions de nos concitoyens, puisqu'il s'agit de la couverture maladie universelle (CMU).
Comme je vous l'avais annoncé lors des précédentes lectures de notre texte, le Gouvernement a poursuivi ses travaux en ce qui concerne l'évolution de la couverture maladie universelle.
Je sais que c'est une question que la représentation nationale suit avec attention. J'ai bien entendu les interrogations et les propositions qui viennent des bancs de la majorité de votre assemblée. Je crois donc utile de vous rendre compte de l'évolution de ce dossier.
La CMU permet aujourd'hui à près de cinq millions de nos concitoyens, parmi les plus défavorisés, de bénéficier gratuitement d'une excellente couverture maladie, et ainsi d'accéder sans obstacle aux soins. Elle constitue sans nul doute une réforme sociale essentielle mise en uvre sous la présente législature.
Toutefois, le seuil de ressources pour bénéficier de la CMU complémentaire introduit, pour les personnes dont les revenus sont à peine supérieurs à ce seuil, une rupture dans leur couverture, puisque pour quelques francs de revenu mensuel au-dessus du seuil, elles doivent se payer une couverture maladie complémentaire.
Cette situation a été plusieurs fois signalée par certains d'entre vous, qui proposaient de relever ce seuil ; en réponse, j'ai indiqué à plusieurs reprises que la priorité de mon action dans ce domaine résidait non pas dans le relèvement du seuil, ce qui ne supprimerait pas les effets pervers, mais dans l'atténuation de cet effet de seuil.
Une concertation approfondie s'est donc tenue au cours des dernières semaines entre la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, les organismes dispensateurs de couvertures maladie complémentaires, et mon ministère. Elle a débouché sur un nouveau dispositif permettant de réduire le coût d'acquisition d'un contrat de couverture maladie complémentaire par les personnes dont les ressources sont à peine supérieures au plafond de la CMU. Ce dispositif présente les caractéristiques suivantes :
- il bénéficiera de façon permanente à toutes les personnes qui dépendent du régime général de la sécurité sociale, dont les ressources n'excèdent pas de plus de 10 % le plafond de ressources de la CMU soit environ 2 millions de personnes ; pour les personnes isolées, cela correspondra à des ressources comprises entre 3 600 et 3 960 francs par mois ; il sera financé au moyen des crédits d'action sanitaire et sociale des caisses primaires d'assurance maladie ;
- une aide sera versée à ces personnes par les caisses primaires d'assurance maladie pour acquérir un contrat complémentaire ; les bénéficiaires de ce type de contrat seront dispensés de l'avance des frais ; le montant de l'aide s'établira en moyenne à 750 francs par an pour une personne seule ; le contrat devra être réservé aux prestations maladies et garantir une couverture équivalente à celle de la CMU ;
- des négociations à l'échelon local entre les caisses primaires et les organismes complémentaires détermineront les tarifs auxquels ces contrats devront être offerts ;
- ce nouveau dispositif ne fera pas faire obstacle au développement de partenariats locaux en matière d'accès aux soins des personnes démunies, élargis notamment aux conseils généraux.
Ces dispositions seront prochainement mises en uvre par voie d'avenant à la convention d'objectifs et de gestion de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés.
Par ailleurs, un dispositif analogue sera négocié avec le régime agricole et celui des professions indépendantes.
Je considère donc que les conditions sont à présent réunies, pour que les personnes dont les ressources sont à peine supérieures au plafond de la CMU, et parmi elles, celles dont le droit à la CMU s'éteindra au début 2002, puissent conserver une couverture maladie de bonne qualité.
En cette fin d'année 2001, nous aurons pu ainsi parachever cette grande réforme de société qu'est la CMU : voilà qui donne du sens à nos débats sur la sécurité sociale de nos concitoyens.
J'ajoute à ceci que le projet de refonte de notre système conventionnel en concertation avec les partenaires sociaux et les professions de santé, est un progrès fondamental qui nous permet de sortir de la situation de blocage provoquée par les décisions et la méthode du gouvernement d'avant 97.
Le dispositif que le Gouvernement a proposé en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale a été adopté par celle-ci, après un avis favorable à l'unanimité du conseil d'administration de la CNAM ! Il s'agit bien d'un changement de méthode.
