Texte intégral
Je suis bien entendu très heureux de vous retrouver aujourd'hui, à l'approche de la fin des travaux de cette 49ème session de l'assemblée plénière du Conseil supérieur des Français de l'étranger.
La tradition établie veut que le président du Conseil, en vous recevant au Quai d'Orsay, ouvre votre session annuelle. Pour des raisons de calendrier, cela n'était pas possible cette année. Fort heureusement le règlement du Conseil prévoit aussi que le président, en fin de session, peut venir tirer les conclusions des débats. Comme je tenais absolument à vous rencontrer, j'ai donc souhaité profiter de cette occasion pour m'entretenir avec vous des divers sujets qui préoccupent les communautés françaises à l'étranger, dont vous êtes les représentants.
Vos débats, ainsi que vos travaux au sein des diverses commissions qui se sont réunies ces jours derniers, ont été fort nourris si j'en juge par le nombre de vœux et de motions dont j'ai pris connaissance. Ils me seront transmis naturellement dans leur intégralité et je les étudierai et les examinerai avec beaucoup de soins et avec le souci d'y répondre aussi positivement qu'il m'est possible. Vous avez pu exposer cette année directement vos préoccupations à certains membres du gouvernement. Je crois que c'est très utile, très positif et que cela contribue au dialogue qui doit s'établir entre votre instance et l'ensemble des responsables gouvernementaux. Permettez-moi simplement de m'attarder sur quelques-uns des problèmes qui vous préoccupent directement. D'abord, je voudrais vous dire un mot sur l'enseignement français à l'étranger, question cruciale pour nos communautés expatriées et aussi pour notre rayonnement culturel.
Quelques jours après la rentrée scolaire, quels sont les points marquants ? Nous avons fait tout ce qui était possible dans le cadre d'un mouvement ancien, mais appelé à se prolonger, de réduction des dépenses publiques, pour que l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger bénéficie d'un bon traitement budgétaire. Le gel du printemps 1996 lui a été épargné, ce qui n'était pas rien. La transformation d'emplois d'expatriés en emplois de résidents a été contenue dans des limites raisonnables en 1996 et devrait l'être aussi en 1997. Soyez-en tout cas, convaincus que la défense du budget de l'Agence restera l'une de mes priorités. Il s'agit, en effet, à la fois de préserver ses moyens et d'obtenir l'ouverture des crédits indispensables au maintien de la qualité de son réseau, qui est incontestablement l'un des meilleurs du monde. Je constate, d'ailleurs, que les résultats au baccalauréat, qui sont de plus de dix points supérieurs à la moyenne nationale, manifestent la qualité de l'enseignement français à l'étranger. Je relève aussi que nos élèves ont obtenu en 1996 douze prix au concours général, dont quatre premiers prix, plusieurs accessits et mentions régionales, et pas simplement en langues vivantes, comme l'on pourrait l'imaginer. L'AEFE vient ainsi au deuxième rang des académies de France, et de ce point de vue, je crois que c'est un succès très remarquable.
Un grand nombre d'établissements vont pouvoir faire l'acquisition des équipements nécessaires à leurs laboratoires scientifiques. Un crédit spécifique de dix-sept millions de francs a été inscrit au budget 1996 et est en cours de répartition.
La formation continue des enseignants bénéficiera, dans deux régions prioritaires pour notre diplomatie, de deux postes supplémentaires pour un inspecteur l'Éducation nationale à Bangkok et pour un nouveau coordonnateur du second degré à Beyrouth, responsable pour le Proche-Orient et le Moyen-Orient.
La mission de coopération éducative, inscrite dans la loi fondatrice au titre des grands objectifs de l'Agence, et, jusqu'à présent, un peu en retrait par rapport aux autres exigences, a pris corps cette année de façon utile au Maroc. Elle permet de rapprocher les actions de l'Agence de la Direction générale et d'autres départements ministériels pour le plus grand bien, je le crois, de notre rayonnement culturel.
