Texte intégral
Mesdames et Messieurs les dirigeants d’entreprises,
Mesdames et Messieurs les nouveaux créateurs d’entreprise,
Mesdames et Messieurs,
C’est avec un très grand plaisir que je vous rejoins aujourd’hui sur le Salon des micro-entreprises, qui fête cette année sa 14ème édition ! Je suis particulièrement heureuse d’intervenir en clôture d’une conférence inaugurale opportunément consacrée aux "entrepreneurs qui réussissent en réseau".
Les témoignages des conférenciers qui se sont succédé cet après-midi ne laissent pas place au doute : le réseau est un formidable moteur pour le développement des entreprises.
On sait que pas moins d’un quart du chiffre d’affaires des TPE proviennent du réseau relationnel de leur dirigeant. Les experts s’accordent aussi pour dire que la pérennité d’une société passe en moyenne de 55% à 70% quand un créateur est accompagné par un réseau !
Je veux insister sur ce point : dans le monde de l’entreprise, la réussite ne peut s’envisager en "solitaire". Elle résulte nécessairement d’une confrontation permanente des idées, d’un échange entre ceux et celles qui portent un projet et les professionnels aguerris dont l’expérience éclaire le plus souvent sur la bonne manière de le concrétiser.
Confronter les idées pour les faire accoucher d’un projet et transformer ce projet en création d’entreprise, je sais que c’est l’étape par laquelle, mesdames et messieurs, beaucoup d’entre vous aujourd’hui êtes passés ou que vous vous apprêtez à franchir. On me confiait tout récemment que quatre mois à peine après le Salon, ce sont près d’1/3 de ses visiteurs porteurs d’un projet qui le concrétisent en immatriculant leur entreprise.
Je sais aussi que derrière les 20 000 visiteurs qui chaque année se rendent au Salon pour s’informer, consulter des experts, rencontrer des partenaires, il y a des millions de Françaises et de Français qui songent à créer leur entreprise. C’est à tous ceux là, aux nouveaux créateurs, aux dirigeants et aux salariés d’entreprise déjà bien établis que je veux rendre hommage pour leur esprit d’initiative. Leur foi dans l’esprit d’entreprendre.
Car c'est la démultiplication de ces initiatives qui permet aujourd'hui encore à l'économie française de stimuler la croissance, l’investissement et l’emploi de demain.
Je veux le dire aussi avec force : tous les créateurs – je dis bien TOUS les créateurs- contribuent à cette dynamique de la création et du développement d'entreprise.
Qui peut aujourd'hui sérieusement contester que si la France a rattrapé au cours des quinze dernières années son retard en matière de création d'entreprises – chaque année, ce sont 500 000 nouvelles entreprises qui voient le jour- elle doit aussi ce résultat aux micro-entrepreneurs alors que 97% de nos entreprises comptent actuellement moins de 20 salariés dans leurs rangs ?
Pourquoi laisser penser d’ailleurs, par je ne sais quel raisonnement à courte vue et élitiste, qu’il y aurait une quelconque légitimité à distinguer entre un "Entrepreneur" avec un grand E et un "entrepreneur" avec un e minuscule ? Le premier serait constitué de l’ensemble des statuts classiques. Le second renverrait à l’auto-entrepreneur.
Dois-je rappeler que plus de 50% des entreprises nouvellement créées proviennent du régime de l'auto-entrepreneur ? J'ai entendu beaucoup de choses sur ce régime, souvent aussi inexactes que blessantes. Pour ma part, je n'oublie pas ce que représente le statut auto-entrepreneurial qui a été à l’origine de près de 4,5 Mds € de chiffre d’affaires pour l’économie française en 2011.
Je suis passée le dire tout à l’heure à Grégoire LECLERC, Président de la Fédération des Auto-Entrepreneurs (FEDAE) sur son stand. Je le dirai aussi prochainement à François HUREL, qui est à la tête de l’Union des Auto-Entrepreneurs (UAE). Et, surtout, à travers eux, je veux adresser à cet instant un message sans équivoque à destination de toutes celles et ceux, actifs, anciens demandeurs d'emplois, seniors et parfois même fonctionnaires qui ont rejoint les rangs de l’auto-entreprise : le Gouvernement mesure bien la contribution qui est la vôtre à la création de richesse économique dans notre pays. Nous ne vous oublions pas. Nous nous appuierons sur vous.
Au sein de ce Gouvernement, laissez-moi vous dire que je serai la voix de toutes celles et de tous ceux qui créent, qui imaginent, qui prennent des risques, qui réussissent, parfois échouent aussi… mais entreprennent, apprennent et nous apprennent aussi de leurs échecs et nous donnent une formidable leçon d’énergie et de vitalité.
Car on peut réussir de bien des façons. Il n'y a pas de "moule" unique du créateur. J'ai salué les auto-entrepreneurs. Je veux rendre hommage à toutes celles et ceux qui sont passés à l'acte ou s'apprêtent à le faire quel que soit le statut de leur entreprise ou le stade de son développement.
