Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec un plaisir tout particulier que j'interviens devant vous aujourd'hui parce que l'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (AFECED me paraît exemplaire un double titre.
Votre Association se caractérise à la fois par sa jeunesse, puisqu'elle a été créée l'an dernier, et par des racines profondes, puisqu'elle succède à I'AFEC, qui avait en son temps joué un rôle si utile pour notre place financière.
En s'ouvrant aux entreprises d'investissement, I'AFECEI est aujourd'hui en mesure de jouer pleinement son rôle de promotion des intérêts de l'ensemble des activités d'intermédiation, qu'elles soient bancaires ou financières.
Depuis sa création, votre Association a fait preuve dynamisme et d'initiative. La personnalité de ses responsables suffit à s'en convaincre.
J'adresse à ce sujet des remerciements tout particuliers à Robert Pelletier pour l'action qu'il a menée jusqu'à présent, et je souhaite mes meilleurs vœux de succès à Pierre Simon pour lui succéder aujourd'hui. Mes encouragements vont aussi bien entendu à M. Douroux qui, dans le cadre de la présidence tournante en vigueur, vient d'accéder à ses nouvelles fonctions.
Vous avez dressé, Monsieur le Président, un tableau de la situation de notre secteur bancaire et financier emprunt de réalisme et d'espoir. J'adhère pleinement à votre analyse et je ne crois pas nécessaire d'y revenir. Je souhaiterais plutôt profiter de l'occasion que vous me donnez pour vous faire part de mes réflexions sur les chantiers auquel nous allons collectivement devoir nous atteler dans les mois qui viennent.
Ces chantiers sont à mon sens au nombre de trois : améliorer encore la qualité du service bancaire et financier (1) ; réussir le passage à l'euro (2) ; renforcer la sécurité de notre système (3).
Je suis en premier lieu persuadé que les activités bancaires et financières de demain devront trouver un nouvel équilibre entre les objectifs de proximité et de contact direct avec la clientèle, et celui de l'exploitation accrue des outils nouveaux offerts par les progrès informatiques et technologiques. II nous faut donc maîtriser au mieux ces techniques nouvelles, et définir un nouveau type de service à la clientèle.
Je suis convaincu que les progrès de l'informatique, et, plus généralement, la baisse des coûts de gestion et de transmission d'informations vont entraîner un véritable bouleversement de l'activité bancaire de détail. Il est aujourd'hui trop tôt pour savoir exactement quels seront ces changements, et à quel rythme ils se poursuivront.
Mais je ne doute pas que l'industrie bancaire nationale, qui dispose, vous l'avez justement souligné, Monsieur le Président, d'une bonne expertise technologique dans ce domaine, saura répondre à cette concurrence, et développer une offre commerciale d'envergure.
De ce point de vue, j'ai noté que l'offre en matière de porte-monnaie électronique se développait fortement dans plusieurs pays européens, et non sans lien avec l'arrivée maintenant très prochaine de l'euro. Ce mouvement ne doit pas nous échapper.
J'ai bien relevé, Monsieur le Président, que vous souhaitiez le plein soutien des pouvoirs publics. Soyez-en persuadé, la puissance publique vous épaulera dans cette tâche.
La meilleure qualité de service passe aussi, vous le savez bien par une adaptation des plages horaires d'ouverture des établissements aux attentes de la clientèle. Nous avons en la matière une réglementation qui est désuète, le décret de 1937 obligeant notamment nos banques à fermer leurs agences au moins deux jours par semaine.
Vous savez que j'ai fait de la modification de ce texte l'une de mes premières priorités.
Mais nous devons aussi veiller à ce que cette modernisation soit aussi conforme aux attentes légitimes des salariés du secteur bancaire. Les partenaires sociaux m'ayant fait part de leur souhait d'un examen de ces questions dans un cadre élargi, je pense qu'il revient à I'AFECEI d'organiser une discussion collective qui permette d'accompagner la modification du décret de 1937.
Le second chantier auquel nous sommes confrontés est celui de l'euro. L'euro est d'abord une chance incomparable pour notre place financière parce qu'il élargit considérablement l'horizon de nos établissements. Mais le changement d'unités monétaires aura aussi pour vos établissements, j'en suis conscient, des coûts transitoires qu'on ne négliger. Nous devons donc tout faire pour que cette grande mutation se fasse dans les meilleures conditions de coûts et de visibilité.
L'AFECEI est au cœur des multiples instances de préparation du passage à l'euro, elle y joue un rôle moteur, et c'est heureux. Vous pouvez, à juste titre et sans fausse modestie, dire que la place financière de Paris se prépare dans d'excellentes conditions à cette étape nouvelle de son histoire.
De son côté, la puissance publique a clarifié au niveau européen l'environnement politique et juridique afin de sécuriser les investissements que vous êtes amenés à faire.
Il reste à poursuivre et à achever les travaux. Je félicite d'ailleurs à cet égard I'AFECEI, qui finalise en ce moment même un travail considérable et remarquable de rédaction de cahiers des charges à destination des professionnels du monde financier. Ce travail pourra contribuer à la formation d'un schéma de place français, ce qui est très important. Mais nous aurons l'occasion d'en reparler, notamment au Comité national de l'euro.
