Texte intégral
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Bienvenue Marc FESNEAU, bonjour.
MARC FESNEAU
Merci, bonjour.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
D'abord, c'est une évidence, Bruxelles, après une nuit blanche ou une nuit noire, les 28 n'arrivent pas à se mettre d'accord, ils sont incapables de trouver quatre, ou cinq noms maintenant, c'est une crise.
MARC FESNEAU
Non, ce n'est pas une crise, c'est habituel à Bruxelles. Quand vous regardez les épisodes précédents, à chaque fois qu'il y a eu un renouvellement de la Commission, il y a toujours eu des moments un peu épidermiques.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous pensez que ça renforce l'Europe, et l'image de l'Europe ?
MARC FESNEAU
Non, ça ne renforce pas l'Europe à ce stade, mais l'important c'est de sortir avec une équipe, les quatre ou cinq, la Commission, le Parlement européen, la BCE, la diplomatie, avec quatre ou cinq personnalités qui soient capables de faire avancer l'Europe. On est en plus à un moment particulier, puisque l'Europe aussi va choisir son budget dans l'année qui vient, et donc c'est quand même important qu'on ait des gens qui soient solides, y compris face aux puissances américaines, chinoises, russes, et donc c'est important.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais celles qui sont nommées sont affaiblies d'ores et déjà.
MARC FESNEAU
Non, je ne crois pas…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'Europe donne l'image de la division, avec des majorités tournantes et bloquantes.
MARC FESNEAU
Vous êtes très connaisseur, comme moi, de ces sujets-là, européens, vous avez vu des tas d'épisodes où dans, au bout de la nuit, ou au bout de deux nuits, on a réussi à se mettre d'accord, c'est ça qui est important. Alors, il y a une configuration nouvelle aujourd'hui, au Parlement européen, c'est que le PPE, ou le PS européen, n'ont pas à eux seuls la majorité, donc il faut tenir compte de cette nouvelle configuration, et c'est ça qui est à l'oeuvre.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Là ils sont en train de prendre le petit-déjeuner, mais peut-être ils vont démentir ce qu'on est en train de dire…
MARC FESNEAU
Et peut-être que dans 10 minutes ils diront le contraire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il est même question d'un troisième sommet à la mi-juillet.
MARC FESNEAU
Oui, c'est ce qu'on a dit, si jamais ils n'arrivaient pas à se mettre d'accord aujourd'hui, mais vous savez, c'est souvent au bout de la nuit que les choses se font, et on est au bout de la nuit si je peux dire, ou au début de la matinée, donc on verra bien ce qui ressort de ce compromis, si compromis il y a.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous n'êtes pas déçu, vous l'européen ?
MARC FESNEAU
Non, je serais déçu que nous fassions quelque chose qui relève, non pas d'un compromis, mais d'une compromission, sur les objectifs qu'on a en termes climatique, en termes économique, en termes…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est quoi la compromission ?
MARC FESNEAU
Le fait que ce soit simplement les équilibres partisans et qu'on ait voulu faire plaisir simplement à tout le monde pour obtenir un accord, je pense qu'on a besoin de personnalités fortes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais est-ce que vous voyez apparaître, là, une défense de l'intérêt général de l'Europe, une vision de l'avenir de l'Europe, ou simplement des marchandages et des intérêts de boutiquiers ?
MARC FESNEAU
Moi il me semble que le président de la République, et je pense que d'autres opérateurs – si je peux dire – européens, ont envie de mettre en lumière des personnalités très fortes au Parlement européen, à la Commission européenne, et c'est ça qui serait une victoire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ils ont raison, mais on voit bien qu'ils ont du mal, on les bloque…
MARC FESNEAU
On les bloque, mais c'est normal.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le PPE, le PS…
MARC FESNEAU
Mais, on voit bien qu'on est en train de bouleverser, et c'est ce qui s'est passé au Parlement européen, des équilibres qui étaient des équilibres récurrents, le PPE était généralement en tête et généralement c'était un candidat du PPE, et c'est ça qu'on est en train de bouleverser, c'est une bonne nouvelle.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il y a comme candidat du PPE, peut-être aussi, avec le soutien d'ORBAN – surprenant d'ailleurs – d'ORBAN et des pays de l'Est de l'Europe, un soutien à Michel BARNIER.
