Texte intégral
APOLLINE DE MALHERBE
L'invité de l'actu c'est vous, Jean-Baptiste DJEBBARI, bonjour.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Bonjour à vous.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes le ministre des Transports. On a peut-être trop tardé, quand même, avant de prendre des mesures vis-à-vis de l'Angleterre, c'est depuis hier soir minuit que toutes les liaisons sont coupées, alors que c'est samedi soir que Boris JOHNSON a donné l'alerte.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Donc, samedi soir, Boris JOHNSON a donné l'alerte, et son ministre de la Santé a dit que le virus, ou une forme mutée du virus, qu'on connaît encore assez mal, était hors de contrôle, et ça a conduit hier, c'est-à-dire dimanche, 20 pays, dont la France, à prendre des mesures de sauvegarde, et donc, oui, à suspendre les circulations en provenance, pour la France, du Royaume-Uni, et pour 48 heures, le temps de faire deux choses, le temps, un, de se concerter au niveau européen, de faire l'analyse scientifique de cette forme mutée du virus, voir effectivement si elle est plus dangereuse, si elle est plus contaminante, et puis mettre en place les modalités pratiques pour que les flux, de passagers et de marchandises, reprennent dans des bonnes conditions. Donc il me semble que prendre 12 heures pour réfléchir, pour décider et mettre en place, dès hier soir minuit, les restrictions en question, me semble relever, au contraire, d'une forme cohérente, rationnelle et organisée…
APOLLINE DE MALHERBE
Arrêtons-nous un instant là-dessus. Concrètement, ça veut dire que vous avez tout mis sur pause, c'est-à-dire que même les camions de marchandises, le fret, tout est arrêté, plus rien n'arrive de Grande-Bretagne ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Concrètement, pour les prochaines 48 heures oui, en provenance du Royaume-Uni vers la France, et donc nous avons, hier soir, eu évidemment les fédérations de transports routiers, nous avons fait communiquer à la SNCF, Eurostar, à l'ensemble des compagnies aériennes et maritimes concernées, à leurs clients, ces nouvelles restrictions…
APOLLINE DE MALHERBE
On arrête tout.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Hier soir il y a des reportages qui l'ont montré, les Français, qui sont notamment résidents au Royaume-Uni, se sont reportés sur les derniers Eurostar pour rentrer, et donc oui, pendant 48 heures les circulations sont suspendues, ça va nous permettre de travailler, dès ce matin, au niveau européen, sur l'analyse, je le disais, scientifique de ces formes mutées du virus qui existent, alors au Royaume-Uni, peut-être ailleurs, et de prendre ensemble les bonnes décisions.
APOLLINE DE MALHERBE
Sauf que, est-ce que la décision, prise dans les 48 heures, ça pourrait être précisément de ne pas rouvrir ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
La décision, effectivement, elle peut être de toute nature. Alors, pas rouvrir, ça paraît difficile notamment s'agissant des transports de marchandises, vous savez que nous avons des chaînes logistiques qui sont très largement liées, que le Royaume-Uni, par définition, est une île, et que donc il faut…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc vous ne l'envisagez pas, vous n'envisagez pas de vous dire, s'il le faut, on isole carrément la Grande-Bretagne, le temps que le virus… ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je vais vous donner l'état d'esprit dans lequel nous sommes. Aujourd'hui nous voulons trouver un protocole sanitaire solide, notamment sur la réalisation de tests PCR pour l'ensemble des gens qui circulent, à la fois les passagers, mais aussi par exemple les transporteurs routiers, j'ai eu l'occasion d'échanger hier soir très tard avec mon homologue britannique, qui dit avoir, Outre-manche, des capacités très conséquentes en termes de tests…
APOLLINE DE MALHERBE
Ça se fait malgré eux, c'est unilatéral, les Anglais ne voulaient pas, j'imagine, que ces frontières soient… ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est une décision souveraine de la France, et d'un certain nombre de pays de l'Union européenne, 20 pays je le disais, et ça se fait aussi en bon dialogue avec les autorités britanniques, je vous l'ai dit, j'ai eu l'occasion d'échanger hier soir avec mon homologue Grant SHAPPS, il est évident que nous avons un intérêt commun à ce que, notamment les liaisons de transport de marchandises, que la chaîne logistique, ne soit pas rompue.
