Texte intégral
Conférence de presse sur la politique d’intégration
J’aimerais tout d’abord remercier M. Hamlaoui MEKACHERA, délégué à l’intégration, et M. Jean GAEREMINCK, conseiller d’État.
Le rapport de qualité qu’ils ont remis, suite à l’intervention du Président de la République le 14 juillet dernier, est à l’origine de la relance de la politique d’intégration que j’ai le plaisir de vos présenter aujourd’hui avec Éric RAOULT.
Cette relance témoigne de la ferme volonté du gouvernement de répondre aux nouvelles exigences de l’intégration.
Cette relance est nécessaire. Il y va de notre cohésion sociale, de l’équilibre et de l’avenir de notre pays.
La politique d’intégration des populations d’origine immigrée en France, vous le savez, est apparue après-guerre dans les années de prospérité des Trente Glorieuses.
Toutes les grandes structures d’accueil des étrangers et les grands organismes publics chargés de l’intégration, ont été créés à cette époque pour répondre aux flux migratoires et aux nécessités économiques du moment.
Les mutations économiques et l’évolution des flux migratoires nous obligent aujourd’hui à des adaptations et à une réaffirmation du « creuset français ».
L’évolution du contexte économique, tout d’abord, marquée principalement par la montée du chômage, a des effets défavorables sur l’intégration.
Un de ces effets parmi d’autres, selon le rapport du Haut Conseil à l’intégration remis récemment au Gouvernement par son président Marceau LONG, est une certaine aggravation des tensions entre les Français et les populations issues de l’immigration.
Ces crispations nourrissent le discours de haine et d’exclusion d’un parti xénophobe et raciste.
Aujourd’hui, plus que jamais, pour éviter de transformer les immigrés en boucs émissaires, il nous faut donc mener une politique d’intégration forte, garante de la cohésion sociale.
Lutter contre le racisme et l’extrême-droite, réaffirmer les principes républicains d’égalité et de fraternité, c’est aussi le sens de cette relance.
La deuxième évolution que doit prendre en compte aujourd’hui la politique d’intégration est celle des flux migratoires.
D’une part, la provenance des flux a changé. Ceux en provenance d’Europe et d’Algérie se sont réduits en faveur de l’Asie et du reste de l’Afrique.
Actuellement environ 30 % des immigrants viennent d’Europe (Turquie comprise), 40 % d’Afrique et 12% d’Asie.
D’autre part, la nature des flux migratoires, elle aussi, a changé. Le travail, en tant que motif d’immigration a été remplacé par l’asile politique et le lien familial.
À partir de 1974, le recrutement des travailleurs est devenu très faible, alors que le regroupement familial a pris de l’importance.
Face à ces évolutions, il nous faut donc relancer le « creuset français » et la tradition d’accueil de notre pays, qui ont permis à des générations d’immigrés de devenir français.
Je vous rappelle qu’en 1986, le nombre de personnes issues de l’immigration postérieure à 1900, était estimé à plus de 10 millions et demi.
Renforcer le « creuset français », c’est tout d’abord réaffirmer les principes dont procède notre modèle d’intégration.
Ce modèle repose sur une démarche individuelle, dans laquelle ne sont pris en compte ni la religion ni la race, ni le sexe. Il rejette donc aussi bien le racisme que le communautarisme.
Les droits et les devoirs qui découlent de ces principes doivent faire l’objet d’une meilleure information des populations d’origine immigrée.
L’intégration est aussi une politique qui ne concerne que les étrangers séjournant régulièrement en France. L’immigration irrégulière contre laquelle le Gouvernement lutte, nuit au processus d’intégration.
La lutte contre l’immigration irrégulière, c’est en effet ce qui nous permet de pratiquer une politique généreuse et ouverte de naturalisations.
Relancer l’intégration, c’est aussi adapter nos structures d’accueil et nos actions aux nouvelles caractéristiques des populations immigrées.
Ainsi, et par exemple, les foyers qui étaient à l’origine destinés aux travailleurs migrants a résident provisoirement en France, doivent être progressivement transformés en logement social, de manière à pouvoir accueillir les familles.
La réforme du un neuvième qui vient d’être lancée à la suite du rapport parlementaire de M. Henri CUQ, et qui vise à favoriser la mixité dans le logement social, va dans ce sens.
Pour s’adapter aux nouvelles populations immigrées qui, de plus en plus, ne sont pas francophones, il faut également développer plus qu’avant l’apprentissage du français.
Relancer le « creuset français », c’est enfin renforcer et soutenir les acteurs qui œuvrent au quotidien, en premier lieu les associations, véritable cheville ouvrière de l’intégration.
En effet, si l’école reste le vecteur fondamental de l’intégration, le rôle des associations n’a cessé de croître et de s’affirmer au fil des années. Il faut encourager et amplifier cette tendance.
Dans cet esprit, une réforme du fonctionnement du FAS, qui est le principal partenaire des associations, a été engagée.
Cette réforme vise à ce que l’organisme soit encore plus proche du terrain et serve encore mieux les associations.
Les procédures budgétaires ont ainsi été améliorées de manière à raccourcir les délais de paiement des subventions accordées aux associations.
L’intégration, Mesdames, Messieurs, est en œuvre de longue haleine, construite pierre après pierre par l’État, les associations et les acteurs de terrain.
