Interview de M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire de la ville et de l'intégration et président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, dans "Nice-Matin" du 14 mai 1997, notamment sur les résultats du "Plan Lycée Réussite", le rôle de la région dans la formation professionnelle des jeunes et les objectifs de la manifestation le "Printemps des lycées".

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Intervenant(s) : 
  • Jean-Claude Gaudin - ministre de l'aménagement du territoire de la ville et de l'intégration et président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur

Média : Le Var Nice matin - Nice matin - Presse régionale

Texte intégral

Nice Matin : La région Provence-Alpes-Côte d'Azur a fait de l'éducation une de ses grandes priorités. Le Plan Lycée Réussite en atteste. Quel est le bilan de cette opération et faut-il déjà songer croissance des effectifs scolaires oblige, au lancement d'un nouveau plan d’urgence pour les lycées de la Côte ?

Jean-Claude Gaudin : En effet, depuis 1989, l'éducation est pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur la priorité des priorités. Pour donner aux jeunes les meilleures chances de réussite, les élus régionaux ont décidé à l'unanimité de lancer un plan d'envergure : le Plan Lycée Réussite.

Les résultats sont aujourd'hui à la hauteur de cette ambition. Jugez-en plutôt : 29 lycées neufs dont 14 pour la seule académie de Nice, et au total,153 lycées agrandis, rénovés, réhabilités ou en cours de travaux. Le tout représente un investissement important de 6,7 milliards de francs, une bouffée d'oxygène pour les entreprises du bâtiment de la région.

Ainsi à Nice, le lycée hôtelier est l'un des symboles les plus aboutis de l'ambition de ce Plan Lycée Réussite. Les jeunes ont là toutes les chances pour apprendre leur futur métier. Le lycée Pierre-Sola, en cours de reconstruction en est un autre exemple, pour ne citer que ceux-là.

Quant à la croissance des effectifs, elle a été dès le départ pour la région une donnée primordiale. Comment peut-on, dans ces conditions, parler d'un plan d'urgence, alors même que les besoins exprimés dans les divers bassins d'éducation ont été étudiés, pris en compte et que tous les ajustements sont examinés, chaque année, avec soin, en liaison avec les rectorats ?

La même réflexion à long terme a prévalu dans l’adoption d’un plan de maintenance destiné à préserver l'avenir de ces bâtiments et à garantir la sécurité de leurs occupants. Nous ne voulons pas que tout soit à recommencer dans dix ans. C'est là tout l'intérêt de la décentralisation qui conjugue efficacité, proximité et gestion optimale des fonds publics. J'ai toutes les raisons d'être fier lorsque certains de mes collègues, présidents de région, viennent s’informer sur notre programme Presto, sécurité totale des machines-outils.

Nice-Matin : Les Alpes-Maritimes, dans le cadre de ce Plan Lycée Réussite, ont été dotées de plusieurs nouveaux lycées. Un établissement neuf est d'ailleurs programmé dans la région de Vence et, par ailleurs, le projet d'un lycée de montagne dans l'arrière-pays niçois a été évoqué à plusieurs reprises déjà. Qu'en est-il ?

Jean-Claude Gaudin : Le futur lycée polyvalent de Vence accueillera pour sa part 1 000 élèves. Le choix de Vence relève pour nous d'un souci d'équilibre et d'aménagement du Moyen-Pays. Nous restons bien sûr attentifs aux besoins d'accueil qui pourraient s'exprimer dans d'autres bassins d'éducation de la région niçoise et notamment dans le zone de montagne du département.

Nice-Matin : La loi quinquennale donne à la région de nouveaux pouvoirs en matière de formation professionnelle. Quel est, en la matière, la politique de la région ?

Jean-Claude Gaudin : C'est vrai depuis la loi quinquennale du 20 décembre 1993. Les régions sont les architectes de l'action publique pour la formation professionnelle des jeunes.

Elles sont eu cœur du réseau des acteurs de la formation professionnelle, bien placées pour assurer la cohérence de l’ensemble des actions de formations.

En région Provence-Alpes-Côte d’Azur, le Plan régional de formation professionnelle des jeunes a été élaboré en étroite collaboration entre la région, l'État, les rectorats et les partenaires sociaux et économiques. Ce plan a été approuvé à l'unanimité le 24 octobre 1996.

La première convention annuelle d’application s’articule autour de cinq principes fondamentaux : la programmation concertée des quatre voies de formation des jeunes (lycées professionnels, apprentissage, formation continue des jeunes, contrats de qualification) ; la poursuite de l'engagement contractuel avec les branches professionnelles ; le suivi de l'insertion des jeunes à l'issue de leur formation ; la validation des acquis. Le cinquième principe concerne l’information des jeunes et de leurs familles sur les métiers et les formations. Des actions très concrètes sont mises en place pour œuvrer en ce sens. Le forum « Cap sur les métiers », du 3 au 5 avril dernier à Nice, s'inscrivait : dans cette stratégie. Ce forum a accueilli plus de 25 000 visiteurs, c'est dire combien le besoin existe...