MARC FESNEAU
Oui, Michel BARNIER était en lice, pas parce qu'il était soutenu par Monsieur ORBAN, mais simplement parce qu'il a été un des négociateurs, il est l'un des négociateurs du Brexit, et il a fait valoir, à bon droit me semble-t-il, les intérêts européens.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il y a un éditorial des Echos, vous l'avez peut-être lu ce matin, qui dit « l'Europe a des choses à dire, mais son absence d'incarnation et d'ambition est, pour elle, un handicap », et pour nous aussi.
MARC FESNEAU
Oui, pour nous aussi, et c'est bien ça ce qui est à l'oeuvre aujourd'hui. L'absence d'incarnation forte – on se souvient les uns et les autres du moment où Jacques DELORS était président de la Commission européenne – l'absence d'inca – ou Simone VEIL président du Parlement européen – on a besoin de personnalités fortes dans un moment où on a besoin de peser lourd dans le monde, face aux Chinois, aux Américains par exemple.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et là ils doivent se marrer, Xi JINPING et Donald TRUMP.
MARC FESNEAU
Là, pour l'instant, ils doivent regarder.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ils doivent dire « on n'a pas de risque avec une Europe concurrente, forte, indépendante. »
MARC FESNEAU
Si nous étions dans le plus petit dénominateur commun, évidemment ils auraient lieu de se réjouir, mais j'espère que nous sortirons avec autre chose.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Nous aussi, mais c'est normal qu'on joue les provocateurs…
MARC FESNEAU
C'est normal.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Dans un tel moment où on peut être déçu qu'il n'y ait pas… Est-ce qu'il ne faut pas revoir l'agenda et la méthode de désignation des… parce qu'ils ont combien de mois avant d'arriver là ?
MARC FESNEAU
Je ne suis pas sûr qu'il y ait de délai d'ailleurs, pour tout vous dire, le 26 mai ont eu lieu les élections européennes, le 3 juillet il y a normalement l'élection du président du Parlement européen, c'est un contingent d'1 mois, ce qui est parfois un peu court, quand vous regardez la plupart des gouvernements européens ou mondiaux, il y a un certain temps avant de nommer un certain nombre de gens, on verra.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
J'espère qu'on n'attendra pas trop longtemps.
MARC FESNEAU
Non.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais dans de telles conditions, comment croire que l'Europe sera capable d'affronter les grands défis concrets qui touchent tous les Européens, chaque citoyen Européen et Français, et vous l'avez dit, sur la migration, le climat, les grands problèmes, les GAFA, etc., comment ?
MARC FESNEAU
Mais, les Français et les Européens croiront à l'Europe quand il y aura des personnalités susceptibles de l'incarner, et c'est ça qui est en jeu en ce moment. Là on est dans les moments qui sont toujours les moments difficiles et les moments pas les plus agréables, qui sont les moments des négociations, qui se passent à Bruxelles, mais en sortira, s'il en sort quelque chose de positif, les Européens le reconnaîtront, j'en suis certain.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est drôle d'avoir un commentaire à un événement qui n'a pas eu lieu…
MARC FESNEAU
Qu'on espère avoir lieu.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais qui en train, peut-être, d'avoir lieu, qui est un événement historique pour l'Europe.
MARC FESNEAU
C'est un moment historique pour l'Europe, c'est pour ça que ça mérite le temps.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et on peut espérer que nous soyons interrompus pendant la discussion avec les résultats qui viendraient de Bruxelles.