Dans le domaine des bourses scolaires, l'effort exceptionnel de rattrapage consenti en 1994 et 1995 a été confirmé en 1996, et pourra l'être, je le crois, en 1997. Plus de 17 000 boursiers bénéficient de cette aide, répartie de façon équitable, pour un budget non négligeable puisqu'il s'élève à 185 millions de francs. Je connais et partage vos préoccupations quant à l'évolution des droits de scolarité, et bien entendu, je souhaite que l'Agence procède à une analyse aussi précise que possible de cette question difficile, compte tenu, de surcroît, de la variété des situations locales qui doivent être prises en considération.
En tout état de cause, nous devons travailler ensemble au développement et à la rationalisation de notre réseau d'enseignement pour préparer l'avenir. Le Premier ministre et moi-même avions demandé à Pierre Lequiller, qui est l'un des vôtres, de présenter un rapport sur ce dispositif. Je crois que vous avez eu l'occasion d'en débattre avec lui au mois de mai dernier, puis de lui faire part de vos suggestions. Ses conclusions en ont certainement tenu compte. Je les trouve particulièrement pertinentes. Je saisirai donc prochainement le Premier ministre de recommandations tirées de son rapport, qui seront de nature, je crois, à faciliter la gestion de notre Agence.
Nous analyserons également les conclusions de la mission conjointe des inspections générales des Finances et des Affaires étrangères sur le régime comptable de l'Agence qui pose quelques problèmes techniques pour les établissements dits « à gestion directe ». Il n'est pas impossible que ces réflexions nous conduisent à modifier certains articles de la loi, ce à quoi, le cas échéant, vous seriez, bien entendu, associés. Je ne crois pas, en revanche, qu'il soit opportun de remettre en question la formule même de l'Agence comme l'évoque la mission d'inspection, car je crois qu'elle doit poursuivre son œuvre, tout en menant les réformes nécessaires.
Voilà pour l'enseignement français à l'étranger.
Le deuxième sujet que je voudrais aborder concerne la réforme de l'État. Elle vise, évidemment à titre principal, à améliorer les relations entre l'État et les citoyens, et parmi eux, il y a bien entendu, les Français de l'étranger. À ce titre, je voudrais évoquer la simplification de la délivrance des certificats de nationalité. Le Premier ministre, l'autre jour, avait réuni le gouvernement en séminaire et avait demandé à chacun des membres du gouvernement de lui faire une proposition sur une réforme qui serait de nature à répondre à l'attente de nos concitoyens et à faire progresser les choses. Pour ce qui me concerne, la politique étrangère a souvent, mais peut-être moins que d'autres administrations, l'occasion de travailler avec nos concitoyens. C'est sur cette question des certificats de nationalité que j'ai appelé l'attention du Premier ministre, sachant, comme dirait les Canadiens que c'est un « irritant », c'est-à-dire un de ces sujets que l'on traîne interminablement et que l'on n'arrive pas à résoudre, alors que ce serait hautement souhaitable. En même temps, c'est, en effet, un sujet technique, juridique et complexe, ce qui explique sans doute pourquoi il n'est pas résolu. En tout cas, je suppose que vous en avez parlé avec M. Toubon, et nous sommes convenus, Jacques Toubon et moi-même, de nous mettre au travail sur cette question pour voir comment, à la fois juridiquement, mais aussi pratiquement pour nos concitoyens, nous pourrions faire des progrès à cet égard.
En vérité, vous avez raison. Je crois que c'est le sujet qui touche le plus nos concitoyens que de voir combien il est difficile pour eux d'obtenir un certificat de nationalité française.
S'agissant de l'état civil, la demande de copie ou d'extrait d'acte de naissance est très abondante. Je sais quelles difficultés rencontrent souvent les Français de l'étranger dans ce domaine, notamment du fait des délais de réponse. Je demande donc que soit vigoureusement poursuivie l'amélioration de ce service rendu au public. Il conviendra, en tout premier lieu, d'inviter les différents services administratifs à appliquer strictement les textes législatifs réglementaires. Je fais d'ailleurs observer au passage qu'au cours de cette même réunion que présidait le Premier ministre, des projets, de simplification ont été proposés par le ministère compétent, qui est le ministère de l'Intérieur, pour simplifier les cas dans lesquels tel ou tel document d'état civil est requis par les procédures en cours.
