Texte intégral
Mesdames et Messieurs les préfets,
Madame Martine Aubry, ministre de l’emploi et de la solidarité et Monsieur Dominique Strauss-Kahn, ministre des finances, de l’économie et de l’industrie, vous ont indiqué le sens et les grandes lignes de l’action du Gouvernement sur deux sujets essentiels.
Je les aborderai à mon tour, du point de vue du ministère de l’intérieur, en attirant tout particulièrement votre attention sur le rôle que vous aurez à jouer en tant que représentants de l’État dans l’application des décisions gouvernementales.
I. - La sûreté, un droit égal pour tous les citoyens.
La grande affaire qui va nous occuper, dans les prochains mois et les prochaines années, c’est, à coup sûr, la sécurité de nos concitoyens. Le Premier ministre, dès son discours de politique générale devant l’Assemblée nationale, le 19 juin dernier, en a fait une priorité pour le Gouvernement, dans des termes que vous avez sans doute en mémoire : « Toute personne vivant sur le territoire de la République a droit à la sécurité. On ne peut accepter une société dans laquelle il y aurait d’un côté des quartiers protégés et de l’autre des zones de non-droit. »
Et tel est bien l’esprit dans lequel j’entends agir en ce domaine : veiller d’abord à l’égalité de nos concitoyens face à la sûreté. Les plus faibles, les plus démunis d’entre eux sont aussi les moins bien garantis dans leurs biens et leur personne. Et l’insécurité les frappe d’autant plus dans les quartiers et les cités où ils vivent. Je vous demande donc de vous préoccuper en premier lieu de la sûreté de ces zones urbaines dans lesquelles l’État est aujourd’hui le plus défaillant.
D’autre part, la sécurité ne saurait procéder de la seule action de la police. Entendez-moi bien : la police et la gendarmerie ont évidemment un rôle central à jouer dans l’établissement et le maintien de la sécurité. Mais elles n’y suffiront pas à elles seules.
En amont de leur intervention, en quelque sorte, il est indispensable que chacun comprenne et accepte quelques règles élémentaires de la vie en société, qu’il adhère à quelques principes simples du droit public et du droit civil. Sont ici en cause l’école, première responsable de l’éducation civique de nos enfants ; mais aussi tous ceux qui, auprès des jeunes et des moins jeunes, dans nos villes, exercent une responsabilité dans la vie collective : les élus locaux, bien sûr, au premier chef, les militants associatifs de tous ordres, les éducateurs sociaux, les assistantes sociales, les bailleurs de logements sociaux, les sociétés de transport, etc. Ce n’est pas diluer la responsabilité des uns et des autres que de les appeler tous à contribuer à la sûreté publique. C’est seulement reconnaître l’existence d’un grave déficit moral et civique que nous ne comblerons pas sans nous mettre tous à la tâche.
Enfin, la sûreté, dans sa réalité comme dans le sentiment qu’on en a, est inséparable d’une bonne coopération entre la police et la justice. La sanction des crimes et des délits n’est pas toujours clairement apparente, ni d’ailleurs véritablement réparatrice. Sans doute le droit pénal applicable aux mineurs a-t-il été établi dans un état de notre société assez éloigné de celui où nous vivons d’aujourd’hui. Mais, dans le cadre des lois en vigueur, ii n’est pas douteux que l’intervention de la police et de la gendarmerie est d’autant plus efficace, elle est d’autant mieux comprise par la population qu’elle se déploie de concert et en harmonie avec celle des magistrats.
Dans cet esprit, un colloque se tiendra à Villepinte les 24 et 25 octobre prochains sur le thème « Des villes sûres pour des citoyens libres ». Des représentants de tous ceux qui concourent à la sûreté y participeront. Il s’agit de susciter une réflexion collective et, au-delà, une véritable mobilisation des énergies. Le Premier ministre apportera sa conclusion aux travaux et, par leur participation, plusieurs ministres témoigneront – ceux de l’éducation nationale, de la défense, du logement, de l’emploi et de la solidarité, de la justice – que la sûreté est l’affaire de tous.
D’ores-et-déjà, et conformément à l’annonce qu’en a fait le Premier ministre, nous préparons un cadre de l’action publique : le contrat local de sécurité ; et le Parlement délibère d’un projet de loi qui nous permettra de créer 35 000 emplois pour la sécurité de proximité d’ici à deux ans.
1. Les contrats locaux de sécurité.
Une circulaire vous sera prochainement adressée, qui vous précisera le mode d’emploi des contrats locaux de sécurité. Ils constituent, à mes yeux, l’outil privilégié d’une politique prenant la citoyenneté comme axe de la prévention, la proximité comme objectif de redéploiement de la police et l’efficacité pour un renforcement de l’action conjointe de cette dernière avec la justice.
Ces contrats s’appliqueront, non pas exclusivement, mais en priorité dans les quartiers ou cités dans lesquels le droit n’a plus force de loi et, au-delà, dans les zones les plus insécures.
Ils seront élaborés, sous votre responsabilité, avec les maires intéressés et le procureur de la République. Vous vous appuierez, pour ce faire, sur les conseils communaux de prévention de la délinquance, là où ils existent et demeurent actifs. Cependant la prévention de la délinquance ne peut plus être qu’un moment de la politique de sécurité. Il faudra rebaptiser ces conseils. Je vous suggère de les nommer « conseils locaux de la citoyenneté ».
Le champ territorial de ces contrats sera, comme leur nom l’indique, celui de la commune ou d’une agglomération urbaine, aussi souvent que cette extension paraîtra nécessaire et possible.
J’attire votre attention sur l’importance du diagnostic préalable de la situation auquel vous devrez procéder : l’analyse de la délinquance et des besoins de sécurité ressentis par la population, sur la voie publique, dans les logements ou les transports, en faisant appel aux moyens d’observation, d’enregistrement et de statistiques dont vous disposez dans les services de la police et de la gendarmerie, mais aussi en considérant les préoccupations exprimées par tous les partenaires qu’on peut associer à cet exercice.
À partir de ce diagnostic, il vous appartiendra de déterminer les priorités et les modalités de l’intervention des forces de police et de gendarmerie, aussi bien que de tous les acteurs de la sécurité, y compris des personnels nouveaux qui seront recrutés au titre des emplois-jeunes.
Un suivi de cette action sera organisé par vous-mêmes et je vous inviterai à m’en rendre compte. Une mission nationale sera constituée et pourra vous aider de ses conseils et des leçons tirées de l’échange des expériences acquises.
S’il s’agit de donner un élan nouveau à la politique de sécurité de proximité, il importe de ne rien négliger des initiatives prises dans le passé, ni des efforts accomplis dans le présent. Tirons au contraire le meilleur parti d’une expérience variée, dont je ne sous-estime ni l’utilité ni la valeur. Vous aurez soin, en particulier, de lier les contrats locaux de sécurité aux plans départementaux de sécurité, dès lors que ces derniers ont été l’occasion d’une mobilisation effective et efficace pour lutter contre la délinquance.
2. Des emplois-jeunes pour la sécurité de proximité.
35 000 emplois d’une durée de cinq ans, voilà les moyens que le Gouvernement met à votre disposition dans les deux prochaines années pour relever le niveau de la sûreté là où elle est mal et insuffisamment garantie. Ces 35 000 emplois se répartiront en deux catégories : les adjoints de sécurité, au nombre de 20 000, dont 8 250 pourront être recrutés d’ici à la fin de 1998, et les agents locaux de médiation, au nombre de 15 000.
a) Les adjoints de sécurité seront embauchés sur des contrats de droit public, et fonctionnellement rattachés à la police nationale. Les conditions de leur recrutement, de leur formation et de leur travail seront réglées par la voie réglementaire, en application du titre 2 de la loi relative au développement d’activités pour l’emploi des jeunes, actuellement en discussion au Parlement. La rédaction d’un décret et de deux arrêtés – l’un sur les droits et obligations des adjoints de sécurité, l’autre sur le recrutement et la formation – est avancée. Ces textes seront signés aussitôt que la loi sera promulguée. Vous recevrez, en complément, une instruction précisant les termes de la réglementation.