APOLLINE DE MALHERBE
Jean-Baptiste DJEBBARI, vous disiez à l'instant, le temps aussi de mettre en place un protocole sanitaire et peut-être des tests, mais, pardon, ça me fait quand même un peu marrer, parce que j'ai regardé très précisément ce matin, j'étais un peu naïve peut-être, mais j'ai regardé très précisément, à l'instant où on se parle, quelles sont les règles quand on rentre en France. Eh bien les règles, quand on rentre en France, c'est que c'est l'entrée libre pour tout le monde, sauf pour 16 pays, entrée libre ça veut dire quoi ? Ça veut dire que tous les passagers qui arrivent à Roissy et à Orly, quelle que soit leur provenance donc, sont soumis officiellement à un contrôle de température, sauf que ce contrôle c'est automatisé, on passe juste sous des portiques. Alors attention, si vous avez plus de 38, qu'est-ce qui se passe ? On se dit "alerte, ils vont être arrêtés." Non, non, s'ils ont plus de 38, il y a un contrôle supplémentaire effectué par un agent, voilà, c'est sympathique.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je vous ai laissé dérouler, mais…
APOLLINE DE MALHERBE
Ensuite, attendez, je voudrais juste quand même aller au-delà ; les 6 pays pour lesquels il faut le test c'est, l'Afrique du Sud, l'Algérie, Bahreïn, la Chine, les Emirats arabes, l'Equateur, vous pourrez avoir la liste, donc ces 16 pays-là il faut un test PCR de moins de 72 heures, Ok. Alors, on fait le test, et si on est positif ? Eh bien, si on est positif, on rentre quand même en France.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Madame de MALHERBE, vous racontez une histoire qui n'est pas exacte.
APOLLINE DE MALHERBE
Et je lis le site d'ADP : "Conformément à la réglementation en cas de test positif le passager est vivement incité à se mettre à l'isolement."
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Madame de MALHERBE, vous racontez une histoire qui n'est pas exacte. La réalité aujourd'hui, et depuis de nombreux mois, c'est que pour venir en Europe, pour venir dans l'espace Schengen, il faut un motif impérieux, donc seuls ceux qui ont un motif impérieux, de famille, de travail, peuvent venir en Europe, ça concerne une centaine de…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais s'ils ont un motif impérieux et qu'ils ont le Covid, ils viennent quand même !
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, non, le motif impérieux, plus déclaration de non-symptômes, plus attestation dérogatoire. Pour 30 pays, et pas 16, pour 30 pays dans lesquels le virus circule activement il y a obligation d'un test PCR. Et par ailleurs, depuis quelques mois…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais si le test PCR est positif ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et si le test PCR est positif, les personnes n'embarquent pas avant le départ, donc les personnes n'embarquent pas…
APOLLINE DE MALHERBE
Sur toutes les compagnies ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Sur toutes les compagnies, dès lors que le test PCR est obligatoire pour les 30 pays, les personnes n'embarquent pas. La chose que nous avions faite c'est que pour les pays dans lesquels les tests n'étaient pas possibles d'être réalisés avant, il y avait un test à l'arrivée, un test PCR à l'arrivée, et depuis novembre nous avons renforcé les dispositifs, notamment à l'égard des Outre-mer, au départ et à l'arrivée, pour mettre en place des tests antigéniques, donc l'histoire n'est pas celle que vous racontez. Et par ailleurs oui, quand les gens arrivent, qu'ils n'ont pas pu faire un test, par exemple les Outre-mer, et qu'ils font un test positif antigénique à Paris, ils sont pris en charge sur le plan médical, ils sont isolés et il y a des contrôles.
