Texte intégral
Mis en cause par Mme Lienemann, ancien ministre délégué au Logement, dans un « point de vue » (le Monde du 21 décembre), je souhaite faire une mise au point sur ce qu'elle a dénommé « l'amendement promoteurs ». Il s'agit, en fait, de l'amendement parlementaire, accepté par le gouvernement et abrogeant l'article 51 de la loi Sapin, qui ajoutait d'autres obligations de publicité foncière à celles déjà existantes en matière de cessions immobilières des collectivités territoriales et des sociétés d'économie mixte (SEM).
Au (mot illisible) son article, Mme Lienemann indique :
1) Qu'il s'agit de la « suppression d'une sorte de mise en concurrence ». C'est faux, l'article 51 n'instituais absolument pas de réelle mise en concurrence, car il n'obligeait à rien sur la conclusion de la vente. Si « des accords tacites préalables » existent, comme le prétend Mme Lienemann, l'article 51 n'empêchait nullement qu'ils ne soient, en définitive, conclus. Je tiens à rappeler qu'existent un code des marchés publics, une estimation préalable des domaines obligatoire et, surtout, la délibération publique des assemblées délibérantes.
2) Qu'« il ne faut pas lâcher », comme l'aurait dit Pierre Bérégovoy, alors Premier ministre. Comment expliquer, alors, que, le 3 décembre 1992, M Lienemann ait – elle-même – proposé, par un amendement no 259 au Sénat, de fixer un seuil au-dessous duquel « les cessions immobilières auraient été exemptées de cette publicité » et que, dans sa lettre du 16 mars 1993, Pierre Bérégovoy ait précisé : « Je vous confirme, enfin, bien volontiers, que les concessions d'aménagement, au sens de l'article L. 300-4 du code de l'urbanisme, sont exclues de la loi et de ses décrets d'application » ? La réponse est simple : le texte en question avait été préparé dans une telle précipitation que ses conséquences, mal étudiées, étaient insupportables, car inapplicables.
Avec ce fameux article 51, Mme Lienemann semble ignorer que certains accédants modestes à la propriété dans des lotissements communaux, qui réalisent « l'investissement de leur vie » en construisant leur maison, se trouvent dans l'incertitude quant au risque de nullité d'ordre public, qui, pendant cinq ans, affecte leurs acquisitions à cause de formalités inapplicables et, du coup, mal remplies par telle ou telle collectivité territoriale. C'est cette situation injuste qui ne pouvait perdurer.
3) Qu'« un moratoire législatif de trois ou quatre ans » aurait été bienvenu. Cette suggestion vient, comme par hasard, après une frénésie législative : de 1990 à 1993, que de lois sur l'habitat et le cadre de vie, accumulées dans le désordre et à la hâte et qu'il faut maintenant – leurs buts étant partagés par tous – revoir pour assurer une réelle efficacité et la sécurité des différents acteurs de l'urbanisme, y compris les acquéreurs !
4) Que « les plus grandes lenteurs viennent, aujourd'hui, des difficultés pour réunir le financement des opérations ». Le gouvernement actuel a pris les moyens de financer plus de cent mille prêts locatifs aidés (PLA) en 1993, chiffre le plus élevé depuis dix ans. Nous n'avons pas de leçons à recevoir des gouvernements de gauche, sous lesquels ont hélas ! été construits beaucoup moins de logements sociaux ! J'ajoute que c'est le gouvernement socialiste qui a déréglementé l'agrément de l'État en Île-de-France pour la construction ou l'utilisation de bureaux, ce qui a conduit à une surproduction empêchant d'y « adosser » le financement des logements. Nous avons assisté, de sa part, à une rafale de « déréglementations », dans ce domaine, avec les textes de 1985, 1990, 1992, 1993 ! Faut-il rappeler que c'est le gouvernement actuel qui s'apprête à rétablir « l'agrément-constructeur » en Île-de-France ? Mme Lienemann a vraiment une mémoire sélective !
N'ayant aucun goût pour la polémique, je voudrais très simplement rappeler que je partage profondément les objectifs de l'article 51 de la loi Sapin, mais que cet article, mal étudié, a été mal écrit, engendrant l'insécurité aussi bien pour les acheteurs que pour les vendeurs. Afin d'atteindre la transparence, tout en supprimant les conséquences négatives de l'article 51, j'ai demandé la mise en place d'un groupe de travail, associant l'administration et un certain nombre de professionnels du droit de l'urbanisme, pour rédiger un nouveau texte.
Ce nouveau texte permettra de comprendre quels doivent être les opérateurs concernés, quel est l'organe délibérant des SEM devant lequel il faudra s'expliquer, que veulent dire les termes de « cession immobilière envisagée », comment les SEM peuvent obliger les actionnaires à inscrire une « communication sur l'information préalable à toute vente à l'ordre du jour de la plus proche réunion de l'organe délibérant de chacune des collectivités au groupement actionnaire », etc.
Encore une fois, le gouvernement ne cherche nullement à revenir sur la transparence, mais il veut y parvenir par un texte qui sera lui-même transparent et compréhensible.