Texte intégral
France 3 - Mercredi 16 octobre 1996
É. Lucet : On a le sentiment, quand on entend les mots d’ordre de grève, que le ras-le-bol est général. Comment expliquer qu’on puisse voir, demain dans la rue, des médecins, des cheminots ou des instituteurs qui sont si différents ?
J. Barrot : Les adaptations de la France aux réalités de demain sont rudes et je comprends personnellement qu’un certain nombre de peurs, de revendications s’expriment. C’est légitime. Par contre, ce qui ne le serait pas, c’est si au-delà de la journée de demain, on s’avisait de bloquer ce pays, de le paralyser, ce serait une mauvaise action. Mais ça ne sera pas.
É. Lucet : C’est une mise en garde ?
J. Barrot : Oui, mais ça ne sera pas. J’ai confiance parce qu’il y a chez tout Français un sens de la solidarité avec l’ensemble du pays. Nous savons aujourd’hui que si le pays était bloqué ce serait la lutte contre le chômage qui serait impossible. Donc, je pense qu’il y a des revendications légitimes, mais que cela n’explique pas et n’excuse pas tout.
É. Lucet : Vous attendez des manifestants qu’ils stoppent leur mouvement au bout d’une journée, mais ils attendent de vous que vous les entendiez. Alors quelle sera votre attitude demain ? L’attentisme ou la négociation ?
J. Barrot : Vous le savez bien. S’agissant de la fonction publique, la discussion est ouverte. Le Premier ministre s’y est engagé. Donc, tout ça fera l’objet de discussions. Nous sommes en face de revendications qui peuvent donner lieu à des négociations. Ce n’est pas la grève qui règle, c’est la négociation. Alors qu’il y ait un jour pour marquer le coup, d’accord ! Mais ensuite, il faut se mettre autour de la table. Et puis, il y a, bien sûr, le monde des médecins. Et je comprends, et je partage la peur et surtout le sentiment des médecins d’être mal aimés. Je voudrais dire que quelques articles de presse ne changeront rien au regard sympathique que nous avons pour les médecins de la France, quels qu’ils soient.
É. Lucet : Mais, ils ont le sentiment que c’est vous qui ne les aimez pas, que vous considérez que ce sont eux, d’une certaine façon, qui creusent le déficit de la Sécurité sociale. Ça c’est leur sentiment.
J. Barrot : Je voudrais d’abord bien dire que le gouvernement n’a été en aucun cas solidaire de certains articles de presse qui ont désigné les médecins comme boucs émissaires. Ce que nous essayons, c’est de préserver – et c’est la dernière chance – notre système de Sécurité sociale et notre assurance maladie avec une médecine libérale. Qu’allons-nous faire la semaine prochaine ? Nous allons envoyer à tous les médecins ce carnet de santé qui sera celui de chaque assuré social pour marquer que la réforme c’est d’abord, assurer ce lien de confiance entre le médecin et son client, son assuré social, de manière à ce que la réforme soit vraiment un surcroit de qualité. Ce n’est pas, comme on dit, le rationnement des soins, c’est la fin des abus pour préserver la médecine à la française.
É. Lucet : On sent que, dans les cabinets médicaux, les médecins sont déstabilisés parce qu’il y a plein de rumeurs. On entend parler de quotas de patients par médecin.
J. Barrot : Voilà l’exemple même de slogan malhonnête. Il n’a jamais été question de faire des quotas. Simplement, ce que nous voulons, c’est que la progression des dépenses d’assurance maladie ne soit pas trop rapide parce que sinon, chaque année, il y a un déficit. Et la loi de financement de la Sécurité sociale permettra de mieux orienter les choses et de lutter contre les abus. Ne laissons pas raconter des histoires.
É. Lucet : On entend aussi dire qu’il va falloir obligatoirement passer par un généraliste avant d’aller chez son pédiatre ou un gynécologue. C’est vrai ou faux ?