MARC FESNEAU
C'est tout ce qu'on souhaite.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ça n'arrête pas, une grosse chaleur est prévue après la canicule qui devrait recommencer. Quelles leçons votre gouvernement tire-t-il déjà, par exemple pour les écoles, est-ce qu'il faut qu'elles soient ouvertes, fermées, etc., est-ce qu'il ne faut pas revoir la construction, la végétalisation des bâtiments ?
MARC FESNEAU
Il y a plusieurs leçons. D'abord la leçon de 2003 a été tirée, puisque manifestement cet épisode s'est mieux passé – moi je voudrais saluer au passage, et ce n'est pas pour le dire simplement devant vous, les services d'urgences qui se sont beaucoup mobilisés pour faire en sorte que les choses se passent au mieux - donc les leçons ont été tirées de 2003. La deuxième chose, c'est qu'il va falloir – c'est du moyen et long terme – que sur un certain nombre de bâtiments, que sur un certain nombre d'activités, on puisse se projeter, regarder, quand on a ces épisodes, qui malheureusement manifestement vont se reproduire de plus en plus, comment on peut faire en sorte de prévenir et, à la fois par la construction, à la fois par comment on pense la ville. On voit bien qu'il y a un certain nombre de villes qui manquent de végétalisation et on sait à quel point la végétalisation est un élément de rafraîchissement dans les communes. Et puis il y a un dernier point, on a vu les événements du Gard, je pense aux viticulteurs en particulier, c'est comment on va réussir à adapter l'agriculture, parce qu'il y a un certain nombre de phénomènes climatiques, désormais, qui remettent en cause l'agriculture et durablement.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'eau.
MARC FESNEAU
L'eau, et aussi le fait qu'un certain nombre de récoltes soient…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Produit précieux, l'eau.
MARC FESNEAU
Oui…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Pour éviter des rationnements et des réductions…
MARC FESNEAU
Ça veut dire que quand on est en période de trop d'eau, il faut pouvoir en partie la stocker, et ça veut dire aussi qu'il faut qu'on ait des cultures qui soient sans doute moins consommatrices d'eau.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
…ce sont les écologistes et les Verts qui bloquent les retenues d'eau.
MARC FESNEAU
Pas toujours, pas toujours. Ils bloquent souvent, pour un certain nombre d'entre eux, les grands barrages et les grandes retenues d'eau, mais il me semble que ce qui étaient des choses qui datent d'il y a quelques siècles, c'est-à-dire de retenir à la mesure de chaque exploitation pour pouvoir faire en sorte qu'au moment où on manque d'eau on puisse la mobiliser, c'est une chose importante. Et puis on a besoin d'avoir de la recherche, et de la recherche en agriculture, avec des essences qui permettent de résister à la chaleur.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et ça commence quand ?
MARC FESNEAU
Là on est déjà dedans. Quand vous discutez avec…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Je veux dire pour l'urbanisme, il faudrait dire que ça commence aujourd'hui, ou demain.
MARC FESNEAU
On ne passe pas de l'ombre à la lumière, Monsieur ELKABBACH. Il y a des communes, qui dans un certain nombre de cas, commencent déjà à penser la ville comme ça, mais vous voyez bien que quand vous transformez la ville, quand vous aménagez une place, vous ne le faites pas du jour au lendemain, mais il faut le faire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
J'ai lu que Yannick JADOT propose des congés canicule.
MARC FESNEAU
Je ne vois pas très bien le sens de ça, le congé canicule…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais vous pourrez proposer, par exemple pour l'hiver, un congé froid.
