Préface de M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, dans "Administration" de juillet-août 1997, sur l'activité des associations loi 1901.

Prononcé le 1er juillet 1997

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Média : Administration

Texte intégral

La vie associative

Tard venue dans la conquête des grandes libertés collectives en France, la liberté d’association a conféré à la République un renforcement vital, un enracinement définitif dans la vie de la nation.

Car la loi de 1901 n’a pas seulement établi la dernière des grandes libertés publiques fondamentales, elle a aussi instauré une rupture avec la méfiance séculaire de l’État à l’égard de l’initiative bénévole ou philanthropique et des corps intermédiaires.

Elle a permis la constitution d’organismes, d’institutions et de mouvements qui ont joué un rôle essentiel dans l’évolution de l’organisation sociale. Elle permet aux citoyens de s’associer pour organiser leurs loisirs, leur vie culturelle. Elle leur permet aussi de s’unir pour défendre leurs intérêts, représenter une cause ou promouvoir un idéal. Elle offre un cadre ou promouvoir un idéal. Elle offre un cadre à toute initiative pour se constituer en sujet de droit. L’éducation et les services sociaux sont les domaines d’élection des associations. En ce sens, la liberté d’association est, aujourd’hui, inséparable de la vitalité des institutions républicaines et de leur capacité à se renouveler sans cesse.

Dans la vie économique, la place des associations n’est pas moindre : plus de 200 milliards de francs, plus de 800 000 salariés en équivalent temps plein. Mais il y a mieux : un Français sur cinq travaille bénévolement dans une association. La loi de 1901 a fait preuve, depuis bientôt un siècle, d’une remarquable universalité. Ce patrimoine juridique mérite d’être précieusement conservé.

Les ministères sont tous, à des titres divers, en relation avec les associations, notamment avec celles qui sont investies de missions de service public ou des partenaires indispensables des services publics.

Le ministère de l’intérieur a peu de partenaires associatifs en propre mais joue, en revanche, un rôle particulier de « gardien » de la liberté d’association instaurée par la loi de 1901.

Ce sont, en effet, les préfectures qui reçoivent la déclaration des associations. S’agissant d’une compétence liée, elles ne jouent qu’un rôle de simple enregistrement, sauf à s’assurer que les dossiers de déclaration sont complets. Mais, en pratique, elles sont quotidiennement sollicitées par les associations pour fournir informations et conseils juridiques.

D’autre part, l’administration centrale instruit l’ensemble des procédures relatives à la reconnaissance d’utilité publique des associations.

À ce titre, le ministère de l’intérieur est quotidiennement au contact des grandes associations et fédérations d’association, dont il contrôle les comptes et qu’il conseille pour tout ce qui a trait à leur fonctionnement statutaire.

Sa connaissance de l’ensemble du milieu associatif et sa compétence en matière de droit et de comptabilité des associations placent ainsi le ministère de l’intérieur en position d’expert auprès de ses partenaires interministériels.

Si les « dérives » qu’ont connues certaines associations peuvent inquiéter l’opinion et appellent des mesures rigoureuses de redressement, cela ne saurait justifier une restriction de la liberté d’association. La réflexion est en revanche ouverte pour améliorer l’efficacité du cadre associatif. Elle pourrait s’appliquer notamment :
    - à la recherche d’une meilleure information des créateurs et adhérents d’associations sur les garanties juridiques que peuvent apporter les statuts de l’association. Généralement considérés comme une simple formalité, les statuts peuvent constituer une véritable charte des droits et obligations des sociétaires et de leurs dirigeants ;
    - au développement des outils de transparence financière des associations qui interviennent dans la « sphère publique » notamment celles qui reçoivent des fonds publics ou assurent des missions de service public ou font appel à la générosité publique ;
    - à la clarification des relations entre les collectivités publiques et les associations.

Les conclusions d’une telle réflexion contribueraient à la modernisation du cadre associatif. En consacrant ce numéro aux associations, la revue Administration ouvre un débat qui participera utilement à cette modernisation. Je m’en réjouis, car ces réflexions, en contribuant à la vitalité de nos associations, ne peuvent que fortifier les valeurs républicaines qui nous rassemblent.