Nice-Matin : Le ministre de l'éducation nationale vient de dévoiler sa réforme de l'enseignement supérieur. La région est-elle susceptible de la relayer ou, tout du moins, de contribuer à une mise en place rapide - comme le souhaite le ministre - et durable de cette réforme ambitieuse ?

Jean-Claude Gaudin : Dans le cadre du plan Université 2000 et du Contrat de plan État-Région 1994/1998, les régions ont démontré la grande attention qu'elles portent à l'enseignement supérieur par l'effort important réalisé pour les investissements.

À la suite de la présentation par le ministre de l'éducation nationale de la réforme de l'enseignement supérieur, les présidents des conseils régionaux ont fait part de leurs observations et de leurs propositions.

Les régions souhaitent que deux données indispensables soient prises en compte.

L'État doit opérer une péréquation nationale de ses dotations entre les régions. Il faut, en effet, absolument éviter un risque de fracture « territoriale » résultant des possibilités financières inégales des régions, ce qui était le cas dans le premier plan Université 2000.

Il est souhaitable que l'ensemble des régions puisse décider des filières universitaires et de leurs implantations. La possibilité d'expérimenter dans des régions un véritable transfert de compétences en matière universitaire devrait pouvoir s'effectuer sur la base du volontariat. Il devra s'accompagner d'un transfert de ressources nouvelles comme pour les transports collectifs ferroviaires régionaux.

Les présidents de région souhaitent donc naturellement une concertation sur ces différents points avec le ministre de l'éducation nationale, préalablement à une mise en place effective de cette réforme.

Nice-Matin : Vous avez lancé en 1993 le « Printemps des lycées ». Au-delà de l’aspect ludique d’une telle manifestation, quel est l’objectif de ces mini olympiades lycéennes, sans exemple en France ?

Jean-Claude Gaudin : Sans exemple en France ? Ce n'est plus tout à fait vrai. Car le Printemps des lycées, créé dans notre région, a fait des émules. La région des pays de la Loire, invitée au Printemps des lycées de 1993, a été à tel point conquise que depuis deux ans, elle fait aussi son printemps !

En créant le Printemps des lycées, nous avons voulu imprimer notre volonté de dépasser notre rôle de simple bâtisseur pour développer des actions d'animation de la vie lycéenne.

Le Printemps des lycées est un rendez-vous qui a été plébiscité par les lycéens et les enseignants dès sa première édition.

Mais ce rendez-vous n'est pas seulement ludique. Il se veut un vecteur de cohésion et d'émulation au sein de chaque établissement. Un moment fort où 4 000 jeunes, toute une classe d'âge se rencontre, se produit dans les disciplines artistiques ou sportives. La joie y est de mise depuis cinq ans et, personnellement, je ne manquerai pas ce rendez-vous pour un empire !

Le printemps des lycées, c'est enfin une occasion exceptionnelle d'échanges entre lycéens : les Hauts-Alpins de Briançon ou de Gap côtoient les Azuréens de Nice ou de Menton, les Marseillais rencontrent les jeunes d'Avignon ou de Digne, bref, c'est le moment pour chaque lycéen de prendre conscience de la dimension régionale. Nos lycéens pourront aussi côtoyer d'autres jeunes venus de plusieurs pays de la Communauté européenne. Cette année en effet, les jurys seront renforcés par la présence de jeunes venus d'Espagne, d'Italie, d'Allemagne, etc.

Le Printemps des lycées, véritable festival des arts et des sports, n'est pas le seul événement d'animation de la vie lycéenne initié par la région. « Entreprendre au lycée » en est à sa sixième édition. Il s'agit là de permettre aux lycéens de créer de petites structures qui fonctionnent comme de réelles entreprises. Le but, bien sûr, est de faciliter les contacts entre les jeunes et l'entreprise, de « désacraliser », ce monde de l'entreprise tout en les initiant aux règles de la vie professionnelle.

Nice-Matin : Malgré les limitations qu'impose la loi, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur est-elle en mesure de satisfaire les doléances des établissements privés sous contrat de l'académie de Nice ?

Jean-Claude Gaudin : Les lycées privés sous contrat d'association avec l'État accueillent sur les six départements de la région 33 000 élèves dont 8 000 pour l'académie de Nice.

Les lois de décentralisation ont conféré aux régions la prise en charge du fonctionnement matériel des lycées privés sous contrat d'association.

En 1990, le conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur a décidé d'aller plus loin dans un cadre strictement légal et de fournir les conditions matérielles de la réussite à tous les jeunes lycéens, quel que soit le mode d'enseignement choisi par les familles.

L'implication de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur en faveur des lycées privés s'est vue élargie aux équipements pédagogiques, en appliquant le principe de parité avec les lycées publics et en participant aux travaux de mise en sécurité des locaux. Les lycées privés de l'académie de Nice ont largement bénéficié de cette action volontariste de la région puisque 100 millions de francs ont été attribués à ce double titre depuis 1990.