Les 18 heures que va maintenant vous présenter Éric RAOULT, sont de nouvelles pierres apportées à cet édifice que le Pacte de relance pour la ville a déjà fortement consolidé et rénové.
Ce Pacte concerne en effet les quartiers les plus en difficulté où vivent, vous le savez, de nombreuses populations d’origine immigrée.
En traitant de tous les aspects de la vie quotidienne dans les quartiers, du logement à l’emploi en passant par l’accompagnement scolaire et la vie associative, le Pacte intervient dans la plupart des domaines qui sont au cœur du processus d’intégration.
Les mesures aujourd’hui annoncées complètent le dispositif et permettent à notre pays de continuer à pratiquer, jour après jour, sans tapage, une politique d’intégration conforme aux plus belles de nos valeurs républicaines. Le modèle français d’intégration est plus que jamais exemplaire.
Conférence de presse
Ce plan pour l’intégration est, tout d’abord, cohérent avec le projet de loi Debré tendant à une meilleure maîtrise des flux migratoires.
Si il y a un lien, dans notre esprit, entre immigration et intégration, il n’y a certainement pas confusion.
D’ailleurs, nos concitoyens ne s’y trompent pas. Des sondages récents l’ont fait clairement apparaître, dans leur très grande majorité, ils partagent le souci du Gouvernement d’un équilibre entre la maîtrise des flux migratoires et l’intégration.
Enfin, notre démarche n’est pas juridique mais pratique. Il s’agit de renforcer les moyens humains et financiers de l’intégration.
Mais notre démarche est originale puisqu’elle repose sur la construction, d’un parcours d’intégration. Je vous ferai remarquer à ce propos, que si ma communication en conseil des ministres est la cinquième en 15 ans à aborder ce thème de l’intégration, c’est la première à souligner la cohérence du parcours de l’intégration à la française, tout en renforçant beaucoup des moyens mis à disposition.
Sans reprendre tous les dispositifs, vous me permettez de dire quelques mots sur quelques étapes essentielles.
1° Le début du parcours
Comme je le dis souvent, l’intégration repose sur une double volonté : une volonté de faire une place pour les étrangers résidant durablement dans notre pays et une volonté de l’étranger de partager notre système de valeur.
C’est pour cela que nous avons mis l’accent sur la connaissance des droits et des devoirs en France au moyen d’un véritable contrat d’intégration.
C’est pour cela, aussi, que tout doit être mis en œuvre pour disposer d’un crédit important d’heures pour apprendre le français (jusqu’à 500 heures).
2° Et puis, il y a l’intégration, qui progresse
Nous avons mis très concrètement l’accent sur les trois facteurs essentiels d’intégration, que sont : l’école, le logement et l’emploi.
Sans être long, je retiendrai pour l’école les mesures concernant l’accompagnement scolaire, c’est-à-dire, le soutien, l’aide au devoir, les activités de l’éveil.
Il s’agit de donner leur cohérence aux actions d’accompagnement scolaire, avec les projets éducatifs des établissements.
Éducation nationale et associations n’ont pas toujours été prêts, pour cela. Aujourd’hui, ils le sont. Ensuite, nous avons décidé de passer en deux ans, de 90 000 élèves à 160 000 bénéficiant de ce soutien.
Par ailleurs, l’enseignement des langues et cultures d’origine sera réformé de telle manière qu’il soit dispensé par des enseignants diplômés et parlant le français. Enfin, 10 internats de semaine seront créés à compter de la rentrée prochaine pour accueillir à la demande des familles, les écoliers et collégiens qui, sans cela auraient été exposés à l’échec scolaire.
Pour le logement, il s’agit, par exemple, en cinq ans, de transformer ou réhabiliter les foyers de travailleurs migrants les plus dégradés. Pour cela, nous nous engageons à 360 MF par an.
S’agissant de l’emploi, nous avons décidé d’accroître les actions de parrainage destinées aux jeunes de milieux défavorisés afin de passer de 10 000 jeunes en 1997 à 30 000 en 1999.
3° Nous n’avons pas non plus négligé les à-coups de l’intégration qu’il faut surmonter
Vous savez que le Président de la République est très sensible aux discriminations, thème qu’il avait évoqué lors du conseil des ministres du 6 novembre dernier.
C’est pour cela que nous avons décidé :
- de créer des médiateurs à la jeunesse dans 10 départements significatifs ;
- de faire passer de 90 à 200 sites, le réseau des femmes relais ;
- ou encore, par exemple, de négocier des conventions de prévention de discrimination avec des syndicats professionnels, dans les trois domaines, du logement, de l’emploi et des loisirs.
Le délégué à l’intégration, M. Hamlaoui Mékachéra, a d’ores et déjà entrepris ce travail, en réunissant les associations intéressées et les professionnels des établissements de loisirs, particulièrement les boîtes de nuit. Son travail avance.
4° Enfin, il y a l’aboutissement de ce parcours d’intégration qu’est la naturalisation
C’est là encore un sujet sensible évoqué par le Président de la République, particulièrement pour ce qui concerne les délais.
Nous nous sommes donnés les moyens de passer d’un délai moyen de deux ans, et malheureusement souvent très supérieur, à un an dont six mois de constitution de dossier en préfecture, et six mois dans mes services.
Voilà, brossé à grand trait l’ensemble de ce dispositif qui doit permettre d’accompagner avec une plus grande efficacité les démarches individuelles qui s’inscrivent dans un projet d’intégration.