Enfin, les mesures nouvelles exceptionnelles que nous avons décidé pour les hôpitaux représentent un effort sans précédent : avec les 3.9 milliards de francs supplémentaires que vous avez accepté de consacrer aux hôpitaux sur 2001 et 2002, vous permettrez à un nombre jamais égalé d'hôpitaux de toutes tailles, du simple hôpital local au grand CHU, de bénéficier de crédits permettant à la fois de résoudre les tensions budgétaires de la fin de l'année 2001, de préparer le passage aux 35 heures, de soutenir des projets d'investissement, de faire des travaux de sécurisation des locaux
Ces crédits sont très attendus, et vous savez que les services de mon ministère ont travaillé sans attendre à leur répartition au plus près des besoins des hôpitaux.
Depuis 1997, le Gouvernement a fait des efforts considérables pour l'hôpital public. Aucun de ses prédécesseurs ne peut se vanter d'avoir fait autant pour la revalorisation et l'amélioration des carrières des agents hospitaliers, toutes catégories confondues.
Aucun de ses prédécesseurs ne peut prétendre avoir augmenté les moyens financiers des hôpitaux autant que nous l'avons fait : depuis 1997, ce sont plusieurs dizaines de milliards de francs supplémentaires que nous aurons consacrés aux hôpitaux (dotations globales, FMES, FIMHO, protocoles 2000 et 2001), sans compter les 3.9 milliards supplémentaires qui restent en discussion.
Compte tenu de tout ceci, je ne peux laisser dire que nos efforts pour l'hôpital public ne sont pas importants.
Non seulement ils sont sans précédent, mais de surcroît ils se traduisent très concrètement, tant pour les établissements qui ont pu s'agrandir ou se moderniser, que pour les agents qui auront de meilleures conditions de travail.
C'était une priorité pour le Gouvernement que de répondre aux besoins de l'hôpital public, et je crois que nous l'avons fait sans ambiguïté.
Alors bien sûr, l'hôpital public est soumis à de fortes demandes de la population ; le niveau d'exigence de nos concitoyens à son égard est à la hauteur de son niveau d'excellence, dont chacun sait qu'il est reconnu dans le monde entier.
Il est vrai aussi que l'hôpital public est amené à gérer de plus en plus de problèmes qui dépassent sa seule compétence médicale : conséquences des violences sociales, situations de misère et d'exclusion, prise en charge du vieillissement lorsque les familles ne veulent plus assumer leur rôle. Beaucoup des maux de notre société pèsent sur l'hôpital public, et il est demandé beaucoup à ses 800.000 agents.
C'est bien la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité que la réduction du temps de travail leur soit appliquée dans les meilleures conditions possibles, c'est-à-dire avec la création d'un nombre important d'emplois.
L'accord que nous avons signé le 27 septembre prévoit la création de 45.000 emplois. Je sais que pour certains, ce volume d'emplois n'est pas considéré comme satisfaisant, et plusieurs d'entre vous s'en sont fait l'écho.
Je veux d'abord vous répondre sincèrement que nous devons privilégier une approche concrète des choses : bien entendu, nous ferions plus et mieux avec plus d'emplois, mais nous ferons déjà beaucoup avec 45.000.
Beaucoup, car 80% de ces emplois seront pourvus en deux ans, d'ici la fin 2003 ; beaucoup, car il s'agit d'un volume annuel de créations d'emplois que la fonction publique hospitalière n'a jamais connu et pour lequel il va falloir susciter des vocations.
Beaucoup, car plusieurs milliers d'élèves infirmiers et infirmières attendent leur premier poste après avoir été formés dans les écoles dont nous avons considérablement augmenté les capacités d'accueil.
Beaucoup, car ces nouveaux agents hospitaliers vont bénéficier d'une carrière plus attractive et de rémunérations revalorisées.
Le Gouvernement est donc fermement décidé à faire en sorte que la mise en place de la réduction du temps de travail se fasse avec le concours de tous, car c'est bien la condition de son efficacité pour le service public hospitalier.