MARC FESNEAU
Oui, c'est ce que j'allais dire, pourquoi pas un congé aussi au moment où on a des épisodes de tempête, des épisodes de… je pense que ce n'est pas une bonne façon de prendre les choses. Ce n'est pas une question de congés, c'est comment on…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc il y a une vision…
MARC FESNEAU
Si Monsieur JADOT veut dire, comment on aménage le travail – et d'ailleurs c'est des choses qui sont déjà à l'oeuvre – pour commencer plus tôt le matin, pour finir plus tôt en début d'après-midi, c'est ce que font un certain nombre de pays qui subissent ces canicules, oui, mais enfin, le principe du congé canicule est un drôle de principe.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
La Cour de cassation vient de se prononcer pour l'arrêt des soins pour Vincent LAMBERT, sa mère est en ce moment, pour plaider sa cause, aux Nations Unis, on verra ce que les Nations Unis peuvent dire face à la justice. Ses médecins de Reims sont, ou seraient donc libres d'appliquer la décision de la Cour de cassation. Est-ce que vous êtes d'accord pour qu'elle soit appliquée ?
MARC FESNEAU
Mais il faut respecter les processus. Alors, le problème, c'est qu'on essaye à la fois de faire entendre la raison, la raison médicale, la raison juridique, et en même temps on est face à des cas individuels et des cas humains, et donc c'est à la fois faire attention, dans les mots, à ne pas heurter ce que peut être la conscience d'une mère ou d'un père, qui voit son fils tétraplégique et qui, au fond, a envie à toutes forces d'essayer de le maintenir en vie…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Pour être concret, vous, vous sentez plus proche de la mère ou de l'épouse ?
MARC FESNEAU
Non, mais la question n'est pas d'être proche de la mère ou de l'épouse, la question c'est de respecter les processus. Il y a une loi Claeys-Leonetti qui a été votée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, si j'en ai bonne mémoire, c'était, me semble-t-il, en 2005, c'est une loi qui dit « l'acharnement déraisonnable. » Manifestement les médecins ont décidé et ont considéré qu'on était dans cette structure-là.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et vous ?
MARC FESNEAU
Mais je n'ai pas…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais si vous aviez – vous gouvernez – si vous aviez la décision finale, qu'est-ce que vous décideriez ?
MARC FESNEAU
Monsieur ELKABBACH, pardon de ne pas vouloir répondre à cette question-là, parce que je ne crois pas que ça relève du champ du politique.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ah !
MARC FESNEAU
Le politique il a posé une loi, c'est aux médecins et aux juristes de donner…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Ils se débrouillent. Ils prennent la responsabilité.
MARC FESNEAU
Non, ils ne se débrouillent pas. Non, ils ne prennent pas leur responsabilité. Je ne suis pas médecin, je ne connais pas le cas personnel de Monsieur LAMBERT, je ne sais pas dire moi, parce qu'il y aurait quelque chose…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais quand la maman de Vincent LAMBERT va aux Nations Unies chercher un soutien politique international ?
MARC FESNEAU
Mais c'est bien son droit que d'aller chercher toutes les voies et moyens, mais je vois d'abord une famille qui est extrêmement déchirée, entre les parents et l'épouse. Ça fait penser aussi à une chose, je pense que – et d'ailleurs Agnès BUZYN l'a rappelé à plusieurs reprises – c'est de pouvoir, avant qu'arrive ce genre d'événement dramatique, donner ses instructions pour savoir dans quelles limites chaque…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc le politique que vous êtes dit, même s'il est ministre…
MARC FESNEAU
Non, le politique il a posé une loi, et la loi elle dit que c'est aux médecins, avec les familles, de poser le diagnostic…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc, si les médecins de Reims décident qu'il faut appliquer…
MARC FESNEAU
Mais oui, nous n'avons pas à intervenir sur le processus des médecins.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
La Cour de cassation…
MARC FESNEAU
Ni sur la Cour de cassation. Il faut respecter les institutions et respecter le corps médical.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Elle s'appelle Carola RACKETE, elle a 31 ans, elle pilotait le navire humanitaire « Sea-Watch 3 » qui avait à son bord 40 migrants, elle les a sauvés, elle les a ramenés à Lampedusa malgré les barrages de la police et la volonté de Matteo SALVINI. Ça l'a fâché, le ministre de l'Intérieur la met en prison. La peine est exemplaire, mais est-ce qu'elle est juste, à votre avis ?