C'est aussi pour assurer aux Français de l'étranger un service public de qualité que le ministère des Affaires étrangères pourra continuer à disposer de corps spécifiques de fonctionnaires compétents, animés par la volonté de servir à l'étranger et garants du professionnalisme des différents métiers qui sont les nôtres. Vous savez qu'il y a eu une inquiétude dans notre administration à cet égard et je crois avoir pu rassurer l'ensemble de nos collaborateurs.
Je voudrais encore rappeler l'excellent travail qui se fait au sein du Comité interministériel des moyens de l'État à l'étranger. Comme vous le savez, c'est une instance nouvelle très importante. Enfin, je voudrais vous dire que je viens de nommer pour suivre l'ensemble de ces questions auprès de moi et du Secrétaire général, M. Laurent Aublin, notre ancien consul général à Hong Kong, qui a déjà eu, me semble-t-il, une première réunion avec votre commission de la représentation et des droits. Je voudrais rappeler le sens politique que revêt cette entreprise. La réforme de l'État ne fait, en réalité, que confirmer, pour ce qui nous concerne, ce que vous vivez chaque jour. La politique étrangère française, la France elle-même, doivent s'adapter à un monde nouveau, en plein évolution, et il ne s'agit pas, pour nous, de traîner les pieds mais plutôt d'accélérer le mouvement. C'est donc une volonté réelle et permanente d'adaptation. La France serait condamnée au déclin de son influence et de son rayonnement si elle n'était pas animée par cette détermination qu'expriment, je crois, de façon très forte et très pertinente, aussi bien le président de la République que le Premier ministre.
C'est dans cet esprit que je voudrais évoquer maintenant devant vous l'adaptation de notre réseau diplomatique et consulaire. Cette adaptation ne nous est pas imposée. Elle ne vient de nulle part ailleurs que de nous-mêmes. Mais je crois qu'elle correspond à notre intérêt profond. Comme vous le savez, nous avons un réseau diplomatique et consulaire très important, l'un des plus denses du monde. Je vous rappelle les chiffres : 172 postes diplomatiques, c'est-à-dire 151 ambassades, 17 représentations permanentes, 4 délégations auprès d'organismes internationaux, à comparer à 160 ambassades américaines, 149 ambassades allemandes, 140 ambassades britanniques. Nous disposons de 116 postes consulaires de plein exercice, auxquels il convient d'ajouter 120 sections consulaires et un réseau de près de 520 agences. C'est dire qu'il s'agit d'un réseau très dense. La France a fait l'effort, au cours des dernières décennies, de le maintenir et de le préserver en dépit des contraintes budgétaires. Ces contraintes existent, nul ne peut penser qu'aucun secteur de la vie nationale serait dispensé de l'effort. Même s'il m'arrive très souvent de penser que, tout compte fait, quand on regarde les courbes passées, cet effort a été plus souvent fait par le Quai d'Orsay que par d'autres, je crois déjà avoir évoqué devant vous cette courbe très remarquable, très intéressante, qui montre l'évolution des effectifs de l'État depuis quinze ans.
Pendant ces quinze années, les effectifs de l'État – j'avais fait un petit graphique que j'aurais dû vous apporter et que j'ai apporté un jour à une réunion du gouvernement autour du Premier ministre, au cours de laquelle celui-ci nous appelait à la rigueur – qui étaient dans cette période sur la base 100 sont aujourd'hui à 115, c'est-à-dire qu'ils ont augmentés de 15 %, puisque nous sommes 15 % mieux servis.
La courbe de l'augmentation des effectifs du ministère des Finances est passée de 100 à 05, en dépit du fait qu'on a informatisé la comptabilité publique et qu'il n'y a plus guère d'activités douanières, à cause de la libéralisation du marché... Nous, le Quai d'Orsay, notre indice est passé de 100 à 95. Cela démontre que dans une période, où finalement il y a eu un certain laxisme, y compris de la part de ceux dont les métiers donnaient des leçons de sagesse et de rigueur, nous avons fait preuve d'une modération tout à fait remarquable. C'est ce qui me donne souvent dans les réunions de travail interministérielles l'occasion de rappeler que le Quai d'Orsay ne peut pas servir de vache à lait aux économies administratives. Mais, ayant dit cela, il n'en demeure pas moins que je suis tout à fait décidé à ce que nous apportions aujourd'hui, parce que je crois que c'est notre devoir, notre contribution à l'effort commun.
