Texte intégral
RTL : jeudi 11 avril 1996
J.-J. Bourdin : Le député RPR H. Cuq demande la destruction des foyers de travailleurs immigrés. H. Cuq remettra au Premier ministre un rapport sur ces foyers. 20 d'entre eux doivent être détruits, dit-il : surpopulation, développement d'une économie parallèle, trafics en tous genre… H. Cuq préconise l'intégration de ces établissements au parc social HLM. Qu'en pensez-vous ?
P. A. Périssol : D'abord, je rends hommage à H. Cuq, député très attentif à ces problèmes et je pense qu'un certain nombre de foyers sont dans la situation qu'il décrit, qui n'est pas une situation acceptable, ni pour ceux qui y résident, ni pour l'ordre public. Donc des mesures doivent être prises. La destruction fait partie des moyens à envisager. Je vous assure que nous regarderons avec beaucoup d'attention les propositions d'H. Cuq.
J.-J. Bourdin : Et l'intégration de ces établissements au parc social HLM ?
P. A. Périssol : C'est toujours aussi une hypothèse.
J.-J. Bourdin : Le plan que vous avez présenté pour les plus démunis prévoit l'attribution de 20 000 logements. Où en êtes-vous ?
P. A. Périssol : Cela marche bien. L'hiver s'est bien passé, notamment…
J.-J. Bourdin : … 8 551 fin décembre, c'était le chiffre.
P. A. Périssol : Absolument. Nous avons lancé le projet de 20 000 logements d'extrême urgence et d'insertion. Le Premier ministre l'a annoncé dans sa déclaration de politique générale, dans un scepticisme de tous les interlocuteurs qui disaient « jamais vous n'y arriverez ! ». Eh bien, en fin d'année, comme vous le disiez, près de 9 000 logements étaient livrés et la dynamique se poursuit. Je suis persuadé que non seulement les 20 000 logements seront atteints à la fin de l'année…
J.-J. Bourdin : …vous en êtes à combien aujourd'hui ?
P. A. Périssol : Nous avons dépassé les 11 000 logements et en fin d'année, je suis persuadé, compte tenu de ce qui est en projet, que nous serons au-delà des 20 000 logements d'extrême urgence et d'insertion. C'est très important parce que beaucoup de communes, plus de 1 200, ont répondu présent. Il y a eu une mobilisation de tous, des maires, des associations, des organismes HLM, pour relever cette grande cause nationale.
J.-J. Bourdin : les prêts à taux zéro, un chiffre ?
P. A. Périssol : Cela marche très bien ! Quantitativement, 10 000 prêts à taux zéro par mois et surtout les 4/5èmes des bénéficiaires sont des gens aux revenus modestes, moins de 15 000 francs par mois. Les 2/3 sont des jeunes de moins de 35 ans.
J.-J. Bourdin : Combien de prêts à taux zéro depuis la mise en place de la mesure ?
P. A. Périssol : 10 000 par mois, c'est en place depuis 6 mois…
J.-J. Bourdin : … 60 000 !
P. A. Périssol : De l'ordre de 60 000.
J.-J. Bourdin : L'immobilier en France, bilan 95, mauvaise année ?
P. A. Périssol : Il est évident que la situation actuelle, en termes d'activité, c'est bien la résultante des ventes qui ont eu lieu ou qui n'ont pas eu lieu il y a un an. Et on sait que depuis la fin 94 l'année 95 a été une année où il y a peu d'achats de logements neufs. C'est pour cela que nous avons réagi, c'est pour cela que nous avons lancé le prêt à taux zéro, c'est pour cela que nous avons permis à ceux qui vont acheter des logements pour les donner à louer, d'amortir et nous avons aujourd'hui une relance, une reprise des ventes, d'environ 20 % de ventes de logements neufs de plus aujourd'hui qu'il y a un an, environ 25 % des ventes de plus dans les logements anciens en février 96 par rapport à février 95. 1996 doit être une très bonne année pour le logement. C'est vrai qu'en termes d'activités, cela se traduira avec un certain nombre de mois en retard.