Les réussites françaises sont multiples et souvent exemplaires. J'ai rendu visite tout à l'heure à une entreprises française du numérique, VIADEO, qui a écrit une belle histoire. Cette entreprise, qui a su surfer sur la vague des réseaux sociaux, compte aujourd’hui déjà 45 millions de membres et enregistre 30 000 nouvelles inscriptions par jour alors même que la concurrence fait rage dans ce domaine !
Cette réussite est loin d’être isolée. Le tissu productif français s’adapte et se renouvelle sans cesse. Le Gouvernement est entièrement mobilisé pour aider les entreprises nouvelles qui veulent suivre le même chemin.
Je veux redire ici que l'effort sans précédent accompli à l’occasion du projet de Budget 2013 pour redresser la trajectoire des finances publiques s’est construit avec le souci constant de protéger les petites et moyennes entreprises.
Je prends un exemple : le projet de loi de finances prévoit la non déductibilité d’une partie des intérêts d’emprunts contractés par les entreprises. Mais nous avons posé le principe d’une franchise de 3 millions d’euros de charges financières, déductibles à 100%, ce qui permettra de préserver les petites entreprises de cette mesure.
Qui pourra bien s’offusquer de ce rééquilibrage alors que l’on sait qu’aujourd'hui, c'est grâce à des mécanismes d'optimisation fiscale tels que la déductibilité des intérêts d’emprunt que les grands groupes paient jusqu’à 14 points de moins de taux d'imposition effectif sur les bénéfices que les PME ? Notre intention n'est pas de pénaliser les grandes entreprises, vous l’aurez compris, mais de demander à chacun un effort proportionné à la richesse qu’il dégage.
L’exemplarité et l’équité sont à ce prix. L’efficacité économique aussi. Car plus les entreprises françaises sont petites et plus elles sont vulnérables, surtout lorsqu’elles nourrissent une ambition de croissance rapide. Songez qu’après cinq ans, seules 1,8% des entreprises nouvelles créées franchissent le cap des 10 salariés !
C’est ce phénomène que les experts appellent pudiquement le « plafond de verre ». On doit tout faire pour le briser. C’est tout le sens des engagements déjà pris par le Président de la République et dont la mise en oeuvre prochaine garantira le développement des petites entreprises malgré la crise.
Il y a bien sûr la Banque publique d’investissement (BPI) destinée à simplifier l’offre publique de financement et qui sera très largement dévolue au financement des entreprises dont nous voulons soutenir le développement : les PME, dans leur diversité, ainsi que les Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI).
Mais nous voulons donner aussi un véritable élan à l’innovation dans notre pays. Avec l’ensemble du Gouvernement, je ne me résous pas à ce qu’à peine un tiers de nos entreprises aient recours, faute de moyens, à l’innovation alors que plus de la moitié des entreprises allemandes et nordiques y accèdent. Pour combler ce retard, le crédit d’impôt recherche (CIR) sera étendu aux dépenses innovation et le dispositif de soutien aux Jeunes Entreprises Innovantes (JEI) sera renforcé.
Des inquiétudes se sont néanmoins exprimées. J’ai tenu personnellement à y répondre. A mon initiative, nous avons reçu jeudi 4 octobre avec Pierre MOSCOVICI et Jérôme CAHUZAC des représentants des PME, notamment issues des secteurs à haute technologie, pour débattre de la fiscalité des plus-values mobilières, que le projet de loi de finances propose de réformer.
Les malentendus ont - je l’espère - été dissipés. A l’issue de la discussion, le Gouvernement a décidé d’amender son dispositif dans le cadre du débat parlementaire. Le principe de justice, qui veut que les revenus du capital et ceux du travail soient traités à égalité, doit prévaloir. Pour autant, les plus-values réalisées par un entrepreneur qui cède son entreprise après l’avoir lui-même développée méritent un traitement spécifique. Loin d’être une rente, cette plus-value rémunère la prise de risque du chef d’entreprise.
Mais, dans l’ombre de ce débat très circonstancié et non dépourvu d’arrière-pensées partisanes, de quelles attentes plus profondes les entrepreneurs me font-il part inlassablement depuis mon arrivée au Gouvernement ? Elles se résument, à vrai dire, en une phrase simple : "Simplifiez-nous la vie et permettez-nous d'évoluer dans un environnement plus propice à l'esprit d'initiative!".
Le chantier est assurément immense. Certains économistes, sans doute de bonne foi, me disent qu’une majorité d’entreprises de petite taille adoptent trop souvent un comportement "défensif" dans notre pays. Qu’elles ont une propension naturelle à se rétracter plutôt qu’à s’ouvrir à de nouveaux débouchés, m’expliquant par exemple que 90% d’entre elles concentrent leur clientèle à moins de 20 kilomètres de leur siège social.
C’est sans doute vrai. Mais s’est-on seulement posé la question des freins à leur dynamique d’expansion ?
Ce n’est pas le repli sur soi, la rétractation qui est le mouvement naturel de l’être humain en général ou de l’entrepreneur en particulier.
