Interview de M. Georges Jollès, vice-président du MEDEF, dans "La Tribune" du 17 septembre 1999, sur la mise à contribution de la Sécurité sociale et de l'UNEDIC pour le financement des 35 heures et la mise en cause du paritanisme pour l'assurance chômage.

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Média : La Tribune

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La Tribune : Le gouvernement projette de mettre à contribution l'UNEDIC et la Sécurité sociale pour le financement des 35 heures. Selon le projet en cours, leur participation serait à hauteur de 40 milliards de francs, dont 8 à 13 milliards dès l'an 2000. Quelle est votre réaction ?

Georges Jollès : S'il y a un point sur lequel les partenaires sociaux sont unanimes, c'est bien sur le financement des 35 heures. Les positions des partenaires sociaux ont d'ailleurs été clairement exprimées à l'État, quand l'UNEDIC et la Caisse nationale d'assurance maladie ont délibéré sur le projet de loi 35 heures. Elles sont unanimes et sans ambiguïté : c'est non. Pour l'instant, nous n'avons été saisis d'aucun projet. Nous ne savons pas encore si l'État ira jusqu'au bout de cette intention, qu'il a – il est vrai – fortement affirmée. S'il le fait, cela serait de sa part un coup de force.

La Tribune : Pourquoi y êtes-vous opposés ?

Georges Jollès : Il faut aller jusqu'au bout du raisonnement et mesurer les conséquences qui ne manqueront pas de peser tant pour les professions de santé, les chômeurs, que pour les entreprises. Prenons la Sécurité sociale, où les partenaires sociaux ne décident pas du niveau des recettes. En 1999, la branche maladie va rester déficitaire, avec une dérive des dépenses de santé qui pourrait être de l'ordre de 15 milliards de francs. Dans ces conditions, comment imaginer qu'on prélève des recettes sans prélever aussi sur les dépenses, sauf à laisser filer le déficit ? Faire participer la Sécurité sociale au financement des 35 heures, c'est dire aux professions de santé : Messieurs, c'est vous qui allez financer les 35 heures ! Cela sera autant de prélevé sur les hôpitaux, les médecins, les infirmières ou les kinésithérapeutes… Pour l'UNEDIC, les partenaires sociaux sont maîtres à la fois des recettes et des dépenses. Si l'État leur impose une charge complémentaire, ils devront baisser les indemnités versées aux chômeurs. Ou augmenter les cotisations, ce qui est totalement exclu. Or, le nombre des demandeurs d'emploi étant en baisse, il serait plutôt logique que la réduction de dépenses qui en découle entraîne une baisse des cotisations : le patronat a bien accepté d'augmenter les cotisations, par le passé, quand le chômage augmentait. Qui plus est, si l'État intervient, je crains que cela ne remette en cause le principe même du paritarisme à l'UNEDIC. Et que cela ne se traduise par un retrait des partenaires sociaux.

La Tribune : Quelle stratégie allez-vous adopter dans les prochaines semaines ?

Georges Jollès : Il s'agit d'abord de prendre connaissance du contenu du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, afin d'avoir des précisions sur le dispositif. Le conseil exécutif du Medef sera de toute façon saisi pour en tirer les conséquences.