Sans anticiper plus qu’il ne conviendrait sur son contenu, je peux vous indiquer les principales missions qui seront confiées aux adjoints de sécurité : améliorer les réseaux d’information et d’action de la police nationale avec ses partenaires institutionnels, la justice et les autres services publics, notamment les travailleurs sociaux, le secteur médical, ainsi que les intervenants locaux ; faciliter l’accès au service public de la police, en participant à l’accueil, à l’information et à l’orientation du public dans les services locaux de police ; soutenir les victimes de la délinquance et des incivilités, notamment en leur facilitant les démarches administratives ; apporter une aide au public sur les axes de circulation, à la sortie des écoles, dans les îlots d’habitation et dans les transports en commun ; développer les missions de surveillance générale, en particulier par îlotage et patrouille, notamment à l’occasion des manifestations culturelles et sportives ; améliorer l’insertion des communautés étrangères et faciliter leur intégration. Et cette liste n’est pas limitative.
En revanche, les adjoints de sécurité ne pourront pas participer à des missions de police judiciaire ou de maintien de l’ordre.
Sachez encore que les adjoints de sécurité porteront l’uniforme et qu’ils pourront être armés, s’il est besoin. C’est vous, Mesdames et Messieurs les préfets, qui constituerez, dans chaque département, une commission pour choisir les candidatures, et c’est encore vous qui agréerez ces candidatures. Les jeunes adjoints de sécurité bénéficieront de deux mois de formation, soit deux fois plus que les policiers auxiliaires, dont six semaines dans des écoles ou des centres de formation de la police nationale.
b) Les agents locaux de médiation concourront d’une autre façon à la sécurité publique. Leur intervention se situera tout entière en amont de celle des forces de police : accueil, médiation, aide à l’alerte sociale, respect des règles de civilité et de bonne conduite, écoute et dialogue, surveillance technologique, facilitation des relations, animation sociale, maintenance de la sécurité de la voirie et sécurité routière, prévention de proximité adaptée à l’environnement, telles sont quelques-unes des fonctions qu’ils pourront remplir. Cette liste-là n’est pas davantage exhaustive que la précédente.
La mission de l’agent local de médiation est d’assurer une présence sur le terrain, au plus près de la population, pour prévenir, anticiper et désamorcer les conflits par le dialogue, la médiation, la dissuasion.
Statutairement, ces agents seront recrutés sur des contrats de droit privé, comme tous les jeunes qui le seront selon les dispositions du titre 1 de la loi relative au développement d’activités pour l’emploi des jeunes. La charge sera donc partagée entre l’État, qui en assumera 80 %, et l’employeur, pour 20 %, qui sera une collectivité territoriale, ou une personne morale de droit privé, société gérant un service public ou association à but non lucratif. En réalité, le choix du partenaire de l’État sera largement ouvert, puisqu’il pourra se porter sur des établissements publics locaux d’enseignement, aussi bien que sur une société de transport en commun, sur un office de HLM comme sur une chambre de commerce et d’industrie, sur un club sportif ou une association de commerçants.
Les conditions du recrutement de ces agents locaux devront être inscrites dans le contrat local de sécurité. Vous y serez donc associés, comme vous le serez à leur formation, qui comprendra une formation initiale d’un mois et un complément de formation continue. Les modalités de la formation seront adaptées à la diversité des activités en cause et au niveau de formation antérieurs des jeunes concernés.
Dans la réalisation de ce programme de création d’emplois pour la sécurité de proximité, vous garderez à l’esprit quelques idées directrices.
Premièrement, il s’agit de répondre à un besoin de nos concitoyens, en l’occurrence la sécurité. Le but, c’est la sûreté ; l’emploi des jeunes, c’est un moyen. Le moyen n’est pas indifférent. C’est pourquoi la formation de ces jeunes doit retenir toute votre attention ; elle seule rendra possible leur insertion durable dans la société, au-delà de la période de cinq années de leur contrat d’emploi.
Deuxièmement, vous veillerez à ce que les activités nouvelles qui serviront de supports aux emplois soient non seulement utiles à la sûreté, cela va sans dire, mais encore perceptibles par la population. Ne choisissez pas le renfort des bureaux, mais la présence sur la voie publique, dans les immeubles de logement, dans les transports, aux abords des collèges ou des commerces.
Troisièmement, l’efficacité passe par la concentration des moyens sur des points sensibles. Évitez le saupoudrage qui, à court terme, est sans doute une commodité de gestion, mais qui déboucherait bientôt sur l’inanité de toute l’entreprise. Les moyens que le Gouvernement vous alloue doivent être affectés, en toute priorité, dans les zones de non-droit, là où l’insécurité est le plus manifeste, là où elle suscite la peur, le désarroi et l’angoisse. 80 % des crimes et des délits sont commis dans 27 départements, et 25 % dans la seule région Île-de-France. Monsieur le directeur de la police nationale en tiendra compte dans la répartition des emplois d’adjoints de sécurité. Vous ferez de même à l’intérieur des départements et suivrez pareille orientation pour les emplois d’agents locaux de médiation.
II. - Le budget du ministère de l’intérieur pour 1998.
Le projet de budget du ministère de l’intérieur a été fixé à 77,78 milliards de francs, en incluant les crédits aux collectivités locales, et à 52,39 milliards de francs, hors collectivités locales. Les effectifs s’élèvent à 171 228, sans compter les 8 250 emplois d’adjoints de sécurité.
Bien que soumis à une contrainte générale qui résulte de la nécessaire maîtrise des dépenses publiques, le projet de budget du ministère de l’intérieur pour 1998 est en augmentation, puisqu’il progresse de 3,6 % par rapport à celui de l’exercice précédent.
La progression constatée en 1998 sera principalement affectée aux dotations réservées aux élections locales, ainsi qu’aux dépenses de personnels qui augmentent de 2,4 %.
1. Le budget de la police s’établit à 28,28 milliards de francs, en progression de 1,1 % par rapport à 1997. Cette progression est en réalité plus forte, si l’on tient compte du fait que 80 % des crédits nécessaires à la rémunération des emplois de proximité seront transférés en 1998, à partir du budget du ministère de l’emploi et de la solidarité.
S’agissant des personnels, la mesure principale est donc la création de 8 250 adjoints de sécurité, dans le cadre du programme de création d’emplois de proximité.
Les crédits de fonctionnement s’élèvent à 3 816 millions de francs et sont en fait reconduits au niveau de la loi de finances initiale pour 1996. Le projet de loi de finances fait apparaître une diminution qui est liée au transfert de 136 millions de francs antérieurement inscrits sur le chapitre de fonctionnement et qui le sont maintenant sur les lignes indemnitaires, du fait de l’adoption du nouveau régime indemnitaire des officiers de police.
Le projet de budget pour 1998 traduit une relance de la politique d’équipement. Les crédits d’équipement des services de police atteignent un total de 1 146 millions de francs en autorisations de programmes, soit une progression de près de 12,5 % par rapport à 1997.
Au sein de cette enveloppe, avec 756 millions de francs d’autorisations de programmes, les crédits consacrés à l’immobilier et au logement enregistrent une augmentation de 13,8 % par rapport à 1997, où ils s’élevaient à 664 millions de francs. L’effort consenti en faveur du déploiement du programme ACROPOL sera amplifié : 265 millions de francs d’autorisations de programmes y seront affectés (contre 210 millions de francs en 1997).
J’en viens maintenant aux crédits qui seront affectés à vos services.
2. Les crédits pour l’administration territoriale s’élèvent à 6 162 millions de francs. Les effectifs de l’administration territoriale ont été préservés et s’élèveront à 28 015 agents.
