Interview de M. François Hollande, premier secrétaire du PS, dans "Libération" le 19 février 1999, sur la décision de la Commission européenne autorisant une baisse de la TVA sur les activités de main-d'oeuvre et les services de proximité.

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Q - La décision de Bruxelles sur la TVA tranche-t-elle de facto le débat sur la fiscalité qui a agité le gouvernement ces dernières semaines ?

Pas nécessairement. A l'automne dernier, nous avions demandé au gouvernement d'intervenir auprès de la Commission européenne pour que soit élargie la liste des produits et services éligibles au taux réduit de TVA. Nous voulions en effet pouvoir alléger la TVA sur les activités de main-d'oeuvre et sur les services de proximité. Or il était impossible de nous donner satisfaction, puisque ces mesures étaient à  l'époque incompatibles avec les règles communautaires. Ce n'est plus le cas aujourd'hui et nous nous en réjouissons. Mais il appartiendra au gouvernement de voir jusqu'où on peut aller. Le projet de loi de finances pour l'an 2000 est encore dans les limbes, et parler d'arbitrage aujourd'hui me semble plus que prématuré. Tout dépendra de la conjoncture, des marges de manoeuvre dont disposera le gouvernement l'an prochain.

Q - Peut-on imaginer que le gouvernement ne fasse rien sur la TVA dans le prochain budget ?

C'est à  la demande de la France, notamment au sommet de Luxembourg de novembre 1997, que Bruxelles a rouvert le dossier des baisses ciblées de TVA sur les activités de service. On comprendrait donc mal qu'il n'y ait aucune suite. Disons qu'il y a là  une obligation de cohérence.

Q - La baisse de la TVA sur les travaux d'entretien de logements que réclamait la commission des finances coûterait, selon Bercy, entre 15 et 20 milliards. Une mesure aussi coûteuse est-elle envisageable ?

Ce chiffrage n'a guère de sens. Primo, tout dépend du champ d'application de la mesure. Deuxièmement, la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien des logements peut limiter le recours au travail au noir et favoriser un surcoût d'activité de ce secteur. Ce que l'on perdrait en recettes fiscales d'un côté, on le récupérerait donc en partie de l'autre. Enfin, l'adoption de cette mesure permettrait de supprimer un certain nombre d'avantages fiscaux, comme le crédit d'impôt pour travaux d'entretien. Il ne faut donc pas raisonner en terme brut mais en terme net. Au final, l'addition ne serait vraisemblablement pas si élevée.

Q - Ecartez-vous l'idée d'un toilettage de l'impôt sur le revenu ?

Cette question viendra en son temps, au moment de la préparation du prochain budget l'été prochain. L'impôt sur le revenu n'est pas notre première priorité. Avant, il y a la TVA, mais aussi la révision des valeurs locatives de la taxe d'habitation. Cela ne veut toutefois pas dire que nous sommes contre l'idée de toucher à  l'impôt sur le revenu.

Dans la dernière loi de finances, nous avons déjà  supprimé quelques niches fiscales. Peut-on aller plus loin ? Il faut voir. L'idée de prélever cet impôt à  la source mérite réflexion.