APOLLINE DE MALHERBE
Ils sont incités à l'isolement.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui…
APOLLINE DE MALHERBE
Je lis très précisément la réglementation, ils sont incités à l'isolement.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il y a des contrôles, les contrôles se sont renforcés, les contrôles notamment des services du ministère de la Santé, donc les gens sont…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais est-ce qu'il n'est pas temps que les choses soient quand même plus efficaces ? On a quand même l'impression qu'il y a un décalage entre le temps de mise en place et ensuite mêmes les règles, et l'efficience, l'efficacité réelle.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il n'y a pas de décalage entre ce que fait… de ce point de vue là, on nous compare toujours à l'Allemagne, il n'y a pas de décalage entre ce que fait l'Allemagne, ce que fait la France, ce que fait l'Italie, ce que fait l'Espagne, ce que fait le Portugal, moi je veux bien…
APOLLINE DE MALHERBE
Eh ben si, l'Espagne par exemple, pour aller en Espagne aujourd'hui, même quand on arrive de France, on doit faire un test PCR.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Par contre il y a un décalage, je vais vous dire, il y a un décalage médiatique, moi j'ai fait tous les pays, je suis allé partout voir, aux Pays-Bas, en Espagne, au Portugal, bref partout, il y a un décalage médiatique, c'est qu'en France, à chaque fois qu'on prend une décision de restrictions on nous dit qu'on est liberticide, à chaque fois qu'un pays fait un peu plus que nous à côté, on nous dit qu'on est laxiste, systématiquement à chaque phase, à chaque séquence de cette crise du Covid, c'est assez…
APOLLINE DE MALHERBE
Aujourd'hui il y a un décalage, alors vous allez peut-être me faire le procès de vous faire un procès en laxisme, mais c'est vrai qu'il y a un décalage notamment avec nos voisins les plus proches, on le disait la Grande-Bretagne, et c'est également le cas de l'Allemagne, du Pays-Bas, de l'Italie, qui ont renforcé à nouveau les mesures à l'approche de Noël…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, mais qui ont aussi une dynamique de chiffres.
APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce que c'est envisageable de notre côté, c'est-à-dire, est-ce que si vous vous rendez compte que tous ces indicateurs qui continuent à être au rouge se poursuivent, est-ce que vous pourriez, est-ce qu'il serait possible que tout d'un coup, du jour au lendemain, d'ici Noël, on prenne des mesures plus restrictives ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En fait deux éléments. D'abord ces pays avaient, pour le coup, un cadre sanitaire un peu moins restrictif que la France, puisque nous sommes…
APOLLINE DE MALHERBE
Tout à fait, on a été restrictif avant.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
On a été restrictif avant, et deuxième élément, évidemment nous suivons la propagation du virus, des formes nouvelles du virus, au jour le jour, et nous avons un cadre, vous savez qu'il y a des conseils de défense que se tiennent à échéance régulière…
APOLLINE DE MALHERBE
Il y en a eu un hier soir en urgence.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Hier soir, effectivement, pour ce sujet du Royaume-Uni, et que la France prendra les bonnes décisions en fonction des évolutions objectives du virus, et je crois que nous avons supposé un cadre, aujourd'hui de protection de la population, qui me paraît adapté, à l'heure où je vous parle, en l'état actuel des connaissances scientifiques, nous avons aussi pris en compte, ce qui est normal, le besoin de respiration des Français, et que par ailleurs vous savez que nous agissons sur le plan économique pour amortir les effets socio-économiques de la crise, donc je crois que là nous avons un cap qui tient.