Les ressources en personnels seront maintenues par le dégel de 100 emplois destinés à résorber l’emploi précaire et permettre de régulariser le recrutement de contractuels d’assistance technique, chargés de la gestion des programmes européens.
Ces effectifs budgétaires pour 1998 tiennent compte de la suppression de 190 emplois de préfecture gelés, et de ce fait inutilisables.
Les crédits de fonctionnement s’établissent à 1 674 millions de francs. Ils subissent donc une baisse de près de 60 millions de francs soit - 3,5 %. Cette diminution correspond à la prise en compte de la surévaluation de la dotation pour l’affranchissement postal qui nous a été allouée en 1997. Dans la réalité, vos moyens pour l’année prochaine seront donc au moins égaux à ceux de 1997.
Naturellement, il faut tenir compte, pour apprécier la réalité des moyens disponibles, des annulations de crédit particulièrement élevées, qui sont intervenues en 1996 (120 millions de francs) et en 1997 (95 millions de francs). Il est impossible à ce jour de préjuger de ce que seront les conditions d’exécution de la loi de finance pour 1998, mais les informations que vous a données le ministre des finances montrent que la construction du budget de l’État a été effectuée à partir de prévisions macro-économiques telles que les corrections en cours d’exécution devraient être sensiblement plus limitées que les années précédentes.
Parmi les crédits pour l’informatique qui sont globalement en baisse de 6,4 %, une capacité de financement des projets nouveaux a été préservée à la même hauteur qu’en 1997. Ces crédits informatiques seront partiellement déconcentrés.
Pour les effectifs et les moyens de fonctionnement, il s’agit donc globalement d’une reconduction. Mais cette stabilité ne doit pas entériner ni l’immobilisme dans l’affectation des ressources, ni la rigidité dans la répartition des emplois et des crédits.
En 1998, les préfectures devront mettre en œuvre la nouvelle législation sur les étrangers. Vous devrez aussi inscrire votre action dans les priorités gouvernementales que constituent le renforcement de la présence de l’État dans les zones urbanisées, l’évolution vers une administration plus proche des citoyens et le développement d’une efficacité accrue dans le contrôle de légalité.
Par ailleurs vous serez fortement sollicités pour la réalisation des politiques prioritaires à commencer par le programme « emplois-jeunes ». Il conviendra donc d’adapter l’allocation des emplois et des crédits à ces priorités.
S’agissant des effectifs de référence qui fixent pour chaque préfecture la répartition des emplois budgétaires, ils devront être adaptés à la hiérarchie de vos missions. J’ai demandé à l’inspection générale de l’administration et à la direction générale de l’administration de me faire des propositions à cet effet.
Je vous demande d’être particulièrement attentifs, dans la préparation de vos budgets, à ce que la répartition des emplois (c’est-à-dire les affectations de personnels) et des crédits (c’est-à-dire l’utilisation de la dotation inscrite sur le chapitre 37 10) permette de financer les missions prioritaires : programme « emplois-jeunes », contrôle de la légalité, accueil des étrangers.
L’évolution de vos missions vous impose des exigences nouvelles, pour vous-mêmes et pour vos collaborateurs. C’est pourquoi une mesure nouvelle de 6,6 millions de francs a été prise pour la revalorisation du régime indemnitaire des personnels de préfecture. Ces crédits seront répartis en priorité au bénéfice des personnels qui subissent des sujétions particulières, du fait de leurs fonctions ou du fait de leur affectation dans les préfectures et les sous-préfectures dont la charge sera particulièrement lourde en 1998.
Par ailleurs, la politique de requalification, notamment la création en gestion 1997 de 44 emplois d’attachés par blocage de 100 emplois de catégorie C, a été consolidée dans le projet de loi de finances pour 1998.
S’agissant du programme national d’équipement des préfectures, les autorisations de programme seront maintenues à un niveau élevé : 250 millions de francs en 1998, contre 247 millions de francs en 1997. Cette mesure atteste de la priorité reconnue au maintien du patrimoine dont dispose l’administration territoriale. Ces moyens permettront d’assurer la maintenance lourde, la rénovation, ainsi que le renforcement de la sécurité des locaux. En 1998, une priorité renforcée sera donnée au financement d’opérations visant à améliorer l’accueil du public, notamment dans les grands départements, et à renforcer la présence de l’État dans les zones urbanisées.
3. Les dotations des collectivités locales : enfin, vous le savez, j’ai tenu à ce que le pacte de stabilité qui règle actuellement les relations financières entre l’État et les collectivités locales, et dont 1998 sera la dernière année d’exécution, soit strictement appliqué.
Ainsi, le Gouvernement ne proposera aucune disposition nouvelle qui modifierait les dotations de l’État aux collectivités locales, le dispositif d’exonération ou de compensation de la fiscalité locale, ou encore le taux de la cotisation « employeur » de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.
Pour autant, les décisions qui ont été prises pour assurer le respect du pacte de stabilité ne visent pas à ériger celui-ci en un système pérenne, ni à en faire la fin dernière de l’action gouvernementale.
Cette stabilité n’a de sens qu’à la condition qu’elle permette aux collectivités locales de se mobiliser en faveur de l’emploi, et d’abord de l’emploi des jeunes. L’État fournit un effort considérable pour assurer le financement de ces emplois. Cette action ne produira tous ses effets que si l’État et les collectivités locales s’y engagent ensemble. Ces dernières en ont, pour 1998, les moyens.
Il vous revient donc de sensibiliser les élus locaux sur ce point, afin qu’ils comprennent le sens et la portée de l’action du Gouvernement, laquelle répond tout simplement, en l’occurrence, à l’intérêt général.
III. - Une politique de l’immigration ferme et généreuse.
J’en viens maintenant à deux autres aspects de notre action : l’application de la circulaire du 24 juin dernier, relative au réexamen de la situation de certains étrangers, et la préparation du projet de loi relatif à l’entrée et au séjour des étrangers sur le territoire national.
1. L’application de la circulaire du 24 juin 1997.
Par circulaire du 24 juin 1997, je vous ai demandé de réexaminer la situation de certaines catégories d’étrangers en situation irrégulière. Je sais combien, pour certains d’entre vous, cette charge supplémentaire peut être contraignante, 110 000 demandes étant enregistrées aujourd’hui.
Je vous ai demandé un effort particulier d’accueil, pour que chaque demandeur puisse être personnellement reçu à la préfecture. Je voudrais attirer votre attention sur la nécessité de délivrer un titre de séjour dès que l’état du dossier de l’intéressé permet de le faire. Un effort tout particulier de motivation des décisions de refus est, par ailleurs, nécessaire.
L’application des critères fixés dans la circulaire ne doit être ni excessivement rigide, ni laxiste. Des instructions complémentaires, sous forme de réponses à des questions souvent posées, vous sont régulièrement envoyées. Elles doivent permettre une égale application du dispositif à travers tout le territoire national.
2. Le projet de loi relatif à l’entrée et au séjour des étrangers.
S’agissant de la préparation du projet de loi, le rapport remis par Monsieur Patrick Weil à Monsieur le Premier ministre comporte 130 propositions.
La plupart de ces mesures, de nature réglementaire ou administrative, font l’objet ce mois-ci de réunions entre les ministères concernés, qui sont nombreux (emploi et solidarité, affaires étrangères, justice, éducation nationale, économie, finances et industries, coopération, outre-mer notamment). Par ailleurs, les modifications législatives envisagées font l’objet d’un projet de loi relatif à l’entrée et au séjours des étrangers en France et à l’asile. Ce projet vient d’être transmis au Conseil d’État ainsi qu’à la Commission nationale consultative des droits de l’homme et au Haut Conseil à l’intégration.
Il s’agit de sortir les immigrés de leur situation d’otages dans des querelles partisanes, qui ne profitent qu’à ceux qui n’adhèrent pas aux valeurs de la République.