À cet égard, vous êtes un certain nombre, notamment sur les bancs du groupe communiste, à avoir demandé des garanties quant à l'association des organisations syndicales non signataires de l'accord à la préparation des textes, à la mise en uvre ainsi qu'à l'évaluation de la réduction du temps de travail.
Je souhaite redire que la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière est une réforme de grande ampleur par son impact sur les conditions de vie des personnels et sur l'organisation hospitalière.
Il est clair que ces enjeux nécessitent que l'ensemble des organisations syndicales soit associé à sa mise en uvre. Le protocole signé le 27 septembre par quatre organisations syndicales prévoyait plusieurs modalités d'associations des syndicats à la définition et à la mise en uvre de cette réforme.
Ces modalités, je souhaite les renforcer.
Au niveau local tout d'abord :
- Dans chaque établissement l'ensemble des syndicats sera appelé à négocier les conditions de mise en uvre de la réduction du temps de travail. Ces négociations auront comme cadre le résultat des négociations nationales qui se sont déroulées avec les huit organisations syndicales entre janvier et septembre 2001.
- Au niveau régional, je donne instruction aux directeurs d'agences régionales de l'hospitalisation afin qu'ils associent les organisations syndicales non-signataires à la définition des modalités de la réduction du temps de travail.
Au niveau national ensuite :
- Certains sujets sont négociés, d'ores et déjà, avec tous les syndicats : il s'agit, conformément au protocole, des textes relatifs aux heures supplémentaires et aux astreintes. Dans ce cadre, tous les syndicats, je dis bien tous les syndicats, ont participé hier à une première réunion d'examen de ces textes.
- Par ailleurs, il existe un comité de suivi qui réunit les quatre syndicats signataires selon les stipulations du protocole. Mais je suis soucieuse que la plus large concertation sur ce dossier puisse avoir lieu. Ainsi, comme je vous l'avais annoncé, une première réunion des syndicats non-signataires s'est tenue le 19 novembre afin de recueillir leur avis sur les textes avant leur présentation au conseil supérieur de la fonction publique hospitalière.
À tout cela, je veux aujourd'hui ajouter de nouvelles propositions, puisque les textes et la stratégie de mise en uvre de la RTT intéressent l'ensemble des syndicats.
Je m'engage ainsi à ce que les syndicats non-signataires soient associés à la mise en uvre et à l'évaluation du temps de travail, au travers d'un comité ad hoc, présidé par mon Cabinet. Ce comité réunira l'ensemble des organisations syndicales représentatives. Je propose ainsi qu'une réunion de ce comité se tienne avant la fin de l'année pour examiner notamment le projet de texte relatif au compte épargne temps.
En outre, chaque fois qu'il sera utile, la commission des statuts du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière sera réunie avant la séance plénière de ce conseil.
Mesdames et Messieurs les Députés,
Voilà ce que je souhaitais dire en introduction à la lecture définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En effet, au-delà de ses aspects techniques, ce texte est un support important pour la politique menée par le Gouvernement en faveur de l'amélioration de la protection sociale de nos concitoyens.
Je remercie particulièrement madame et messieurs les rapporteurs pour l'importance du travail qu'ils ont accompli, et je vous demande solennellement, au nom du Gouvernement, d'adopter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 dans les mêmes termes que lors de votre précédent vote.
Je vous remercie.
(Source http://www.social.gouv.fr, le 27 décembre 2001)
Mesdames, Messieurs les députés,
J'ai l'honneur de soutenir au nom du Gouvernement, en lecture définitive, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 ; à l'issue de ce débat, votre assemblée aura le dernier mot.
Dans quelques instants, je demanderai à votre assemblée de se prononcer en faveur du texte que vous aviez adopté à l'issue de la deuxième lecture. En effet, le Sénat a préféré, cette année encore, rejeter en bloc le texte que vous lui aviez transmis.
Bien entendu, vous n'ignorez pas les désaccords majeurs qui persistent entre d'un côté le Gouvernement et votre majorité, et de l'autre la majorité sénatoriale.
Votre rapporteur vous en fera certainement le compte rendu précis dans quelques instants, mais je voudrais revenir sur quelques-uns de ces désaccords.
Je constate tout d'abord, et c'est une évidence, que nous divergeons sur l'appréciation à donner sur l'état des comptes sociaux.
