Déclaration de Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat au logement, sur les nécessaires interventions de l'Etat pour favoriser l'investissement dans la pierre et la construction de logement et sur les aides personnalisées, Marseille le 16 octobre 2001.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : 91èmè congrès de l'UNPI (Union nationale pour la propriété immobiliaire), à Marseille le 16 octobre 2001

Texte intégral


Monsieur le Président,
(remerciements d'usage)
La propriété privée est un facteur majeur d'une politique du logement en général et d'une politique sociale en particulier.
Je partage votre analyse concernant les principes fondamentaux qui guident notre société. Il est sain de rappeler avec force et dans nos textes constitutionnels, en France et en Europe, la valeur majeure du droit de propriété que nul ne conteste, je crois, ici. Et, dans le même temps, nous voyons bien que les sociétés développées font monter au même niveau l'existence des droits fondamentaux garantis à la personne en termes de dignité humaine. Et c'est là toute la logique du droit au logement.
C'est bien l'équilibre de ces droits qui doit fonder la France du 21ème siècle, l'Europe du 21ème siècle et toutes les civilisations développées. Ce n'est pas nouveau, parce que la devise de notre société c'est : liberté, égalité et fraternité. C'est bien dans l'équilibre de ces trois valeurs que se fonde l'équilibre de notre société, de notre République.
Alors, je partage votre avis : c'est l'Etat qui doit être le garant des droits fondamentaux mais c'est aussi l'Etat qui doit prendre la charge sociale majeure ; mais prendre la charge sociale, ne veut pas dire être l'unique acteur du social. L'Etat doit intervenir dans les textes, et notamment sur les dispositions réglementaires. On sait par exemple que le droit au logement ne suffit pas, puisque nous avons progressé ensemble, avec un accord général, sur le concept du " droit au logement décent ". L'Etat doit intervenir en termes de solidarité, par l'aide à la pierre, par l'aide à la personne et par les mécanismes fiscaux.
Mais on ne peut pas dire à l'Etat qu'il doit avoir en charge la responsabilité sociale et ne pas accepter qu'il cible ses efforts, législatifs, fiscaux ou d'aides publiques, sur la vocation que vous lui assignez comme étant prioritaire, c'est-à-dire celle du social. On ne peut pas, à la fois, demander à l'Etat de répondre à tous les problèmes de tous en disant, par ailleurs, le social c'est l'Etat !
Je rappelle, pour ma part, que je n'est pas une vision étroite du social ; la plupart de nos dispositifs fiscaux, ou sociaux, concernent plus de la majorité de nos concitoyens et même dans certains cas 70 à 80 % de Français. Ce n'est donc pas le social étriqué, c'est effectivement un mouvement de progrès social dans lequel chacun à des droits garantis.
Je crois que, sur ce fondement, le pays est largement uni.
Le problème, dans le secteur du logement, notamment quand on vit dans le monde urbain, c'est que la place équipée, où l'on a accès à un niveau de vie digne, où l'on n'est pas loin des centres de travail, n'est pas infinie. Le foncier n'est pas infini. Et quand la demande monte, on n'est pas obligés d'avoir, spontanément, une réponse. Je rêve d'une société où tout le monde est solvable. Je constate hélas que tel n'est pas le cas.
En tout cas, c'est le rôle de l'Etat d'intervenir dans une économie régulée. Tout le débat est de savoir où nous mettons l'effort et quand on le distribue.
Il est vrai qu'il y a un problème d'investissement privé, mais je voudrais, non pas qu'on relativise mais qu'on en prenne la juste mesure. Parce que je ne crois pas qu'en dramatisant et en créant une image négative on puisse réussir à convaincre. Nous avons construit en 2000, 312.000 logements dont 42 000 HLM. Pour ceux qui imaginent que c'est l'économie administrée publique, il y a tout de même 270 000 logements qui font partie du privé : une part en accession, une autre en investissements privés. Et jamais depuis très longtemps, il y a eu un tel décalage : un tel niveau de construction et un si faible niveau de logement social.