J. Barrot : C’est faux. Mais cela a bien été dit ! Simplement, il pourra y avoir des expériences volontaires pour un certain nombre d’assurés sociaux qui voudront se confier à leur généraliste, et éviter, en effet, d’aller d’un médecin à un autre. Pour cela, il pourrait y avoir un réseau de soins et nous allons commencer des expériences. Mais je voudrais surtout vous dire, et aux médecins qui nous écoutent, que bien sûr, demain, ils vont mettre un peu leur amertume dans le grand chaudron des contestations, mais ce n’est pas là qu’ils trouveront la potion magique – pour reprendre Astérix.
É. Lucet : Justement, qu’est-ce qui se passe ? Il y a un déficit d’explication du gouvernement ou de moyens ?
J. Barrot : Mais nous entrons dans une réforme qui prend un certain temps pour se mettre en place. Elle est basée sur la qualité…
É. Lucet : Ça veut dire qu’il y a déficit d’explication.
J. Barrot : Peut-être bien qu’il faut encore et toujours expliquer. Mais il faut aussi que notre Caisse nationale d’assurance maladie le répète suffisamment, ces mises en état de discussions…
É. Lucet : Elle va trop loin ?
J. Barrot : Non, mais les premières mesures étaient-là comme des propositions, elles appelaient des contre-propositions. Il y a cinq groupes de travail aujourd’hui à la CNAM. Est-ce que les médecins ont bien réalisé que le processus de discussion était ouvert ? C’est ça qu’il faut qu’ils comprennent, et qu’ils ne s’éloignent pas eux aussi de la table de négociation.
France Inter - Mardi 22 octobre 1996
L. Joly : Concrètement, comment ce carnet fonctionne ? Comment la confidentialité sur les maladies des patients va être préservée ? À partir de quand va-t-on l’avoir en main ?
J. Barrot : D’ici la fin de l’année, 45 millions de Français et de ménages vont recevoir ce carnet de santé. Qu’est-ce que c’est ? C’est un aide-mémoire. Un aide-mémoire d’abord pour soi-même. Il faut bien savoir si on a bien fait faire ses vaccinations. Je vous le rappelle, tous les dix ans, le tétanos. Un aide-mémoire pour soi-même, donc. Un aide-mémoire pour son médecin qui saura, dès qu’on lui présente son carnet, les antécédents que l’on a eus et pourra ainsi aller plus vite et mieux dans son diagnostic. Et enfin, un aide-mémoire pour le bénéfice de notre assurance-maladie à tous parce que, grâce à notre carnet de santé, nous n’oublierons pas – ce que nous faisons souvent, les uns ou les autres – de dire que pendant les vacances, nous avons eu une petite prise de sang pour une petite analyse de laboratoire et que ce n’est pas la peine de la répéter un mois après. Voilà, cet aide-mémoire, c’est un outil précieux. On l’a attendu longtemps. Nous l’avons mis au point avec un très large accord et, bien sûr, celui de l’Ordre des médecins.
L. Joly : Vous dites aide-mémoire et justement, c’est un petit peu le reproche que l’on pourrait faire à cet outil. Il n’y a rien d’obligatoire dans ce carnet de santé. On n’est pas obligé de le présenter à chaque fois, le médecin peut ne pas noter certaines informations. Finalement, rien n’étant obligatoire, est-ce qu’il sera vraiment efficace pour diminuer les dépenses de santé, pour éviter la répétition d’actes ?
J. Barrot : Une règle de mieux-vivre, cela présente en soi un intérêt. Pourquoi s’en dispenser ? C’est un peu, permettez-moi cette comparaison, comme si on disait qu’il est obligatoire – et il est bien obligatoire – de se laver les dents. Et on l’apprend à nos enfants et Dieu merci, cela commence à donner des résultats. Je crois que la génération qui monte saura maintenant, comme le savaient les mamans avec le carnet de l’enfant et comme les premiers retraités l’ont fait dans l’expérience précédente, mais trop limitée, utiliser cet outil pour une meilleure santé. Et du même coup, les économies seront réalisées parce qu’il y aura beaucoup de gaspillages évités.