France 3 : mercredi 17 avril 1996
L. Bignolas : Six mois après le taux zéro, est-il un succès ?
P. A. Périssol : C'est un succès, puisqu'en six mois, il y a 57 000 prêts à taux zéro. Je rappelle qu'il y en avait avant la moitié, c'est-à-dire à peu près 30 000 prêts d'accession à la propriété. Donc en six mois on en a fait deux fois plus. Deuxièmement, et surtout, c'est le profil des bénéficiaires qui est intéressant.
L. Bignolas : Des gens jeunes ?
P. A. Périssol : Ce sont des jeunes, pour les deux tiers. Ce sont des gens modestes : moins de 15 000 francs de revenu par mois pour 80 % d'entre eux. Ce sont des ouvriers, des employés pour 60 % d'entre eux. C'est-à-dire que les ménages modestes et jeunes, qui avaient toujours eu le désir d'accéder à la propriété et qui ne le pouvaient plus, peuvent à nouveau le faire, et c'est une grande satisfaction.
L. Bignolas : Est-ce les mesures de l'automne sont suffisantes, on l'a vu, c'est quand même la grogne dans le bâtiment ?
P. A. Périssol : Oui, ça a été dit : 1996, c'est l'année de l'espoir. Alors pourquoi les entreprises de bâtiment souffrent aujourd'hui ? C'est parce que l'activité aujourd'hui, c'est le résultat des ventes qui a eu lieu il y a un an. Et c'est bien parce que je connaissais cette conjoncture difficile qu'on a lancé le prêt à taux zéro, qu'on a relancé l'investissement locatif privé. Et les 57 000 prêts à taux zéro, c'est 57 000 chantiers qu'il y aura dans quelques mois. Il y a un effet mécanique. Vous le voyez, 1996 est l'année de l'espoir dans le bâtiment, j'allais dire c'est aussi l'année des promesses tenues.
L. Bignolas : La chambre artisanale des petites entreprises du bâtiment, qui a manifesté notamment sur le territoire de Belfort hier, n'est pas tout à fait de votre avis. Elle réclame des aides supplémentaires et menace de manifester à nouveau ?
P. A. Périssol : Ce que je sais c'est qu'aujourd'hui, que ce soit ceux qui travaillent comme agents immobiliers dans l'ancien ou que ce soit les constructeurs de maisons individuelles, ceux qui sont au contact de la commercialisation constatent qu'aujourd'hui, ça repart. Et donc demain on aura les effets en terme d'activité, de chantier. Je disais qu'à travers ça, ça serait l'année des promesses tenues. Le prêt à taux zéro, le candidat Chirac l'avait annoncé, nous l'avons fait dans des délais records, moins de quatre mois. Le président de la République a fixé un cap social, le prêt à taux zéro tient ses engagements. Le Premier ministre a souhaité un Etat plus efficace en réformant. Le prêt à taux zéro montre qu'on peut réformer sans alourdir la charge avec le contribuable. Donc 1996, l'année de l'espoir pour le logement et le bâtiment.
France Inter : jeudi 18 avril 1996
A. Ardisson : Vous avez rendu publics les chiffres du prêt à taux zéro depuis six mois. Pensez-vous atteindre votre pari de 120 000 prêts en année pleine ?
P. A. Périssol : C'est un très grand succès. Pour le dire de manière claire, en six mois, nous avons fait deux fois plus de prêts à taux zéro qu'on ne faisait en toute une année pour l'aide précédente qui était le prêt d'accession à la propriété. En six mois, nous avons fait deux fois plus qu'en un an avant. C'est aussi un succès sur le profil des bénéficiaires. Il s'agit pour l'essentiel de ménages modestes. Quatre cinquièmes gagnent moins de 15 000 francs par mois et de jeunes de moins de 35 ans pour les deux tiers.