Cette adaptation, je dois vous le dire de façon très forte, est moins déterminée par des considérations d'économie budgétaire qui ne sont évidemment pas absentes, que par la nécessité d'adapter ce réseau aux mouvements du monde : ici, telle fonction qui paraissait hier nécessaire l'est moins et ailleurs, telle fonction qui n'était pas remplie hier devrait l'être aujourd'hui et devra certainement l'être plus encore demain. Il est facile de voir, par exemple, que les nécessités de la présence de notre dispositif au sein de l'Union européenne ne sont plus celles qu'elles étaient au temps des diligences, mais qu'en sens inverse, notre absence cruciale, tragique dans des zones émergentes, où l'insuffisance de notre présence – « absence » est quand même injuste –, est évidemment une grande lacune. J'observe que, dans le passé, ce mouvement a été continu. Ainsi, depuis la chute du mur de Berlin, quinze ambassades nouvelles ont été ouvertes à l'est de l'Europe. Dans les pays où nous pouvions, compte tenu de nos moyens, ouvrir une ambassade de grand format, l'administration a mis en place des ambassades dites minimales. C'est ainsi, par exemple, en Géorgie, en Bosnie ou en d'autres endroits. Par ailleurs, au cours des dernières années, cinq représentations permanentes ont été créées en raison de l'intensification des organisations multinationales qui prennent, comme vous le savez, une place croissante dans la diplomatie moderne.
De même, nous avons diminué de douze postes en quinze ans, soit près d'un poste par an, le réseau consulaire français en Europe. Depuis la création du CIMEE, le Comité interministériel des moyens de l'État à l'étranger, en février 1994, le ministère des Affaires étrangères anime et coordonne une réflexion sur l'adéquation des moyens mm priorités de l'action extérieure de l'État. Cette action est conduite avec le concours de nos ambassades et aussi en liaison avec les autres administrations, de façon à avoir une vue globale de la présence française de l'État à l'étranger, celle du Quai d'Orsay, mais aussi celle des autres administrations.
Pour l'exercice 1996, j'ai donc été amené à proposer au Premier ministre les mesures suivantes : d'abord l'ouverture de l'ambassade de pleine exercice à Achkhabad, au Turkménistan, ensuite la nomination, au moins dans un premier temps, d'ambassadeurs résidant à Paris, et effectuant des missions périodiques, dans deux pays où nous étions absents, la Mongolie à Oulan-Bator et l'Érythrée à Asmara. Dans le même temps, nous fermerons quatre ambassades à Kingston, à Freetown, à Monrovia et à Lilongwe au Malawi. Nous ouvrirons prochainement un consulat à Canton, mais nous fermerons quelques postes consulaires à Florence, à Edmonton, à Honolulu, à San-Juan de Porto-Rico et à Mons. Des rapprochements faisant jouer le principe de suppléance vont être mis en œuvre avec la DREE et la coopération. Je veux dire par là que désormais, nous allons pouvoir avoir tantôt un consulat ayant vocation économique, tantôt un poste d'expansion ayant vocation consulaire. Nous sommes tombés d'accord avec mon collègue ministre des Finances pour monter ce dispositif. Nous avons une dizaine d'expériences en vue, naturellement à parité, c'est-à-dire un poste d'expansion économique bénéficiant d'une attribution consulaire pendant qu'un poste consulaire bénéficierait de compétences économiques.