En modifiant l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l’entrée et au séjour des étrangers, la loi du 25 juillet 1952 sur le droit d’asile, ainsi que diverses dispositions du code civil, du code pénal, du code de procédure pénale et du code de la Sécurité sociale, le Gouvernement entend fixer les termes d’une politique généreuse, mais ferme, de l’immigration.
La suppression de formalités tracassières, l’appui à l’installation de certaines catégories de résidents, une meilleure prise en compte de la situation personnelle et familiale, des droits mieux sauvegardés, un droit d’asile plus ouvert, sont d’autant plus justifiés et trouveront d’autant mieux leur place dans notre législation que la lutte contre les filières d’immigration illégale et l’éloignement des étrangers en situation irrégulière seront mieux assurés.
Ce projet de loi sera soumis avant la fin de, l’année à la première lecture de chacune des deux assemblées parlementaires. Je souhaite que le vote définitif intervienne avant la fin du mois de janvier et que les décrets d’application nécessaires soient pris au printemps.
Voilà, Mesdames et Messieurs les préfets, les principales questions que je souhaitais aborder avec vous. J’insiste, en terminant, sur votre tâche primordiale : l’explication inlassable de la politique entreprise, la mobilisation des services de l’État à son service et le suivi méticuleux de son application.
Sécurité, emploi des jeunes : il n’est pas besoin d’un long argumentaire pour vous convaincre de l’urgence d’un progrès en ces domaines. Le Gouvernement s’est donné les moyens de la réussite. Il attend de vous que vous y contribuiez dans vos fonctions.
Date : Vendredi 26 septembre 1977
Source : interieur.gouv.fr
Allocution de Monsieur Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’intérieur
Réunion des responsables départementaux et régionaux de la police nationale
Mesdames et Messieurs,
J’ai le plaisir à vous recevoir. C’est pour moi l’occasion de rencontrer les responsables de la police que vous êtes et de vous exposer comme il se doit les grandes lignes politiques que j’entends suivre.
J’ai réuni hier les préfets afin qu’au lendemain du conseil de ministres qui a approuvé le projet de loi de finances pour 1998 ils puissent être informés de son contenu.
J’ai saisi cette occasion pour leur donner des indications sur la partie de ce projet qui intéresse le ministère de l’intérieur et pour leur faire connaître les orientations de la politique gouvernementale relative à la sécurité.
J’ai tenu aujourd’hui à vous rencontrer, vous qui êtes en charge directe de la mise en œuvre de la politique de sécurité définie par le Gouvernement pour vous dire ma considération, celle que j’éprouve à travers vous pour le travail de nos policiers et aussi pour vous préciser ce que j’attends de vous. Je mesure les difficultés de votre métier qui vous met au contact des réalités sociales les plus rudes.
La tâche qui est la nôtre est considérable. En effet, l’attente des Français en matière de sécurité est grande.
Leur espoir est fort. Leurs exigences sont pressantes et elles sont légitimes car la sûreté est le fondement même du pacte qui fonde la République. C’est la raison pour laquelle le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, le 19 juin, a fait de la sécurité une priorité gouvernementale : ‘Toute personne vivant sur le territoire de la République a droit à la sécurité ».
La sûreté est pour la République le socle nécessaire à l’exercice de toutes les libertés. C’est le premier droit du citoyen. C’est la mission première de l’État.
Il ne peut en effet y avoir de libertés pour nos concitoyens, individuelles ou collectives, si leur sécurité n’est pas garantie. La sécurité des personnes et des biens doit être assurée pour tous et partout.
Je sais l’important travail qui est mené sur le terrain, par vous-mêmes et par vos collaborateurs. Au plan national, en 1997, le recul de la délinquance se poursuit. Il est de moins 1,22 % et même de moins 3,43 % pour la délinquance de voie publique. En août, même si une statistique mensuelle doit être relativisée, la diminution a été de plus de 7 %. Je vous demande de maintenir vos efforts pour partout faire reculer la violence et les incivilités. Je sais que c’est un effort de tous les jours.
La baisse de la délinquance générale s’accompagne cependant d’une évolution préoccupante des atteintes aux personnes qui progressent encore de 10 % depuis le début de l’année et de la délinquance des mineurs qui augmente dans les mêmes proportions, et dont nous savons bien qu’elle nous laisse largement démunis.
Ce développement de la violence touche plus particulièrement certaines villes, certains quartiers. Cette inégalité de fait est intolérable, elle est contraire au pacte républicain, c’est notre rôle et notre devoir d’y remédier.
D’une manière générale, la sécurité est l’un des domaines où l’écart entre les attentes légitimes des citoyens et l’action publique est le plus fort.
La police ne peut seule faire face aux dérives que nous constatons depuis trente ans. La sécurité est d’abord une affaire d’état d’esprit. Elle ne peut résulter que de l’attitude d’hommes et de femmes pleinement conscients de faire partie d’une collectivité et désireux de respecter les codes d’une société libre et démocratique, régie par des règles de vie consenties et acceptées par tous.
Pour que la République soit partout chez elle, il est indispensable de rétablir ou d’instituer quelques codes simples de conduite en rappelant ce qu’est véritablement la citoyenneté, ensemble indissociable de droits et de devoirs.
La répression des crimes et des délits est indispensable, leur prévention nécessaire, mais répression et prévention n’atteindront pas leur but, si dans la population, dès l’enfance, dès l’adolescence, on n’a pas su faire naître et vivre durablement un profond sentiment d’attachement aux valeurs de la République, le respect de la chose publique, le sens de l’intérêt général ; bref, l’adhésion à une citoyenneté active et responsable.
Cela nous conduit à un partenariat renforcé avec tous les acteurs de la vie sociale, l’éducation nationale, qui constitue le creuset dans lequel les enfants s’éveillent à la vie civique, et aussi les collectivités locales qui œuvrent à la qualité de la vie de nos concitoyens, et plus largement, de tous ceux qui vivent sur notre sol.
La sécurité dépend également d’une complémentarité étroite entre la justice d’une part, et d’autre part, les services de police et de gendarmerie chargés de la répression des crimes et délits, et de leur prévention. C’est l’un des grands objectifs que je me fixe, améliorer en accord avec Madame le garde des sceaux, le fonctionnement de l’ensemble de la chaîne pénale.
Mais la sécurité, c’est aussi, bien sûr, un total engagement de la police, une mobilisation constante fondée sur la qualité et la motivation des femmes et des hommes qui la servent, une adaptation permanente de ses moyens et de ses méthodes aux besoins exprimés par nos concitoyens, afin de faire reculer la délinquance et de faire progresser le sentiment de sécurité.
La mise en œuvre d’une politique de sécurité efficace et ambitieuse doit reposer sur la refondation de la citoyenneté, le développement d’une véritable police de proximité, le renforcement de l’action conjointe des services de police et de justice.
Ce sont là les thèmes qui constitueront les orientations majeures du colloque « des villes sûres pour des citoyens libres » qui se tiendra à Villepinte en Seine-Saint-Denis les 24 et 25 octobre prochains.
En ce qui concerne la police nationale, la politique que j’entends développer s’articule autour de trois démarches principales :
- la première est la mise en œuvre des contrats locaux de sécurité ;
- la seconde réside dans le programme de création de 35 000 « emplois-jeunes » affectés à la sécurité ;
- la troisième a pour objet la réorientation résolue des modes d’intervention de la police nationale vers la police de proximité.
1. Les contrats locaux de sécurité
Les contrats locaux de sécurité feront l’objet d’une circulaire dont l’élaboration est en cours d’achèvement au niveau interministériel (justice, défense, intérieur).
L’esprit qui anime le texte qui vous parviendra est de mobiliser au plan local, celui de la commune ou de l’agglomération, tous ceux qui peuvent jouer un rôle direct ou indirect en matière de sécurité, d’y associer tous ceux qui ont une parcelle de responsabilité pour améliorer la situation.