Donc, vous comprenez bien que quand je dois discuter avec mes collègues chargés du budget, et même avec les parlementaires, quand je dis que l'investissement privé de logements va mal, il vaut mieux que j'ajuste l'argumentaire pour convaincre. Pas seulement avec mes collègues du budget, mais également avec l'ensemble de la société française. J'en prends pour preuve la lecture des journaux économiques. Et nous ne sommes pas, M. le Président, dans la situation où je me suis trouvée en 1992 avec des taux d'intérêts élevés, une fiscalité lourde et où tout le monde avait intérêt à placer en Bourse et en Sicav.
Mais les ardeurs boursières se sont calmées. Et alors, tous ceux, comme moi, qui sont convaincus qu'il y a la nécessité d'un investissement pierre fort dans notre pays, peuvent dire aux épargnants : faites attention à cette mythologie de la bourse qui va régler tous les problèmes et les placements mobiliers qui se substitueraient à la valeur " pierre ". Regardez dans la longue durée.
Les circonstances ne nous sont pas défavorables pour permettre que l'investissement privé dans la pierre soit soutenu.
Reste que les constats que vous avez faits sur le choix d'une part des investissements pierre est juste, en partie du côté des institutionnels. Que s'est-il passé en matière d'investissement locatif privé, où il y a une chute essentiellement chez les institutionnels qui s'en sont désinvesti, pour plusieurs raisons :
1ère raison : les lois bancaires européennes ont amené les banques ou les compagnies d'assurances, au moment de l'ouverture de l'espace européen, à pratiquer un désinvestissement en faveur de placements financiers plus rentables à court terme. Et c'est le mécanisme dominant.
Vous avez eu raison de souligner la vente du parc d'un certain nombre de grandes entreprises publiques, qui faisaient qu'une partie de ce parc était tenu par des structures publiques d'investissement privé, parce que c'était du locatif qui n'était pas du HLM ou du logement social public. Les entreprises se sont dit : notre métier n'est plus d'avoir de la pierre, mais d'investir dans la recherche, les télécommunications Nous avons donc, il est vrai, à faire face à cette forme historique de basculement des placements financiers à court terme ou des ciblages économiques plus serrés sur certains secteurs économiques. Il faut prendre le relais pour trouver d'autres formes d'investissements permettant de l'investissement privé locatif.
Un certain nombre de choses ont déjà été engagées, d'une certaine façon, puisqu'une partie de la convention du 1 %, qui correspond justement à cette volonté de faire émerger des groupes fonciers, des interventions foncières, soit dans le secteur du social, soit dans celui de l'intermédiaire, vient en contrepoint de ce grand mouvement de désinvestissement qu'il y a eu par le passé.
Je voudrais tout de même rappeler les dispositions qui ont été prises par l'Etat. Car si nous avons ce bon taux global de construction de logements et d'investissements dans la pierre, c'est quand même parce qu'il y a eu des efforts fiscaux extrêmement importants ;
o Baisse des droits de mutation ; depuis des années tous les acteurs de l'investissement privé demandaient cette baisse des droits de mutation ;
o Baisses de revenus pour les bailleurs, notamment dans le cadre de l'investissement Besson ; j'ai souhaité, dans la prochaine loi de finances améliorer le dispositif. Je voudrais vous dire que le dispositif tel qu'il s'opère n'est pas une déduction sur trois ans, mais bien une déduction pérenne, sur la longue durée. Alors la question du délai que vous avez indiquée n'est pas ce que le gouvernement a retenu. Et j'ai partagé votre avis sur le fait que 50 % ce n'était pas suffisamment incitatif. Il y aura donc un amendement du gouvernement à la loi de finances montant cette déduction à 60 % ; très honnêtement, je crois que nous aurons du mal à convaincre sur 80 % ; j'ai proposé, en tant que gouvernement, 60 %, mais le Parlement et vos organismes sont là pour en débattre ; il me semble que c'est un équilibre raisonnable qui devrait donner une vraie viabilité. Je partage la préoccupation des intervenants disant qu'il faudrait arriver à un niveau de réalisations de Besson chaque année d'environ 35 000 logements ; cela me paraît le niveau qu'on peut raisonnablement se fixer collectivement.
o Deuxième chose : quand vous regardez le budget de l'Etat en matière de logements, ce qui a massivement augmenté, c'est la part de l'aide fiscale, sur les dernières années. D'ailleurs, certains de mes amis, qui considèrent qu'on n'a pas fait suffisamment pour le logement social, me disent : mais ce gouvernement a trop fait en aides fiscales et pas suffisamment en aides pour le logement social. Il faut donc trouver le juste équilibre.