La majorité sénatoriale considère que les comptes produits par le Gouvernement sont volontairement inexacts, qu'il se livre à des " manipulations ", pour financer ses grandes réformes sociales.
Devant le Sénat, je n'ai pu laisser de telles affirmations sans réponses et, dans la mesure où elles rejoignent sans surprise les propos de l'opposition dans votre assemblée, permettez-moi d'y revenir quelques instants.
Personne ne peut d'abord contester que le régime général est redevenu excédentaire en 1999. La majorité sénatoriale le reconnaît elle-même et il faudrait beaucoup de mauvaise foi pour le nier.
Nous savons tous, sur ces bancs, que c'est en grande partie le résultat de la politique économique volontariste menée par le Gouvernement : moins de chômeurs, c'est plus de cotisations sociales.
Non seulement nous avons renoué avec les excédents en 1999, mais les prévisions pour 2001 et 2002 confirment nettement cette tendance.
Il ne fait donc aucun doute que la sécurité sociale est en meilleure santé financière que du temps où la précédente majorité exerçait les responsabilités de sa gestion : un équilibre global depuis 1998, un déficit cumulé de plus de 200 milliards de francs entre 1994 et 1997, cela fait quand même une différence !
C'est ce qui nous a permis au cours de notre débat de décider des mesures nouvelles pour améliorer la protection sociale de nos concitoyens :
- pour une meilleure prise en charge des malades, vous avez notamment voté un plan de soutien en faveur de l'hôpital public, et vous avez décidé de renforcer la prévention bucco-dentaire des jeunes ;
- pour soutenir les familles, vous notamment avez créé un congé de paternité, et vous avez développé les places d'accueil pour les autistes ;
- pour lutter contre les risques liés aux conditions de travail, vous avez considérablement amélioré la protection des salariés, et nous avons fait ensemble un premier pas vers la réparation intégrale des accidents du travailJe puis vous annoncer en outre que le Gouvernement a décidé comme plusieurs d'entre vous l'aviez proposé, de supprimer par la voie réglementaire la condition de deux années de vie commune pour le bénéfice de la rente d'ayant droits versée en cas de décès de la victime d'accident du travail.
Toutes ces mesures sont attendues et seront appréciées de nos concitoyens.
Quant aux hypothèses économiques pour 2002, rien pour l'heure ne permet de démentir l'hypothèse de croissance de 5 % de la masse salariale.
Je me souviens pourtant des déclarations catastrophistes de certains députés de l'opposition lors de la présentation de ce projet de loi en septembre.
Pourtant, comme je l'ai annoncé au Sénat, l'année 2001 devrait nous révéler de meilleurs résultats que prévu en matière recettes de la sécurité sociale, puisque l'ACOSS a eu connaissance des encaissements à la fin du troisième trimestre, qui montrent un acquis de croissance de la masse salariale déjà très élevé.
Tout porte donc à croire que la prévision de croissance de la masse salariale de 5,9 % pour l'ensemble de l'année 2001 sera dépassée.
Selon les travaux d'ajustement des comptes en droits constatés menés actuellement par l'ACOSS, il apparaît que les comptes définitifs de l'année 2001 pourraient être -et ce ne sont encore que des hypothèses- pourraient être majorés de l'ordre de 18 milliards de francs.
J'ai cru nécessaire d'en informer le Parlement, même si ces chiffres ne restent que des hypothèses.
Pour conclure sur les comptes, je crois que ce débat d'apparence technique et comptable est plus politique et révélateur qu'il n'y paraît, car derrière ces arguments, ce sont bien des divergences fondamentales qui nous opposent quant aux orientations que nous devons donner à nos politiques sociales.
La droite parle des comptes sociaux et jamais des assurés sociaux. C'est d'ailleurs cette attitude que les Français ont rejetée en 1997.
Nos différences, ce sont celles qui séparent de façon évidente la gauche de la droite.
Des différences qui donnent à la gauche un bilan incomparable à celui de la droite en matière de salaires et de pouvoir d'achat, de soutien à la croissance, d'emploi et de lutte contre le chômage, de protection contre la maladie, de moyens pour les hôpitaux, de prise en charge de la dépendance des personnes âgées, de lutte contre l'exclusion, de soutien aux familles et à la petite enfance
Je rappellerai cette évidence : le Gouvernement a fait depuis 1997 beaucoup plus que ces prédécesseurs pour améliorer la qualité de vie de nos concitoyens, et pour venir en aide aux plus faibles dans notre société.