Les préfets seront chargés de proposer ces contrats ou de répondre aux souhaits des maires qui veulent en doter leur commune. Cette démarche doit naturellement concerner en premier lieu les villes où la délinquance est élevée, mais également celles où les habitants manifestent un fort sentiment d’insécurité.
Ces contrats seront élaborés conjointement par le représentant de l’État, le procureur de la République et le maire, chacun au titre de ses compétences. Ils seront signés par ces trois autorités, et éventuellement par d’autres partenaires, la région ou le département, par exemple, qui apporteront une contribution à leur application.
Leur préparation devra rassembler tous les partenaires qui peuvent contribuer à restaurer le sentiment de sécurité : vous-mêmes bien sûr, au premier chef, mais aussi l’inspecteur d’académie et les chefs d’établissements scolaires, les responsables des services sociaux, mais aussi ceux des associations et des professions les plus concernées et puis les citoyens eux-mêmes, dans leurs quartiers, qui sont finalement les mieux placés pour faire part de leurs attentes et de leur perception des choses, et souvent ont aussi des suggestions simples et pratiques à formuler. Pensez aussi à associer ceux qui sont les plus vulnérables.
Les conseils communaux de prévention de la délinquance existants pourront servir de support à la concertation. Ce sera d’ailleurs un moyen de relancer leur activité. Il faut les rénover, les revitaliser. Sans doute aussi les rebaptiser (conseils locaux de la citoyenneté) pour élargir leur champ d’actions.
Lorsqu’ils n’existent pas, il convient de créer des instances propres à ouvrir la concertation la plus large et la plus approfondie.
Il sera aussi nécessaire de simplifier et d’harmoniser les différents programmes concernant tant le travail clandestin que la toxicomanie, la prévention de la délinquance ou la lutte contre les incivilités.
L’élaboration du contrat local de sécurité devra reposer sur un diagnostic précis et complet.
J’insiste sur l’importance de cette phase préalable qui doit viser à analyser de la manière la plus exhaustive avec l’ensemble des acteurs concernés, non seulement la délinquance, mais aussi et, c’est plus difficile, le sentiment d’insécurité, ses causes, son évolution.
Ce diagnostic permettra de déterminer les priorités de l’action. C’est pour cette raison qu’il est fondamental.
Le contrat local ne saurait être en effet un catalogue de bonnes intentions ou un simple recensement des moyens existants. Il ne peut avoir de sens que s’il est organisé autour d’objectifs prioritaires qui pourront d’ailleurs être révisés en fonction des résultats et ce, à échéances régulières. Il implique un dialogue suivi de tous les partenariats concernés et bien sûr aussi avec les citoyens eux-mêmes.
Ils concerneront d’abord la prévention. Celle-ci passe par :
- l’apprentissage du civisme et des règles de comportements élémentaires qui exigera un engagement particulier des services de l’éducation nationale, mais aussi des autres acteurs locaux ;
- la promotion d’une solidarité et d’une sécurité de voisinage, qui implique l’expression de leurs besoins de sécurité par les citoyens et un dialogue responsable entre tous les partenaires ;
- l’adaptation des moyens existants et leur redéploiement en direction des territoires et des populations les plus vulnérables tels que les établissements scolaires confrontés à la violence, les jeunes en voie de marginalisation ou les toxicomanes.
Les contrats locaux de sécurité comporteront aussi des orientations en vue d’adapter le fonctionnement des services de l’État à l’objectif de sécurité recherché par :
- une meilleure coordination des tâches entre ses services et ceux des collectivités locales ;
- le développement des groupes de traitement local de la délinquance ;
- l’extension des maisons de justice et du droit ;
- le meilleur accueil du public et particulièrement des victimes ;
- le développement de l’îlotage dans les sites sensibles ;
- la mise en place d’adjoints de sécurité dans les services de la police nationale et celle d’agents locaux de médiation ou d’autres contrats d’emplois-jeunes.
Les objectifs devront être autant que possible quantifiés. La mise en œuvre des contrats devra faire l’objet d’une évaluation régulière, au plan local. Une évaluation sera faite simultanément au plan nationale, notamment grâce à la cellule d’animation et de suivi créée auprès du directeur général de la police nationale.
J’appelle enfin votre attention en ce qui concerne les contrats locaux de sécurité sur deux points :
- l’importance que peut revêtir la communication dans un domaine où la perception de la réalité compte au moins autant que la réalité elle-même ;
- la nécessité que les contrats traduisent des engagements réciproques.
2. Les emplois-jeunes
Deux catégories seront instituées dans le cadre du programme de création des 35 000 emplois-jeunes affectés à la sécurité :
- premièrement, les adjoints de sécurité, dont l’employeur sera le ministère de l’intérieur, c’est-à-dire la police nationale au titre de l’article 2 du projet de loi en discussion au Parlement.
Ils seront placés auprès des fonctionnaires de la police nationale pour accomplir, sous leur autorité, des missions de police. S’agissant de fonctions régaliennes, il était logique que l’État soit leur employeur.
Ils seront dotés d’un uniforme. Ceux d’entre eux dont la mission le justifie pourraient être armés.
Les missions qui leur seront confiées permettront à la police de mieux faire face à certaines tâches aujourd’hui mal ou insuffisamment remplies.
Ils renforceront les effectifs qui se consacrent à l’îlotage, assureront la surveillance des abords des écoles, favoriseront l’accueil et notamment celui des victimes, faciliteront les contacts avec les jeunes et les communautés étrangères, participeront à des tâches de sécurité routière. Ils ne pourront en revanche participer à aucune mission d’ordre public ou à caractère judiciaire.
Les adjoints de sécurité seront repartis en fonction de la situation de la délinquance et du sentiment d’insécurité, mais également des engagements qui seront pris par les communes et les autres partenaires.
Vous participerez à leur recrutement, le dispositif retenu étant en effet déconcentré et départemental.
Les candidatures pour ces postes d’adjoints de sécurité pourront être déposées dans les commissariats dès le vote de la loi. Ceux-ci seront dotés, par l’intermédiaire du secrétariat général pour l’administration de la police des dossiers (fiches de candidatures notamment), ainsi que d’un livret permettant aux fonctionnaires chargés de l’accueil de répondre aux questions des jeunes.
La sélection des candidats sera effectuée en fonction des postes ouverts dans votre département dont le nombre sera communiqué dans l’instruction relative aux adjoints de sécurité. Elle doit l’être, cela va sans dire, sans aucune discrimination ethnique, sur des critères de capacité.
Seuls participeront à cette sélection, qui comportera des tests psychotechniques, les candidats physiquement et médicalement aptes, sans casier judiciaire ayant fait l’objet d’une enquête administrative favorable et à l’image des populations concernées, car cela renforcera la confiance à l’égard de la police, condition de son efficacité.
Les SGAP serviront de soutien à l’organisation de ces tests et à l’ensemble de la procédure de recrutement.
Sur la base des résultats, les candidats retenus seront convoqués à un entretien devant une commission de sélection.
Cette commission dont vous ferez partie devra veiller à l’adéquation entre le profil des candidats et les missions qu’ils seront amenés à exercer. Le recrutement local doit permettre de retenir les jeunes dont le profil correspond le mieux aux missions à remplir.
Elle veillera aussi à ce que le recrutement des adjoints de sécurité reflète aussi justement que possible les diverses composantes de la société française.
Ce peut être un moyen de renouveler le dialogue entre le police et la population, particulièrement sa composante la plus jeune.
Mais cela ne sera possible que grâce à des candidats motivés ; le travail de la commission de sélection sera donc capital.
Le préfet proposera des contrats aux jeunes, choisis en fonction de leurs aptitudes d’une part et des besoins à satisfaire d’autre part.
