Texte intégral
L’enseignement est aujourd’hui l’un des instruments dont notre pays a besoin pour entrer dans le XXIe siècle. Cette bataille est économique et culturelle. L’école doit être au cœur de la transmission des savoirs, et notamment par le biais des nouvelles technologies. Une ouverture sur le monde, davantage de sources de savoir, dans un cadre maîtrisé, voilà l’enjeu qui est devant nous. La responsabilité qui est la mienne en tant que ministre de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie est que chaque enfant, chaque jeune, quel que soit son milieu social, puisse y avoir accès. Seule l’école peut aujourd’hui remplir ce rôle.
En tant que ministre de l’éducation, j’ai d’emblée pris la mesure de l’ampleur et de la difficulté de la tâche : il s’agit de jeter les bases d’une autre démarche éducative, de transformer des habitudes pédagogiques, afin d’œuvrer à l’apprentissage des nouvelles générations. À ce titre, avec ses 70 000 établissements et ses 15 millions d’élèves, d’enseignants et de personnels administratifs, l’école est le premier chantier de France. Il ne s’agit pas de céder aux sirènes du modernisme, mais d’utiliser bénéfiquement ces technologies dans une démarche éducative globale.
Les applications pédagogiques sont multiformes et beaucoup restent à inventer. Je me bornerai à en citer quelques-unes.
Le multimédia peut constituer un formidable vecteur de motivations pour des élèves en difficultés, fâchés avec les voies d’apprentissage traditionnelles.
L’utilisation de l’ordinateur favorise, chez les jeunes, une démarche plus active et stimule des formes de créativité sur différents supports (texte, image, audiovisuel…).
Les bases de données sur CD-Rom ou Internet leur permettent d’accéder, directement et de façon interactive, à des connaissances. Le travail personnel devient plus riche par une démarche de projets : l’accès direct aux informations, l’apprentissage du tri, de la critique.
Les réseaux internes aux établissements permettent la mise en place de travaux de groupe. Par le courrier électronique, on dialogue avec des interlocuteurs du monde entier.
Les produits multimédias engendrent de nouveaux modes d’apprentissage (visualisation dans l’espace, son) et touchent un plus grand nombre d’élèves.
Ces activités supposent une réelle intégration dans la pédagogie quotidienne, dont on a tendance, à mon avis, à sous-estimer la difficulté. Aujourd’hui, aucun pays au monde ne l’a réellement réussie, malgré de nombreuses tentatives dans les années 80, par ignorance de la qualité d’invention demandée à chaque enseignant en situation d’adaptation pédagogique.
Le mouvement que j’ai initié ne peut donc se réaliser pleinement qu’avec une action très volontaire des équipes enseignantes et du temps laissé aux expérimentations pédagogiques. Toutes celles qui ont été menées dans ce domaine montrent à quel point la présence des enseignants est nécessaire pour que les enfants progressent et ne s’en tiennent pas à des activités purement ludiques.
Les salles multimédias dans les établissements scolaires peuvent être ouvertes en dehors des heures de classe pour accueillir l’étude ou des activités périscolaires des élèves.
Plus tard, lorsque les accès au courrier électronique se seront généralisés, Internet sera un nouveau lien entre l’élève et l’enseignant.
Cette possibilité ouverte par l’usage du multimédia à l’école, en dehors des heures de cours, favorise le suivi des élèves, allège considérablement leur temps de travail à la maison et permet d’offrir une meilleure maîtrise des connaissances aux jeunes les plus défavorisés culturellement.
La présence, dans un même ministère de tutelle, de l’éducation nationale et de la technologie permet des synergies nouvelles. Ainsi, de nouvelles techniques sont testées dans les établissements scolaires. Avec les équipes de développement de Bull, nous testons, par exemple, de nouvelles méthodes pour protéger l’accès des élèves à des serveurs interdits. Avec Alcatel, nous allons tester des techniques, dites ADSL, de haut débit.
Mais surtout, en partenariat avec le Centre national d’études spatiales (CNES) et de nombreuses entreprises, nous connectons expérimentalement des écoles à des services pédagogiques par satellite, ouvrant ainsi aux zones rurales, par exemple, des débits très importants.
J’ai symboliquement fixé comme objectif pour l’an 2000 une adresse électronique par enseignant, par étudiant et par classe. Au-delà, je n’ai pas de plus grande ambition que de préparer ainsi les générations à la révolution de l’information et à la mutation de la société induite par l’essor du multimédia, de donner le maximum d’atouts aux élèves pour construire le monde de demain et y vivre pleinement.
Pour moi, l’ordinateur sera, demain, un outil aussi simple que le téléphone aujourd’hui. Cet ordinateur n’est qu’un outil dont nous devons tirer le meilleur. Soyons clairs, ce n’est pas Le Cid ou l’ordinateur ! C’est l’ordinateur au service du savoir et de la culture.
Par ailleurs, plus que jamais la maîtrise de la culture et de la langue française reste nécessaire.