Le dernier chantier qui me paraît revêtir une importance primordiale pour un bon développement de votre secteur, est celui du renforcement de la sécurité de notre système financier.
Le diagnostic là aussi est bien connu. Le double mouvement de déréglementation et d'internationalisation qu'ont connu nos établissements depuis une dizaine d'années, s'est traduit par une forte progression des risques qui est à l'origine des quelques défaillances que nous avons tous en tête.
Il nous faut donc sans tarder réfléchir au moyen d'anticiper les évolutions et les risques pour à la fois en prévenir la réalisation et éventuellement pouvoir y remédier.
Dans ce domaine la règle principale me paraît être « Aide-toi, le système t'aidera ». Nous ne pourrons pas avoir une bonne sécurité de place sans des dispositifs de contrôle interne performants dans les établissements.
Ceci relève, bien entendu, de la responsabilité des établissements eux-mêmes, qui doivent travailler au renforcement ou à la mise en place de tels systèmes.
Quant à elles, les autorités chargées de la réglementation ont élaboré une réglementation qui propose un corpus de mesures applicables à tous les établissements. Le Comité de la Réglementation Bancaire (CRBF) l'adoptera dans les tout prochains jours. Cette réglementation devrait rendre plus efficace le contrôle des opérations, notamment celles qui sont effectuées sur les marchés, et la mesure des risques, avec la mise en place de véritables systèmes de surveillance.
Il va de soi que cet ensemble réglementaire, par ailleurs absolument nécessaire, constitue le minimum des mesures à mettre en œuvre. Rien n'interdit aux établissements d'aller plus loin dans le contrôle interne, et, pour ma part, ceci me paraîtrait tout à fait utile.
L'amélioration du contrôle interne n'est évidemment pas Le contrôle externe des établissements doit aussi être rendu plus efficient.
Sur ce sujet important, le récent rapport de la Commission des Finances de l'Assemblée Nationale a formulé d'utiles recommandations, visant notamment à renforcer encore du travail de la Commission Bancaire, et de son Secrétariat Général.
Ceci constitue un important chantier à mener à bien dans les meilleurs délais. Je compte m'appuyer sur les analyses et les suggestions de la Commission des Finances pour le poursuivre.
Ceci dit, aucun système de contrôle, si utile ou perfectionné qu'il puisse être, ne peut se targuer de pouvoir garantir pleinement contre l'apparition de crises ou de risques imprévus.
De ce point de vue, il est tout d'abord impératif de mener à son terme le processus actuel d'homologation des systèmes de garantie des dépôts ou systèmes équivalents. La mise en place de tels systèmes a donné lieu, nous le savons, à de nombreux débats. Il est temps que le CRBF puisse enfin procéder à cette homologation, et je souhaite que cela puisse intervenir avant la fin de ce mois.
Mais, et, d'une certaine manière, les difficultés rencontrées par cette homologation l'illustrent bien, il faut probablement aller plus loin, en unifiant davantage les dispositifs existants de manière à améliorer encore le dispositif français de garantie des dépôts. L'objectif d'une telle réforme doit être de renforcer les garanties des déposants et de faciliter la gestion des crises bancaires, le cas échéant, grâce à des interventions préventives.
J'ai noté que la profession elle-même avait engagé des réflexions à ce propos, notamment en ce qui concerne la création d'un fonds de garantie "chapeau" couvrant l'ensemble des réseaux.
Je souhaite que ces réflexions, en concertation avec mes services, se poursuivent activement. Je n'exclus d'ailleurs pas, et ceci pourrait peut-être faciliter la maturation de ces réflexions, qu'une telle réforme puisse impliquer une évolution de la contribution des institutions financières, évolution que, comme vous, Monsieur le Président, je considère a priori souhaitable, tout en demeurant prudent sur le calendrier compte tenu de la situation budgétaire tendue dans laquelle nous sommes.
Voilà, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous dire aujourd'hui sur l'avenir de notre secteur bancaire et financier,
Nous sommes entrés dans une phase de mouvement qui va profondément modifier notre paysage financier dans les dix années qui viennent.
Nos établissements ont des atouts considérables pour faire face à ces évolutions, mais ils ont aussi accumulé certains retards tandis que, de son côté, la puissance publique a tardé dans son œuvre de modernisation du cadre réglementaire et institutionnel.
Aujourd'hui notre horizon s'éclaircit.
L'économie repart de manière vigoureuse et l'hypothèse de 2,3 % de croissance pour 1997, faite par le Gouvernement, apparaît de plus en plus clairement comme un plancher.
Cette reprise est fondée sur des bases saines alimentées en particulier par la baisse historique de nos taux d'intérêt tant à court qu'à long terme. Les prévisions de résultat de nos entreprises sont à la hausse et la Bourse connaît une santé florissante bénéficiant aux Français qui, de plus en plus nombreux, investissent dans les fonds propres des entreprises. A vous maintenant d'accompagner ce mouvement et de vous engager résolument auprès des entreprises afin de faciliter leurs investissements et leurs projets de croissance.
Les priorités sont maintenant clairement identifiées. Sachons collectivement faire preuve du courage qui nous permettra de relever avec succès les défis qui se présentent à nous.