A. Ardisson : C'est normal puisque les conditions d'obtention de ce prêt font que pour l'avoir, il ne faut pas gagner plus de 30 000 francs par exemple pour une famille de trois en Île-de-France, 27 500 francs en province.
P. A. Périssol : Vous dites que c'est normal. Je veux bien mais ce n'est pas ce qui se passait avant. Pourquoi avons-nous réussi à atteindre cette cible sociale ? C'est parce que nous avons une aide qui est très juste et qui est d'autant plus forte que les revenus sont plus faibles. Si c'est normal, ça n'allait pas de soi pour une raison simple : nous avions perdu cette accession à la propriété sociale. Aujourd'hui, ces ménages aux revenus modestes, ces jeunes qui ne pouvaient plus accéder à la propriété mais qui en avaient gardé le désir le peuvent à nouveau. C'est très important car les trois quarts d'entre eux sont des locataires, que ce soit dans le parc privé ou dans le parc HLM. De telle sorte que quand l'un d'entre eux accède à la propriété, il libère une place qui permettra à celui qui attend une HLM ou qui attend de pouvoir se loger dans le parc privé, de pouvoir le faire. C'est donc un très grand succès. J'allais dire, on tient les promesses. Le prêt à taux zéro, le candidat J. Chirac l'avait annoncé : nous l'avons fait en des temps record. Le président de la République a fixé un cap social à sa politique, l'engagement est tenu avec le prêt à taux zéro. Le Premier ministre s'est engagé à réformer pour rendre l'Etat plus efficace : avec le prêt à taux zéro, nous faisons la preuve qu'on peut réformer sans alourdir la charge pour le contribuable.
A. Ardisson : Bref, vous êtes content ?
P. A. Périssol : Oui, bien sûr. Mais je suis content parce que ce qui me semble importante dans notre société, c'est de réduire l'appréhension du lendemain, c'est de réduire le manque de confiance collective dans l'avenir qui est source d'inhibition. Il faut réduire cette peur. Lorsqu'on rend une certaine espérance sociale en permettant à des gens de réaliser leur projet d'accéder à la propriété, on redonne cette confiance, comme d'ailleurs lorsqu'on réalise des logements d'insertion, on réduit la peur du lendemain.
A. Ardisson : Les professionnels avaient deux craintes. D'abord que la nouvelle réglementation évacue du marché les classes moyennes. Qu'en est-il dans vos statistiques ?
P. A. Périssol : D'abord il faut toujours rappeler que le prêt d'accession à la propriété, il n'y en avait que 30 000 à peu près par an. Donc il fallait être un heureux bénéficiaire, il y avait un effet de loterie. Il y avait ceux qui avaient une aide puissante et ceux qui n'en avaient pas parce qu'ils n'arrivaient pas au bon moment, ce qui est facteur de relative injustice. Deuxièmement, aujourd'hui, les classes moyennent peuvent bénéficier du prêt à taux zéro. Il est vrai que lorsqu'on a des revenus plus modestes, on en bénéficie plus : c'est ma conception de la justice sociale. C'est aussi ma conception d'une certaine efficacité, c'est-à-dire qu'on aide les gens non pas avec des effets d'aubaine, comme les appellent les économistes, mais on les aide pour leur permettre de réaliser un projet qu'ils ne pourraient pas réaliser autrement.
A. Ardisson : L'autre crainte des professionnels, c'était que les assouplissements sur les possibilités d'accéder à ce prêt pour l'achat de l'ancien moyennant des travaux moins élevés que ce qui avait été prévu initialement ne conduisent les gens à se reporter sur l'ancien plutôt que le neuf.