Tout ceci contribue à provoquer des synergies, à une économie de moyens et à une plus grande efficacité de notre réseau. Il s'agit de faire en sorte que la présence française soit plus efficace et soit présente là où elle ne l'était pas. Je sais bien le prix que vous attachez tous au maintien de nos postes existants. Je comprends, bien entendu, les regrets que chacun éprouvera et notamment sur place, quand on annonce la fermeture d'un consulat. Je sais l'extrême sensibilité de ces sujets, et je connais bien, comme vous, la tentation de notre pays de parler des réformes et de les reporter au lendemain. Il faut bien que, de temps en temps, nous soyons capables de prendre des décisions, de les prendre avec sagesse, avec mesure, avec modération, mais de les prendre. Si d'ailleurs nous voulons progresser là, n'ayant pas des moyens en extension permanente, il faut savoir se redéployer ici. Bien sûr nous faisons des efforts importants de formation pour nos agents. L'Institut de formation de l'administration consulaire situé à Nantes a déjà vu passer plus de 200 stagiaires en deux ans. Des crédits spécifiques ont été demandés pour la réforme de l'État, afin de mener à bien les opérations de rénovation et d'amélioration des locaux servant à l'accueil du public. Tout ceci va dans le sens de cette réforme de l'État, priorité du gouvernement à laquelle notre administration des Affaires étrangères entend apporter sa contribution dynamique.
Je voudrais aborder une autre question qui concerne les crédits d'intervention de la Direction des Français à l'étranger et des étrangers en France. Naturellement, cela a été dans la préparation du projet de loi de finances pour 1997, une priorité à laquelle j'ai été particulièrement attentif. S'agissant des frais de rapatriement, la dotation correspondante sera certes diminuée par une consolidation du gel imposé il y a quelques mois. Les crédits ouverts sur ce chapitre sont provisionnels. Ils sont très différents des crédits fermes et définitifs. Ils dépendent en réalité des besoins et de la consommation, et peuvent donc être ajustés en cours d'année si nécessaire.
Concrètement, la dotation 1997 n'induira pas une diminution du nombre des rapatriements qu'il sera possible d'effectuer et encore moins leur contingentement. Quant à l'assistance aux Français à l'étranger et aux réfugiés en France, ces moyens seront intégralement préservés.
Vous avez, Mesdames et Messieurs, le mérite en revient à votre commission des affaires économiques, consacré un intéressant débat à la présence économique française à l'étranger, faisant ainsi suite au colloque organisé le 28 mai par le président René Monory. Vos suggestions dans ce domaine me seront évidemment très précieuses. Dans la sphère de l'économie et des échanges plus qu'ailleurs, nous vivons à l'heure de la mondialisation. Le terme effraie et suscite souvent l'incompréhension. Il est, certes, porteur de quelques inquiétudes, mais il est aussi et probablement surtout porteur d'avenir. Il constitue, en tout cas, un défi qui intéresse notre présence à l'étranger.
Nous sommes la quatrième puissance exportatrice du monde, le deuxième pays exportateur par habitant. Nos entreprises se battent somme toute avec une très belle efficacité. Nous devons donc à la fois soutenir ce mouvement et en ressentir une certaine fierté.
Nous avons exprimé l'intention de donner la priorité de notre attention aux petites et moyennes entreprises. Lors de la réunion des ambassadeurs qui s'est tenue au début de ce mois, j'ai demandé aux ambassadeurs de consacrer à cet égard des efforts maximum en direction des PME et des PMI. Les grandes entreprises ont certes besoin de nous. Chaque fois que je vais à l'étranger, dans mon dossier, j'ai toujours un certain nombre de fiches qui concerne dix ou douze entreprises, dont je reparle à tout moment et en tous lieux. Je le fais d'ailleurs de bon cœur et avec beaucoup de détermination. Mais au-delà, l'amélioration et le renforcement de la présence française à l'étranger dépend de la capacité des PME à aller sur ces marchés nouveaux. Bien sûr, notre réseau de PME et de PMI est généralement formé de petites entreprises, alors que, par exemple, le réseau allemand est formé d'entreprises plus importantes, de taille moyenne. La tâche est difficile. Pour une entreprise de 400 ou 500 salariés avec un chiffre d'affaires correspondant, on a sans doute les capacités financières et les moyens humains d'aller faire l'effort d'investissements que constitue la conquête d'un nouveau marché étranger. Lorsqu'il s'agit d'une entreprise de 80 ou 100 salariés comme c'est souvent le cas, c'est autre chose. C'est souvent beaucoup plus difficile c'est parfois hors d'atteinte. Je souhaite donc que notre réseau diplomatique y consacre un grand effort. Cela a été l'objet central de la réunion des ambassadeurs, à laquelle j'avais invité mes collègues Jean-Pierre Raffarin et Yves Galland. Nous avons convenu de lancer une initiative en direction des PME en demandant à nos ambassadeurs, de bien les accueillir, d'y consacrer tous leurs soins non seulement dans leurs ambassades, d'y consacrer tous leurs soins, mais d'aller en province à la rencontre de ces entreprises pour leur tendre la main. Nous ferons une première expérience à Nantes dans quelques semaines, et à la lumière de cette expérience, nous pourrons poursuivre à travers l'ensemble des régions françaises.