Bien sûr, il y a encore beaucoup à faire, personne ne peut le contester, face aux inégalités sociales et à la pauvreté, face aux difficultés de nos services publics, face aux situations de chômage qui touchent encore deux millions de nos concitoyens.
Depuis le début de la législature, le Gouvernement a pris soin d'inscrire dans chacun des projets de loi de financement de la sécurité sociale, un nombre important de mesures qui répondent à ces difficultés.
En marge de nos débats, un certain nombre d'annonces ont pu être faites, et je voudrais d'ailleurs revenir sur une question qui n'est pas du ressort du PLFSS, mais qui concerne très directement la protection sociale de plusieurs millions de nos concitoyens, puisqu'il s'agit de la couverture maladie universelle (CMU).
Comme je vous l'avais annoncé lors des précédentes lectures de notre texte, le Gouvernement a poursuivi ses travaux en ce qui concerne l'évolution de la couverture maladie universelle.
Je sais que c'est une question que la représentation nationale suit avec attention. J'ai bien entendu les interrogations et les propositions qui viennent des bancs de la majorité de votre assemblée. Je crois donc utile de vous rendre compte de l'évolution de ce dossier.
La CMU permet aujourd'hui à près de cinq millions de nos concitoyens, parmi les plus défavorisés, de bénéficier gratuitement d'une excellente couverture maladie, et ainsi d'accéder sans obstacle aux soins. Elle constitue sans nul doute une réforme sociale essentielle mise en uvre sous la présente législature.
Toutefois, le seuil de ressources pour bénéficier de la CMU complémentaire introduit, pour les personnes dont les revenus sont à peine supérieurs à ce seuil, une rupture dans leur couverture, puisque pour quelques francs de revenu mensuel au-dessus du seuil, elles doivent se payer une couverture maladie complémentaire.
Cette situation a été plusieurs fois signalée par certains d'entre vous, qui proposaient de relever ce seuil ; en réponse, j'ai indiqué à plusieurs reprises que la priorité de mon action dans ce domaine résidait non pas dans le relèvement du seuil, ce qui ne supprimerait pas les effets pervers, mais dans l'atténuation de cet effet de seuil.
Une concertation approfondie s'est donc tenue au cours des dernières semaines entre la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, les organismes dispensateurs de couvertures maladie complémentaires, et mon ministère. Elle a débouché sur un nouveau dispositif permettant de réduire le coût d'acquisition d'un contrat de couverture maladie complémentaire par les personnes dont les ressources sont à peine supérieures au plafond de la CMU. Ce dispositif présente les caractéristiques suivantes :
- il bénéficiera de façon permanente à toutes les personnes qui dépendent du régime général de la sécurité sociale, dont les ressources n'excèdent pas de plus de 10 % le plafond de ressources de la CMU soit environ 2 millions de personnes ; pour les personnes isolées, cela correspondra à des ressources comprises entre 3 600 et 3 960 francs par mois ; il sera financé au moyen des crédits d'action sanitaire et sociale des caisses primaires d'assurance maladie ;
- une aide sera versée à ces personnes par les caisses primaires d'assurance maladie pour acquérir un contrat complémentaire ; les bénéficiaires de ce type de contrat seront dispensés de l'avance des frais ; le montant de l'aide s'établira en moyenne à 750 francs par an pour une personne seule ; le contrat devra être réservé aux prestations maladies et garantir une couverture équivalente à celle de la CMU ;
- des négociations à l'échelon local entre les caisses primaires et les organismes complémentaires détermineront les tarifs auxquels ces contrats devront être offerts ;
- ce nouveau dispositif ne fera pas faire obstacle au développement de partenariats locaux en matière d'accès aux soins des personnes démunies, élargis notamment aux conseils généraux.
Ces dispositions seront prochainement mises en uvre par voie d'avenant à la convention d'objectifs et de gestion de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés.
Par ailleurs, un dispositif analogue sera négocié avec le régime agricole et celui des professions indépendantes.
