Déclaration de M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget, sur la réorientation des aides publiques en faveur de la rénovation du parc des logements existants, sur le maintien du programme de construction de HLM, Paris le 1er décembre 1997.

Prononcé le 1er décembre 1997

Intervenant(s) : 

Circonstance : 51ème congrès de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) à Paris les 1er et 2 décembre 1997

Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames, messieurs

Je tiens à vous remercier de m’avoir convié à votre congrès.

Il est d’usage dans ce type d’occasions de se limiter à quelques propos agréables et de circonstance, et de souhaiter aux congressistes une excellente poursuite des travaux qui les réunissent.

Je souhaite, bien au contraire, que notre rencontre soit l’occasion d’un véritable échange, en réponse aux questions que vous avez posées. Les propos que vous venez de tenir ne font que me renforcer dans cette intention. Je me propose donc de vous présenter mes remarques en trois points.

En premier lieu, je reviendrais un instant sur les décisions budgétaires prises par l’État depuis les élections.

J’ai le sentiment que, dès la déclaration de politique générale du 19 juin 1997 par Lionel Jospin, une inflexion a été marquée : la relance des aides de l’État au logement s’est faite en affectant des moyens nouveaux à la réhabilitation du parc existant. Contrairement à d’autres décisions de même type prises dans le passé, le Gouvernement n’a pas souhaité lancer de nouveaux programmes de construction neuve : l’objectif était en effet de répondre plus rapidement aux besoins de logements.

Cet effort en faveur de la réhabilitation des logements existants a porté non seulement sur le parc social, mais aussi sur le parc privé : les subventions aux propriétaires occupants, avec les primes à l’amélioration de l’habitat (PAH), ou aux bailleurs, avec les subventions de l’ANAH, ont aussi été accrues.

J’ajoute que le budget 1998 reprend ces orientations, en augmentant les moyens affectés aux programmes de réhabilitation, encore une fois sur la totalité du parc. De plus, un effort particulier a été fait en direction des travaux conduits dans le parc social grâce à un allégement du taux de la TVA.

Au total, le Gouvernement est donc bien allé dans le sens que vous appelez de vos vœux, à savoir la prise en compte du marché du logement dans sa totalité. Cet effort ne s’est pas fait au détriment du logement neuf : les moyens affectés aux constructions des HLM ont, pour la première fois depuis longtemps, été calculés sur les coûts réels et la totalité du programme prévisionnel. En matière d’accession, si, comme vous l’indiquiez, des mesures d’économies ont été décidées, le volume des logements pouvant bénéficier d’un prêt à taux zéro n’a pas été réduit.

Ma seconde remarque porte sur les orientations qui guident ces décisions.

Vous dénoncez depuis plusieurs années, tant au nom de la défense légitime de votre profession qu’au nom de l’intérêt général, la priorité excessive donnée en France au secteur du neuf par la politique du logement, au détriment de l’ancien. Pour l’essentiel, je partage cette analyse. Et je voudrais vous dire pourquoi.

Vous le savez, ce gouvernement accorde une priorité absolue à l’emploi. La politique du logement a de très fortes répercussions en termes d’activité dans le secteur du BTP, secteur moteur s’il en est.

Or, la construction neuve n’est plus, comme elle pouvait l’être dans les années 1950, la seule activité porteuse d’emploi dans ce secteur.

Actuellement, plus de la moitié de l’activité des entreprises du bâtiment, et en particulier des PME, provient de la rénovation et de la réhabilitation du logement ancien. Comme le soulignait encore la presse il y a quelques semaines, la réhabilitation du parc existant de logements est désormais le premier gisement d’activités dans le secteur.

Bien plus encore, les études économiques prouvent que le contenu en emploi d’un franc d’argent dépensé est supérieur – on dit parfois de 40 % – dans les travaux sur le patrimoine ancien que dans la construction neuve.

C’est pourquoi, soucieux comme vous de l’efficacité de la dépense publique, je suis prêt à examiner les conditions d’une réorientation progressive des aides publiques, du logement neuf vers le parc existant.

En effet, les professionnels que vous êtes rappellent régulièrement que le secteur du neuf et le secteur de l’ancien ne font qu’un seul marché. Dans de nombreux cas, l’acquisition d’un bien neuf est précédée de la revente d’un logement ancien. Il faut donc tenir compte de cette situation et en tirer les conséquences.

Le Gouvernement est prêt à avancer dans cette voie, ainsi qu’il l’a d’ores-et-déjà montré. Cette réorientation doit, de mon point de vue, être inspirée par une préoccupation constante : dépenser mieux, au service du logement et de l’emploi.

Cependant, je ne suis pas venu vous faire des promesses que je ne saurais tenir. Ce n’est pas la façon dont ce Gouvernement travaille, je serai donc franc avec vous.

Pour être crédible, toute réorientation des aides publiques ne peut être opérée qu’à effort budgétaire constant car la réduction des déficits publics est un impératif absolu. Il serait illusoire d’imaginer que l’État puisse étendre au logement ancien le dispositif actuel des aides au logement neuf.

Les spécialistes du logement que vous êtes le savent très bien : plus de déficit, c’est une dette publique et des taux d’intérêt plus élevés, et donc une accession à la propriété rendue plus difficile. Il nous faudra donc travailler à effort public constant.

C’est dans cet esprit qu’avec Dominique Strauss-Kahn, Jean-Claude Gayssot et Louis Besson, je compte avancer dans la voie d’une plus grande efficacité de la dépense publique en faveur du logement.

Ma dernière remarque répond à vos interrogations sur l’attitude du Gouvernement à l’égard de votre profession.

Je ferai ici un constat : dès lors que nous partageons une analyse commune sur la situation du marché du logement dans notre pays, il faudra que le Gouvernement puisse s’appuyer, dans chacun des secteurs du logement, sur des professionnels prêts à s’engager dans une nouvelle politique. Vous avez, de par votre fonction, un rôle éminent à jouer dans cette évolution.

Aussi, en conclusion de ce propos, je voudrais vous rassurer : j’ai bien entendu vos préoccupations et je ferai en sorte qu’elles soient prises en compte dans les décisions que nous prendrons lorsqu’il s’agira de définir de nouvelles mesures.

C’est sur cette proposition que nous poursuivions encore le dialogue, pour améliorer la politique du logement dans notre pays, que je vous propose d’ouvrir vos propres travaux.

Monsieur le président, mesdames, messieurs, je vous remercie.