MARC FESNEAU
Je ne crois pas que le message qu'on puisse envoyer à quelqu'un qui sauve 40 personnes soit le message de la mettre en prison, c'est une chose assez simple, ça ne me paraît pas conforme à l'idée qu'on se fait du droit humanitaire, si on peut dire les choses comme ça. Ça ne veut pas dire que ça résout pour toujours la question de l'immigration…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Non, mais une ou deux questions. Si elle était entrée dans un port français, qu'est-ce qui serait arrivé ?
MARC FESNEAU
Je ne crois pas qu'elle aurait été mise en prison.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous ne croyez pas ou vous en êtes sûr ?
MARC FESNEAU
Non mais, je ne crois pas qu'elle aurait été mise en prison. On voit bien la politique de Monsieur SALVINI, la politique de Monsieur SALVINI est une politique de l'exemple et parfois du coup d'éclat. Cette femme, elle pilote un bateau qui a secouru des gens, donc il faut bien faire, comment dirais-je, accoster quelque part, et donc la question c'est la question de la solidarité européenne et de la solidarité à l'endroit des migrants.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Surtout qu'il y a d'autres migrants encore.
MARC FESNEAU
Est-ce que l'idée de sauver quelqu'un, ou quelques-uns – là on est sur 40 personnes – relève du judiciaire et de la prison ? Il ne me semble pas.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc vous demandez sa libération, en tant que Français…
MARC FESNEAU
Il me semble que comme citoyen…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Membre du gouvernement français aujourd'hui, vous avez au moins la liberté de vous engager, de dire on veut sa libération.
MARC FESNEAU
Comme citoyen, il y a quelque chose d'illogique à mettre quelqu'un en prison parce qu'il a sauvé des citoyens, voilà. Après, qu'il y ait des questions de passer dans les eaux territoriales ou d'enfreindre la loi, mais ça ne relève pas de la prison.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et ces gestes de solidarité, de générosité, ne méritent pas le procès, la prison ?
MARC FESNEAU
On ne met pas en prison quelqu'un qui a exercé un geste de solidarité, sinon quel est le message qu'on envoie au fond, dans le monde ?
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est vrai que l'Europe, quand elle sera prête, la nouvelle, elle devra trouver des solutions pour les questions de migrations…
MARC FESNEAU
Mais, l'Europe, vous avez raison, parce que l'Europe elle devra trouver des réponses aux questions migratoires, et nous aussi, parce que c'est faute d'avoir trouvé des questions et d'avoir laissé les pays, et l'Italie en premier chef, ce n'est pas Monsieur SALVINI, mais ceux qui étaient là avant lui, d'avoir laissé un certain nombre de gens arriver en Italie, en disant, une fois qu'ils étaient en Italie, « ce n'est plus le problème de l'Europe », alors que c'était le problème de l'Europe, qui fait qu'on est dans ces situations-là, on a une responsabilité collective. La géographie a mis l'Italie là, ce n'est pas la faute des Italiens, c'est la tectonique des plaques…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
La Grèce, l'Italie etc.
MARC FESNEAU
Il y a la Grèce, l'Italie, et donc c'est à nous, avec les Italiens, avec les Grecs, et avec les autres, de trouver des solutions.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais pour Carola RACKETE vous dites…
MARC FESNEAU
Mais vous voyez bien le message qu'on enverrait au monde et à des gens, c'est de dire, le fait de sauver quelqu'un ça relève de la prison, vous voyez bien qu'il y a un problème quand même ! C'est le simple bon sens et la simple humanité.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est ce que vous dites ce matin, même avec beaucoup de prudence, c'est ce que vous dites à SALVINI.
MARC FESNEAU
Oui, c'est le simple principe de l'humanité.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce qu'il faut interdire le Rassemblement de Marine LE PEN ?