Une fois le choix effectué, le SGAP incorporera le jeune dans une école ou un centre de formation de la police nationale.
Une formation d’un mois et demi lui permettra d’acquérir les savoirs de base nécessaires à l’exercice des missions de police.
Elle sera complétée par une formation de quinze jours dans le service d’affectation, afin de familiariser le jeune aux spécificités de son territoire d’intervention et au contenu de la mission qui lui sera confiée.
Au-delà de cette phase de recrutement et d’affectation, il importe que le dispositif permette la préparation et l’intégration des jeunes dans un emploi durable.
La formation continue qui leur sera dispensée tout au long de leur contrat permettra d’atteindre cet objectif. Elle visera à leur enseigner un métier et à valider leur expérience. Elle les préparera également aux concours administratifs et bien sûr, en premier lieu, aux concours spécifique devront être adaptés aux adjoints de sécurité.
Une deuxième catégorie d’emplois jeunes sera créée dans le cadre de ce programme : il s’agit des agents locaux de médiation, qui relèvent pour leur part de l’article 1 du projet de loi, c’est-à-dire du dispositif général. Ils n’ont pas pour objet de participer directement aux missions de sécurité. Leur rôle est de prévenir les tensions dans un quartier, dans une cité ou dans les transports en commun, de contribuer à réduire des tensions par une action en amont des forces de police, et ce, essentiellement par la médiation, l’écoute et le dialogue.
Ils seront employés par les collectivités locales, mais aussi par les concessionnaires de transport public, par les offices HLM, par les organismes consulaires, par les associations sportives et culturelles et par tout autre organisme chargé d’une mission de service public.
Le contrat local de sécurité mentionnera le nombre d’agents locaux de médiation recrutés par chaque partenaire, en premier lieu par la ou les communes concernées.
Le contrat local permettra également de préciser les conditions d’emplois de ces jeunes, et notamment leurs missions et les modalités de leur recrutement et de leur formation.
Ces mesures nécessiteront des textes d’application : un décret, deux arrêtés et une instruction pour la mise en œuvre des adjoints de sécurité, et un contrat cadre entre le ministère de l’intérieur et celui de l’emploi et de la solidarité fixant les conditions générales d’emploi des agents locaux de médiation. Tous ces textes seront diffusés immédiatement après le vote de la loi, dès que la consultation du Conseil d’État sur le projet de décret aura été effectuée.
J’ai indiqué aux préfets la nécessité d’affecter les emplois jeunes, adjoints de sécurité et agents locaux de médiation, en priorité dans les zones où l’insécurité est la plus manifeste. Il importe, pour l’efficacité de notre action, d’éviter tout saupoudrage : les moyens nouveaux seront alloués aux départements qui en ont le plus besoin et, dans ces départements, dans les villes et les quartiers où ils seront le plus utiles. J’entends qu’adjoints de sécurité et agents locaux de médiation soient visibles par la population, qu’ils soient déployés de telle façon qu’ils contribuent tout à la fois à réduire le nombre des actes de délinquance et à rassurer nos concitoyens. On n’y parviendra que par l’effet d’une certaine concentration des moyens. Il y aura des choix à faire. Je vous demande d’aider les préfets à en décider.
Le troisième volet réorientation résolue des nationales vers la police de notre action réside dans un mode d’intervention de la police de proximité.
3. La police de proximité
Je veux d’abord répondre à une question qui est souvent posée à propos de ce qu’il est convenu d’appeler la réforme qui procède de la loi du 21 janvier 1995.
J’observe que cette réforme a été décidée par la loi, qu’elle se situe dans la ligne de l’action de tous les gouvernements depuis bien des années, et en particulier de la loi qu’a fait voter Pierre Joxe en 1958, et enfin que tant par la restructuration des corps et des carrières que par l’organisation des services et des modes de travail, elle va globalement dans le sens d’une présence accrue sur la voie publique.
Cela étant, il faut aller plus loin pour créer une véritable police de proximité.
Je compte le faire d’abord par le renforcement des moyens en hommes : ce sont les adjoints de sécurité.
Je compte le faire aussi par l’esprit qui animera leur utilisation : celui d’un dialogue réel avec la population, dialogue qui ne doit rien enlever à la rigueur de la poursuite des délinquants, mais dont chacun perçoit bien qu’il peut apporter beaucoup à la qualité de la relation police-population et plus largement à la qualité des relations entre les citoyens.
Un autre aspect de la police de proximité : l’amélioration de l’accueil de la population.
À Paris, depuis le mois de juin déjà, une première réforme a été engagée en ce sens, puisqu’une permanence fonctionne 24 heures sur 24 pour recueillir les plaintes et prendre en charge les victimes dans tous les commissariats de voie publique.
Le moment est venu d’aller plus loin dans le sens d’un meilleur service au public.
Il importe en premier lieu que soit développée au plus tôt, une véritable police de proximité au niveau des arrondissements et des quartiers.
C’est la raison pour laquelle j’ai demandé au préfet de police d’engager une démarche en vue de mettre en place une nouvelle organisation des services de la préfecture de police, distinguant les services en charge des missions d’ordre public et ceux en charge de la prévention de la délinquance et de la police de proximité. Les premières traductions concrètes devront intervenir dans un délai d’un an après qu’aient été conduites les phases d’études, de concertation avec les représentants du personnel et de consultation des instances paritaires.
L’objectif est de permettre à la préfecture de police de continuer à exercer ses missions d’ordre public avec la même efficacité et la même disponibilité, tout en lui donnant les moyens de développer de façon significative la police de proximité.
En province, dans le même esprit, les modes d’organisation permettant la permanence que rendent les services de sécurité publique devront être généralisés.
Je pense notamment au traitement du petit judiciaire en temps réel, et à la mise en place, dans les services dont la taille le permet, d’un service de quart.
Ainsi :
- l’accueil du public est amélioré grâce à la permanence et au traitement immédiat des affaires ;
- le rôle des officiers est enrichi ;
- le corps de maîtrise et d’application voit ses fonctions diversifiées et valorisées ;
- la lutte contre la délinquance est rendue plus efficace notamment par la relance de l’activité des services de nuit et une disponibilité accrue pour l’investigation.
Par ailleurs, afin d’améliorer l’élucidation des délits les plus fréquents – cambriolages, vols à la roulotte – qui contribuent le plus au développement du sentiment d’insécurité, le recours aux moyens de la police technique de proximité sera systématisé.
Il faut que dans toutes les circonscriptions de police, l’on soit en mesure de conduire les petites opérations de police technique telles que la prise des empreintes digitales, opérations qui il y a peu encore n’étaient à la portée que de quelques services spécialisés.
Dans tous ces domaines il est possible de faire mieux.
Une circulaire vous sera adressée prochainement afin de préciser les axes de votre action. Elle abordera notamment, en ce qui concerne l’accueil du public :
- l’amélioration des locaux. Des crédits supplémentaires sont prévus au budget pour 1998 dont je vais pour parler dans un moment ;
- la mise en place de la nouvelle version du guide d’accueil policier informatisé (GAPI) ;
- le personnel sécurité ;
- le professionnalisme toujours à améliorer et leur renforcement par l’emploi d’adjoints de sécurité ;
- l’adaptation des horaires ;
- le partenariat avec l’Institut national d’aide aux victimes et de médiation (INAVEM).
En ce qui concerne l’amélioration du taux d’élucidation, qui passe par le développement des moyens destinés à la police technique de proximité, ces directives préconiseront :
- la poursuite de l’implantation du STIC-Canonge ;
- la mise en œuvre systématique d’investigations techniques sur les lieux de cambriolage de lieux habités ;
- le choix de fonctionnaires motivés et dotés des moyens techniques indispensables.
4. Le projet de budget 1998
La réussite de ces orientations passe par la mise en œuvre de moyens adaptés, c’est-à-dire à la fois la mise à votre disposition de ressources suffisantes, mais aussi par la capacité à bien gérer ces ressources pour les affecter aux missions prioritaires.