L. Joly : On va l’avoir à partir de lundi, n’est-ce pas ?
J. Barrot : Il arrivera d’abord dans une région, la région Midi-Pyrénées. Il fallait bien commencer par une région. Et puis, tous les médecins de France vont le recevoir au préalable et, de proche en proche, toute la France devrait l’avoir à la fin de l’année.
L. Joly : C’est un premier pas. Après, ce carnet de santé va être remplacé par une carte à puce, pourquoi ne pas passer directement à la carte à puce ? Est-ce que l’on n’aurait pas fait des économies ?
J. Barrot : D’abord parce que, techniquement, il faut mettre en place toute l’informatisation du système de santé. Et surtout aussi parce qu’il faut habituer les Français à s’approprier un peu leur santé, à la gérer eux-mêmes. C’est un grand appel à la responsabilité, c’est pour cela que ce n’est pas mineur, ce carnet de santé. Vraiment, c’est chacun qui devient un peu acteur de sa santé.
L. Joly : Cela va coûter combien, ces carnets ?
J. Barrot : Il coûte un franc, il faut bien le distribuer. Cela étant, c’est un coût modeste par rapport à l’importance qu’il peut avoir si les Français veulent bien en faire le bon usage que nous attendons d’eux.
L. Joly : Avec la carte à puce, quelle sera la différence ?
J. Barrot : D’abord, la carte va, dans un premier temps, servir à transmettre directement l’ordonnance aux caisses. Ce sera donc un moyen de télétransmission qui nous évitera beaucoup de paperasserie, et notamment aux médecins. Mais le point d’aboutissement, c’est le dossier médical informatique et informatisé qui offrira encore plus de possibilités parce qu’il aura toutes les garanties que peut apporter la clef qui réserve ce dossier uniquement au médecin et au patient. Encore que, vous l’avez vu, nous avons pris de grandes précautions pour garder le carnet de santé papier confidentiel.
L. Joly : Lesquelles ?
J. Barrot : Eh bien, vous n’aurez à présenter à quiconque, sauf votre médecin, votre carnet de santé. Si un employeur s’amusait à le demander au moment de l’embauche, il serait sanctionné. Et il y a aussi la discrétion parce que nous voulons une relation de confiance. Vous parliez tout à l’heure d’errance médicale, il faut créer la confiance entre le médecin et son patient. Il faut qu’éventuellement, le patient puisse dire au médecin qu’il s’interroge sur l’inscription de telle mention dans son carnet. Eh bien, le médecin lui dira que c’est peut-être utile mais qu’il reconnaît que la discrétion est nécessaire. Et le patient pourra choisir avec son médecin de ne pas inscrire quelque chose sur le carnet.
L. Joly : On a parlé tout à l’heure des plus de soixante-dix ans. Il y a plus de onze millions de retraités en France et ce n’est pas rien. Ils descendent dans la rue aujourd’hui et ce n’est pas la première fois. Ils ont l’impression d’être eux aussi « tendus » c’est-à-dire de perdre du pouvoir d’achat, de n’avoir pas obtenu la prestation autonomie qu’avait promise le candidat Chirac. Que leur répondez-vous aujourd’hui ?
J. Barrot : D’abord, je suis obligé de rappeler que les choses ont beaucoup progressé. Aujourd’hui, nous savons qu’en moyenne, les retraités ont un revenu supérieur de 10 %environ aux revenus des actifs parce que, depuis un certain nombre d’années, le pouvoir d’achat des retraités progressait un peu plus vite que celui des actifs.
