Texte intégral
Discours de monsieur Jean-Claude Gaudin
L’aménagement du territoire : le plan pour le monde rural et le schéma national d'aménagement et de développement du territoire.
Ces deux dossiers, aujourd'hui arrivés à maturité, déboucheront cette année, et feront de 1997 un grand cru pour l'aménagement du territoire.
En ce début d'année, Mesdames, Messieurs, plutôt que de vous exposer d'une traite et par le menu le programme d'action de mon ministère pour l'année qui commence, je vais m'attacher à vous exposer ce qui, pour moi, est l'essentiel, c'est-à-dire ce qui doit changer dans la vie quotidienne de nos concitoyens, qu'ils habitent en ville ou à la campagne :
- comment va s’améliorer, grâce au Pacte de Relance pour la ville, la vie des habitants des quartiers en difficultés ?
- comment sera facilitée, grâce au plan pour le monde rural, la vie des habitants des campagnes ?
- enfin, quels sont les enjeux concrets du schéma national d’aménagement et de développement du territoire ?
La ville tout d’abord.
L'année 1997 est celle de la mise en application du Pacte de Relance pour la Ville.
Grâce au travail mené d'arrache-pied par les services placés sous mon autorité, tout le [mot illisible] législatif et réglementaire prévu par le Pacte est aujourd'hui opérationnel.
Il aura ainsi fallu moins d'un an - peut-être un record - pour mettre sur pied ce qui constitue, je vous le rappelle, le dispositif le plus important, le plus novateur, le plus global jamais mis en œuvre dans le domaine de la politique de la ville.
Il y avait urgence, et nous avons voulu, par notre rapidité, montrer à tous nos concitoyens des banlieues difficiles que, loin d’être oubliés, ils étaient au centre de notre priorité.
Je suis heureux que nous ayons réussi avec Éric Raoult à répondre à cette urgence.
Cependant, le plus important reste maintenant à faire, puisqu'il s'agit de donner corps au dispositif et de changer la vie des quartiers.
Car le travail législatif et réglementaire réalisé en 1996 n'a consisté qu'à façonner des outils. Ce qui compte maintenant, c'est de les utiliser sur le terrain, de mobiliser tous les acteurs, de les conseiller, de les inciter. C'est mon défi, c'est notre défi pour 1997.
Grâce à cette mobilisation générale à laquelle : nous appelons, il faut en 1997 que chaque habitant des quartiers les plus défavorisés voit sa vie s'améliorer : parce qu'il pourra y trouver un travail ; parce qu'il verra une activité économique et commerçante renaître dans un cadre de vie plus agréable ; parce que ce cadre de vie sera relié au centre-ville par des transports améliorés ; parce qu'il s'y sentira désormais en sécurité et pourra y trouver les services administratifs et sociaux dont il a besoin.
Il faut aussi qu'en 1997 nous redonnions l'espoir aux jeunes grâce à la mise en œuvre des emplois de ville qui, en offrant un travail stable, apportent aux jeunes une formation et leur permettent de reprendre confiance en eux, de façon que, comme l'a souhaité le Président de la République, 1997 soit l'année de leur emploi.
J'invite donc à se mobiliser sur la création de ces 100 000 emplois de ville toutes les collectivités territoriales et tous les partenaires, associations et entreprises concessionnaires.
Voilà ce qui doit changer cette année dans les banlieues.
C'est à l'effectivité de ces changements que vous pourrez apprécier la réussite du Pacte de Relance.
Je suis pour ma part confiant. Je ne veux pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Mais la mise en œuvre des zones franches urbaines, dont la présentation il y a quelques mois suscitait scepticisme et raillerie, donne tous les signes avant-coureurs du succès. L’intérêt manifesté par les chefs d’entreprise montre que nos choix étaient les bons.
J’en viens à l’aménagement du territoire, en commençant par le plan pour le monde rural.
Ce plan, nombre de nos concitoyens l’attendent avec impatience.
Alors, qu'il me soit permis ici de dissiper toutes les inquiétudes : le plan pour le monde rural, qui constitue, à mes yeux, une véritable priorité politique sera bel et bien mis en place cette année, et son volet législatif sera présenté au Parlement dans les mois qui viennent.
Il permettra de parer au déclin de certains territoires ruraux, en leur offrant les moyens d'un nouveau développement. Il devra ainsi assurer l'égalité des chances à l'ensemble des Français qui vivent à la campagne.
Bref, avec la sortie de ce plan, 1997 sera au monde rural ce que 1996 a été à la ville.
Les mesures qu'il contient interviendront dans quatre domaines : le maintien et le développement des activités, la présence de services publics de qualité, le logement, et enfin l'organisation du territoire, c'est-à-dire la mise en place d'un cadre adéquat pour fédérer les volontés autour d'un projet local.
Au travers des interventions dans ces quatre domaines, quel est l'objectif poursuivi ?
C'est de faire en sorte qu'une personne qui, par choix ou par nécessité, vit à la campagne n'en soit pas handicapée dans son quotidien.