P. A. Périssol : Le premier point, la crainte des professionnels : je connais bien la situation des entreprises de bâtiment. Je sais qu'elle est difficile aujourd'hui pour une raison très simple : le niveau d'activité aujourd'hui, c'est la conséquence du faible niveau de vente et de commercialisation d'il y a un an. Aujourd'hui, elles sont dans une situation difficile, mais je sais aussi qu'elles reprennent confiance. Les 57 000 prêts à taux zéro, c'est 57 000 chantiers dans le deuxième semestre 1996. Donc, je crois qu'aujourd'hui, au-delà des difficultés…
A. Ardisson : C'est du neuf ou de l'ancien ?
P. A. Périssol : Pour l'essentiel, c'est du neuf, ne serait-ce que parce que l'extension du prêt à taux zéro à l'ancien avec moins de travaux – 20 % - c'est une extension qui a été décidée en début d'année 1996. Je crois par contre que c'est important, parce que ça permet à des ménages d'acquérir le bien à partir de l'ancien. Il est vrai que c'est une demande forte. Donc, la responsabilité du ministre du Logement, c'est une responsabilité économique de relancer l'emploi, mais c'est aussi une responsabilité sociale que de répondre à la demande des Français.
A. Ardisson : Quid de la conjoncture ?
P. A. Périssol : Les logements qui sont financés aujourd'hui, ce sont les permis de construire de demain et ce sont les chantiers d'après-demain. Le cycle du logement est ainsi fait qu'il y a plusieurs mois entre le moment où les ventes repartent et le moment où ça se traduit en termes d'activité. Aujourd'hui, les ventes repartent. C'est pour ça que c'est l'année de la confiance. C'est pour ça que tout le monde peut être confiant sur la suite.
A. Ardisson : D'autres mesures à venir ?
P. A. Périssol : Nous avons fait beaucoup de choses : nous avons fait le prêt à taux zéro ; nous avons relancé l'investissement privé locatif ; nous avons fait les logements d'urgence. Bref, nous avons fait beaucoup de choses pour renforcer la cohésion sociale dans notre société, parce que c'est une des conditions de la croissance et de l'emploi et parce que je crois que c'est l'élément fort voulu par le président de la République, par le Premier ministre auquel nous devons tous nous attacher : renforcer la cohésion sociale dans le pays.
Le Parisien : 18 avril 1996
Le Parisien : Pourquoi une telle mesure ?
Pierre-André Périssol. : C'est une proposition de loi opportune. Elle va constituer un élément de sécurisation dans un secteur où il convient de protéger les acquéreurs. Aujourd'hui, le consommateur qui achète un produit quel qu'il soit à un certain nombre de garanties. Mais, aussi paradoxal que cela paraisse, on a aujourd'hui moins de sécurité dans l'acquisition d'un logement que sur un bien de consommation. Or, l'achat d'un logement est un acte financièrement coûteux, qui a une signification affective profonde, puisqu'il concerne le lieu où va s'épanouir la famille. C'est de ce constat qu'est née la proposition qui constitue une protection de l'acheteur sur l'un des éléments essentiels du logement qui est sa surface.
Le Parisien : Comment cela va se traduire ?
Pierre-André Périssol : Dorénavant, la surface des logements anciens acquis devra être indiquée dans l'acte notarié et être juste à 5 % près. Si elle n'est pas mentionnée, l'acte de vente sera nul et, si la surface réelle est inférieure de plus de 5 % au nombre de mètres carrés précisés, l'acheteur aura droit à un remboursement proportionnel à la différence. Cela concerne les logements en copropriété puisque, dans les logements individuels, d'autres considérations entrent en jeu, comme le terrain, par exemple. Cette garantie est donnée à l'ensemble de ceux qui achètent un logement ancien, que l'opération passe ou non par un professionnel. Il est très important, sur un bien comme le logement, de donner des éléments qui vont rassurer. Tout ce qui contribue à donner confiance à un acheteur est un élément de stimulation du marché. On est sur un bien qui représente plusieurs années de salaire et devant lequel on est relativement démuni en raison même de la complexité de l'achat. Les vendeurs eux-mêmes ont intérêt à cette disposition de transparence.
Le Parisien : Comment la mesure va-t-elle être mise en œuvre ?
