Déclaration de M. Dominique Perben, ministre des DOM TOM, sur le projet de loi portant extension aux TOM et à la collectivité territoriale de Mayotte de l'article L71 du Code électoral sur le vote par procuration, au Sénat le 5 février 1994.

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Circonstance : Examen au Sénat le 5 février 1994 du projet de loi portant extension aux TOM et à la collectivité territoriale de Mayotte de l'article L71 du code électoral sur le vote par procuration

Texte intégral

Monsieur le Président,
Monsieur le Rapporteur, 
Mesdames, Messieurs les Sénateurs,

J'ai l'honneur de présenter à votre haute Assemblée le projet de loi portant extension aux territoires d'outre-mer et à la collectivité territoriale de Mayotte des dispositions de la loi n° 93-894 du 6 juillet 1993 modifiant l'article L. 71 du code électoral et relative au droit de vote par population.

En préambule à mon intervention, je tiens à remercier votre commission des lois et du tout particulièrement son rapporteur M. le Sénateur Michel Rufin pour la qualité de son rapport et pour la façon dont il a présenté ce projet.

Comme son titre l'indique, ce projet de loi a précisément pour unique objet d'éteindre dans les territoires d'outre-mer et la collectivité territoriale de Mayotte la nouvelle rédaction de l'article L. 71 du code électoral qui résulte des dispositions de la loi n° 93-894 du 6 juillet 1993.

Je vous rappelle que ce texte faisait suite à une proposition de loi adoptée par votre haute Assemblée le 29 juin 1991 et tendant à élargir en faveur des retraites la procédure du vote par procuration.

Ce texte distinguait en fonction de l'âge des retraites et ne bénéficiait pas aux autres catégories d'inactifs. La loi du 6 juillet 1003 comporte une rédaction tout à fait nouvelle de l'article L. 71 du code électoral dans son ensemble.

La procédure d'élaboration de cette loi a illustré un très fort consensus pour mettre fin à des discriminations entre les citoyens dans le recours au vote par provocation, sans pour autant permettre que le recours à cette modalité dérogatoire de voie soit ouvert pour convenance personnelle. Si l'on examine de plus près l'article L. 71 du code électoral tel qu'il est issu de la loi du 5 juillet 1993, on observe que seul n'a pas été modifié le paragraphe II, qui notamment bénéficie aux personnes dans l'impossibilité de se déplacer le jour du scrutin par suite de maladie même si elles se trouvent alors dans leur commune d'inscription.

Au contraire, a été d'abord substituée à l'énumération des vingt-trois catégories d'électeurs figurant au paragraphe I de l'article L. 71 du code électoral une formule générique selon laquelle le vote par procuration est ouvert aux électeurs qui établissent que des obligations dûment constatées les placent dans l'impossibilité d'être présents dans leur commune d'inscription le jour du scrutin.

En outre, le paragraphe III a été recréé au sein de cet article, paragraphe qui ajoute parmi les électeurs pouvant exercer leur droit de vote par provocation, ceux "qui ont quitté leur résidence habituelle pour prendre des vacances", ce qui permet à ces personnes, quel que soit leur âge, de n'avoir pas à justifier l'existence d'une obligation.

Les retraites sont ainsi susceptibles de recourir au vote par procuration dès lors qu'ils ressortent de l'un ou l'autre des trois paragraphes de l'article L. 71 du code électoral.

L'ensemble de ce dispositif est marqué par un plus grand libéralisme et, en même temps, par la volonté de respecter les principes constitutionnels de secret et de caractère individuel du vote.

Ce texte ne comporte cependant aucune mention d'extension et ne s'applique donc qu'en métropole, dans les départements d'outre-mer et la collectivité territoriale de Saint-Pierre et Miquelon.

Les territoires d'outre-mer et la collectivité territoriale de Mayotte sont en effet régis par le principe de la spécialité législative dont le Conseil d'État a rappelé, dans sa décision "Élections municipales de Lifou" en date du 3 février 1990, qu'il s'imposait également aux lois modifiant une loi applicable.

L'extension n'a donc pas été immédiatement réalisée.

Or, il serait paradoxal que ce texte, dont l'objet essentiel est de mettre fin aux discriminations dont faisaient l'objet certaines catégories d'électeurs, ne soit pas très rapidement étendu aux territoires d'outre-mer et à la collectivité territoriale de Mayotte. Cela serait ressenti comme une discrimination du tout au moins comme une inégalité de traitement tout à fait injustifiée. En effet, ces collectivités territoriales d'outre-mer connaissent souvent des distances importantes et donc des raisons supplémentaires de recourir au vote par procuration.

Le gouvernement a donc particulièrement souhaité l'inscription de ce projet de loi à la présente session extraordinaire et je remercie le rapporteur et la commission des lois d'en avoir permis l'examen dès aujourd'hui.

Du reste, aussitôt le vote de la loi dont résulte cette nouvelle rédaction de l'article L. 71 du code électoral, mon attention avait été appelée par plusieurs parlementaires et notamment par monsieur le Sénateur Simon Loueckhote, sur l'opportunité de mettre fin au décalage ainsi restauré entre la métropole et les territoires d'outre-mer.

Je relève également qu'en l'absence de l'adaptation et s'agissant d'une extension pure et simple, la consultation n'était pas obligatoire comme le Conseil d'État l'a indiqué. Cependant, la consultation à laquelle j'ai procédé a permis de s'assurer de l'intérêt des assemblées locales pour ce projet puisque deux d'entre elles ont très rapidement exprimé un avis favorable et sans réserve, tandis que le comité consultatif de Nouvelle-Calédonie s'est prononcé dans le même sens.

Dès qu'aura été votée ce texte, dont je rappelle l'importance au seuil d'une année qui, connaitra des consultations électorales, le saisirai le Premier ministre d'un projet d'extension du décret du 10 novembre 1993 fixant les justifications à produire par les électeurs susceptibles d'être admis à voter par procuration. Le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, avait en effet très justement souligné la particulière importance de ce secret. Il était en effet essentiel que la suppression de l'énumération des rubriques constituant le précédent paragraphe I de l'article L. 71 du code électoral ne créé pas des pratiques différentes selon les autorités habilitées à délivrer des procurations.

Je vous invite donc, mesdames, messieurs les Sénateurs, à adopter ce projet de loi.