L. Joly : Quand même, avec le RDS, la CSG, on ponctionne leur pension !
J. Barrot : D’abord, il faut tempérer ce jugement optimiste par le fait qu’il reste encore ici et là des petites retraites. Et je crois que ce qui est beaucoup plus important, c’est d’essayer d’aller vers plus de justice plutôt que de faire des revendications tous azimuts. Deuxièmement, on leur a demandé de payer un petit peu pour leur assurance-maladie. Il faut dire qu’actuellement, pour le même revenu, un ménage qui touche un salaire proche du Smic paye encore trois, quatre points de plus qu’un retraité avec les mêmes revenus. Nous avons donc demandé aux revenus imposables, pas aux autres, de faire un effort supplémentaire pour l’assurance-maladie. Bon. Et j’en viens à la prestation dépendance. J’aimerais bien que les retraités regardent de très près ce qu’est en train de faire le Sénat Premièrement, c’est une prestation qui sera désormais différente de la prestation pour les handicapés. On distingue la dépendance. Deuxièmement, on donne vraiment cette prestation à la personne, sous forme de services rendus à la personne. Et troisièmement, cela va donner lieu à une appréciation simple, il n’y aura plus besoin de toutes ces formalités de Cotorep. Donc, je crois qu’il y a un progrès, même si nous allons progresser par étapes.
L. Joly : Quand les manifestations sur le pavé à Paris, mais aussi en province, se succèdent, quand, dans les sondages, la cote d’A. Juppé est toujours plus basse, quand certains s’interrogent sur la légitimité qu’il y a encore à gouverner avec une telle cote d’impopularité, qu’est-ce que vous pensez ?
J. Barrot : Je suis tenté de dire aussi que si on attendait que le président ou le Premier ministre soit le plus populaire, alors effectivement, il résoudrait tous les problèmes d’un coup de baguette magique. Cela n’existe pas. Nous devons adapter ce pays. C’est un effort difficile. Qu’il y ait un peu de grogne, je le comprends très bien mais je crois que nous devons gouverner ce pays avec des convictions. Nous voulons un avenir pour la France et je souhaite simplement que les retraités qui défilent ce soir pensent aussi que, dans les efforts qui leur sont demandés, c’est l’avenir de leurs enfants, de leurs petits-enfants qui est en cause.
Europe 1 - Mardi 22 octobre 1996
J.-P. Elkabbach : À l’égard de la France, l’air est plutôt froid en Israël ?
H. Gaymard : Très froid : ce n’est pas le mot. Je crois qu’il y a toujours des relations passionnées et passionnelles entre la France et Israël. La France est traditionnellement un ami d’Israël et, entre amis, on se dit les choses franchement.
J.-P. Elkabbach : Cette journée de mardi comporte aussi des risques. Le président de la République ne s’adresse pas aux élus de la Knesset. Est-ce la France ou Israël qui ne l’a pas voulu ?
H. Gaymard : Dans un premier temps, quand le voyage a été organisé, les autorités israéliennes n’ont pas souhaité qu’il y ait une étape à la Knesset. Finalement, le président de la Knesset a demandé à ce que J. Chirac vienne lui rendre visite, ce qu’il fera. Je crois que c’est un non-événement.
J.-P. Elkabbach : Oui, un non-événement. C’est dommage qu’il n’y parle pas ? Il va parler devant les Palestiniens, c’est la première fois qu’un Français ou qu’un Européen le fera ?
H. Gaymard : C’est la première fois parce qu’auparavant, le conseil palestinien n’existait pas, puisque les accords d’Oslo n’avaient pas été signés. Donc, c’est une première fois, mais ce n’est pas une preuve de dédain vis-à-vis d’Israël.
J.-P. Elkabbach : Au contraire, ce n’est pas un reproche de ma part. La droite israélienne, en ce moment, répète dans des termes brutaux que la France, avec sa politique arabe et pro-palestinienne est en train de sacrifier, d’une certaine façon, la sécurité et l’avenir d’Israël, et qu’elle est partiale.
H. Gaymard : C’est faux. La France, comme l’Europe d’ailleurs, au Moyen-Orient, sont à la fois des amis d’Israël et ont une audience dans les pays arabes. Et le rôle que veut jouer la France au Moyen-Orient, comme l’a dit le président Chirac, c’est un rôle de facilitateur et un rôle d’apporteur de paix.
J.-P. Elkabbach : Équilibrer ?