MARC FESNEAU
Le Rassemblement de Marine LE PEN, c'est-à-dire ?
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Le parti.
MARC FESNEAU
Non.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce qu'il faut l'interdire ? Est-ce qu'il faut l'isoler, je ne dis pas l'incarcérer, mais est-ce qu'il faut l'isoler, elle ?
MARC FESNEAU
Non mais, on est dans un champ démocratique, dès lors qu'elle ne serait plus dans le registre démocratique, les questions se poseraient. Après, qu'on ait besoin, avec Marine LE PEN, d'être très clair, c'est-à-dire de dire qu'il ne peut pas y avoir d'alliance, il ne peut pas y avoir de compromis, il ne peut pas y avoir de compromission, mais on n'est pas dans le champ de l'interdiction démocratique.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Absolument pas, nous non plus, elle est à l'Assemblée nationale, au Parlement européen…
MARC FESNEAU
Il y a des gens qui votent pour elle.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Elle est reçue à l'Elysée, etc. Ma question : pourquoi cette esclandre parce que Marion MARECHAL est invitée à un débat contradictoire pour le MEDEF, qu'est-ce que c'est ce tollé, cette hypocrisie ?
MARC FESNEAU
Moi je n'ai pas compris honnêtement – alors après c'est la liberté du MEDEF - mais l'intérêt qu'il y avait pour le MEDEF à interroger ou à mettre dans un débat Marion MARECHAL-LE PEN, dont je ne connais pas particulièrement la compétence en termes économique, mais je ne lui fais pas grief de ça, et je ne vois pas quel était l'intérêt, sauf l'idée de vouloir mettre en scène quelque chose – je crois qu'il y avait des gens aussi de la France Insoumise…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui, d'autant plus que sous la pression le MEDEF s'est ravisé et a annulé.
MARC FESNEAU
On n'a pas besoin d'avoir des populistes pour parler du populisme, voyez, parce que sinon, si on pousse cette pelote-là on peut aller très loin dans la dérive.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Oui, mais on a invité les Insoumis et personne…
MARC FESNEAU
Oui, les Insoumis ne viendront pas non plus, si j'ai bien compris, au MEDEF, mais je pense qu'il n'y a pas à mettre en scène ça, il y a à travailler sur quels sont les phénomènes qui font pousser les populismes et comment on lutte contre les populismes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Mais entre l'inviter, puis céder, la décommander, quelle est la faute la plus sérieuse ?
MARC FESNEAU
Oh, je n'en sais rien. on n'a jamais intérêt à se lancer dans ce genre de chose quand après c'est pour reculer, je pense que les deux sont, d'une certaine façon, regrettables, mais je pense qu'il y avait quelque chose d'iconoclaste à inviter à l'Université d'été du MEDEF quelqu'un qui, au fond, est quelqu'un qui porte la déstructuration de la société française, la société politique française. Marion MARECHAL-LE PEN, elle ne rêve que d'une chose, c'est de renverser tout ça. Je ne vois pas très bien ce que ça apportait au débat. Après elle a le droit de penser ce qu'elle a envie de penser !
JEAN-PIERRE ELKABBACH
On peut être contre, évidemment, mais la démocratie, si elle est forte, son rôle c'est de convaincre, même ses adversaires, mais ceux qui veulent la détruire ou la déstructurer, son rôle c'est de les vaincre….
MARC FESNEAU
Mais c'est pour ça que quand les représentants du Rassemblement national…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Est-ce qu'elle est assez frêle aujourd'hui la démocratie pour avoir peur de Madame Marion MARECHAL ?