Pierre-André Périssol : L'application est prévue au 1er janvier 1997. Il s'agira de la surface habitable, c'est-à-dire de la surface de plancher construite après déduction des parties occupées par les cloisons, marches, embrasures de portes et fenêtres… C'est la définition classique, souvent appelée « surface balayable ». Le seuil de tolérance de 5 % permet au vendeur de mesurer la surface lui-même, il n'y a pas d'obligation de recourir à un professionnel, c'est une opération qui ne sera donc pas coûteuse. Il faudra simplement savoir mesure la surface d'un trapèze…
RMC : vendredi 19 avril 1996
P. Lapousterle : Les problèmes de l'immigration clandestine et les propositions de la commission d'enquête parlementaire divisent la majorité et le Gouvernement, puisque trois ministres ont pris leurs distances avec ce texte. Quel est votre sentiment ?
Pierre-André Périssol : Rappelons d'abord que c'est un rapport d'origine parlementaire. De son côté, le Gouvernement entend lutter contre l'immigration clandestine, car il y va du respect de nos lois, de la stabilité de la société française, et de la capacité d'insertion des immigrés qui sont en situation régulière et qui veulent s'intégrer. Il faut donc être efficaces dans la lutte contre l'immigration clandestine mais cette efficacité ne passe pas nécessairement par des solutions qui, même si elles frappent les esprits peuvent, se révéler simplistes.
P. Lapousterle : C'est-à-dire ?
Pierre-André Périssol : La fermeté oui mais dans le respect de nos traditions républicaines, dans le respect des droits de la personne.
P. Lapousterle : vous ne soutenez pas l'intégralité des mesures qui sont proposées ?
Pierre-André Périssol : Je n'ai pas à les soutenir ou pas. Je le laisse à la responsabilité parlementaire, de toutes tendances, qui ont participé à cette commission. Il y a un Gouvernement et J.-L. Debré proposera prochainement ce qu'il compte faire pour donner toute leur efficacité aux lois existantes.
P. Lapousterle : Un sondage qui sort ce matin dit que si des élections avaient lieu dimanche prochain, la majorité sortirait gagnante dans son combat législatif contre l'opposition. Ça vous surprend ?
Pierre-André Périssol : Non et pour la raison suivante : notre pays est dans une situation qui nécessite de très importantes réformes. Et comme tout ce qu'on a tardé à faire, c'est difficile à faire. Deuxièmement, les Français sont légitimement impatients. Donc à la fois ils ont l'épiderme sensible, mais ils comprennent bien qu'il faut faire ces réformes. Je croix qu'ils comprennent le message du Gouvernement, l'action du Premier ministre qui s'est engagé à rendre l'État plus efficace en le réformant.
P. Lapousterle : Vous savez bien que la cote de popularité du Gouvernement n'était pas brillante.
Pierre-André Périssol : Les sondages, on l'a vu, sont parfois trompés. Je crois qu'aujourd'hui les Français comprennent qu'il faut réformer et ensuite ils veulent que ces réformes, ces messages du président de la République, conduisent à plus de cohésion sociale et donc à plus de justice.
P. Lapousterle : Un député RPR des Yvelines a remis un rapport au Premier ministre demandant la destruction pratiquement immédiate de vingt foyers d'immigrés qui accueillent les travailleurs migrants. Soutenez-vous ce rapport et que faire des gens qui habitent des foyers ?
Pierre-André Périssol : Je tiens à rendre un hommage à la fois au travail et au député H. Cuq qui a fait ce rapport. Que dit ce rapport ? Qu'il y a des foyers pour immigrés qui, premièrement, n'assurent plus de conditions d'hébergement dignes de ce nom et, deuxièmement, qu'ils constituent des zones de non-droit. Il faut donc résoudre cette situation et pour cela il propose soit des destructions avec la reconstitution dans des petites unités, soit, quand c'est possible, des réhabilitations. A. Juppé a chargé un préfet de suivre ces recommandations et de voir comment les mettre en œuvre.