H. Gaymard : Équilibrer.
J.-P. Elkabbach : M. Netanyahou refuse aux Européens et aux Français le droit de visiter la Maison d’Orient, le siège de l’OLP à Jérusalem-Est. Vous y êtes allé à la place de M. de Charette. Pourquoi a-t-on cédé à M. Netanyahou ?
H. Gaymard : M. de Charette n’a pas fait partie du voyage israélien du président de la République, dans la mesure où cette question de la Maison d’Orient était posée. Vous savez que la communauté européenne a fait la distinction entre les visites de travail et les visites officielles, et M. de Charette ne fera pas partie du voyage présidentiel en Israël.
J.-P. Elkabbach : Les Israéliens ont regretté ?
H. Gaymard : Les Israéliens l’ont regretté et le président de la République m’a demandé d’aller porter un message à M. Husseini, à la Maison d’Orient, hier matin, ce que j’ai fait.
J.-P. Elkabbach : Vous n’avez pas parlé de questions techniques, c’est-à-dire de questions de santé, donc, c’est un subterfuge ou un artifice.
H. Gaymard : J’ai parlé de questions de santé. Vous savez que nous avons une coopération en matière de santé avec les Palestiniens. Mme Veil, en 1974, a fait un voyage à Jérusalem, dans les territoires pour parler et engager une coopération en matière sanitaire. Nous avons une coopération avec plusieurs hôpitaux palestiniens, et c’est de cela que j’ai parlé également avec M. Husseini.
J.-P. Elkabbach : Et vous m’avez dit que vous y retourniez ce soir, à la fois en Israël et demain, à Gaza. M. Netanyahou bloque les négociations sur Hébron en ce moment. Il choisit la médiation américaine, il rejette obstinément la présence européenne. M. Netanyahou n’est-il pas en train de mettre en danger le processus de paix ? J’en parle avec vous puisque vous étiez en Israël et que vous y retournez.
H. Gaymard : Moi, je n’ai pas de commentaire à faire sur le gouvernement israélien. Ces questions ne sont pas dans mes attributions gouvernementales. Je crois que cette question israélo-palestinienne, c’est une question très importante, qui touche chacun des Français, puisque la France est un pays de culture plurielle où beaucoup de Français se sentent personnellement, au fond de leur cœur, concernés par ce qui se passe en Israël, en Palestine et au Moyen-Orient. Et je crois que sur ces sujets-là, trop de sang a coulé. Cette terre a trop été promise pour que nous ayons des attitudes irresponsables.
J.-P. Elkabbach : C’est quoi l’irresponsabilité ?
H. Gaymard : Je crois que c’est tourner le dos à la paix. Que ce soit du côté palestinien ou du côté israélien, quels que soient parfois les sentiments légitimes d’exaspération ou de revendication, il faut aller vers la paix, c’est le sens du voyage du président de la République.
J.-P. Elkabbach : En tout cas, votre visite à la place de M. de Charette à la Maison d’Orient a démontré que, selon ou conformément aux accords d’Oslo, le statut de Jérusalem est et reste négociable, et que tout doit être négocié ?
H. Gaymard : Tout à fait et, en attendant que cette négociation se fasse, c’est le statu quo qui doit prévaloir.
J.-P. Elkabbach : Le voyage du président de la République va réduire les relations avec les Israéliens ?
H. Gaymard : Au bout du compte, je ne pense pas, puisqu’il y a toujours eu des relations confiantes entre la France et Israël. Il n’y a pas de raison que ça change.
J.-P. Elkabbach : Vous êtes venu présenter le carnet de santé. Quand tous les Français l’auront-ils ?
H. Gaymard : Ce carnet sera distribué à partir de la fin du mois d’octobre et tous les Français l’auront avant la fin de l’année. Ils le recevront par La Poste d’ailleurs.
J.-P. Elkabbach : Pourquoi 45 millions ?
H. Gaymard : Parce que c’est pour les Français de plus de 16 ans et les jeunes ont déjà leur carnet de santé à eux.
J.-P. Elkabbach : Qui va détenir le carnet de santé ?