APOLLINE DE MALHERBE
On n'a pas fermé les liaisons avec l'Afrique du Sud, qui connaît aussi une mutation du virus.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Si, c'est la même chose, nous avons fait la même chose hier en Conseil de défense, ce qui s'applique… donc, le Royaume-Uni passe en rouge écarlate, avec les restrictions que nous avons détaillées ensemble, et l'Afrique du Sud tombe effectivement sous le même coup de ces pays rouge écarlate…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais pas depuis, pas depuis, enfin c'est-à-dire, à l'heure où on se parle, on ne peut plus rentrer en France depuis l'Afrique du Sud ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Avec production de test PCR. L'Afrique du Sud rentre dans le cas des 30 pays que je citais tout à l'heure…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc c'est un peu moins restrictif que la Grande-Bretagne ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
On a très peu de liaisons avec l'Afrique du Sud… il y en a beaucoup plus avec l'Allemagne, et c'était principalement un sujet allemand, hier.
APOLLINE DE MALHERBE
Jean-Baptiste DJEBBARI, l'Agence européenne du médicament se penche aujourd'hui sur la question du vaccin PFIZER, avec une question notamment, qui est la question du transport de ces vaccins, on le sait bien, il y a une chaîne du froid qui va être extrêmement complexe. Est-ce que ce transport va être assuré ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui. D'abord nous avons appris des séquences précédentes, j'ai eu l'occasion de le dire, puisque nous avons été mis à l'épreuve pour transporter des masques, des respirateurs, plus tard des tests, donc il y a une chaîne logistique qui s'est mise en place. Vous avez raison de dire que le cas particulier cette fois-ci c'est le stockage, à -70, -80 degrés, les choses sont en ordre de marche, tant pour le transport aérien, que pour le transport de marchandises, l'idée étant d'avoir à la fois des grands centres de tri, et puis après la distribution vers les pharmacies, et enfin l'acheminement vers les médecins qui, de fait, inoculeront, feront la vaccination.
APOLLINE DE MALHERBE
Ça se fera par camions, actuellement on nous dit que ce sera par camions DHL et FEDEX, est-ce que ça vous parait suffisant ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, en tout cas nous avons dimensionné, nous avons dimensionné l'appareil logistique, notamment effectivement le transport routier, les zones de stockage, de manière à pouvoir assumer des volumes importants, et des volumes importants dès la fin du mois, puisque vous savez que, le Premier ministre l'a rappelé, l'objectif est d'avoir les premières vaccinations d'ici à la fin du mois de décembre, sous réserve qu'aujourd'hui, effectivement, l'Agence européenne du médicament donne son…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais il n'y a pas vraiment de suspens, ça paraît d'ailleurs assez étrange parce qu'on a l'impression qu'on attend depuis des jours et des jours ce feu vert de l'Agence européenne du médicament, et en même temps tout est prêt, donc… ils pourraient encore dire non ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ce sujet de mutation du virus pose la question de savoir, mais ça semble être le cas, si le vaccin est efficace sur les formes mutées du virus. Alors, de ce que je comprends, de ce que je lis, il y a beaucoup de formes mutées du virus, et ce n'est pas anormal qu'un virus, comme de la grippe, comme le coronavirus, mute, mais il faut être bien sûr qu'effectivement le vaccin, tel qu'il va être distribué, est efficace pour l'ensemble de ce virus, et de ses variantes, et donc c'est par exemple, j'imagine, un des champs de discussion qu'il va y avoir ce matin autour de l'Agence européenne du médicament.
APOLLINE DE MALHERBE
Merci beaucoup Jean-Baptiste DJEBBARI d'être venu dans ce studio, vous qui nous dites donc que, en effet, tout est sur pause avec la Grande-Bretagne pour 48 heures, vous n'excluez pas la possibilité que cette interdiction d'entrer sur le territoire se poursuive.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
"Tame well tell" comme on dit en anglais.
APOLLINE DE MALHERBE
On attend, on attend, les décisions. Merci beaucoup.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 4 janvier 2021