Je considère donc que les conditions sont à présent réunies, pour que les personnes dont les ressources sont à peine supérieures au plafond de la CMU, et parmi elles, celles dont le droit à la CMU s'éteindra au début 2002, puissent conserver une couverture maladie de bonne qualité.
En cette fin d'année 2001, nous aurons pu ainsi parachever cette grande réforme de société qu'est la CMU : voilà qui donne du sens à nos débats sur la sécurité sociale de nos concitoyens.
J'ajoute à ceci que le projet de refonte de notre système conventionnel en concertation avec les partenaires sociaux et les professions de santé, est un progrès fondamental qui nous permet de sortir de la situation de blocage provoquée par les décisions et la méthode du gouvernement d'avant 97.
Le dispositif que le Gouvernement a proposé en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale a été adopté par celle-ci, après un avis favorable à l'unanimité du conseil d'administration de la CNAM ! Il s'agit bien d'un changement de méthode.
Enfin, les mesures nouvelles exceptionnelles que nous avons décidé pour les hôpitaux représentent un effort sans précédent : avec les 3.9 milliards de francs supplémentaires que vous avez accepté de consacrer aux hôpitaux sur 2001 et 2002, vous permettrez à un nombre jamais égalé d'hôpitaux de toutes tailles, du simple hôpital local au grand CHU, de bénéficier de crédits permettant à la fois de résoudre les tensions budgétaires de la fin de l'année 2001, de préparer le passage aux 35 heures, de soutenir des projets d'investissement, de faire des travaux de sécurisation des locaux
Ces crédits sont très attendus, et vous savez que les services de mon ministère ont travaillé sans attendre à leur répartition au plus près des besoins des hôpitaux.
Depuis 1997, le Gouvernement a fait des efforts considérables pour l'hôpital public. Aucun de ses prédécesseurs ne peut se vanter d'avoir fait autant pour la revalorisation et l'amélioration des carrières des agents hospitaliers, toutes catégories confondues.
Aucun de ses prédécesseurs ne peut prétendre avoir augmenté les moyens financiers des hôpitaux autant que nous l'avons fait : depuis 1997, ce sont plusieurs dizaines de milliards de francs supplémentaires que nous aurons consacrés aux hôpitaux (dotations globales, FMES, FIMHO, protocoles 2000 et 2001), sans compter les 3.9 milliards supplémentaires qui restent en discussion.
Compte tenu de tout ceci, je ne peux laisser dire que nos efforts pour l'hôpital public ne sont pas importants.
Non seulement ils sont sans précédent, mais de surcroît ils se traduisent très concrètement, tant pour les établissements qui ont pu s'agrandir ou se moderniser, que pour les agents qui auront de meilleures conditions de travail.
C'était une priorité pour le Gouvernement que de répondre aux besoins de l'hôpital public, et je crois que nous l'avons fait sans ambiguïté.
Alors bien sûr, l'hôpital public est soumis à de fortes demandes de la population ; le niveau d'exigence de nos concitoyens à son égard est à la hauteur de son niveau d'excellence, dont chacun sait qu'il est reconnu dans le monde entier.
Il est vrai aussi que l'hôpital public est amené à gérer de plus en plus de problèmes qui dépassent sa seule compétence médicale : conséquences des violences sociales, situations de misère et d'exclusion, prise en charge du vieillissement lorsque les familles ne veulent plus assumer leur rôle. Beaucoup des maux de notre société pèsent sur l'hôpital public, et il est demandé beaucoup à ses 800.000 agents.
C'est bien la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité que la réduction du temps de travail leur soit appliquée dans les meilleures conditions possibles, c'est-à-dire avec la création d'un nombre important d'emplois.
L'accord que nous avons signé le 27 septembre prévoit la création de 45.000 emplois. Je sais que pour certains, ce volume d'emplois n'est pas considéré comme satisfaisant, et plusieurs d'entre vous s'en sont fait l'écho.
Je veux d'abord vous répondre sincèrement que nous devons privilégier une approche concrète des choses : bien entendu, nous ferions plus et mieux avec plus d'emplois, mais nous ferons déjà beaucoup avec 45.000.