S’agissant des ressources, le projet de loi de finances qui a été présenté au conseil des ministres avant-hier prévoit un budget de 28,28 MDF pour la police nationale, en progression de 1,1 % par rapport à 1997.
Cette progression est en réalité plus forte si l’on tient compte du fait que 80 % des crédits nécessaires à la rémunération des emplois de proximité seront transférés en gestion 1998, à partir du budget du ministère des affaires sociales.
S’agissant des personnels, la mesure principale est donc la création de 8 250 adjoints de sécurité que j’ai évoqués précédemment. Comme vous le savez, les premiers recrutements d’adjoints seront engagés dès la promulgation de la loi à l’automne 1997 afin que soient recrutés 1 650 adjoints de sécurité à la fin de cette année.
Par ailleurs, la réforme des corps des carrières sera poursuivie à travers la mise en œuvre d’une meilleure répartition des effectifs entre les différents corps et permettra la création de 664 postes dans le corps de maîtrise et d’application dont 200 brigadiers majors, portant ainsi le total à 2 805.
Dans le même esprit, sera poursuivi le repyramidage du corps des officiers. Ce sont ainsi 40 emplois de commandant à l’emploi fonctionnel qui sont créés.
En accompagnement de ces mesures, des mesures indemnitaires seront mises en œuvre :
- la création d’un nouveau régime unifié pour le corps de commandement (18 MF de mesures nouvelles). Cette mesure permettra une meilleure gestion des carrières et donc le développement de la mobilité dans le nouveau cadre statutaire ;
- l’achèvement de l’extension de la prime de SGAP de Paris aux fonctionnaires du SGAP de Versailles (12,5 MF) ;
- la revalorisation du régime indemnitaire des attachés de police, à parité des fonctionnaires de grade équivalent du cadre national des préfectures permettra quant à elle de rendre ce corps attractif en sortie d’institut régional d’administration – 70 postes supplémentaires d’attachés de police seront créés en 1998.
Comme vous le savez, une vaste concertation est en cours au niveau national et départemental en ce qui concerne l’action sociale. Dans ce domaine, la relance de l’action est particulièrement nécessaire car les policiers sont confrontés, du fait même de leur activité professionnelle, à des contraintes et à des tensions variées et répétés. Je souhaite développer l’action sociale dans quatre domaines prioritaires :
- le renforcement de la protection juridique, médicale et sociale des policiers ;
- l’amélioration des conditions de vie et de travail dans les services ;
- celle des conditions de vies personnelle et familiale ;
- l’affirmation de la place et du rôle du policier dans la société.
Comptez sur moi pour défendre le service public de la police et la considération qui vous est due.
Bien entendu, cela implique que nul n’oublie jamais que le service public c’est d’abord le service du public.
J’entends que vous preniez toute la part qui vous revient à la politique d’action sociale en participant à cette phase d’écoute, de recueil de propositions et de discussions.
Dans le projet de budget pour 1998, des moyens supplémentaires sont prévus :
- 25 MF seront consacrés au développement d’une véritable médecine de prévention. Ils permettront de généraliser les démarches mises en œuvre dans les SGAP de Marseille, Dijon et Paris ;
- le dispositif de soutien psychologique sera renforcé par la création de dix emplois de psychologues. Ces emplois implantés dans chaque SGAP permettront la création d’un réseau national de soutien ;
- 10 MF seront consacrés à la mise en place de la restauration chaude dans les services dès l’année prochaine.
S’agissant des moyens de fonctionnement, les crédits s’élèvent à 3 816 MF et sont en fait reconduits au niveau de la loi de finances initiale de 1996. Le projet de loi de finances fait apparaître une diminution apparente. Celle-ci est en fait liée au transfert de 136 MF antérieurement inscrits sur le chapitre de fonctionnement et qui le sont maintenant sur les lignes indemnitaires du fait de la mise en place du nouveau régime indemnitaire des officiers.
Dans le même esprit, le financement de l’allocation de service des commissaires, qui avait été effectué pour partie par prélèvement sur les moyens de fonctionnement de la police en gestion est maintenant totalement inscrit sur les crédits indemnitaires à travers une mesure nouvelle de 65 MF.
Enfin, le projet de budget pour 1998 traduit une relance de la politique d’équipement. Les crédits d’équipement des services de police atteignent un total de 1 146 MF en autorisation de programme, soit une progression de près de 12,5 % par rapport à 1997.
Au sein de cette enveloppe, avec 601 MF d’autorisations de programmes, les crédits consacrés à l’équipement immobilier de la police enregistrent une augmentation de 21 % par rapport à 1997 (493 MF). Je souhaite relancer fortement l’action de rénovation des équipements immobiliers.
Depuis une dizaine d’années, des efforts importants ont été entrepris pour rénover un patrimoine immobilier qui avait été laissé en déshérence.
Mais force est de constater qu’il reste beaucoup à faire notamment dans deux domaines qui sont :
- les équipements immobiliers de la police dans les grandes agglomérations et à leur périphérie. J’ai demandé aux services centraux d’examiner la situation immobilière de la police dans les zones prioritaires et d’y engager la réalisation de projets nouveaux ;
- les équipements de formation. La police nationale devra recruter dans les sept années à venir près de 25 000 fonctionnaires et les capacités de formation doivent être adaptées à cette perspective.
L’effort consenti en faveur du déploiement du programme ACROPOL sera amplifié : 265 MF d’AP seront affectés (210 MF en 1997) ; La rénovation des transmissions est particulièrement nécessaire pour que soit améliorée l’efficacité opérationnelle et la sécurité des personnels.
Le programme ACROPOL qui avait été lancé au début de 1993 a connu beaucoup de vicissitudes. Les objectifs et modalités de sa mise en œuvre seront redéfinis pour que le temps perdu soit rattrapé.
Pour réussir la mise en œuvre des orientations que je vous ai présentées précédemment, les emplois et les crédits qui sont prévus au projet de budget pour 1998 doivent être affectés en priorité aux missions et aux zones géographiques prioritaires.
Les « programmes d’emploi de crédits » qui constituent au niveau national la ventilation interne des crédits que le projet de loi de finances identifie par grandes masses, mais aussi les budgets de vos services devront être préparés dans l’esprit que je viens de définir et que je vous demande de communiquer à tous ceux qui sont placés sous vos ordres.
En ce qui concerne le programme d’emploi de crédits, j’effectuerai dans les jours à venir une première répartition des crédits de fonctionnement entre grands services (sécurité publique, services spécialisés, CRS, etc.) et par zones géographiques (par SGAP). Puis, au sein de chaque zone (correspondant au ressort du SGAP) sera engagé le dialogue de gestion afin d’aboutir à une répartition entre chaque service.
La répartition des crédits que je déciderai au niveau national devra permettre le renforcement des moyens des directions départementales de sécurité publique notamment dans les zones prioritaires.
C’est dans ce cadre que cette année, je souhaite que soient améliorées les conditions de répartition des emplois budgétaires entre les services.
Chacun le sait, la répartition des effectifs dans la police nationale est largement le résultat de l’histoire. Les mouvements individuels ont finalement plus d’importance qu’une réflexion sur l’adéquation entre les missions et les ressources mises en œuvre. Il n’y a pas, comme dans les préfectures, un dispositif « d’effectif de référence » permettant de définir les effectifs pour chaque département sur la base d’une véritable analyse des besoins.
De plus, les conditions de recrutement ont aggravé les effets négatifs. En effet, le recrutement par concours national des gardiens conduit à ce que les personnels soient affectés en début de carrière dans des services éloignés de leur région d’origine.