Ce qui est un fait réel, c'est que dans la dépense publique pour le logement, la part des allégements fiscaux a pris une part considérable, en nette augmentation alors que l'aide à la pierre, dans le social en particulier, était en diminution.
Je pense qu'on peut améliorer le dispositif ; en revanche, il y a des sujets plus signifiants : je vais essayer de faire avancer l'idée d'élargir l'amortissement Besson aux descendants et ascendants. Je crois à cette logique patrimoniale familiale. Cela fait partie des propositions que j'ai mis sur les rangs des discussions : comment améliorer le dispositif Besson ?
Au niveau de la TVA à 5,5 % nous allons continuer à demander la dérogation européenne ; nous n'avons pas de grosses craintes, a priori, notre dossier est bon . Nous devrions convaincre l'Europe.
J'ai entendu des arguments sur les PLS ; moi aussi je suis convaincue qu'il s'agit d'un très bon produit correspondant effectivement à une population qui aujourd'hui a du mal à trouver des logements, notamment dans les centres-villes. Dès cette année, j'ai obtenu du gouvernement 2 000 PLS supplémentaires. Je veux rappeler, et je l'ai dit aux DDE et aux préfets qu'il n'y a pas de monopole PLS pour les HLM. D'autant plus que l'an prochain il y en aura 12 000 à la loi de finances. Un bond significatif de PLS. Je veillerai à ce que la part entre les HLM et l'investissement privé puisse être équilibrée
A plus long terme je partage complètement votre analyse sur la question des retraites. Peut-être pas sur les solutions, mais il y a une chose certaine c'est que le traitement des retraites suppose des épargnes longues favorisées. Pour moi le placement pierre est un excellent placement retraite. Faut-il encore que la Nation l'organise dans cette même dynamique. Si l'on fait des ponts d'or à l'épargne salariale, je considère qu'il serait intéressant de réfléchir à une aide plus substantielle de l'Etat à l'épargne retraite par la pierre.
De ce point de vue, pour régler cette affaire, je vous propose plusieurs éléments :
o Réalisation d'un rapport pour savoir quelles sont les solutions possibles pour adosser des produits retraites au placement pierre : peut être des produits collectifs, individuels ; il y a toute une gamme possible. J'ai bien noté vos propositions.
o Proposition d'un échange de vue, par le biais d'un groupe de travail, pour être en situation de regarder le champ des propositions par les organismes professionnels ou associatifs compétents. M. Devert nous a parlé aussi de la nécessité de valoriser tout particulièrement l'épargne solidaire et l'épargne sociale, dans le cadre justement des fameux fonds d'épargne salariaux. Rien n'empêche que ces fonds d'épargne salariaux soient placés dans la pierre. Je déposerai à la prochaine loi sur le sujet des amendements visant à permettre à l'épargne salariale d'être placée en investissement locatif sur la pierre car il n'y a aucune raison que cela se transforme en actions ; il y a d'autres formes d'épargnes solidaires qui peuvent être valorisées et je le souhaite.
C'est le premier volet de l'action de l'Etat : l'aspect fiscal.
La seconde, c'est effectivement la question de l'aide à la personne. L'aide à la personne est décisive pour la solvabilisation des locataires.
Je rappellerai que ce gouvernement a revalorisé l'aide à la personne, qui ne l'avait pas été pendant plusieurs années et le niveau de chaque aide individuelle a considérablement augmenté, plus que l'inflation, ce qui était loin d'être le cas dans les années précédentes. Au-delà de cette revalorisation minimale, le système a été amélioré, notamment pour les salariés qui quittaient les systèmes types RMI qui réintégraient le monde du travail, pour favoriser l'accès de nos concitoyens au travail et lutter contre les trappes à pauvreté et les mécanismes dissuasifs pour un certain nombre de nos concitoyens pour retrouver du travail.
Alors, les aides à la personne, 6 milliards de francs supplémentaires de dépenses étalées sur deux ans, ont été revalorisées. Cette année, nous revaloriserons le forfait charge de 2 %. C'est modeste encore, mais, là aussi, pendant des années le forfait charge n'a pas bougé.