Beaucoup, car 80% de ces emplois seront pourvus en deux ans, d'ici la fin 2003 ; beaucoup, car il s'agit d'un volume annuel de créations d'emplois que la fonction publique hospitalière n'a jamais connu et pour lequel il va falloir susciter des vocations.
Beaucoup, car plusieurs milliers d'élèves infirmiers et infirmières attendent leur premier poste après avoir été formés dans les écoles dont nous avons considérablement augmenté les capacités d'accueil.
Beaucoup, car ces nouveaux agents hospitaliers vont bénéficier d'une carrière plus attractive et de rémunérations revalorisées.
Le Gouvernement est donc fermement décidé à faire en sorte que la mise en place de la réduction du temps de travail se fasse avec le concours de tous, car c'est bien la condition de son efficacité pour le service public hospitalier.
À cet égard, vous êtes un certain nombre, notamment sur les bancs du groupe communiste, à avoir demandé des garanties quant à l'association des organisations syndicales non signataires de l'accord à la préparation des textes, à la mise en uvre ainsi qu'à l'évaluation de la réduction du temps de travail.
Je souhaite redire que la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière est une réforme de grande ampleur par son impact sur les conditions de vie des personnels et sur l'organisation hospitalière.
Il est clair que ces enjeux nécessitent que l'ensemble des organisations syndicales soit associé à sa mise en uvre. Le protocole signé le 27 septembre par quatre organisations syndicales prévoyait plusieurs modalités d'associations des syndicats à la définition et à la mise en uvre de cette réforme.
Ces modalités, je souhaite les renforcer.
Au niveau local tout d'abord :
- Dans chaque établissement l'ensemble des syndicats sera appelé à négocier les conditions de mise en uvre de la réduction du temps de travail. Ces négociations auront comme cadre le résultat des négociations nationales qui se sont déroulées avec les huit organisations syndicales entre janvier et septembre 2001.
- Au niveau régional, je donne instruction aux directeurs d'agences régionales de l'hospitalisation afin qu'ils associent les organisations syndicales non-signataires à la définition des modalités de la réduction du temps de travail.
Au niveau national ensuite :
- Certains sujets sont négociés, d'ores et déjà, avec tous les syndicats : il s'agit, conformément au protocole, des textes relatifs aux heures supplémentaires et aux astreintes. Dans ce cadre, tous les syndicats, je dis bien tous les syndicats, ont participé hier à une première réunion d'examen de ces textes.
- Par ailleurs, il existe un comité de suivi qui réunit les quatre syndicats signataires selon les stipulations du protocole. Mais je suis soucieuse que la plus large concertation sur ce dossier puisse avoir lieu. Ainsi, comme je vous l'avais annoncé, une première réunion des syndicats non-signataires s'est tenue le 19 novembre afin de recueillir leur avis sur les textes avant leur présentation au conseil supérieur de la fonction publique hospitalière.
À tout cela, je veux aujourd'hui ajouter de nouvelles propositions, puisque les textes et la stratégie de mise en uvre de la RTT intéressent l'ensemble des syndicats.
Je m'engage ainsi à ce que les syndicats non-signataires soient associés à la mise en uvre et à l'évaluation du temps de travail, au travers d'un comité ad hoc, présidé par mon Cabinet. Ce comité réunira l'ensemble des organisations syndicales représentatives. Je propose ainsi qu'une réunion de ce comité se tienne avant la fin de l'année pour examiner notamment le projet de texte relatif au compte épargne temps.
En outre, chaque fois qu'il sera utile, la commission des statuts du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière sera réunie avant la séance plénière de ce conseil.
Mesdames et Messieurs les Députés,
Voilà ce que je souhaitais dire en introduction à la lecture définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En effet, au-delà de ses aspects techniques, ce texte est un support important pour la politique menée par le Gouvernement en faveur de l'amélioration de la protection sociale de nos concitoyens.
Je remercie particulièrement madame et messieurs les rapporteurs pour l'importance du travail qu'ils ont accompli, et je vous demande solennellement, au nom du Gouvernement, d'adopter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 dans les mêmes termes que lors de votre précédent vote.
Je vous remercie.
(Source http://www.social.gouv.fr, le 27 décembre 2001)