Ainsi par exemple, l’affectation de jeunes gardiens originaires de province en région Île-de-France conduit à ce que les personnels les moins expérimentés soient confrontés aux situations souvent les plus difficiles. Elles débouchent aussi sur des demandes de mutation qui ne peuvent être rapidement satisfaites.
Cette situation conduit à la démotivation des personnels. Elle conduit aussi à une insuffisance d’encadrement dans beaucoup de départements fortement urbanisés.
Cette année, des concours déconcentrés ont été organisés dans les SGAP de Paris et de Versailles. Ils ont permis d’améliorer significativement la part des policiers affectés en début de carrière dans leur région d’origine.
Une nouvelle étape sera franchie dans les trois années à venir avec la généralisation du système de recrutement déconcentré.
Mais la capacité à mieux allouer les emplois et les crédits repose de plus en plus sur votre action personnelle dans la préparation du budget de votre service.
La déconcentration de la gestion des crédits de fonctionnement a constitué un progrès incontestable, mais il faut aller plus loin dans cette voie.
Plus que jamais, je vous demande de vous engager personnellement à la mise en œuvre de ce dialogue de gestion pour permettre une véritable adéquation entre les priorités de la politique de sécurité et les ressources affectées aux services.
La préparation de vos budgets devra donc donner une priorité à la mise en œuvre d’une police de proximité tel que je l’ai fixée précédemment.
Concrètement, les actions concernant l’accueil du public, le développement de la police technique de proximité devront recevoir une priorité accrue.
La procédure budgétaire, ce qu’on appelle le dialogue de gestion qui associe vos services, ceux des SGAP et ceux de la centrale, sera modifiée pour que soient renforcées les capacités de dialogue entre le SGAP et vous.
La préparation de ces budgets doit être un moment privilégié du dialogue social. À l’exemple de ce qui est pratiqué dans les préfectures, il est nécessaire que deux réunions du comité technique paritaire départemental soient consacrées chaque année à la concertation sur le budget et son exécution.
5. La confiance : condition de la réussite
En ce qui concerne l’engagement des fonctionnaires, je sais leurs qualités, leur dévouement, et leur volonté de servir. Je sais aussi leur capacité à s’adapter aux évolutions de la délinquance et plus largement aux transformations de la société.
Ils en apportent quotidiennement la démonstration.
Ces qualités doivent trouver à s’exprimer dans le meilleur cadre fonctionnel et être reconnues de nos concitoyens. C’est pourquoi je suis particulièrement attaché, à la fois parce qu’elle permettra de revaloriser leur fonction, mais également parce qu’elle répond à un véritable besoin opérationnel, à ce que le corps de maîtrise et d’application puisse accéder progressivement à la qualité d’officier de police judiciaire.
Je veillerai à ce que cette mesure, qui passe par un texte de loi préparé en liaison avec le ministère de la justice, aboutisse dans des délais rapprochés.
Je souhaite aussi une rénovation profonde de l’exercice de l’autorité hiérarchique dans la police nationale. À cet égard, je voudrais être parfaitement clair.
La hiérarchie doit commander et exercer pleinement ses compétences.
Mais elle doit être aussi capable de promouvoir le commandement moderne au travers de règles de communication associées à l’organisation de la formation professionnelle.
Elle doit veiller en permanence à la qualité des rapports sociaux et humains ainsi qu’au suivi médical, psychologique et social des fonctionnaires. Elle doit associer les fonctionnaires à la réflexion sur les priorités et les évolutions.
Elle doit en un mot tirer toutes les conséquences de la richesse humaine que compte la police nationale.
Si ces importantes responsabilités sont dès à présent prises en compte lors de la formation initiale et continue des commissaires de police, ce n’est pas encore le cas pour le corps de commandement et d’encadrement, ni pour celui de maîtrise et d’application, pour lesquels j’ai demandé au directeur général de la police nationale la mise en place d’un dispositif analogue à celui des commissaires.
Il est en effet indispensable qu’à tous les niveaux de responsabilité, un effort soit fait pour communiquer en vue d’associer tous ceux qui sont placés sous vos ordres.
C’est une question de considération à l’égard des fonctionnaires autant qu’une question d’efficacité. Il faut que tous se sentent également motivés. C’est là-dessus que je jugerai les responsables car le résultat ne peut naître que de la motivation.
Le corollaire de cette police modernisée, plus proche des citoyens, la garantie de son succès tient également à la confiance que lui portent les Français. Pour qu’ils la lui accordent, nos concitoyens doivent être convaincus que leur besoin accru de sécurité publique ne sera pas satisfait au détriment de leurs libertés. Les policiers doivent donc avoir un comportement irréprochable et faire preuve d’un respect rigoureux de la légalité : la police doit être exemplaire, non seulement par son équipement et son activité, mais aussi par la qualité et la tenue des hommes qui la composent.
Car nous le savons, les missions de police, en raison de leur caractère coercitif, sont l’objet d’une vigilance particulière et parfois l’objet de critiques.
Or, de telles critiques peuvent, lorsque le doute s’est installé à l’égard du fonctionnement d’un service, nuire grandement à l’efficacité de son action, et lorsque les faits sont avérés, porter un préjudice considérable à l’image de l’institution policière.
Leur origine – à supposer qu’elles soient fondées – qu’elle réside dans un comportement personnel ou dans un dysfonctionnement de l’administration doit être analysée en vue d’en tirer les leçons et d’éviter leur renouvellement.
En effet, l’accroissement des moyens accordés par l’État à la police impose plus que jamais que celle-ci soit irréprochable et qu’elle travaille dans le respect le plus scrupuleux de la déontologie.
Afin de répondre à cette exigence, un projet de loi créant une instance nationale compétente, non seulement à l’égard de la police, mais de tous les services ayant un rôle en matière de sécurité – gendarmes, douaniers est en cours de préparation.
Je vous demande, dans l’attente de cette échéance, de faire preuve d’une très grande vigilance sur ces questions.
Les Français attendent de leur police, qu’elle réponde à leur besoin légitime de sécurité en s’adaptant à l’évolution de la société. C’est parce que nous sommes conscients de cette exigence que nous avons engagé les réformes qui s’avéraient nécessaires afin de mieux adapter cet outil qu’est la police nationale aux réalités modernes.
Le remise en question de l’organisation et du mode de fonctionnement de l’administration policière comme de toute institution d’ailleurs est une bonne chose, mais elle est aussi chose difficile.
Je sais toutefois, et vous l’avez d’ailleurs déjà montré, que votre sens du service public, votre engagement pour la défense des valeurs républicaines nous permettront d’atteindre les objectifs que je viens de vous fixer.
Je sais également que la difficulté ne sera pas pour vous un obstacle, car vous n’êtes pas de ceux que la difficulté rebute. Notre effort ne part pas de rien et il est un effort de longue haleine.
Vous tenez à ce que l’image de la police soit non seulement valorisante parce qu’elle démontre un savoir-faire reconnu, mais qu’elle révèle également une dignité sans faille comme les Français sont en droit de l’attendre de l’institution républicaine à laquelle vous avez l’honneur d’appartenir.
La police est un recours essentiel face à la perte des repères que nous constatons quotidiennement dans maints secteurs de la société, à la dégradation sociale dont témoigne l’extension de l’incivilité et de la délinquance et à l’affaiblissement du civisme.
Mais la politique que je viens de définir s’inscrit dans un dessein plus vaste : celui d’une société plus juste, où l’emploi doit être la grande priorité collective, d’une société moins inégalitaire, plus solidaire, d’une société plus citoyenne capable de faire appel au ressort moral de chacun. Dans ce cadre, vous avez toute votre place, reconnue à la mesure des mérites que vous saurez montrer pour faire comprendre et respecter la loi.
Vous serez, j’en suis sûr, dignes de l’attente et de l’espoir de nos concitoyens.
Ma confiance vous est acquise.
Je compte sur vous comme vous pouvez compter sur moi pour marquer des points dans cette grande entreprise qui nous réunit.