La question de l'aide à la personne est une question importante, d'abord à cause des flux financiers : 80 milliards de francs sont dépensés chaque année par la Nation uniquement en aides à la personne. Comparés à l'aide à la pierre ou au budget du logement de l'Etat, c'est gigantesque ; je ne propose pas de mettre ces 80 milliards dans l'aide à la pierre, mais j'observe, au moment où l'inflation est faible, où les taux d'intérêts sont bas et où les salaires n'ont qu'une augmentation modérée, qu'on ne peut pas laisser un système qui explose. Avec, évidemment, dans certains cas, des effets de loyers très, très loin, de l'augmentation des salaires et de l'augmentation de l'inflation. Tout est affaire d'équilibre. Nous manquons d'aides à la pierre. Je suis convaincue de la nécessité d'un rééquilibrage en faveur de l'aide à la pierre.
D'ailleurs, M. le Président, vous me demandez des crédits pour l'ANAH : mais les crédits de l'ANAH, c'est de l'aide à la pierre. Vous avez voté tout à l'heure une délibération demandant que l'apport initial soit ajouté au système existant ; c'est bien de l'aide à la pierre, s'agissant évidemment de la réhabilitation pour des bailleurs qui n'étaient pas très fortunés et qui ne pouvaient pas placer facilement et déclencher le mouvement de réhabilitation. Quand je dis "aides à la pierre", je dis toutes les formes d'aides à la pierre. Et je suis convaincue, qu'il s'agisse de la réhabilitation en particulier ou de la construction du neuf, notamment si on veut éviter de refaire les ghettos du passé, que nous aurons besoin d'une aide à la pierre. D'ailleurs, c'est l'accession sociale à la propriété, que j'ai essayé de promouvoir, car je suis fondamentalement convaincue de l'accession à la propriété, de l'accession à la propriété en général, qui a le plus de mal, même s'il faut être attentif à ce que vous avez dit sur les couches moyennes.
Cette dotation de 70 000 F (10 600 ) est destinée à celles et ceux qui ont des revenus en dessous de 2 fois le SMIC à peu près, et qui vont pouvoir accéder à la propriété plutôt dans le monde urbain pour éviter cet étalement, ce mitage qui coûte cher aux familles, aux collectivités, qui n'est pas équilibrant pour notre environnement. Par ailleurs, les mêmes 70000 F sont destinés pour des gens qui viendront en investissement en accession à la propriété dans les zones urbaines sensibles en voie de reconquête, évidemment je n'imagine pas que les quartiers les plus lourds vont brutalement basculer dans cette situation ; mais on va pouvoir remettre un peu d'accession à la propriété ; il y a des quartiers qui sont en train de remonter la pente. Il faut les aider à aller plus vite.
Je suis farouchement favorable à l'accession à la propriété, mais je constate que cette accession à la propriété, par le simple jeu du marché, même avec des taux d'intérêts bas, n'arrive pas à permettre à tous ceux qui le souhaitent et qui ont suffisamment d'engagements personnels raisonnables d'y accéder; il y a donc nécessité d'une aide à la pierre.
Je suis tout à fait d'accord sur une chose : la difficulté pour le bailleur d'être garanti dans la convention et le contrat qu'il a avec le locataire. Il y a eu de nombreuses discussions pour trouver quel est le juste équilibre entre les droits du bailleur et ceux du locataire. Je crois que nous sommes à peu près dans un équilibre, un équilibre juridique, mais non réel parce qu'aujourd'hui un certain nombre de bailleurs privés, ayant un locataire qui ne paie pas, se retrouvent devant des difficultés lourdes. Et c'est ce problème qui me paraît, aujourd'hui, le plus urgent à traiter. Et moi, je me suis réjouie du LOCA-PASS.
Oui, les dispositifs mis en place sont compliqués. Je crois avoir compris votre problème et je partage votre diagnostic. C'est pourquoi je suis arc-boutée à l'idée suivante : il faut une couverture logement universelle (CLU) qui garantisse, bien sûr, le locataire de bonne foi mais en même temps qui garantisse le propriétaire du paiement de son loyer dans les cas de chômage ou dans les cas où il n'y a pas, manifestement, une carence de la bonne foi du locataire.
Il est fondamental que ce système existe.
Je dis que pour les bailleurs sociaux, les bailleurs en général, il faut qu'on organise, dès sa signature, un élargissement de la convention aux étudiants et étudiants boursiers. Le CNH de décembre fera une proposition concernant la CLU : il y aura une évaluation des coûts financiers de ce dispositif.