MARC FESNEAU
La question n'est pas d'avoir peur de Marion MARECHAL-LE PEN, c'est simplement de… on n'est pas obligé de mettre en scène Marion MARECHAL-LE PEN à toutes fins et à toutes occasions, alors que là il n'y avait aucun motif. Il y a des parlementaires du Rassemblement national à l'Assemblée nationale, on les combat à l'Assemblée nationale, et c'est très bien ainsi.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Deux, trois sujets. Agnès BUZYN doit décider assez vite du sort de l'homéopathie, est-ce qu'il faut que la Sécurité sociale continue de rembourser l'homéopathie, Monsieur le ministre ?
MARC FESNEAU
Il y a deux sujets. Il y a un certain nombre de gens qui utilisent régulièrement l'homéopathie, deux, il y a une autorité indépendante qui a jugé que l'homéopathie ne portait pas d'effet sanitaire.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est cette structure indépendante qui a, en général, le dernier mot.
MARC FESNEAU
Généralement qui a le dernier mot, maintenant Agnès BUZYN, elle est avec ce rapport, elle va l'examiner, elle va le contre-expertiser ou l'expertiser, et à partir de là elle prendra sa décision, ce n'est pas à moi d'abord de l'annoncer, et deux…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
En tant que politique, etc., vous n'avez aucune idée ?
MARC FESNEAU
Je peux vous dire quelque chose Monsieur ELKABBACH ? J'ai besoin de lire ce rapport pour me faire une opinion ; et après vous avez aussi un certain nombre de gens qui sont dans ce diagnostic, enfin dans cette utilisation de l'homéopathie, et s'il y a des décisions à prendre il faut peut-être les prendre dans la durée, on verra.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous pourrez ne pas dérembourser ?
MARC FESNEAU
On verra, on verra.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Les CRS ont aspergé des manifestants, je crois que c'était vendredi, des écologistes, de gaz lacrymogènes pour les disperser. C'est une méthode, je sais bien que le ministre de l'Intérieur, Christophe CASTANER, à la demande de l'Elysée, a demandé une enquête, qu'est-ce que vous en pensez ?
MARC FESNEAU
Que le mieux c'est de suivre les procédures et de regarder l'enquête, ce que dira l'enquête et ce qui a pu justifier d'images qui ont pu être choquantes pour un certain nombre de gens, et donc il faut laisser faire l'enquête et ce qui a pu justifier de l'utilisation des gaz lacrymogènes. Ce n'est pas une violence physique volontaire, directe, pardon, c'est une violence qui est, pour certains, exercée au travers de… gaz lacrymogènes.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
… dit « ce n'est pas moi qui ai donné l'ordre », donc le problème c'est le préfet de police qui ne déteste pas la manière forte, énergique, qui est en cause.
MARC FESNEAU
Christophe CASTANER, à juste titre, a demandé au préfet de police d'examiner la situation et le pourquoi de l'utilisation des gaz lacrymogènes, et après nous verrons. Il faut faire toujours attention, dans le monde dans lequel on vit, de ne pas sur-réagir aux images ou aux événements sans en avoir l'explication complète, il faut regarder la vidéo complète.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Il faut chercher la vérité.
MARC FESNEAU
Et il faut chercher la vérité, et parfois la vérité est un peu plus complexe que ce qu'elle ne paraît au travers des images.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Sans doute… le mouvement est un mouvement de désobéissance civile qui cherche à bloquer aussi les institutions…
MARC FESNEAU
Oui, les blocages ne sont jamais des choses très satisfaisantes dans les villes ou…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
L'image fait que vous allez être un peu en difficulté, quelquefois, avec les écologistes et les jeunes que vous voulez convaincre.
MARC FESNEAU
Ce n'est pas une question de difficulté, c'est une question que la loi soit la loi, et que les choses s'appliquent de façon honnête.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
La loi soit la loi. La PMA, il paraît qu'au MoDem vous êtes assez divisé, quelle est votre position, vous ?