H. Gaymard : C’est un carnet que je vais vous donner, que je vais vous laisser, qui est jaune, qui se glisse facilement dans la poche ou dans un sac à main, qui est jaune et bleu et qui a été élaboré en étroite concertation à la fois avec l’Ordre des médecins, les syndicats de médecins et, bien évidemment, les Français qui ont été consultés dans des échantillons. Donc, ce carnet sera détenu par chaque Français. Il y a beaucoup d’informations, il y a des conseils de santé publique d’abord et puis, il y a un certain nombre d’informations sur les hospitalisations, les vaccinations, sur les consultations.
J.-P. Elkabbach : La présentation est obligatoire. Mais si je refuse de le présenter, je n’ai pas de sanction ?
H. Gaymard : Il n’y a pas de sanction puisque nous avons voulu faire de ce carnet un outil de santé, un carnet de santé – puisque c’est son nom – et que chaque Français se l’approprie. C’est la mémoire de la santé de chaque Français.
J.-P. Elkabbach : Je note qu’il n’y aura pas de nom, pas de photo ?
H. Gaymard : Il n’y aura pas de nom, ni de photo pour garantir la confidentialité, il y aura uniquement le numéro de Sécurité sociale.
J.-P. Elkabbach : L’étape suivante, c’est la carte à puce santé qui est en ce moment expérimentée à Saint-Nazaire. Son extension et sa généralisation est prévue pour… ?
H. Gaymard : C’est prévu à partir de 97-98. L’idée c’est que, dans deux ans, chaque Français ait une carte de santé à puce qui se substituera au carnet papier qui est distribué aujourd’hui. Mais il nous a semblé important de distribuer d’abord ce carnet papier pour que les Français s’habituent à cette démarche de la mémoire santé.
J.-P. Elkabbach : Au bout de deux ans, le carnet de santé d’aujourd’hui disparaîtra ?
H. Gaymard : Tout à fait.
J.-P. Elkabbach : N’est-ce pas contradictoire, n’est-ce pas un double inconvénient, à la fois sur le plan du coût et sur le plan du désordre que cela va causer ?
H. Gaymard : Il n’y aura pas de désordre mais il nous a semblé que – d’abord, deux ans, c’est quand même assez long, ce n’est pas pour tout de suite, il y a encore un certain nombre d’expérimentations à faire – dans un premier temps, il fallait que les Français s’approprient ce carnet de santé.
J.-P. Elkabbach : L’objectif est donc de réduire la consommation à la fois de soins médicaux et de médicaments ?
H. Gaymard : L’objectif principal, c’est le juste soin et que chacun ait la mémoire de sa santé. Quand on va voir un médecin qui n’est pas son médecin traitant, il faut que, tout de suite, il sache qui vous avez vu avant, de manière à voir des correspondances. Chacun y gagnera, on peut être allergique à certains médicaments ou à certains traitements, donc, je crois que c’est très important. Au bout du compte, il est bien évident que c’est aussi un outil de responsabilisation. Ce que je veux dire, très clairement parce que j’ai entendu des choses un peu bizarres, c’est qu’il est bien évident qu’il n’y a pas de quotas d’actes, ni de consultations, mais je crois que les uns et les autres, nous sommes très attachés, profondément, à notre Sécu et que pour sauver notre Sécu, il faut aussi que nous fassions preuve de responsabilité.
J.-P. Elkabbach : C’est un des instruments de réforme de la Sécurité sociale ? Vous avez une idée du montant des économies, si ça marche bien ?
H. Gaymard : Aucune. Aucune idée du montant des économies générées. Je crois que c’est une affaire de responsabilisation de chaque Français. C’est un peu ce que j’appellerais du civisme social.
J.-P. Elkabbach : Une proposition de loi a été déposée par une trentaine de députés RPR et UDF pour supprimer le remboursement de l’IVG non thérapeutique. Vous la retenez ou vous la balayez ?
H. Gaymard : Je la balaye. Cette question n’est pas à l’ordre du jour.