P. Lapousterle : On en a les moyens ?
Pierre-André Périssol : Dès lors qu'il y a une situation difficile, il faudra les trouver. Pas seulement des moyens financiers, mais des moyens d'intervention qui nécessitent un accord des collectivités locales sur lesquelles se situent ces foyers et de la coopération d'un ensemble de gens.
P. Lapousterle : Dans un entretien au Parisien, X. Emmanuelli dit qu'en accord avec vous, « il serait imaginable que des bureaux vides puissent être affectés à des logements pour des gens qui en ont besoin. Quel genre de bureaux ?
Pierre-André Périssol : Je salue Emmanuelli qui fait un très bon boulot auprès des personnes qui sont en grande difficulté, en France ou sur tous les théâtres chauds dans le monde. Il y a deux problèmes : le premier est celui de bureaux. Nous sommes aujourd'hui dans une crise qui n'est pas une crise passagère mais structurelle, qui va durer, il y a trop de bureaux. Deuxièmement : à l'intérieur de ceux-ci, qui ne retrouveront pas preneurs sous forme de bureaux, dans une échéance prévisible, il y en a une grande partie qui sont d'anciens logements, qui ont été transformés en bureaux. Je crois donc qu'il est de l'intérêt de tous, à commencer par celui de ceux qui détiennent ces bureaux, mais aussi de la société, de retransformer ces bureaux, quand c'est techniquement possible, en logements. On ne peut pas tolérer qu'il y ait d'un côté des bureaux durablement vacants et de l'autre des gens qui ne sont pas logés ou qui sont à la recherche d'un logement. Il faut donc transformer ces bureaux en logements.
P. Lapousterle : ça porterait sur de nombreux logements ?
Pierre-André Périssol : Il y a aujourd'hui un nombre de mètres carrés de bureaux vides importants et dont une partie est transformable en logements. Ce n'est pas une opération facile mais elle est indispensable.
P. Lapousterle : Vous avez l'habitude de dire que « 1996 c'est l'année du logement ». Ce n'est pas ce que disent les professionnels du bâtiment qui se plaignent de licencier du personnel car ils n'ont pas de travail.
Pierre-André Périssol : Deux choses : les professionnels du bâtiment, les entreprises du bâtiment, souffrent depuis un certain temps. Pourquoi ? car entre le moment où il y a une vente et le moment où ça va se traduire dans le carnet de commandes de l'entreprise, il se passe un certain délai qui est de l'ordre d'un an. Et donc la situation des entreprises du bâtiment que l'on connaît aujourd'hui c'est la résultante du faible niveau de vente d'il y a un an. L'ensemble des professionnels du bâtiment est aujourd'hui confiant car il sent concrètement la reprise, la relance. J'ai noté des constructeurs de maisons individuelles qui parlent de plus de 35 % de ventes, des agents immobiliers qui parlent de plus de 25 %. Nous avons réformé, en fonction de la situation que je reconnais très difficile, nous avons lancé le prêt à taux zéro qui marche bien : 57 000 prêts faits depuis 6 mois. A savoir qu'en 6 mois, deux fois plus de prêts à taux zéro qu'on ne faisait en une année de l'aide ancienne, avec le même argent et pour des ménages qui ont la caractéristique d'avoir des petits revenus et d'être jeunes dans leur très grande majorité. Ce qui est la preuve qu'on peut réformer sans alourdir la charge du contribuable. C'est le cahier des charges fixé par le Premier ministre. Et ensuite, c'est la preuve qu'on peut avoir une action qui a le cap sur le social, qui renforce la cohésion sociale, c'est le cahier des charges que m'a donné J. Chirac en me demandant de construire le droit au logement dans ce pays.
P. Lapousterle : Ce matin, vous êtes formel : dans un an, les entreprises du bâtiment auront du travail et cesseront de licencier ?
Pierre-André Périssol : Les 57 000 prêts à taux zéro, c'est 57 000 chantiers dans quelques mois. Je rappelle que le logement ne fait que la moitié du chiffre d'affaires des entreprises du bâtiment qui pour le reste font des équipements qui sont commandés par des collectivités locales.