Dans un autre domaine tout à fait différent et auquel, je le sais et à juste titre vous rattachez beaucoup d'importance, qui est celui de la protection sociale, je voudrais vous dire quelques mots à propos des retraites versées aux anciens salariés français en Afrique. Une étude a été demandée à ce sujet par le Premier ministre. Elle a été menée à bien par l'inspection des Affaires sociales et en liaison avec mon Département et avec le ministre délégué à la Coopération. Le rapport issu de ces travaux vient d'être remis au Premier ministre. Je ne peux donc préjuger des conclusions que celui-ci tirera ni des instructions qu'il sera amené à donner. La mission tripartite, conformément aux principaux objectifs qui lui avaient été assignés, a procédé à une analyse détaillée du fonctionnement et de la situation financière des caisses locales de protection sociale et a recensé le nombre des personnes concernées. Elle a constaté la grande disparité des situations des régimes africains de retraite.
Si elle a pu être rassurée dans le cas de certaines caisses, manifestement en voie d'assainissement, l'avenir de quelques autres n'incite pas à l'optimisme. Ce sont ces différents constats qui ont orienté ces propositions, s'agissant aussi bien de l'appui au fonctionnement des régimes locaux que de l'appel à la solidarité nationale. On ne saurait, en la matière, se cacher à la fois la complexité des mesures à mettre en œuvre et les conséquences pratiques et financières que de telles mesures pourront avoir. C'est donc un sujet que nous aurons sur notre table les uns et les autres dans les prochains mois. Naturellement, ce sera pour nous tous, pour vous je n'en doute pas, mais j'espère que vous ne doutez pas que ce sera aussi le cas pour moi, une de nos priorités.
Mesdames et Messieurs, on ne peut pas épuiser, même en une demi-heure, l'ensemble des sujets qui préoccupent nos communautés françaises à l'étranger. Je voudrais pour autant, avant de terminer, rappeler l'importance des questions de sécurité. Comment en effet, pourrais-je ne pas évoquer, en m'adressant à vous pour la première fois depuis leur mort, le sort des sept moines français, lâchement et sauvagement assassinés en Algérie au mois de mai. Comment ne pas évoquer aussi la tragique disparition, il y a quelques semaines de Monseigneur Claverie, évêque d'Oran. Ils savaient, comme tous nos compatriotes vivant dans ce pays, à quel danger ils étaient exposés. Ils avaient choisi, en toute connaissance de cause de ne pas se conformer aux conseils de retour que le gouvernement français avait donné à ses ressortissants, car, en leur âme et conscience, ils jugeaient qu'ils devaient continuer à porter témoignage de leur foi au milieu du peuple algérien. J'admire la grandeur de ce choix. Je voudrais leur rendre hommage devant vous.
Voilà, Mesdames et Messieurs. Beaucoup d'autres questions certainement retiendront votre attention. J'aurai plaisir à répondre aux interventions qui vont avoir lieu maintenant. Je voudrais que vous ayez la conviction que les services du Département, sur mes instructions mais ils n'en ont pas besoin, ils le font spontanément, sont entièrement mobilisés sur ce qui est l'une des grandes priorités de la politique étrangère de la France : servir nos compatriotes à l'étranger.