C'est de permettre aux Français qui désirent s'installer à la campagne de le faire sans craindre de s'y trouver isolé, coupé de toute activité, de tout emploi, de tout service public.
Ce plan doit aussi contribuer à préserver les richesses naturelles et culturelles que recèlent les campagnes.
Il doit enfin, et je m’arrêterai là, offrir aux élus, aux entrepreneurs, aux associations qui veulent pouvoir coopérer pour mettre en valeur leur territoire, des réponses simples et appropriées.
Bref, vous le voyez, ce plan traite de questions proches des préoccupations de chacun.
L'aménagement du territoire n'est pas en effet qu'une affaire de délocalisations entre Paris et le désert français ; ce n'est pas non plus qu'une affaire de fonds ou de subventions, auxquels on a trop porté attention en 1996 au moment du vote du budget.
L'aménagement du territoire, débarrassé de sa gangue technocratique, c'est un projet politique.
C'est faire des choix qui concernent le quotidien de chaque citoyen c'est aussi déterminer quelle société nous voulons pour les années à venir.
C'est, pour cette raison, une politique du long ternie qui, je vous l'accorde, s'accommode plus ou moins bien d'échéances électorales proches.
C’est néanmoins une politique nécessaire.
Il est temps en effet de prendre en compte, dans l'organisation de notre territoire, les évolutions auxquelles notre société est confrontée. Je pense principalement à la construction européenne, à la mondialisation de l'économie ou encore au développement des techniques d'information et de communication.
C'est dans cet esprit qu'a été élaboré le schéma national d'aménagement et de développement du territoire que je présenterai cette année au Parlement, et dont j'ai déjà saisi d'un avant-projet l'ensemble de mes collègues du gouvernement qui doivent me remettre leurs propositions dès demain.
Ce schéma national, qui n'a rien moins pour objectif que de dessiner une France plus équilibrée, plus harmonieuse et mieux ancrée au cœur de l'Europe, pose les conditions d'un développement de tout le territoire, de tous les territoires, de manière à éviter l'exclusion territoriale et une France à plusieurs vitesses.
En d'autres mots, ce schéma national doit permettre d'éviter que d'autres pactes de relance de la ville ou d'autres plans pour le monde rural soient un jour nécessaires.
Il vise donc à créer des conditions favorables au développement de tous les territoires, en rompant avec la conception simplement redistributrice, redistributrice des activités de certains territoires vers d'autres territoires, qui a trop longtemps inspiré la politique d'aménagement du territoire.
L'équilibre territorial n'en est pas négligé pour autant, et de nombreuses dispositions contribueront à dynamiser l'espace rural et à aménager les villes.
Enfin, une importante partie du schéma sera consacrée à l'organisation du territoire. Sans remettre en cause l'échelon communal auquel nous sommes tous attachés, mais qui est par trop émietté, il est en effet indispensable d'envisager de nouveaux cadres territoriaux mieux adaptés au développement.
Ces cadres territoriaux me semblent devoir être les agglomérations dans les zones de forte densité et les pays dans les zones de faible densité.
Il faudra donc renforcer la coopération intercommunale, et la création, il y a quelques jours à Alençon, à l'initiative de mon ami Alain Lambert, de la onzième communauté urbaine, en est un bon exemple. C’est dans cette voie qu’il faut persévérer. C’est ce type d’initiative que le schéma national doit encourager.
Mesdames, Messieurs, l'année 1997, comme je l'affirmais au début de mon propos, sera importante pour l'aménagement du territoire.
Après une année consacrée aux quartiers en difficulté et à la Corse, je vais en effet m'attacher à venir en aide aux campagnes et à doter notre territoire des moyens de son développement pour les années à venir.
Ces objectifs prioritaires pour 1997 ne tendent pas seulement à satisfaire une exigence d'équité et de parité entre la ville et la campagne.
Ils permettront également de redonner à l'aménagement du territoire toute sa dimension, qui est celle d'un projet politique pour le pays tout entier.
Je vous souhaite à tous et à toutes une très bonne année.
Intervention de monsieur Eric Raoult
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs,
Soyez les bienvenus, Avenue de Ségur, où, avec Jean-Claude Gaudin, je suis heureux de vous accueillir, cette année encore, à l'occasion de la cérémonie traditionnelle des vœux.
L'année dernière, je vous avais dit nos projets et nos ambitions. Une semaine après, Alain Juppé vous présentait le Pacte de Relance pour la Ville.
1995 avait été l’année de l’attente.
1996 a été l’année de la mise en place.
1997 sera l’année de la mise en œuvre de la relance et de la confiance retrouvée.
Le Président de la République n’a pas dit autre chose, le soir du 31 décembre. Il a souligné que 1996 avait été une année difficile, mais qu’il restait confiant parce que la France change.
Je sais bien que la confiance ne se décrète pas. Mais je sais aussi que l'on est plus souvent trompé par la défiance que par la confiance.
C'est ce pari sur la confiance qu'avec Jean-Claude Gaudin nous avons entrepris de relever tout au long de l'année 1996. Confiance urbaine, confiance républicaine et confiance en nous-mêmes.