Mais, comprenez-moi bien : lorsqu’à l’occasion de la réponse à un appel d’offre, l’on exige d’une micro-entreprise une multiplicité de pièces qui lui avaient déjà été demandées lors d’une précédente consultation, ne pousse-t-on pas ses dirigeants à adopter une posture "défensive" et à limiter, de facto, leur projection commerciale ?
Lorsqu’un entrepreneur souhaite - pour se développer, investir, innover ou encore exporte - identifier un point de conseil, d’accompagnement financier ou stratégique et qu’il est placé face à un "maquis d’aides publiques aux entreprises", s’étonnera-t-on du malaise qu’il ressent, de la difficulté qu’il éprouve à se repérer parmi ces dispositifs qui n’ont pas toujours été pensés pour répondre à ses besoins spécifiques ?
Ces exemples, je le vois bien, vous touchent. Ils renvoient à des réalités que chacun et chacune d’entre vous a rencontré au moins une fois, si ce n’est à de nombreuses reprises.
Je suis bien résolue à faire évoluer ces réglementations, ces carcans devrais-je dire, et tout un ensemble de pratiques anachroniques qui les accompagnent et fragilisent la croissance voire, dans certains cas, la survie de vos entreprises :
- pour se faire, je crois d’abord indispensable d’alléger les contraintes réglementaires qui pèsent sur les entreprises, notamment dans les domaines techniques : songez qu’aujourd’hui un grand nombre de réglementations françaises sont beaucoup plus exigeantes que ce qu’imposent les directives européennes. On ne peut tout de même pas demander aux chefs d’entreprise français de systématiquement courir avec un boulet aux pieds tout en leur demandant d’atteindre des objectifs ambitieux de croissance et d’emplois ! ;
- j’ai commencé mon propos en rappelant tout à l’heure l’importance de la culture de réseau dans le développement des entreprises. Les premiers partenaires de votre croissance, les premiers auxiliaires de votre réussite, doivent être les grands groupes. Avec Arnaud MONTEBOURG, nous avons décidé d’écrire une nouvelle page de la relation entre les grandes entreprises et les PME dans notre pays.
Je vous annonce que nous nommerons dans les tous prochains jours à la fois un Médiateur des relations inter-entreprises pour prendre la succession de Jean-Claude VOLOT et, c’est une nouveauté, un Médiateur aux marchés publics, placé auprès du premier, et qui sera chargé d’apporter une réponse rapide aux entreprises en difficulté en raison de retards de paiement ou de manquements des administrations à l’occasion de la commande publique. Nous pensons qu’il est de notre devoir de tout faire pour qu’émerge au plus vite en France une alliance durable et efficace entre les principaux acteurs du tissu productif, privilégiant plus nettement encore qu’aujourd’hui la coopération entre "petits" et "grands" ;
- je veux, enfin - vous l’aurez bien compris - encourager l’esprit d’initiative et faire sauter les différentes barrières à la création et au développement des entreprises dans notre pays. J’ai demandé cet été à Philippe HAYAT, un entrepreneur de renom, de me faire des propositions pour valoriser l’esprit d’entreprise en France, chez les jeunes, chez les femmes, chez toutes celles et ceux qui ont envie de créer mais qui ne le font pas toujours de peur d’échouer, de peur qu’on ne les aide pas. Je crois qu’il faut changer le logiciel culturel français pour qu’enfin on puisse donner ses lettres de noblesse à la prise de risque…et à son corollaire, l’échec. Je veux valoriser l’échec utile. Aux Etats-Unis, un échec, c’est une expérience ; en France c’est une porte qui se ferme. Notre pays a évolué ces dernières années, mais il reste un immense travail à faire sur les mentalités. Aussi, je vous annonce qu’un Haut Responsable à l’entrepreneuriat va être nommé par le Premier ministre et placé auprès de moi en tant que ministre des PME. Il sera chargé de mettre en oeuvre les propositions formulées dans le rapport HAYAT pour diffuser l’esprit d’entreprendre au sein des jeunes générations.
Pour tous ces chantiers - simplifier la vie des entreprises, développer la culture partenariale, encourager l’esprit d’initiative - je veux pouvoir compter sur vous, mesdames et messieurs les dirigeants des micro-entreprises.
A une époque où il est possible de basculer dans la tentation aussi impuissante que vaine d’un discours déploratif et résigné, je voudrais vous dire - au contraire - tout l'espoir que j'ai quant à vos succès à venir. Nos succès à venir. Ceux des entreprises françaises, à l’intérieur et à l’extérieur de nos frontières. Car le "génie français", hier comme aujourd’hui, ne demande qu'à être encouragé pour s'exprimer.
Mesdames et Messieurs, n'ayons pas peur de réussir ni d'encourager ceux qui se projettent, malgré les embûches de toutes sortes, vers le succès !
Que vous soyez nouveau créateur ou dirigeant expérimenté, c’est grâce à votre mobilisation, grâce à votre détermination aux côtés de la mienne, que nous bousculerons les habitudes et ferons émerger ensemble une culture plus propice à la conquête économique !
Je vous remercie pour votre attention.
Source http://www.redressement-productif.gouv.fr, le 11 octobre 2012