MARC FESNEAU
Moi c'est un engagement du président de la République, et donc je pense que c'est un engagement qu'il faut tenir. Après, ce n'est pas la question d'être divisé, je crois que dans tous les groupes cette question-là traverse et pose des questions d'éthique, et de bioéthique. Cette loi-là elle ne comportera pas que l'affaire de la PMA, la conservation des ovocytes, la PMA post mortem, il y a un certain nombre de sujets qui sont sur la table. Moi ce que je souhaite simplement comme ministre des relations avec le Parlement, c'est que nous ayons un débat apaisé. Nous voulons, sur la PMA, nous souhaitons que nous allions vers la PMA. Il y a des tas d'autres sujets, le droit à la filiation, il y a plusieurs options qui sont posées sur la table, il faut qu'on puisse en débattre sereinement, et moi je…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
C'est à la rentrée le débat.
MARC FESNEAU
C'est à la rentrée, à la fin du mois de septembre.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Vous savez ce qu'on dit, parce que juillet comme aujourd'hui, il y a des débats qui vont avoir lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat, les parlementaires sont au bout. Jean-Paul DELEVOYE présente comme prévu ses orientations, dans quelques jours, pour la réforme des retraites, c'est une décision historique qui sera mise en application à partir de 2025-2030, mais les décisions elles seront prises là. Est-ce qu'il est vrai que ça ne sera pas débattu et voté avant avril-ami de l'année prochaine ?
MARC FESNEAU
Non mais, d'abord, étant ministre des Relations avec le Parlement je suis obligé d'être dans la contrainte du calendrier. Nous avons un certain nombre de textes, Jean-Paul DELEVOYE va présenter au mois de juillet les conclusions du rapport, et du travail qu'il a fait, du travail remarquable qu'il a fait de dialogue avec les territoires, avec les citoyens, avec les régimes de retraite, et Dieu sait s'il y en a beaucoup en France. Il y aura ensuite un temps de dialogue et de discussion avec les partenaires sociaux, c'est bien normal sur une réforme aussi importante du système…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc ?
MARC FESNEAU
Et donc on est plutôt…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc vous annoncez qu'il y aura une grande consultation…
MARC FESNEAU
Absolument, donc on est plutôt, et c'est normal dans cette logique-là, et donc on est plutôt, vous voyez bien que c'est un texte qui porte sur dans 10, 15 ou 20 ans, et donc qu'on prenne le temps, et qu'on prenne le temps éventuellement sur ces horizons-là, il n'y a pas de gêne, on est absolument dans le calendrier.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Donc avril-mai ?
MARC FESNEAU
Je ne dis pas avril-mai, je dis on est absolument dans ce calendrier. Je rappelle simplement qu'avant avril – excusez-moi de cette chose assez évidente – on a le mois de mars, on a des élections municipales, les travaux parlementaires sont interrompus, et avant ces dates-là nous avons le budget…
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Enfin vous dites ce que je voulais que vous disiez, c'est-à-dire qu'après, quand je vous dis avril-mai, c'est parce que vous ne voulez pas que ça se fasse avant les municipales…
MARC FESNEAU
C'est inexact, je vais vous dire une chose très simple. La loi sur la Fonction publique, on nous avait dit il ne fallait pas la faire avant les européennes, on a eu le courage de le faire avant les européennes, c'est simplement le travail législatif qui bloque et qui fait qu'on a des interruptions.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Merci. On a abordé un certain nombre de sujets très concrets…
MARC FESNEAU
Merci à vous.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
Et à Bruxelles ils prennent leur petit-déjeuner tranquilles, ils n'ont pas encore pris leur décision.
MARC FESNEAU
Ils petit-déjeunent encore.
JEAN-PIERRE ELKABBACH
La guerre de Lyon aura sans doute lieu, d'un côté le symbole et le mentor, de l'autre l'ex-dauphin qui se met à son compte, David KIMELFELD est face à Gérard COLLOMB, et demain je recevrai David KIMELFELD, COLLOMB était l'invité du « Grand rendez-vous Europe 1 CNews » hier. Merci, bonne journée.
MARC FESNEAU
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 juillet 2019