* Confiance urbaine
C'est cette confiance dans notre modèle urbain, que j'ai représentée à Istanbul, au printemps dernier, lors de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable.
Parce que la haine, l'exclusion et la relégation, ne résument pas la réalité des banlieues. J'ai toujours dit que ces quartiers, c'étaient avant tout des hommes et des femmes, leurs parcours et leurs espoirs. La politique de la ville, c'est de l'humain plus que de l'urbain.
Cela veut dire de l’activité. Nous l’avons fait avec la création des zones franches qui se mettent en place depuis le 1er janvier. Nous avons travaillé dans le plus large consensus.
Aujourd'hui, nous en recueillons les fruits. En simplement 15 jours, plusieurs dizaines d'entreprises se sont déjà installées et plus de 1 000 se sont portées candidates.
Je souhaite que la même dynamique s'enclenche pour les emplois de ville. Nous partons d'un acquis de près de 5 000 emplois fin 1996, pour un objectif de 50 000 en fin d'année 1997.
Sachez que nous mettrons tout en œuvre pour répondre à l'attente des jeunes des quartiers. Certains sont aujourd'hui parmi nous. Ils peuvent porter témoignage de l'utilité de ces emplois de ville.
Je n'oublie pas, non plus, le rôle des associations dont les financements sont désormais stabilisés.
Cela veut dire aussi de la sécurité, avec une vraie mobilisation de moyens supplémentaires sur le terrain. Cela s’est fait en étroite collaboration avec mon collègue Jean-Louis Debré.
La partie est engagée et le sentiment d’abandon recule.
Cela veut dire, enfin, une réaffirmation de notre tradition urbaine, de villes ouvertes, diverses et accueillantes. Plusieurs d’entre vous, qui m’ont accompagné aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne ont pu mesurer ces différences.
Vous pouviez croire, il y a un an, que je m'illusionnais sur l'efficacité de notre Pacte de Relance. Vous étiez habitués, pendant des années à des effets d'annonces puis des déceptions. En 1996, vous avez été nombreux à m'accompagner sur le terrain. Vous avez pu rencontrer des associations et des élus qui en veulent.
Pour cela, pour cette nouvelle image des banlieues que vous avez donnée à travers vos médias, je tiens à vous remercier.
Mais ne comptez pas sur moi pour m'arrêter en si bon chemin. Notre politique de la ville doit, en effet, être placée dans une perspective plus large. Celle de l'adhésion des individus à un projet citoyen, à des valeurs communes, pour une plus grande cohésion sociale.
C'est le sens de la politique d'intégration républicaine que nous allons mettre en œuvre dans les prochains mois.
* Confiance républicaine
La presse a fait connaître l'existence d'un rapport sur ce sujet élaboré par Hamlaoui Mekachera, délégué à l'intégration et M. Gaeremynck, Conseiller d'Etat. Ce rapport s'appuie sur trois volets essentiels :
- l'insertion,
- la médiation,
- la promotion des réussites.
Ce triptyque correspond aux besoins concrets, exprimés par les acteurs de terrain, que nous avons rencontrés tout au long de l'année 1996.
Certes, l'intégration est le pendant d'une immigration maîtrisée.
On a l'habitude de dire lorsque « l'immigration clandestine recule, l'intégration avance ». Je continue à le penser.
Mais l'intégration est une politique en soi, même si elle a trop souvent été non dite, et bien à tort.
Elle passe par l'éducation, l'emploi et la lutte contre les discriminations. Ce sont mes priorités pour 1997. Comptez sur moi pour éviter les discours, et avoir une approche pragmatique. Ce qui m'intéresse, c'est d’agir concrètement pour améliorer la vie quotidienne des personnes.
Vous pouvez également compter sur moi, pour prendre à bras le corps ce problème des discriminations qui frappe plus particulièrement les jeunes. Je sais que le Président de la République y est très attentif. Mais cela nous concerne tous, parce que ce sujet est très symbolique pour notre cohésion sociale et l'unité nationale.
Ce que je souhaite finalement pour l'année 1997 est tout simple.
* Confiance en nous-mêmes
Nous devons affirmer notre confiance dans nos valeurs républicaines, et conforter notre tradition d'accueil et d'intégration.
Ce n'est pas un hasard si j'ai souhaité que, ce matin, soient associés aux vœux de la presse, des responsables d'associations de terrain.
Ce n'est pas simplement parce que vous êtes des acteurs privilégiés de la politique de la ville. C'est aussi, et principalement, parce que vous incarnez au quotidien les valeurs de la République, les valeurs de solidarité, donc de fraternité, de liberté associative et d'égalité de droit.
Faisant des vœux pour 1997, je souhaite que cette intégration urbaine et individuelle, que vous privilégiez, vous les associations, soit un modèle qui se développe et qui soit mieux reconnu.
Je forme donc des vœux pour que vous, les représentants de la presse, des radios et de la télévision, soyez, en 1997, à l'écoute de ceux qui font la seule politique qui vaille, celle du terrain.
Mesdames, Messieurs, je vous souhaite encore une fois une bonne et heureuse année.