Il nous reste plusieurs débats à ouvrir :
o le débat sur l'évolution des loyers : remettre en chantier le débat sur l'indexation des loyers sur l'ICC : il faut un indicateur et un indice fiables à l'égard du service et du coût réel pour le bailleur et du service reçu pour le locataire. La CNC a été saisie de ce souhait de discuter d'un indice plus composite, plus adapté au coût réel des loyers, plus ajusté aux réalités d'aujourd'hui que ne l'est l'ICC.
o le débat sur le décret "charges", pour deux raisons :
la sécurité (travaux techniques de mise en sécurité - questions sur les gardiens : comment répartir la charge au regard des nouvelles exigences de sécurité qui risquent encore d'augmenter ?
les économies d'énergie, suite à notre souhait de contribuer à la réduction de l'effet de serre : investissement massif en matière d'énergie pour le propriétaire, mais bénéfice du côté du locataire, qui verra une réduction des charges.
Deux sujets de nature à justifier que l'on débatte à nouveau de l'équilibre de ce décret "charges" pour que soient précisés un certain nombre d'éléments qui seraient souhaitables et qui élargiraient notre vision de l'avenir en la matière.
o la décentralisation de la politique du logement : je partage le souhait du Président de l'UNPI, même si les élus locaux ne sont pas enthousiasmés.
Je dois rencontrer les présidents de Régions et de Conseils généraux pour discuter avec eux des perspectives de la décentralisation du logement en France. Plusieurs pistes :
l'habitat rural : pas de problème
la réhabilitation de l'ancien : piste importante (un point commun des élus locaux de gauche comme de droite : OPAH pour la rénovation des centres-villes ; valeurs très consensuelles. Les élus locaux ne manqueront pas de s'investir autour de ce sujet) Mais j'ai déjà là beaucoup plus de réticences. Car, même si on peut imaginer la décentralisation des crédits de l'ANAH, ou même celle des fiscalités adossées qui pourrait irriguer l'équivalent des crédits de l'ANAH, ce serait mentir de dire qu'ils se bousculent autour de cette responsabilité. Quant à l'idée de décentraliser les crédits d'aides à la pierre ou d'aides à la personne (80 milliards pour l'aide à la personne), inutile de dire que là c'est une angoisse métaphysique qui saisit tout le monde. Et là nous redécouvrons les vertus de l'Etat jacobin et chacun de me dire : oui, mais nous n'avons pas assez de ressources, même pour le plus riche, et la région la plus défavorisée qui déclare qu'elle ne pourra jamais faire face, même avec des péréquations nationales.
Mais je suis très ouverte à tout cela car une seule chose compte : atteindre l'objectif final. La seule chose qui m'importe c'est que l'égalité des droits soit respectée pour tous.
Monsieur le Président, n'opposons pas la ville et les logements. La politique de la ville n'est pas seulement la politique des quartiers, ou alors on ne s'est pas entendus : 80 % de nos concitoyens vivent en ville et aujourd'hui il y a un large accord sur l'idée de dire : si dans la société française on ne casse pas les ghettos, les endroits les plus favorisés seront quand même soumis à une tension globale.
Notre pays, qui est un pays d'humanisme, ne peut faire qu'un pari, celui de la mixité sociale ; il n'est pas du devoir de l'Etat de vous demander d'être les débiteurs sociaux de la Nation, mais vous pouvez comprendre que nous sommes devant des choix où il faut faire des équilibres. Le Gouvernement a fait pas mal déjà pour l'investissement locatif privé. Je suis prête à ouvrir avec vous d'autres pistes : améliorer le dispositif Besson, réfléchir rapidement à la couverture logement universelle, revoir les indices ou les charges pour qu'ils soient mieux ajustés à la réalité. Mais ne perdons pas de vue ce qui nous unit fort au sein de cette Nation, c'est-à-dire l'idéal de la République. Il me semble que cet idéal suppose que chacun fasse un pas vers l'autre ; ma porte vous est ouverte; le dialogue sera permis dans cet esprit de pas mutuel, mais aussi d'attachement accroché au cur, viscéralement, de l'idéal républicain de liberté, d'égalité et de fraternité.

(source http://www.logement.equipement.gouv.fr, le 14 février 2002)