Texte intégral
Gérard Morin : On attend une marée noire sur les côtes atlantiques. Le plan Polmar-terre est-il prêt ce matin ?
Jean-Claude Gayssot : Le plan Polmar-terre a été déclenché hier. Ce que je veux dire aujourd’hui, à cette heure-ci, selon les modèles de la météo que fait Météo-France, on pense que l’impact avec la terre va se faire samedi dans l’après-midi. Mais, contrairement à ce qui se disait hier, ce ne serait pas d’abord l’île d’Yeu qui serait la première concernée, mais plutôt le littoral entre Le Croisic et Noirmoutier.
Gérard Morin : Au-dessus de l’estuaire de la Loire ?
Jean-Claude Gayssot : Ensuite, la dérive reviendrait vers le sud pour se situer dans la zone entre Saint-Jean-de-Monts et l’île d’Yeu. Je dis cela parce qu’il faut être assez prudent sur les évolutions. Il y a à la fois le vent qui joue, les courants maritimes, les courants côtiers qui ont un impact.
Gérard Morin : Est-on en mesure d’intervenir si cela se passait au Croisic, par exemple, parce que les moyens se mettent en place actuellement à La Rochelle ?
Jean-Claude Gayssot : On a fait venir, on a concentré sur cet espace, sur cette zone-là le maximum de moyens disponibles et qui, en fonction des évolutions, pourront être déplacés plutôt sur un site ou plutôt sur un autre. Actuellement, il y a une mobilisation exceptionnelle. Je crois que dans une catastrophe de ce type-là, jamais autant de moyens n’auront été déployés. Ce qui est vrai c’est que les conditions océaniques…
Gérard Morin : S’il y a des creux de huit mètres, des barrières gonflables ne serviront pas à grand-chose ?
Jean-Claude Gayssot : Bien évidemment. Déjà, un millier de tonnes a été pompée. J’espère que l’on va pouvoir continuer à pomper toute la journée.
Gérard Morin : Il y en a combien hors des soutes du bateau ?
Jean-Claude Gayssot : Selon les chiffres cela varie entre 6 000 et 10 000.
Gérard Morin : Donc, il en reste 5 à 9 000 à pomper ? Est-ce qu’il faut pomper ce qu’il y a dans les soutes ?
Jean-Claude Gayssot : Il faudra pomper ce qui est dans les soutes. J’ai fait venir un matériel spécifique, une espèce de robot qui va pouvoir vérifier quelle est la situation, comment se comportent les deux épaves qui sont à 120-130 mètres de fond. Ensuite, il faudra prendre toutes les précautions pour pomper, et notamment il faut que la mer soit calme, sinon on ne peut pas effectuer tous les barrages qui sont nécessaires pour le pompage de l’épave.
Gérard Morin : Vous, personnellement, vous êtes sur le pont jusqu’à Noël et après ? Pas de vacances !
Jean-Claude Gayssot : Tous les services de l’État sont mobilisés. Il y a 2 000 hommes qui sont déjà prêts à intervenir au point de vue de la côte. La mobilisation en mer est tout à fait extraordinaire.
Gérard Morin : Vous faites aussi appel à la population pour qu’elle donne un coup de main ?
Jean-Claude Gayssot : Oui, il y a d’ailleurs une volonté ! Je pense aux pêcheurs. Il y a une expression de solidarité qui est tout à fait engagée. Le plan Polmar-terre permet les réquisitions si cela était nécessaire.
Gérard Morin : On parle beaucoup des responsabilités : Total dit que ce n’est pas le problème de l’affréteur du bateau, celui qui paye pour le transport, c’est le problème de l’armateur, celui qui possède le bateau. Quel est votre avis ?
Jean-Claude Gayssot : Le système n’est pas bon actuellement. Actuellement, il y a des normes fixées par l’organisation maritime internationale, mais figurez-vous qu’il n’y a aucune sanction prévue pour les faire appliquer. Cela ne peut pas continuer comme cela. Je pense qu’il faut en finir avec les pavillons de complaisance. Je pense qu’il faut en finir avec un système qui consiste à rechercher le prix de transport le plus bas au détriment de la sécurité et de l’environnement.
Gérard Morin : Mais que peut votre voix ? C’est un domaine industriel et financier international très important.
Jean-Claude Gayssot : C’est un domaine international. A l’échelle de la France, j’ai renforcé les dispositifs en ce qui concerne les contrôles, les moyens de surveillance matériels et humains. Il faudra doubler les effectifs de contrôle d’ici deux ans. Nous le ferons. Mais, je suis décidé.
Gérard Morin : Si un bateau n’est pas aux normes, vous l’empêcherez de partir d’un port français ?
Jean-Claude Gayssot : Absolument ! Il faut arriver à ce que, à l’échelle européenne, il y ait un système de sanctions communs, applicables par tous les États, y compris pour les bateaux des pays tiers.
Gérard Morin : Vous profitez de la présidence française dans la communauté européenne ?
Jean-Claude Gayssot : Oui, et sans attendre, je suis intervenue dès hier auprès de la Commission européenne qui l’a mis dans son programme de travail pour l’an prochain. Mais pour insister et pour que nous fassions vite quelque chose, j’ai écrit au pétrolier également…